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L'oxydation in situ : potentialités et limites

31 mars 2009 Paru dans le N°320 à la page 24 ( mots)
Rédigé par : Christophe BOUCHET

C'est une technique de remédiation des sols aussi bien que des eaux souterraines polluées. Elle peut être mise en place là où des technologies plus traditionnelles ne sont pas opérationnelles. Le coût de sa mise en oeuvre est plutôt raisonnable. Encore peu employée en France, elle a fait ses preuves aux États-Unis et aux Pays- Bas. Avec succès lorsque les critères clés nécessaires à sa réussite sont convenablement mis en oeuvre. À cette condition, les techniques de l'oxydation in situ semblent promises à un bel avenir. Explications.

Aussi appelée en anglais In situ Chemical Oxidation (ISCO), l'oxydation in situ regroupe une palette de procédés chimiques qui ont pour point commun d'utiliser des réactifs oxydants dans le but de dégrader chimiquement les polluants in situ. Ils s'inscrivent donc dans la gamme de procédés de traitement chimiques basés sur l’oxydation des polluants.

Ces procédés sont susceptibles de s'appliquer aussi bien au traitement de la zone saturée que de la zone insaturée d'un site à traiter. Ils sont apparus au début des années 1990, en complément des techniques de traitement ex situ. C'est que leurs avantages ne sont pas minces : possibilité de traiter des surfaces et des volumes importants, pas de transports de matériaux pollués, pas besoin d’excavations ni de pompages et des durées de traitement relativement brèves.

D’une manière générale, le traitement des sols et nappes polluées fait appel à différents types de traitements qui se distinguent chacun par un ensemble de contraintes, une efficacité et un coût. Comme dans tous les domaines de la dépollution, il n'existe pas de technique universelle susceptible d'être mise en œuvre en toutes circonstances. Dans la plupart des cas, la solution adoptée est le fruit d'une combi

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[Photo : Mise en place d’un traitement par oxydation in situ]

Mise en place de plusieurs techniques.

Utilisées en parallèle ou en complément les unes des autres, cette combinaison permettra d’atteindre le taux de dépollution souhaité en fonction des délais impartis au traitement et du budget consacré à l’opération. Les techniques d’oxydation in situ ne font pas exception à cette règle : dans la plupart des cas, elles viendront en complément d’autres procédés de traitement. Et pas forcément sur l’ensemble d’un site. Elles peuvent par exemple être utilisées pour traiter des hot-spots localisés, ou pour affiner un traitement réalisé à l’aide d’une autre technique, par exemple traiter une phase dissoute libérée par un autre procédé ou, à l’inverse, pour initier une dégradation qui favorisera un processus biologique ultérieur. Le spectre de mise en œuvre de ces procédés est donc assez large. Mais ils ne s’adressent qu’à certains types de polluants dans des conditions bien précises.

Certains types de polluants dans des conditions bien précises

L’oxydation in situ est généralement utilisée avec succès sur des polluants organiques de type aliphatique non saturé ou aromatique, chlorés ou non. Bien que moins efficace, elle peut également être mise en œuvre sur les hydrocarbures aliphatiques saturés (octane, hexane) et sur les alcanes chlorés. Parmi les polluants susceptibles d’être traités par l’oxydation in situ, on trouve donc essentiellement les BTEX (benzène, toluène, éthylbenzène et xylènes), les solvants chlorés (COV), les HAP (hydrocarbures aromatiques polycycliques), les PCB (polychlorobiphényles), les alcools aromatiques type phénol et les pesticides organiques.

« En ce qui concerne la gamme de polluants, la technique est éprouvée pour les hydrocarbures aliphatiques, hydrocarbures aromatiques, solvants chlorés, mais je resterais réservé pour ce qui est du PCB et certains pesticides, pour lesquels des études plus conséquentes devraient être réalisées sur les sous-produits générés » estime toutefois Hubert Bonin, Président de l’UCIE et Gérant d’Hub Environnement. Comme pour l’ensemble des techniques de traitement in situ qui ne permettent pas d’accéder directement à la zone polluée, la phase préalable de caractérisation de la pollution est essentielle. C’est elle qui fournira les premières indications permettant d’évaluer le potentiel de l’oxydation in situ. Des essais sur pilote viendront ensuite confirmer le bien-fondé de l’option choisie et, le cas échéant, affiner les réponses préalablement définies. Ces informations concernent la géologie et l’hydrogéologie du site à traiter, la composition chimique du sol et des eaux souterraines, la nature et la localisation des polluants à traiter. Elles permettront également de définir le ou les oxydants les plus adaptés à la configuration étudiée, capables de dégrader les polluants en composés non nocifs, jusqu’au stade de dioxyde de carbone dans le cas des solvants chlorés.

[Encart : Oxysol : un programme de recherches sur le traitement des sols par oxydation chimique in situ Oxysol est un projet PRECODD 2007 (Programme ECOtechnologies et Développement Durable) de l’Agence Nationale de la Recherche destiné à valider la filière de traitement in situ des sols contaminés par des polluants organiques, fondée sur le couplage de l’oxydation chimique et la restauration des fonctions du sol. L’un des domaines d’application de cette filière concerne les friches industrielles de grande taille, contaminées par des mélanges de composés organiques et inorganiques, pour lesquelles il n’existe pas vraiment de technologie de traitement opérationnelle et économiquement acceptable en vue de leur reconversion. D’une manière générale, la filière est destinée aux sols contaminés par les polluants organiques et, en particulier, pour le traitement de la zone insaturée. Des essais de laboratoire sont conduits pour tester les oxydants, définir les conditions d’optimisation du procédé d’oxydation et préparer la refonctionnalisation. Des essais en colonnes lysimétriques de grande taille permettent d’étudier in situ l’efficacité de la filière et son impact environnemental. Le projet associe des partenaires scientifiques publics (GISFI), semi-public (BRGM) et des partenaires industriels, de la chimie (Solvay), du traitement de sols (TVD) et donneur d’ordre (Arcelor Real Estate France). Le projet, qui a démarré en mars 2008, doit durer 36 mois.]

Car chaque oxydant se caractérise par des propriétés spécifiques qui requièrent des conditions de mise en œuvre particulières, lesquelles dépendent également de la géochimie du site. « L’injection d’un oxydant puissant dans un sol doit être bien maîtrisée car ce type de produit peut engendrer des modifications structurelles du sol et donc modifier les qualités de portance de celui-ci, prévient Thierry Jumeau, Directeur Technique du Bureau d’études Soler Environnement. Nous constatons que lorsque cette technique de traitement est utilisée sur un site construit ou en cours de construction, les problèmes de géotechnique (type de fondations du bâtiment) vis-à-vis de la déstructuration du sol ne sont pas toujours analysés comme il le faudrait ».

Les oxydants les plus fréquemment utilisés sont le Fenton, un peroxyde d’hydrogène associé au fer pour atteindre une cinétique rapide, l’ozone, le persulfate de sodium et le permanganate de potassium ou de sodium. Ils se présentent selon les cas sous forme liquide, gazeuse ou solide. Le réactif de Fenton réagira efficacement avec des dérivés du pétrole, éthanes et éthylènes en minéralisant ces produits alors que le permanganate, sans effet sur les composés pétroliers et les alcanes chlorés, est un oxydant puissant qui réagit rapidement avec les solvants chlorés.

L’oxydant déterminé, l’application de la technologie va consister à l’injecter par le biais de puits d’injection ou plus rarement par malaxage en surface et en profondeur.

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[Photo : L’oxydant déterminé, l’application de la technologie va consister à l’injecter par le biais de puits d’injection ou plus rarement par malaxage en surface et en profondeur. Le plus souvent, les oxydants sont introduits dans les sols et les eaux, au moyen de puits d’injection. Le réseau de puits doit donc couvrir l’ensemble de la zone à traiter en prenant en compte les hétérogénéités des sols à traiter et de la pollution afin que le polluant soit en contact avec l’oxydant.]
[Encart : Hubert Bonin succède à Thierry Blondel à la présidence de l’UCIE Créée en 1983 par Thierry Blondel, l’UCIE qui rassemble une centaine d'adhérents, est une association dont l'objectif est de défendre la profession composée d’ingénieurs consultants en environnement. Ses membres sont issus d'horizons extrêmement différents, universitaires, consultants indépendants, laboratoires d’analyses, entreprises prestataires de services, chercheurs... et rassemblent des spécialistes pointus de différentes disciplines : géochimie, écologie, urbanisme, gestion déchet, sites et sols pollués, aménagement de décharges, management environnemental. L’UCIE (Union des Consultants et Ingénieurs en Environnement) est donc un véritable laboratoire d'idées, et constitue une force de propositions particulièrement bienvenue à une période où les maîtres d’ouvrage sont à la recherche plus que jamais de solutions intelligentes, économes en énergie et en ressources. Pour Hubert Bonin, le nouveau Président de l’UCIE, « L’oxydation in-situ, comme toutes les autres techniques in situ, offre une vraie alternative à l'excavation et l'envoi en décharge. Les experts de l’UCIE travaillent pour la mise en œuvre plus fréquente de tels procédés et technologies plus “éco-compatibles”, et possèdent ainsi une forte expérience dans ce domaine ». L’UCIE se veut très ouverte au dialogue et aux échanges vers l’extérieur et initie nombre de séminaires et journées de réflexion avec l’administration, et d'autres métiers (industriels, BTP, promoteurs...). Ainsi la prochaine journée du 5 juin 2009, à Lyon, journée organisée avec le support de la ville de Lyon, sera-t-elle consacrée à résoudre la problématique du devenir des terres excavées en milieu urbain. Fort de son expérience, Hubert Bonin est bien décidé à continuer le travail de son prédécesseur à une époque où plus que jamais, le besoin en expertise indépendante n'a jamais été aussi important, pour faire face aux grands défis du développement durable.]

Le plus souvent, les oxydants sont introduits dans les sols et les eaux, au moyen de puits d'injection. Le réseau de puits doit donc couvrir l'ensemble de la zone à traiter en prenant en compte les hétérogénéités des sols à traiter et de la pollution afin que le polluant soit en contact avec l'oxydant. Le choix des techniques d'injection dépend de la géologie du site et de la localisation de la source à traiter. La méthode d'injection classique s'applique bien aux sols sableux. Par contre, des sols argileux nécessiteront des puits de diamètre plus large pour augmenter les surfaces de diffusion.

Les paramètres de réglage de l'injection, à savoir le débit, la pression, le nombre, la taille et la répartition des trous sont également des paramètres déterminants pour assurer un contact correct entre polluants et oxydants.

Assurer un contact correct entre polluant et oxydant

C'est la principale difficulté de la technique, car la qualité de ce contact conditionne le succès du traitement. De nombreux paramètres doivent être pris en compte pour assurer l'optimisation de ce contact : la géologie, l'hydrologie et la géochimie du site sont déterminants. L'injection des oxydants sera ainsi largement plus facile dans un sol sableux que dans un sol riche en argile. Mais la perméabilité des sols sableux étant importante, la dispersion des oxydants sera également plus rapide et plus large. Les rayons d'actions des oxydants devront donc être pris en compte tout comme leur cinétique de décomposition qui va décroître en fonction de la distance de leur rayon d'action.

La localisation des polluants doit également être prise en compte. Dans la pratique, les polluants sont disséminés dans

[Photo : Une gamme spécifique de produits chimiques est utilisée pour l’oxydation. Mais les produits chimiques n’interviennent pas seulement pour réaliser des réactions rapides d’oxydation. Ils peuvent être introduits dans le sol pour améliorer la bioremédiation, parmi eux les peroxydes de calcium et de magnésium de Solvay constituent une source de production lente d’oxygène qui va stimuler l'activité bactérienne.]
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la matrice et se présentent sous la forme d'une multitude de poches plus ou moins faciles à localiser. De plus, dans le cas de traitement en phase liquide dense non aqueuse (DNAPL), les réactions ont lieu entre l’oxydant et la phase dissoute du produit. La réaction est donc limitée par la cinétique de dissolution dans la nappe. La surface de contact entre les poches de polluant et l'eau conditionne en partie ce paramètre. Il est donc essentiel de déterminer la présence et la taille des poches de DNAPL résiduelles.

L’efficacité du contact polluant/oxydant est sans doute le principal facteur limitant le développement de l’oxydation in situ. Mais ce n’est pas le seul. Les opérations qui se déroulent en surface (transport, stockage, manipulation des oxydants) comportent des risques qui doivent être pris en compte et maîtrisés. De plus, les effets induits par ce type de traitement doivent également être pris en considération. La technique, qui requiert l'utilisation de produits dangereux, les oxydants, peut engendrer des modifications importantes des conditions géochimiques du milieu (modification du pH, montée en température des zones traitées, migration de la pollution), causer une augmentation de la mobilité d’autres polluants, voire générer la formation de polluants secondaires et finalement entraîner une perturbation biologique du milieu naturel.

La mise en place d'un oxydant puissant dans un sous-sol n’est pas une opération anodine. Elle nécessite une bonne maîtrise de la technique et une gestion spécifique des risques.

Bien maîtriser la technique et mettre en place une gestion des risques

Bien qu’encore peu répandue en Europe, la technique de l’oxydation in situ présente de nombreux avantages. Parmi ceux-ci, un temps de traitement rapide, pas d’excavation des sols, pas d’extraction ni d’accumulation de polluants mais une destruction de ceux-ci, des coûts modérés qui se situent entre ceux des techniques classiques de bioremédiation et ceux des techniques telles que les barrières perméables réactives ou les traitements thermiques. Ces atouts expliquent que de nombreux prestataires aient développé ces dernières années une expertise permettant de surmonter les facteurs limitants qu'ils soient d’ordre technique ou liés à l'aspect sécurité.

Sita Remédiation a par exemple développé Oxidis®, une technique basée sur l’oxydation in situ qui a par exemple été mise en œuvre sur un ancien site de production d’équipement automobile situé dans les Vosges (88), confronté à une pollution de la nappe phréatique par du trichloroéthylène. La complexité du sous-sol (gravier, béton, limon, sable, tourbe) ainsi que la présence d’anciennes fondations qui compartimentaient l’aquifère ont rendu la localisation de la zone polluée difficile. Quarante puits de pompage et d'injection ont donc été posés par les ingénieurs de Sita Remediation afin d'identifier les zones sources et les poches de pollution au trichloroéthylène.

Le procédé mis en place s’est déroulé en trois étapes :

  • - Un pompage des eaux contaminées par l’intermédiaire d'un réseau d’aiguilles d’extraction ;
  • - Un traitement des eaux polluées dans une unité d’oxydation photocatalytique. Le trichloroéthylène a été détruit sous UV en présence de dioxyde de titane (TiO₂) ;
[Encart : Oxydation chimique in-situ : les études préalables sont indispensables Réalisé par Soléo Services pour le compte d’un sous-traitant automobile situé en Rhône Alpes, ce chantier a été conçu sur la base d'un système de recirculation couplant des aiguilles de pompage et des aiguilles d'injection d’oxydant. Le système mis en place avait pour vocation de traiter une zone source polluée par des solvants chlorés où le niveau très important des concentrations indiquait la présence probable de produit pur. La conception du projet est passée par une phase de dimensionnement laboratoire qui a permis de calculer la quantité d'oxydant nécessaire pour le traitement et qui a également permis de mettre en évidence que l'oxydant utilisé agissait comme stabilisateur de plusieurs polluants métalliques qui posaient problème, puisqu'il existe sur ce site une pollution mixte solvants chlorés/métaux lourds. Un essai pilote terrain a ensuite permis de valider les observations du laboratoire et d'acquérir les données nécessaires au dimensionnement final du projet complet qui compte au total une douzaine d'aiguilles de pompage et injection. Le graphique ci-dessous présente l'évolution des concentrations solvants chlorés d’un point de contrôle suite aux deux premières phases d’injection.]
[Photo : Évolution des teneurs en solvants chlorés]
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[Photo : Sita Remédiation a par exemple développé Oxidis, une technique basée sur l’oxydation in situ qui a par exemple été mise en œuvre sur un ancien site de production d’équipement automobile situé dans les Vosges.]

Les eaux ont ensuite été enrichies d’un réactif oxydant avant d’être réinjectées dans le sol par des aiguilles allant jusqu’à 5 mètres de profondeur.

En 8 mois, 5 000 m³ d’eau ont été traités à l’aide de 600 litres d’oxydant et 130 kg de TCE ont été récupérés ou détruits.

Tout comme Ikos Sol Meix, Arcadis, dans le cadre de cas concrets de traitement, a également mis en œuvre cette technologie sur plusieurs sites, notamment d’anciennes stations-services désaffectées. Les résultats obtenus ont permis d’observer des taux d’abattement des concentrations en hydrocarbures (notamment des BTEX) pouvant aller jusqu’à 80 ou 90 %, et ce parfois en l’espace de quelques mois.

De son côté, Hub Environnement a développé récemment, en partenariat, deux nouveaux procédés baptisés “Oxyjet” et “Jet-Extract” permettant enfin de s’affranchir des problèmes de colmatage, avec un procédé d’injection dérivé des technologies de consolidation in situ des sols. L’injection avec de tels moyens permet un traitement plus ciblé, plus homogène et surtout avec des rayons d’influence plus conséquents, et de résoudre enfin la difficulté de mise en contact oxydant-polluant. « Avec ces procédés, nous faisons une fois de plus la démonstration que la dépollution des sols doit se faire avec des experts ayant une excellente connaissance des pollutions associée à la compétence de grandes entreprises du TP maîtrisant la sécurité et les travaux spéciaux souterrains », souligne Hubert Bonin, gérant d’Hub Environnement.

Solvay Soil Remediation, Tauw Environnement, ICF Environnement ou encore TVD travaillent activement sur le sujet. De même qu’Extract-Ecoterres qui dispose déjà de plusieurs références sur des sites industriels en Belgique. Colas Environnement et Recyclage et Serpol disposent de plusieurs références en anciennes stations-services et dépôts pétroliers. Veolia Propreté Traitement des Sites et Sols pollués (GRS Valtech) réunit également dans une organisation interne spécifique des moyens humains et techniques dédiés à la mise en œuvre de procédés de traitements in situ. Ainsi, le pôle technique composé d’une vingtaine de personnes maîtrise l’ensemble des procédés de traitement in situ : venting, stripping, sparging, slurping, pompage-écrémage, confinement mais aussi oxydation chimique, du dimensionnement à l’exploitation, en passant par la fabrication.

Brezillon se montre plus prudente sur les risques associés à cette technique, appliquée in situ, soit du fait des modifications physico-chimiques du milieu, essentiellement le potentiel rédox, soit du fait de l’apparition, en cours de traitement, de composés plus toxiques que les polluants d’origine. Tout en ayant étudié et réalisé plusieurs projets d’oxydation chimique in situ, Brezillon s’est plus particulièrement orientée vers l’oxydation chimique sur site. Dans le cadre de son programme R & D, la société développe le procédé Oxyterre®, qui verra le jour en 2009. Ce procédé sera notamment orienté vers le traitement sur site de terres polluées par des composés organiques peu volatils et peu biodégradables (HAP, hydrocarbures lourds…).

Colas Environnement et Recyclage, spécialisée dans les travaux de dépollution, a effectué, au cours des dernières années, de nombreux essais et chantiers concernant l’oxydation chimique. « Cette technique a comme principal avantage de dégrader l’ensemble des polluants jusqu’à minéralisation, mais elle pose des soucis importants quant à son utilisation », estime Jérôme Rheinbold, directeur de Colas Environnement & Recyclage. « Des risques liés à la mise en œuvre peuvent exister. Les coûts de ces produits sont élevés et les quantités à injecter peuvent s’avérer importantes. En effet, la réaction d’oxydoréduction s’opère également sur la matrice sol, très consommatrice, avant de dégrader les polluants eux-mêmes. Dans le cas de polluants très concentrés, potentiellement présents sous forme de phase pure (par exemple micro-gouttelettes de COHV dans les sols et la nappe), les injections d’oxydants provoquent des phénomènes de lessivage, solubilisation des polluants qui génèrent, immédiatement après, une augmentation des concentrations à l’aval hydraulique. Pour maîtriser ce phénomène, la quantité injectée doit être suffisante pour dégrader les polluants et abaisser les concentrations. Il faut renouveler autant de fois que nécessaire ces injections afin de traiter toutes ces zones concentrées. En conséquence, pour optimiser la consommation des oxydants, ces zones doivent être reconnues préalablement afin d’y cibler l’injection sous peine de consommer en pure perte du produit sur la matrice sol. Ces zones peuvent être seulement des horizons spécifiques (passées sableuses intercalées entre des lentilles argileuses) de quelques dizaines de centimètres d’épaisseur. Si les conditions ne sont pas réunies, il est difficile de pérenniser un tel traitement et la possibilité d’envisager un traitement in situ par biodégradation ensuite est quasi nulle, l’activité bactérienne ayant été détruite. Par expérience et pour des questions de bilan coûts-avantages, les injections sont préconisées avec d’autres techniques et dans des zones où les polluants sont sous forme dissoute ou moyennement concentrée et où les contraintes sont fortes (risque sanitaire à l’aval, impossibilité d’appliquer un traitement par biodégradation). »

Ortec Générale de Dépollution a également réalisé de nombreux chantiers de dépollution en utilisant des techniques d’oxydation chimique sur des composés différents comme les TCE, TCA, PCE ou BTEX. « Ces dépollutions n’ont pu aboutir avec succès que grâce à la conduite préalable d’essais pilotes de traitabilité et/ou de phases de reconnaissance des milieux à dépolluer. »

particulièrement axés sur les aspects géochimie et conditions hydrodynamiques de la nappe » indique Jean-Gabriel Carta, responsable du Développement. « Ortec Générale de Dépollution s'attache, au-delà de confirmer la faisabilité technique, à la maîtrise des autres aspects primordiaux de la mise en œuvre de la technique. La création de sous-produit polluant doit être étudiée afin de ne pas créer de pollution secondaire ou de risque pour la sécurité des personnes ». Dans l'étude de ses projets, l’entreprise s'appuie sur les services des grands fabricants d’oxydants (Solvay, Carus) afin de maîtriser la réaction globale d’oxydation, le comportement de l'oxydant dans le milieu et les conditions de mise en œuvre de ces produits dont la manipulation peut présenter certains risques.

« Ces mises au point préalables ont permis de rassurer, dans des opérations de dépollution de ce type, l’ensemble des parties prenantes et plus particulièrement les autorités de surveillance qui ont encore trop souvent quelques réticences à l’application de cette technique novatrice » estime Jean-Gabriel Carta. « À ce titre, le retour d’expérience d’Ortec Générale de Dépollution montre que les techniques d’oxydations ne sont encore pas toujours bien accueillies en France comme elles peuvent l’être par exemple dans d’autres pays comme la Suisse et l’Allemagne ou encore sur le continent africain ».

Pour Christophe Chêne, Directeur technique chez Soléo Services, « Cette technique est très efficace et économiquement intéressante, mais doit être réservée à des cas très particuliers, notamment le traitement des zones sources de solvants chlorés. Sa mise en œuvre doit se faire de manière mesurée et réfléchie. Aussi procédons-nous toujours par étapes pour valider le bien-fondé de la solution que nous proposons : un test laboratoire pour déterminer les besoins en oxydant et éventuellement étudier les problèmes de relargage de métaux lourds, puis un essai pilote terrain pour valider les conditions d’injection dans le milieu. En effet, le facteur limitant de cette technique reste la mise en contact du réactif avec le polluant dans un milieu hétérogène comme le sol ».

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