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Mesure ampérométrique en continu du chlore libre de l'acide hypochloreux et du chlore combiné

30 juillet 1981 Paru dans le N°56 à la page 43 ( mots)
Rédigé par : B. SAUNIER et Y. REGNIER

B. SAUNIER, Ingénieur-Conseil, Ph. D. UC BERKELEY SAUNIER EAU ET ENVIRONNEMENT (RENNES)

Y. REGNIER, Ingénieur ENSCR, Licencié ès Sciences C.I.F.E.C. (PARIS)

INTRODUCTION

Les analyseurs ampérométriques actuellement disponibles sur le marché, pour la mesure en continu du chlore libre, présentent l’inconvénient de laisser le chlore combiné interférer sur la mesure du chlore libre. L’importance de cette interférence varie suivant les types d’appareils et leur mode de fonctionnement. Dans la présente étude, cette interférence a pu être évaluée entre 20 et 40 % de la quantité de chlore combiné mesurée ; ainsi, en présence de 1 mg/l de chlore combiné, l’appareil indique une concentration en chlore libre supérieure de 0,2 à 0,4 mg/l à la concentration de chlore libre réellement présente dans la solution.

Pour les mesures de concentrations de chlore résiduel composées d’une proportion élevée de chlore libre, l’erreur due à l’interférence de 20 à 40 % du chlore combiné reste faible et acceptable, mais pour la mesure de résiduels chlorés composés de proportions importantes de chlore combiné, l’erreur devient importante ; elle est telle qu’elle rend impossible l’utilisation des analyseurs ampérométriques actuels pour le contrôle de la chloration au point de rupture (breakpoint).

Pour le contrôle en continu de l’injection du chlore, en concentrations voisines de celles requises pour que le phénomène d’oxydation de l’azote ammoniacal se déroule dans des conditions proches de celles dites du point de rupture, il est nécessaire de mesurer en continu le chlore libre et le chlore combiné, après un temps de contact compris entre 5 et 10 minutes suivant l’injection du chlore. Dans ces conditions, la cinétique du phénomène (1) (2) nous indique que la concentration en chlore combiné peut être bien supérieure à celle en chlore libre. Lorsque la quantité de chlore injectée est légèrement inférieure à la quantité théorique pour se trouver au point de rupture, nous savons qu’après quelques minutes de temps de contact il n’y a plus présence de chlore libre mais seulement de chlore combiné avec une proportion importante de dichloramine. Si un analyseur ampérométrique classique est utilisé pour mesurer le chlore libre, le chlore combiné interfère sur la mesure et l’analyseur affiche de manière erronée une présence de chlore libre. Cette remarque est d’autant plus importante que l’appareil ne permet pas de discerner une situation correspondant à une injection de chlore légèrement au-dessous du breakpoint (3). L’usage d’un analyseur ampérométrique classique ne peut donc donner satisfaction pour contrôler l’injection de chlore au breakpoint des eaux contenant de l’azote ammoniacal et, a fortiori, de l’azote organique.

Ces quelques réflexions mettent en évidence l’importance de la mise au point d’un analyseur ampérométrique en continu assurant une mesure précise et fiable du chlore libre, même en présence d’un excès de chlore combiné. Cet appareil, récemment développé (4) et commercialisé par C.I.F.E.C., permet d’effectuer la mesure en continu du chlore libre et du chlore combiné ; s’il est couplé avec un pH-mètre et à un enregistreur de température, il indique la concentration en acide hypochloreux. L’acide hypochloreux est connu pour être le composé chloré le plus germicide, ainsi le vieux rêve caressé par de nombreux auteurs, de contrôler en continu l’injection du chlore en fonction de la concentration en HOCl, devient possible puisque l’appareil donne et affiche cette concentration instantanément et en continu.

DESCRIPTION DE L’ANALYSEUR BS

Toutes les tentatives de mesure directe du chlore libre avec des analyseurs ampérométriques classiques ayant échoué, nous avons pensé que la solution était une mesure indirecte. L’analyseur BS (fig. 1) comprend deux analyseurs ampérométriques de chlore total fonctionnant en parallèle. Le premier, recevant une eau non traitée, donne la concentration en chlore total. Le second, alimenté avec de l’eau additionnée d’un réducteur spécifique du chlore libre (appelé RSCL dans la présente étude), mesure la concentration en chlore combiné. Ces informations sont rassemblées dans un calculateur qui détermine

[Photo : Fig. 1. – Analyseur BS 21. Analyse chlore libre.]

La concentration en chlore libre. Il donne, en plus, la teneur en acide hypochloreux (« chlore libre actif ») s'il est couplé avec un pH-mètre et un capteur de température.

La mesure du chlore libre obtenue par différence entre deux mesures de chlore total n'est fiable qu'avec l'utilisation d'analyseurs ampérométriques ne présentant pas de dérive dans le temps, due, entre autres, à la polarisation de leurs électrodes. L'expérience dans ce domaine nous a montré qu’en présence d'iodure de potassium et de tampon pH 4,0, les analyseurs utilisés assuraient une mesure fiable et précise du chlore total, et ne dérivaient pas dans le temps. Cette absence de dérive semble due à la présence d'iode entre les électrodes (5). En effet, le chlore libère quantitativement en moins d'une seconde l'iode des iodures à pH 4,0. Au contraire, en absence d'iodure, les analyseurs dérivent certes très faiblement à pH acide, mais suffisamment pour rendre aléatoire une détermination du chlore libre calculée par une différence de mesures.

Le réducteur spécifique pour le chlore libre a fait l'objet d'un examen attentif ; il s'agissait de trouver un composé réagissant avec le chlore libre (HOCl et OCl−) tout en restant inerte avec les chloramines minérales et organiques susceptibles d'être présentes. Il s'est avéré qu'un composé à base de nitrite permettait de résoudre ce problème. La présente étude montre qu'il ne réagit qu’avec le chlore libre.

EVALUATION DE L’IMPORTANCE DE L'INTERFERENCE DU CHLORE COMBINE SUR LA MESURE DU CHLORE LIBRE AVEC UN ANALYSEUR AMPÉROMÉTRIQUE CLASSIQUE

Matériel et méthodes.

Pour effectuer cette détermination, nous avons utilisé l'un des deux analyseurs ampérométriques classiques composant l’analyseur BS, et nous avons préparé des solutions de chloramines à partir d'eau potable, d'azote ammoniacal, de méthylamine et d'eau de Javel. Entre deux expériences, l'analyseur BS recevait une eau de piscine chlorée. On sait, en effet, que l'absence d'oxydant entre les électrodes d'un analyseur ampérométrique pendant une période prolongée entraîne leur polarisation rapide, ce qui engendre alors une dérive de l'appareil.

La préparation de la monochloramine était effectuée à pH voisin de 7,5 en maintenant un rapport

Azote massique supérieur à 5 ; c’est-à-dire que pour 1 mg/l de Cl₂, il était ajouté au moins 5 mg/l d’azote ammoniacal. En suivant cette procédure, il a été obtenu une solution contenant de la monochloramine pratiquement exempte d’autres formes chlorées. En présence d’azote organique, le chlore se combine avec lui pour donner des organochloramines réagissant comme la dichloramine lors de la mesure du chlore par la DPD (1).

La préparation de la dichloramine est plus délicate. Pour obtenir une solution contenant une proportion importante de dichloramine, du chlore et de l’azote ammoniacal ont été mélangés à pH 4 dans un rapport massique Cl₂ : N égalant 2,5 à 1. Après un temps de contact de trois heures à l’abri de la lumière, on obtient une solution contenant une forte proportion de dichloramine (70 à 80 %), le reste étant de la trichloramine avec quelques traces de monochloramine.

On a préparé aussi une solution de méthylchloramine CH₃NH₂ à pH neutre, dans le rapport molaire CH₃NH₂ : Cl₂ égalant 3 à 1.

La réaction entre le chlore libre et la méthylamine est complète en quelques minutes et forme une méthylchloramine très stable.

La mesure du chlore libre et du chlore combiné est effectuée par la méthode titrimétrique au DPD-FAS (6). Le pH est mesuré à l’aide d’un pH-mètre électrique.

Évaluation de l’interférence des chloramines sur la mesure du chlore libre lors du fonctionnement à pH 4,0 sans iodure.

Dans son mode de fonctionnement actuel, l’analyseur ampérométrique classique est utilisé pour la mesure du chlore libre en absence d’iodure, soit à pH 4,0, soit à pH neutre.

Le tableau 1 récapitule les résultats obtenus avec une solution constituée principalement de monochloramine. La comparaison entre la concentration en chlore libre mesurée par la méthode au DPD et celle indiquée par l’analyseur ampérométrique classique fait état d’une interférence de la monochloramine de 25 à 30 %. Ainsi, 1 mg/l de monochloramine donne une lecture de 0,2 à 0,3 mg/l de chlore libre.

Le tableau 2 permet la comparaison des concentrations en chlore libre indiquées avec l’analyseur ampérométrique classique et la méthode DPD-FAS en présence d’une teneur élevée en dichloramine. On constate une interférence de la dichloramine de l’ordre de 18 à 20 %.

Le tableau 3 montre que dans les conditions opératoires précédentes la méthylchloramine entraîne une interférence d’environ 25 % du chlore libre.

Afin de confirmer les résultats précédents, il a été préparé diverses solutions chlore-azote dans des proportions telles que celles-ci soient proches du point de rupture (breakpoint) et à pH entre 6 et 6,5.

TABLEAU 1.

Lecture Cl₂ libre par l’analyseur ampérométrique Mesure des différentes formes de chlore par la méthode DPD-FAS, en mg/l Cl₂

libremonochloraminedichloraminetotal
0,08 à 0,20,100,110,16
0,180,300,340,43
0,800,720,200,25
0,320,370,721,28
1,792,880,120,04
0,020,120,180,65
0,720,942,120,32
0,240,290,560,82
1,361,622,103,04

Interférence = 25 à 30 % c.-à-d. 1 mg/l monochloramine → lecture de 0,2 mg/l de chlore libre

Mesure en continu du chlore libre dans une solution de monochloramine par un analyseur ampérométrique classique fonctionnant avec un tampon pH 4,0 et en absence d’iodure.

TABLEAU 2.

Lecture Cl₂ libre par l’analyseur ampérométrique Mesure des différentes formes de chlore par la méthode DPD-FAS, en mg/l Cl₂

libredichloraminetrichloraminetotal
0,080,110,150,22
0,250,270,300,95
1,021,382,563,06
0,120,270,550,68
0,841,800,030,06
1,121,181,722,84
4,08

Interférence = 18 à 20 % c.-à-d. 1 mg/l dichloramine → lecture de 0,2 mg/l de chlore libre

Mesure en continu du chlore libre dans une solution de dichloramine par un analyseur ampérométrique classique fonctionnant avec un tampon pH 4,0 et en absence d’iodure.

TABLEAU 3.

Lecture Cl₂ libre par l’analyseur ampérométrique Mesure des différentes formes de chlore par la méthode DPD-FAS, en mg/l Cl₂

libretotal
0,080,11
0,150,22
0,300,48
0,611,12
0,120,28
0,320,42
1,101,78
2,102,92
3,223,98

Interférence = 25 % c.-à-d. 1 mg/l de méthylchloramine → lecture de 0,2 mg/l de chlore libre

Mesure en continu du chlore libre dans une solution de méthylchloramine par un analyseur ampérométrique fonctionnant avec un tampon pH 4,0 et en absence d’iodure.

expérimentation est l'objet du tableau 4. Les mesures avec la méthode DPD-FAS ont permis de constater que dans ces conditions l’analyseur ampérométrique donne une lecture de chlore libre par excès.

Évaluation de l'interférence des chloramines sur la mesure du chlore libre lors du fonctionnement à pH neutre sans iodure.

L'analyse ampérométrique du chlore libre est quelquefois proposée à pH neutre. Ce mode de fonctionnement a été vérifié, ainsi que l’interférence de la monochloramine et de la dichloramine dans ces conditions. Les résultats obtenus sont présentés aux tableaux 5 et 6. Ils montrent que l’interférence de la monochloramine est alors très faible, de l'ordre de 5 %, alors que celle de la dichloramine avoisine 40 %. Dans ces conditions de fonctionnement, il a été noté une dérive notable de l'appareil et la nécessité d’effectuer au moins un ajustement par semaine.

TABLEAU 4.

Lecture Cl libre par analyseur ampérométrique libre monochloramine dichloramine trichloramine
0,38 0,22 0,26 0
0,69 0,09 2,08 0
0,97 0,07 2,20 0,48
0,38 0,04 1,68 0
1,01 0,50 0,96 0,29

Mesure en continu du chlore libre dans une solution chlore-azote ammoniacal au cours des quinze premières minutes de la réaction au point de rupture, avec un analyseur ampérométrique classique fonctionnant avec un tampon pH 4,0 et en absence d’iodure.

TABLEAU 5.

Lecture Cl libre par analyseur ampérométrique libre combiné
0,03 0
0,06 0,68
0,08 1,08
0,10 1,48
0,12 1,82
0,16 2,20
0,18 2,82
0,23 2,94
3,68

interférence = 5 % c.-à-d. 1 mg/l monochloramine → lecture de 0,05 mg/l de chlore libre

Mesure en continu du chlore libre dans une solution de monochloramine par un analyseur ampérométrique fonctionnant avec un tampon pH 7,0 et en absence d’iodure.

TABLEAU 6.

Lecture Cl libre par analyseur ampérométrique libre combiné (NHCl₂)
0,32 0
0,62 0,69
1,02 1,63
1,35 2,43
1,82 3,32
2,42 5,50
6,40

interférence = 40 % c.-à-d. 1 mg/l NHCl₂ → 0,4 mg/l de chlore libre

Mesure en continu du chlore libre dans une solution contenant principalement de la dichloramine par un analyseur ampérométrique avec un tampon pH 7,0 et en absence d’iodure.

RECHERCHE DES INTERFÉRENCES POSSIBLES SUR L'ANALYSEUR BS

Interférences éventuelles du réducteur sur la mesure du chlore combiné.

L’analyseur BS étant constitué de deux analyseurs ampérométriques de chlore total, il est essentiel de vérifier que les diverses chloramines n’interfèrent pas avec le réducteur spécifique du chlore libre (RSCL) injecté en amont de l’analyseur mesurant le chlore combiné. Pour effectuer cette vérification, des solutions de monochloramine, dichloramine et méthylchloramine ont été préparées suivant la procédure précédemment développée. Ces solutions sont injectées dans l’analyseur BS en débit continu. Des déterminations du chlore combiné étaient effectuées en parallèle par la méthode DPD-FAS.

Les résultats obtenus sont présentés aux figures 2, 3 et 4, avec respectivement des solutions constituées en majorité de monochloramine, dichloramine et méthylchloramine. Ils montrent que le réducteur spécifique du chlore libre injecté en amont de l’analyseur chlore combiné est absolument inerte vis-à-vis des diverses chloramines minérales et organiques. En effet, la mesure du chlore combiné lue sur l’analyseur BS et portée en abscisse aux figures 2, 3 et 4 n'est pas sensiblement différente de celle mesurée au DPD-FAS et portée en ordonnée.

[Photo : Étude de la mesure de la monochloramine par l’analyseur BS.]
[Photo : Étude de la mesure de la dichloramine par l'analyseur BS.]
[Photo : Étude de la mesure de la méthylchloramine par l'analyseur BS.]
[Photo : Étude de la mesure du chlore combiné par l'analyseur BS en présence de 30 & 50 mg/l d'acide isocyanurique.]

Cette expérimentation nous a permis d'établir l'absence de réaction avec les chloramines du composé utilisé pour réduire le chlore libre. D'autre part, les analyseurs étant utilisés à pH 4,0 en présence d'iodure de potassium, les chloramines libèrent l'iode des iodures. Les résultats montrent que le RSCL utilisé ne réagit pas avec l'iode.

Interférence éventuelle du réducteur sur les résiduels de chlorocyanurates.

Le Ministère de la Santé a récemment donné un accord provisoire (7) pour l'utilisation de l'acide isocyanurique en piscine publique afin de stabiliser le chlore libre. Afin d'examiner l'interférence éventuelle du RSCL sur la mesure du chlore combiné engendré en présence d'acide isocyanurique en piscine publique, il a été analysé des solutions d'eau chlorée contenant 30 à 50 mg/l d'acide isocyanurique. Il apparaît que les concentrations en chlore combiné déterminées avec le DPD et l'analyseur ampérométrique sont voisines. Le RSCL ne réagit donc pas avec le chlore combiné en provenance des chlorocyanurates stables.

Mesure du chlore libre dans des solutions contenant des concentrations élevées de chloramines.

Diverses expérimentations nous ont permis de vérifier que l'analyseur BS assurait une lecture fiable du chlore libre en présence de concentrations élevées de chloramine. À cet effet, nous avons préparé des solutions à pH voisin de 6,0 et contenant un rapport du chlore à l'azote ammoniacal d'environ 8,0 (exprimé en masse). Après quelques dizaines de minutes de temps de contact, il y a présence de concentrations élevées de dichloramine avec de faibles teneurs en chlore libre.

[Photo : Étude de la mesure du chlore libre par l'analyseur BS dans une solution contenant une quantité élevée de dichloramine.]

chlore libre. Cette situation est la plus défavorable qui puisse être rencontrée en pratique, car la concentration en dichloramine exprimée en Cl₂ peut être cinq à dix fois supérieure à celle du chlore libre exprimée aussi en Cl₂. Les résultats de cette expérimentation sont présentés à la figure 6. Il apparaît nettement que l’analyseur BS ne subit dans ces conditions aucune interférence des chloramines puisque les concentrations indiquées par l’analyseur et celles mesurées au DPD-FAS sont similaires.

Utilisation de l’analyseur BS pour suivre l’évolution du chlore libre et du chlore combiné dans une piscine publique.

L’analyseur BS a enregistré pendant plusieurs mois les teneurs en chlore libre et en chlore combiné d'une piscine publique. Le contrôle de l’injection du chlore était effectué manuellement par les opérateurs. Les enregistrements du chlore libre et combiné obtenus pendant une semaine représentative sont présentés à la figure 7.

[Photo : Fig. 7.2 - Analyse en continu par l’analyseur ampérométrique BS de l’I.F.E.C. des différentes formes de chlore dans une eau de piscine.]

Cette étude a permis de mettre en évidence les observations suivantes :

  1. 1) il est possible de maintenir la teneur en chlore combiné au-dessous de 0,4 mg/l dans une eau de piscine publique à contexte favorable, lorsque la teneur en chlore libre est au moins égale à 1,5 mg/l, c’est-à-dire à pH 7,4, 0,78 mg/l d’acide hypochloreux ;
  2. 2) l’arrivée d'un nombre important de baigneurs, par exemple le mercredi entre 10 heures et 18 heures, entraîne une chute importante du chlore libre et une augmentation du chlore combiné ; il apparaît que ce dernier est très stable une fois formé ; ce n’est qu’à partir du lendemain, vers 7 heures, qu’il commence à être oxydé suite au redressement de la teneur en chlore libre. Ce comportement du chlore combiné est typique des organochloramines. En effet, les chloramines minérales sont instables (sauf NCl₃) en présence de chlore libre et disparaissent en quelques minutes dans les conditions de pH, température et de rapport du chlore à l’azote présentes dans l’eau de cette piscine. Nos analyses ont montré qu'une faible fraction de ce chlore combiné pouvait être du trichlorure d’azote ;
  3. 3) la variation de la teneur en chlore libre dans l’eau d’un bassin sous contrôle manuel, ceci est très important (figure 7) est due au fait que les opérateurs sont obligés de commencer la journée en maintenant une teneur en chlore libre élevée dans l’eau de la piscine afin d’avoir la certitude de disposer d’une concentration en chlore libre suffisante pendant la forte fréquentation.

La solution aux problèmes posés par l’amplitude des variations du résiduel en chlore actif (HOCl) est l’asservissement de l’injection de chlore à une mesure exacte de cette teneur résiduelle, d’où l’intérêt du nouvel équipement ampérométrique BS. Plus d’une centaine de piscines publiques françaises disposent aujourd’hui d’une régulation automatique de chlore étudiée à la lumière de ces travaux.

L’ANALYSE EN CONTINU DES DIVERSES FORMES DE RÉSIDUELS HALOGÈNES - APPLICATIONS

De nombreuses réalisations ont confirmé que l’analyseur BS utilisant deux ou plusieurs analyseurs ampérométriques classiques en parallèle, avec ou sans injection de réducteurs spécifiques du chlore libre, du brome libre, de l’ozone, du bioxyde de chlore, etc., permettait de déterminer séparément et en continu les éléments suivants :

  • * brome libre et brome combiné,
  • * brome libre et halogènes combinés,
  • * chlore libre et bioxyde de chlore,
  • * chlore libre, bioxyde de chlore et chlorite,
  • * ozone, chlore libre, chlore combiné,
  • * chlore libre, bioxyde de chlore, ozone et chlorite,
  • * ozone et bioxyde de chlore,
  • * ozone, bioxyde de chlore, chlore et chlorite.

Cette liste n’est pas exhaustive.

La mesure du brome libre et du brome combiné en continu constitue une nouveauté importante car jusqu’à présent il n’existait aucune méthode simple de séparation de ces éléments. Son application est intéressante dans les eaux de piscines bromées et dans les eaux de mer chlorées. Il a été aussi constaté la présence de quantités quelquefois élevées de brome combiné, sous la forme probable d’organobromamines peu bactéricides dans les eaux de piscines bromées.

Dans les eaux de mer chlorées, par exemple en piscine ou en refroidissement des centrales thermiques ou nucléaires, le chlore injecté réagit avec les matières azotées et les bromures présents dans

l'eau de mer, et libère le brome des bromures. En présence de matières organiques ou d'azote ammoniacal, il se forme des organochloramines et seulement une partie du chlore injecté libère du brome qui réagit à son tour avec les matières azotées pour former des bromamines. Dans ces conditions, il y a présence de brome libre et de formes combinées du chlore et du brome. L’analyseur BS permet de mesurer en continu la teneur en brome libre et celle en halogène combiné. Dans les eaux de refroidissement, la différence entre ces deux éléments est importante, car ils réagissent différemment dans le milieu récepteur. Le brome libre est plus toxique pour la faune et la flore que le brome combiné sous forme d'organochloramine, mais il est instable, aussi disparaîtra-t-il plus vite que le brome organique combiné.

La séparation en continu des autres éléments oxydants devient de plus en plus nécessaire dans les stations de traitement des eaux potables. L'utilisation conjuguée du bioxyde de chlore, de l'ozone et du chlore se généralise pour le traitement des eaux de surface de mauvaise qualité (11). Il y a quelquefois présence en un même point, de résiduels oxydants composés d'un mélange des résiduels formés par ces divers traitements. Actuellement, aucun appareil d'analyse en continu ne permet de les séparer. Les analyseurs BS apportent une réponse à ce problème.

CONCLUSION

On a vu que les diverses chloramines engendrent une interférence de 25 à 40 % sur la mesure du chlore libre donnée par un analyseur ampérométrique classique fonctionnant en l'absence d'iodure. Pour avoir travaillé avec divers autres analyseurs ampérométriques notamment à Rancho Cordova (8), SAUNIER (3) confirme que cette interférence est caractéristique des analyseurs ampérométriques classiques. Cette conclusion est d’ailleurs en accord avec des travaux de RICHARD (9), mais en désaccord avec une étude de MORROW (10). L'utilisation à Rancho Cordova (3) (8) de l'analyseur ampérométrique développé par MORROW (10) pour le contrôle automatique du breakpoint nous a permis de constater que celui-ci était précis, fiable et stable, mais qu'il présentait l'inconvénient d’être sensible à la dichloramine. Celle-ci engendrait une interférence d'environ 20 % sur la mesure du chlore libre mesuré avec cet appareil. Cette interférence entraînait d'ailleurs l'impossibilité de contrôler l'injection du chlore de manière à maintenir le système à proximité immédiate du point de rupture. D’autre part, lorsque le chlore était injecté juste au-dessous du point de rupture, cet analyseur affichait faussement la présence de chlore libre, ce qui ne permettait pas au système d'automatisme de rétablir un contrôle de l'injection du chlore au point de rupture ou légèrement au-dessus.

L'absence de réaction entre les chloramines et le réducteur spécifique de chlore libre (RSCL) utilisé dans l'analyseur BS a été vérifiée. L'utilisation de cet analyseur pour mesurer le chlore libre en présence de fortes concentrations de chloramines donne entière satisfaction. Le contrôle de l’injection du chlore de manière à maintenir celle-ci à proximité du breakpoint est maintenant possible en raison du développement de cet appareil et d'un contrôleur automatique du breakpoint, ce dernier fera l'objet d'une communication ultérieure. Des analyseurs BS de chlore libre et combiné fonctionnent depuis plusieurs années avec succès, dont certains dans les usines de traitement d'eau potable de la Région Parisienne. Ils ont fait la preuve de leur précision et de leur fiabilité.

L'utilisation de cette génération d'analyseurs pour la mesure en continu des résiduels oxydants de chlore libre, brome libre, brome et chlore combiné, ozone, bioxyde de chlore et chlorite apporte un réel progrès (12) au contrôle du traitement des eaux potables. La séparation du brome libre et combiné constitue aussi une importante nouveauté, car aucune technique simple ne permettait d'effectuer cette analyse en continu jusqu'à maintenant.

REFERENCES

(1) B.M. SAUNIER — Kinetics of Breakpoint Chlorination and Disinfection. Thèse de doctorat publiée à l'Université de Californie à Berkeley, mai 1976.

(2) B.M. SAUNIER et R.E. SELLECK — The Kinetics of Breakpoint Chlorination in Continuous Flow Systems ; présenté à la conférence annuelle de l'A.W.W.A. à La Nouvelle-Orléans, 22 juin 1976.

(3) R.W. STONE, B.M. SAUNIER, R.E. SELLECK et G.C. WHITE — Pilot Plant and Full Scale Ammonia Removal Investigations Using Breakpoint Chlorination ; présenté à la 49° convention du W.P.C.F. à Minneapolis, 5 octobre 1976.

(4) B.M. SAUNIER et A. DERREUMAUX — Procédé et Appareil de mesure ampérométrique de la teneur en chlore libre d'une solution ; dépôt de brevet en cours en France et à l'étranger.

(5) J.J. MORROW — US Patent n° 3 431 199 (26 novembre 1968).

(6) A.J. PALIN — Analytical Control of Water Disinfection with Special Reference to Differential DPD Methods for Chlorine, Chlorine dioxide, bromine, iodine and ozone. J. Inst. Wat. Eng. 28 : 139 (1974).

(7) B.M. SAUNIER — La désinfection des eaux de piscines par les chlorocyanurates. Revue Piscine, Éditions Christian Ledoux, janvier 1979, p. 103.

(8) G.C. WHITE — Disinfection of Wastewater and Water for Reuse. Van Nostrand Reinhold Publishers, New York, 1978.

(9) Y. RICHARD — Mesure du chlore : détermination automatique du point critique. T.S.M., février 1975, 67-74.

(10) J.J. MORROW et R.N. ROOP — Advances in Chlorine-Residual Analysis. J.A.W.W.A., avril 1975, 184-186.

(11) W.J. MASCHELEIN — L'ozonation des eaux. Éditions Lavoisier, Paris, août 1980.

(12) G. GAURIAU — Critères de choix des automates de dosage des produits chimiques. AIDE, congrès Wasser Berlin, 2 avril 1981.

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