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L'ozone casse les DCO dures

30 juillet 1999 Paru dans le N°223 à la page 53 ( mots)
Rédigé par : Christelle NAYME

Cet article fait l'inventaire des propriétés de ce gaz, oxydant puissant, utilisé essentiellement en traitement de l'eau, pour désinfecter, éliminer la pollution d'origine organique. Une réalisation est présentée, ainsi que les installations classiques d'ozonation : pilote et industrielle. Messer et Wedeco se sont associés afin de proposer une solution globale pour l'oxygène, le générateur d'ozone et la mise en contact : de l'étude au suivi des installations en passant par les essais.

Messer et Wedeco se sont associés afin de proposer une solution globale pour l’oxygène, le générateur d’ozone et la mise en contact : de l’étude au suivi des installations en passant par les essais.

[Photo : Photo de l'installation Wedeco-Messer (lixiviats)]

L'ozone est un gaz présent dans l’atmosphère, à des concentrations faibles mais variées. Polluant lorsqu'il provient des gaz d’échappement des voitures, il est indispensable dans la stratosphère afin d’arrêter les rayons UV nuisibles.

Qu’est-ce que l’ozone ?

Ce gaz est un oxydant très puissant, un désinfectant particulièrement efficace, utilisé principalement dans le traitement de l'eau.

Il présente de nombreux avantages : pas de formation de sous-produits, utilisation flexible, ce composé est très écologique. L’ozone étant instable, il doit être produit là où il est utilisé. Il est généré par décharge électrique sur de l’oxygène pur ou sur l'oxygène contenu dans l'air.

Les générateurs d’ozone permettent de produire de l’ozone jusqu’à des concentrations de l’ordre de 15 % en poids (200 g/Nm³ environ).

Les utilisations de l’ozone

En traitement de l'eau, l’ozone est utilisé pour ses diverses propriétés :

Désinfection

Désinfectant particulièrement efficace, il permet de traiter l'eau potable sans influer sur le goût ni laisser de sous-produits.

[Figure : Mécanisme de dégradation de l’indigo par l’ozone]

toxiques,

Sur les eaux usées, son utilisation avant rejet permet de désinfecter tout en éliminant la matière organique résiduelle ou une coloration indésirable.

Préconisé dans les piscines de rééducation, il élimine tous les risques de propagation de maladies.

Élimination de DCO

Oxydant très sélectif, il permet en ajustant les conditions opératoires d’oxyder préférentiellement un type de molécule : les colorants ou plus généralement toute la matière organique.

Les effluents, qu’ils soient rejetés dans le milieu naturel ou dans une station d’épuration communale, doivent respecter des normes en DCO (Demande Chimique en Oxygène) de plus en plus strictes. L’ozone permet d’éliminer la matière organique qui n’a pas été réduite lors d’un traitement primaire (biologique ou physico-chimique). Cette pollution résiduelle est en général connue sous le terme de talon de DCO dure. Il est possible aussi d’utiliser de plus petites quantités d’ozone avant un traitement biologique pour augmenter la biodégradabilité d’un effluent.

Ces différentes réactions sont notamment mises en jeu dans le traitement des lixiviats de décharge : Wedeco possède en Allemagne une trentaine de références sur cette application.

L’ozonation et le traitement biologique de nitrification-dénitrification sont couplés afin d’optimiser au maximum l’efficacité. L’effluent circule dans les différentes étapes du traitement, le taux de recirculation étant fixé en fonction des caractéristiques du lixiviat à traiter.

L’ozone ici est donc utilisé afin de diminuer la DCO dure et d’augmenter la biodégradabilité de l’effluent.

Autres applications

Sa réactivité notamment avec la matière organique permet bien sûr son utilisation en traitement de l’air (désinfection ou désodorisation).

L’ozone peut être utilisé afin d’éliminer du fer ou du manganèse dans une eau destinée à être embouteillée par exemple. Il permet aussi de détruire les cyanures issus d’un process chimique.

Afin de répondre à la demande de production de papier sans chlore, le blanchiment de la pâte à papier peut être réalisé au moyen d’ozone.

Cet oxydant très puissant offre une multitude d’applications dans des domaines très divers.

Comparaison entre air et oxygène pour la génération d’ozone

L’utilisation de l’ozone généré à partir d’oxygène pur permet de construire des installations plus compactes. En effet, le générateur en lui-même est plus petit pour la même quantité d’ozone produite et il n’y a pas de système de préparation d’air (compresseurs, sécheurs utilisés pour descendre le point de rosée de l’air à –70 °C).

L’investissement est donc moindre.

Les cinétiques de réaction sont plus rapides. La mise en œuvre est plus facile : moins de gaz est injecté pour traiter la même quantité de liquide. Cela rend possible l’utilisation de techniques performantes (pompe de surpression-venturi) pour la mise en contact de l’ozone et de l’eau et augmenter ainsi le rendement de dissolution.

La consommation électrique est moins élevée. En effet, on ne consomme pas d’énergie pour la préparation d’air et les rendements énergétiques de production d’ozone sont plus élevés.

La maintenance est réduite sur un ozoneur à

[Photo : Container d’essais pilotes]

oxygène, il n'y a pas de compresseur, de sécheur... Les tubes diélectriques dans lesquels a lieu la génération d'ozone ne sont contrôlés qu'au bout de 5 ans.

Lors d'un couplage de l'ozone et d'un traitement biologique, il est de plus possible de recycler l'oxygène, utilisé pour la génération d'ozone, pour l'aération du biologique.

En effet lors de toute utilisation de l'ozone, les gaz après réaction sont acheminés dans un destructeur thermique (ou thermo-catalytique) qui permet d'éliminer les traces d'ozone résiduelles dans les évents.

[Photo : Schéma d'une installation (pilote ou industrielle)]

Un des paramètres essentiels à maîtriser lors de l'utilisation de l'ozone en traitement de l'eau est la mise en contact du gaz et de l'eau. En effet, le rendement de transfert intervient beaucoup sur les quantités à mettre en jeu et donc sur le coût du traitement.

Le système mis au point par Wedeco et installé pour la majorité des applications est représenté sur la figure 2. L'ozone généré à partir d'oxygène pur est injecté dans l'effluent au travers d'un venturi. Cette injection a lieu dans une boucle de recirculation alimentée par une pompe de surpression. La réaction a lieu en général dans un réacteur sous pression, ce qui permet d'augmenter les rendements de dissolution de l'ozone dans l'eau et d'augmenter les cinétiques de réaction de l'ozone avec les composés organiques.

En sortie de réacteur, les évents sont envoyés dans le destructeur thermo-catalytique. Les traces d'ozone sont donc éliminées et le gaz peut donc être rejeté dans l'atmosphère.

Principe de la décoloration

L’ozone sous forme moléculaire agit préférentiellement sur les liaisons insaturées, selon le mécanisme présenté dans la figure 1.

De nombreuses études, du laboratoire à l'essai pilote, ont été réalisées sur les réactions de l'ozone avec les colorants utilisés dans l'industrie textile.

La quantité d’ozone consommée dépend fortement du type de composés à éliminer et de la DCO présente dans l’effluent. En effet, l'ozone moléculaire réagit plus rapidement avec les composés colorés qu’avec la matière organique.

Comme on le voit sur le mécanisme de dégradation de l'indigo par l’ozone, l'attaque de la molécule d'ozone est très sélective : la cinétique de dégradation des doubles liaisons responsables de la couleur est très rapide. En ajustant les conditions opératoires (pH, utilisation d'une ozonation catalytique avec le peroxyde d'hydrogène ou les UV), il est possible de dégrader plus rapidement les cycles aromatiques par l'action moins spécifique des radicaux hydroxyles.

Exemple d’application industrielle

Levi's à Wervik en Belgique

Le but de l'installation de l’ozone en traitement tertiaire des effluents dans cette unité de teinture de jeans était de permettre le recyclage d'au moins 70 % de l'eau consommée.

L'usine est en effet située au-dessus d'une nappe phréatique (partagée entre la Belgique et la France) qui s’épuise ; le gouvernement belge leur a demandé de diminuer la quantité d'eau qu'ils utilisent : la meilleure solution est donc le recyclage.

Différents procédés ont été testés sur le site :

  • - traitement physico-chimique et ultrafiltration : ce couplage ne permet pas d’éliminer suffisamment la couleur ni la matière organique,
  • - essai de traitement tertiaire au charbon actif : développement de bactéries anaérobies sur le filtre, apparition de mauvaises odeurs sur l'effluent recyclé,
  • - essai de traitement biologique : une partie de la couleur est adsorbée sur les flocs, ces différents traitements combinés ne permettent pas le recyclage en process de l'effluent,
  • - le traitement, une fois optimisé, utilise en finition une ozonation, qui permet de décolorer totalement l'effluent et d’obtenir ainsi des caractéristiques d’eau permettant son utilisation en process : la qualité des produits finis obtenus est égale à celle obtenue avec l'eau de forage. Pour des raisons de confidentialité, peu de détails sur l'installation seront fournis.

Après séparation des fibres et des pierres (pierres ponces provenant de l'unité stone washed), l'effluent est stocké dans un bassin égalisateur. Il est pompé dans ce bassin jusqu'à des échangeurs de chaleur (ou une tour de refroidissement) (figure 3).

[Photo : Circulation de l'effluent chez Levi's]

Chaine de traitement :

Traitement physico-chimique :

Après floculation, le pH est ramené à 6,6. Un polymère est alors ajouté afin de séparer les boues (couleur résiduelle verte).

Les boues du physico-chimique sont mélangées avec celles provenant du traitement biologique. L’ensemble est pressé sur un filtre presse (35 % matière sèche).

Traitement biologique :

L'aération dans le bassin de boues activées est alimentée par deux compresseurs. L'injection d'air se fait au moyen d'un tube, sur lequel sont disposées des pipes, traversant le bassin (800 m³, 8 m de haut).

[Figure : Figure 4 – Schéma d'une électrode Wedeco]

Ce système permet d’obtenir une distribution de l’oxygène dans le bassin parfaitement homogène. Ce brassage et l’aération sont assurés par deux pompes, fonctionnant en alternance, de 2000 m³/h. Des nutriments sont ajoutés dans le bassin lors des arrêts de la production (week-end…) : acide acétique et ammoniaque.

Filtre à sable :

Il est situé entre le traitement biologique et l’ozonation.

Traitement tertiaire : ozonation

L’ozoneur a une production de 7 kg/h, il est dimensionné pour traiter 35 m³/h d’effluent. L’injection est réalisée par une pompe de surpression et un venturi, le mélange après passage dans un réacteur (pression atmosphérique) est stocké dans un bassin avant d’être envoyé en production. La couleur à éliminer est due à des colorants réactifs (faiblement jaune).

Traitement de l’air :

Tous les effluents gazeux provenant du traitement biologique, des bassins de stockage, sont récupérés et traités sur des biofiltres. L’installation a été dimensionnée pour traiter en moyenne 45 m³/h pendant 24 h. Le physico-chimique peut traiter 70 m³/h, le biologique 54 m³/h. Le responsable et ses 4 techniciens (ils travaillent par postes) font toute la maintenance sauf ozone, filtre presse et compresseurs.

[Figure : Figure 5 – Container d’ozonation : de la production d’ozone au système de réaction]

Quand la production doit changer, ils vérifient tout d’abord au laboratoire ou sur l’installation pilote disponible sur place que le traitement peut éliminer la pollution induite.

Génération industrielle de l’ozone

Ci-contre figure le schéma d’une électrode Effizon®, mise au point par Wedeco. De chaque côté de l’électrode centrale en inox, l’oxygène pur circule, l’ozone est donc généré dans ces deux espaces de décharge électrique : les ozoneurs sont donc plus compacts que des générateurs classiques (un seul espace de décharge) pour une production identique.

Les particularités du partenariat

La complémentarité des compétences de Messer France et de Wedeco nous permet de proposer des solutions clefs en main, de vendre l’ozone comme un autre gaz : en prenant en charge l’investissement et la maintenance de l’installation de génération d’ozone et éventuellement de production d’oxygène (PSA, VPSA).

En effet, Wedeco est le spécialiste du traitement des pollutions industrielles (effluents très pollués comme les lixiviats de décharge, les différents effluents industriels et notamment colorés), et Messer France est spécialiste de la mise en œuvre de tous les gaz.

[Encart : Références bibliographiques • Bailey P. S. (1982), Ozonation in organic chemistry, Academic Press, New-York • Langlais B., Reckhow D. A., Brink D. R. (1991), Ozone in water treatment, application and engineering, Lewis Publishers • Leitzke O., Geiger M., Ried A., Laumen Br. (1997), The state of development and operational experience gained with processing leachate with a combination of ozone and biological treatment, Proc. IOA-Wasser Berlin, VBS • Nayme C. (1997), Thèse : Étude de la dégradation par ozonation de deux colorants utilisés en teinture : recherche de sous-produits, étude cinétique et influence sur les applications industrielles, Univ. Rennes 1, n° 1673 • Parduyns R. (1990), Rapport interne Messer]
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