Donner de l'intelligence à un réseau de distribution d'eau ou d'assainissement consiste à le doter de capteurs, d'enregistreurs et d'actionneurs permettant le recueil de données toujours plus nombreuses et à les associer à des outils de traitement informatique sophistiqués, distribués ou centralisés offrant ainsi une vision globale du réseau. Un tel ensemble intégré d'équipements ouvre la voie à un pilotage plus efficace et plus réactif et au développement de nouvelles fonctionnalités comme l'optimisation de la consommation électrique. Il constitue un enjeu économique et réglementaire pour le distributeur d'eau, avec, en corollaire, la promesse de services étendus pour les consommateurs.
En quoi ce que l’on qualifie aujourd’hui de réseaux intelligents représente-t-il une révolution des métiers de l’eau, alors que les réseaux sont aujourd’hui pour la plupart bien instrumentés ? Pour Fabrice Renault, Directeur du Segment Eau chez Schneider Electric, une des entreprises fondatrices de l'alliance mondiale pour le développement des réseaux d’eau intelligents (Swan : smart water network) créé en 2011, « le réseau intelligent combine tous les
Des solutions intégrées de gestion intelligente pour les grandes villes
Spécialiste des produits de gestion intégrée dans les domaines de l'eau aussi bien que de l'énergie, de la distribution électrique, de la gestion des bâtiments ou des automatismes industriels, Schneider Electric a concrétisé sa vision du réseau d’eau intelligent dans un outil qui s’appuie sur ses compétences à tous les niveaux de la chaîne, hormis l’exploitation. Le Water Management Suite intègre des solutions propriétaires matérielles, de communication, des logiciels de supervision et d’aide à la décision ainsi qu’une partie conseil. « Grâce à des outils d’analyse intelligents, il est possible de détecter des fuites en comparant les mesures réelles aux valeurs de la modélisation et de les prioriser en fonction du volume des pertes et non du pourcentage de débit, explique Fabrice Renault. De plus, en connectant ces outils à des bases de données informatiques recensant tous les instruments et leur description sur système d’information géographique, on peut éditer un bon de maintenance répertoriant les informations et le matériel indispensables à l’intervention ».
Installé à Doha, au Qatar, ce système a permis de réduire les pertes d’eau de 20 % en un an. Mais la plateforme associe également une partie gestion de l’énergie qui s’appuie sur toutes les mesures physiques de consommation électrique remontées par les capteurs pour commander l’ouverture des vannes en fonction. S’ajoute une prestation de conseil pour acheter au meilleur coût l’énergie sur le marché international. Doha a ainsi réduit de 30 % sa facture énergétique sur son installation de distribution d’eau. « Avec notre système intégré, il est possible de gagner, dans les pays déjà bien équipés comme en Europe, 10 à 15 % sur l’efficacité opérationnelle, de faire 10 à 15 % d’économie sur la facture énergétique et autant sur le coût global de l’infrastructure. Notre solution a été éprouvée dans des mégapoles de 1 à 10 millions d’habitants. Elle pourra s’appliquer dans quelques années à des villes plus petites. En revanche, en dessous de 30 000 habitants, le coût par habitant et le niveau des compétences requises pour gérer ces solutions risquent d’être trop important ».
Les niveaux (matériel, communication, logiciel) doivent désormais être réunis dans un ensemble intégré. Jusqu’à présent les mesures à distance alimentaient des outils de pilotage pour faire du contrôle opérationnel et gérer le réseau à partir d’indicateurs remontés de terrain de façon discontinue, avec un intervalle de quelques minutes à quelques heures ou jours. Aujourd’hui, les instruments sont dotés d’intelligence embarquée, les données sont transmises en temps réel, analysées et interprétées de façon globale par des outils d’aide à la décision permettant d’être plus efficaces. Ainsi, des outils informatiques de haut niveau permettent de croiser en temps réel les données en provenance de multiples instruments pour offrir un meilleur diagnostic et une plus grande réactivité. Il est également possible d’optimiser l’installation, non seulement du point de vue de son rendement, mais aussi de sa consommation énergétique par exemple. La création de nouveaux services aux usagers est aussi un des objectifs visés par une plus grande intelligence dans l’utilisation des données recueillies sur le réseau.
Bien que la technologie des réseaux intelligents s’applique indifféremment aux réseaux d’assainissement et aux réseaux d’eau potable, ce sont ces derniers qui ont surtout bénéficié des avancées dans le domaine car les enjeux économiques (coût du traitement de l’eau et de la maintenance), écologiques (préservation de la ressource) et réglementaires poussent en ce sens. En particulier, le décret du 27 janvier 2012 (Grenelle 2) oblige les collectivités à réaliser un descriptif détaillé des réseaux d’eau et à élaborer un plan d’action pour réduire les pertes et augmenter ainsi leur rendement. D’autre part, la loi Warsmann du 14 avril 2011 donne à l’exploitant le devoir d’alerter les usagers en cas de consommation anormale, avec plafonnement de la facture du client en cas de fuite non signalée dans sa propriété.
Des capteurs toujours plus intelligents et plus communicants
Autant d’exigences qui nécessitent une surveillance plus précise et continue du réseau et qui trouvent une réponse avec le développement de la télérelève. De plus en plus d’équipements sont en effet dotés aujourd’hui de moyens de communication permettant de recueillir les données stockées et de les transmettre à un récepteur mobile (walk by, drive by) ou à de petits réseaux fixes de télérelève regroupant les données sur des concentrateurs qui les transmettront à leur tour à une plateforme de gestion logicielle par GSM ou Internet (par une passerelle GPRS).
Le marché propose de nombreux équipements (postes locaux de télégestion, prélocalisateurs de fuite, sondes multiparamétriques, dataloggers, débitmètres) autonomes en énergie, équipés de modules de télétransmission et bien souvent de logiciels embarqués : Lacroix Sofrel, Perax, Wit ou Mios en outils de télégestion ; Sewerin, SebaKMT, TD Williamson, Hydreka ou Primayer en prélocalisateurs de fuites ; Endress+Hauser, Krohne ou ABB en débitmètres, ce dernier proposant par exemple, avec Aquamaster 3, une solution intégrée.
… intègrent toutes les contraintes spécifiques de ces acteurs : protocoles propriétaires, connectiques particulières, contraintes d’étanchéité, de fixation, etc. Les produits sont alors très souvent labellisés au nom des clients, Webdyn travaillant en OEM. Webdyn fournit également des concentrateurs « sur étagère » pour l’usage de tous les acteurs du marché : il s’agit dans ce cas de produits dont le mode d’installation et d’emploi est standardisé. Ces produits sont capables de relever tout type de compteurs, en filaire ou en radio et avec de nombreux protocoles disponibles. Ils permettent d’alimenter n’importe quel système d’informations.
Les fabricants de compteurs proposent de leur côté des appareils capables de se connecter sur différents réseaux de télérelève. Par exemple, le compteur d’eau à ultrasons Hydrus de Sappel accepte les protocoles de communication Prios, Real Data et OMS (Open Metering System). De même, le compteur électromagnétique iPerl de Sensus fonctionne avec le protocole OMS et un protocole propriétaire mais ouvert et aujourd’hui intégré au système de relève de compteurs par terminaux mobiles de Dioptase, très utilisé par les collectivités. Spécialiste informatique dans le domaine de la relève de compteurs par terminaux portables, Dioptase développe également des logiciels de relève de compteurs par terminaux portables ainsi que des logiciels de gestion des tournées et des releveurs, tous deux issus de nombreuses années d’expérience dans ce métier. Les grands distributeurs d’eau ont développé leur propre solution de télérelève.
350 000 m³ d’eau économisés à Beaune
La Ville de Beaune (21) a choisi, dans le cadre d’une renégociation de son contrat de délégation de service public, d’instrumenter son réseau d'eau potable pour limiter les pertes et améliorer le service aux usagers. La solution de réseau intelligent retenue, proposée par Veolia Eau, a consisté à combiner plusieurs technologies innovantes et complémentaires. Dans un premier temps, 6 200 compteurs Itron intégrant la technologie de transmission radio basse puissance Homerider ont été déployés et les informations rapatriées par un réseau de transmission radio supervisé par M2oCity. Ce système de télérelève permet de générer des alertes mail ou SMS en cas de détection de consommation anormale et d'offrir aux usagers la possibilité de visualiser leur consommation quotidienne sur un site web. « La mise en place de ces services a fait évoluer positivement l'image du service Eau », estime Thierry Chanussot, directeur exploitation de la région centre Bourgogne de Veolia Eau.
Parallèlement, une sectorisation du réseau de distribution a été mise en œuvre de façon optimale grâce à une modélisation hydraulique préalable qui a conduit à définir huit zones. Les entrées et sorties de chaque secteur ont été équipées de débitmètres ABB et le secteur central, correspondant à la vieille ville historique, a été doté de 80 pré-localisateurs acoustiques Phocus de Primayer, dotés d'un module Homerider, afin de repérer de façon la plus précise possible l'origine d'une fuite et de limiter ainsi les interventions dans la zone protégée. Les données de ces appareils sont rapatriées par le même réseau de télécommunication M2oCity ; elles alimentent le superviseur de Veolia, Leme, pour calculer les rendements hydrauliques et localiser les fuites. « En 2011, un an après sa mise en place, cet investissement a permis d’économiser 350 000 m³ d'eau, soit 90 jours de consommation de la ville, souligne Thierry Chanussot. Le rendement est passé de 68 % en 2009 à 78 % en 2011. Nous comptons atteindre 80 % en 2016 ». Les derniers pourcentages à gagner sont cependant les plus durs car de nombreuses fuites sont trop faibles pour être détectées. La plupart de ces fuites proviennent de la détérioration des canalisations qui, très anciennes, se fissurent et créent de micro-fuites. La sectorisation permet toutefois de soutenir une démarche visant à renouveler les canalisations en identifiant les zones les plus fragiles.
La ville de Beaune n’en reste pas là. Elle équipe actuellement le réseau de trois sondes multiparamétriques Kapta de Endetec afin de mesurer la qualité de l'eau, en particulier son taux de chlore, à des endroits stratégiques : la sortie de l'usine, l'entrée de l'hôpital et le bout du réseau. De plus, en 2014, des sondes Imus seront disposées dans le réseau d’assainissement pour étudier les variations de hauteurs d’effluent en cas d'orage ou de pics d'utilisation. « Les données de ces différents équipements seront également rapatriées par le réseau de télécommunication M2oCity, ajoute Thierry Chanussot. Il est également possible de mutualiser cette infrastructure pour le rapatriement d'autres données. La ville envisage par exemple d’équiper les bennes de déchetteries pour connaître leur niveau de remplissage en temps réel et procéder à leur vidage en temps utile ».
Veolia Environnement, à travers sa filiale Homerider Systems, a été le promoteur et le pionnier en Europe de la télérelève longue portée sur la fréquence radio 169 MHz, en réseau fixe sans répéteurs, permettant le recueil automatique des données avant leur envoi, via GSM ou GPRS, au centre de traitement. Homerider Systems a conçu des modules radio 868 MHz pour la télérelève en réseau fixe. Cette entreprise a noué des partenariats avec les principaux fabricants de compteurs d'eau – Itron, Sappel, Kamstrup, Elster ou Sensus – pour intégrer ce module à leurs équipements et ajouter de l'intelligence embarquée permettant un pré-traitement des informations au niveau du capteur et la génération d’alertes. « Nous réalisons au niveau du module lui-même les traitements nécessaires pour détecter une fuite, un retour d’eau ou pour calculer des consommations horaires, etc. », explique Thierry Lafue de Endetec-Homerider Systems. « Le nombre de données envoyées au niveau central est réduit, ce qui augmente la rapidité et l'efficacité ».
Saur, à travers ses Centres de Pilotages Opérationnels, utilise une interface Itron.
« Cloud » pour permettre à ses clients de visualiser leur territoire sous Google Earth et les installations et opérations menées en temps réel.
Un grand enjeu : l’interopérabilité
Malgré les efforts engagés par les fabricants pour se connecter avec les principaux systèmes de télérelève existants, l’interopérabilité reste un critère de choix incontournable au moment de l’introduction d’un nouvel équipement car il n’existe pas encore d’accord sur une norme de transmission. La création en 2011, par Veolia et Orange, de M2oCity apporte une solution inédite et innovante pour assurer une télérelève transparente et à moindre coût. S’appuyant sur le métier d’Orange, la jeune société construit des infrastructures de télécommunication dédiées aux objets communicants en installant des passerelles radio sur des points hauts (châteaux d’eau, clocher, toit d’immeuble) et fonctionne par abonnements : « Pour un coût inférieur à 1 € par mois et par objet, nous offrons un service moins cher que la téléphonie mobile et nous gommons les problèmes d’interopérabilité pour nos clients, explique Pierre-Yves Senghor. Nous nous mettons d’accord avec les fabricants de modem pour que leur signal soit compatible avec notre infrastructure et, si ce n’est pas possible, nous développons une nouvelle infrastructure compatible avec ce signal. Notre intérêt d’opérateur de télécommunication est de générer du trafic et donc de promouvoir les solutions proposées par tous les fournisseurs d’équipements ». Une plateforme, M2oConnect, met en avant les principales solutions existantes.
Bien que très exigeante en instrumentation et surveillance, la sectorisation est particulièrement utile pour détecter les fuites sur ce long réseau. « Selon le type de réseau, nous proposons des approches spécifiques et adaptées : soit de la prélocalisation acoustique à poste fixe (par exemple dans un centre bourg très interconnecté), soit des campagnes temporaires avec prélocalisation et corrélation dans les zones les plus pertinentes », détaille Damien Lehembre. Les données des prélocalisateurs et de la sectorisation sont analysées par l’application Secteau au centre de pilotage opérationnel de Saur afin de définir les zones d’intervention prioritaires en fonction de l’importance des fuites.
La présence de sondes multiparamétriques est également intéressante sur un réseau d’eau potable. Placées à des endroits stratégiques et couplées avec une modélisation hydraulique de celui-ci, elles permettent de suivre la qualité de l’eau et de détecter d’éventuelles pollutions.
Réseaux intelligents : chez les abonnés aussi...
Les technologies qui permettent de réduire les fuites et les pertes dans les réseaux de distribution sont tout aussi efficaces chez les abonnés.
Hydrelis a conçu, autour de son disjoncteur d'eau, des solutions permettant de limiter ou de supprimer les fuites chez les utilisateurs.
Le disjoncteur d’eau peut couper l'eau en cas de grosses fuites, fermer l'alimentation pendant les horaires de nuit ou couper et rouvrir l'eau à distance sur demande. Dotés d’une intelligence locale, ces dispositifs peuvent aussi remonter des informations de consommation ou recevoir des instructions. En bref, ils fournissent des réponses adaptées à tous les cas.
Ces solutions prouvent régulièrement leur efficacité, avec des économies d’eau de l'ordre de 30 %. En témoigne le cas de la ville de Nevers sur les consommations de 15 sites, suivis sur plus de trois ans.
Elles sont mises en œuvre dans plusieurs villes, mais aussi chez Orange, EDF, McDonald’s, Carrefour ou la SNCF, avec des résultats toujours similaires.
Ces solutions sont déjà existantes et opérationnelles sur l'infrastructure. L'entreprise compte aujourd’hui un parc d’un million d’objets communicants en France, avec la supervision d'une infrastructure dans 1 500 villes. L'avantage d'un tel système, et son coût modéré, réside dans le fait qu’il est possible de partager le réseau de télécommunication avec d'autres clients et d'autres métiers (réseaux de chaleur urbains, gestionnaires de bâtiments, opérateurs de collecte de déchets, etc.).
Des outils logiciels pour exploiter et optimiser
Les communications radio et l’avènement d'infrastructures dédiées permettent d’envisager la télérelève à moindre coût. Si ce maillon du réseau intelligent est considéré comme essentiel, c’est qu'il permet la relève automatique, aussi fréquente que souhaitée, des index des compteurs. Il est ainsi aisé de facturer sur la base de la consommation réelle, de diminuer les coûts liés à la relève manuelle, d’alerter rapidement les usagers en cas de consommation anormale et de leur offrir des services sur un portail web, comme le suivi de leur consommation quotidienne ou les indices de qualité de l'eau.
Les données télérelevées sont également exploitées pour améliorer le rendement ou l'efficacité des interventions. Qu’ils soient proposés par les fabricants d’objets communicants (Homerider Systems, Hydreka, ...) ou par des entreprises spécialisées en TIC, les logiciels de supervision intègrent de plus en plus de fonctionnalités : calcul des rendements du réseau, reporting, calcul des pics de consommation, génération d’alertes, archivage, détection de fuite, etc.
Par exemple, le superviseur PCvue d’ARC Informatique traite les données brutes ou quotidiennes en temps réel, quel que soit leur mode de transmission (satellite, radio, ADSL). « Nous pouvons nous interfacer avec tout type d’équipements en France et à l'étranger, comme ceux de Perax, Wit ou Sofrel », souligne Fabien Rigaud, responsable marketing et communication chez ARC Informatique. « C’est intéressant, par exemple, lorsque des syndicats intercommunaux sont créés et combinent des équipements pilotés par des systèmes différents. »
Aréal, concepteur des solutions de supervision Topkapi, a ajouté au traitement différé des données leur traitement en temps réel et les calculs sur des données horodatées provenant de différents équipements. « Nous proposons, dans le même outil, la possibilité de traiter les données horodatées au fur et à mesure de leur arrivée avec génération d’alarme en cas d’anomalie », explique Arnaud Judes, responsable communication chez Aréal. « Le processus est transparent pour le client et lui permet d’être plus réactif. »
L'un des atouts de Panorama E2 de Codra est de pouvoir créer facilement des applications de supervision orientées objet, ce qui permet de gagner d’autant plus de temps dans la configuration de l’application lorsque l'installation est grande. « Un autre point fort de Panorama E2 est d’être capable de notifier automatiquement les alertes par e-mail ou SMS en fonction du planning d'astreinte », ajoute Cyril Rolland, responsable marketing de l’entreprise.
L'application d’Homerider Systems réunit pour sa part en un seul outil toute une palette de fonctionnalités.
La nanotechnologie intégrée aux réseaux
La Communauté de Communes du Pays de Gex, qui regroupe 27 communes, assure entre autres compétences celle de l'eau potable et exploite, à ce titre, près de 820 km de réseaux. « Le rôle de la collectivité est de prévoir et d'organiser au meilleur coût, l'entretien, la réparation et le renouvellement des équipements nécessaires au maintien de la qualité du service à l'usager », explique Jean-Charles Bal, responsable du Bureau d'études « Eau et Assainissement » de la Communauté de Communes du Pays de Gex. Elle s'est donc dotée dès sa création d'un outil informatique lui permettant d'une part de rassembler la connaissance de son patrimoine et d’autre part de le gérer de façon appropriée. Dans cette optique de gestion patrimoniale, la Communauté de Communes du Pays de Gex s'est orientée sur le choix de « marquer » tout organe de réseau neuf (tuyau, vanne, coude, branchement) ou existant rencontré dans le cadre de ses chantiers d'eau potable à l'aide de boîtiers ELIOT.
ELIOT est un système communicant de détection d’ouvrages enterrés ou immergés, basé sur la technologie RFID, composé d'une puce RFID fixée sur l'objet à signaler et d'un lecteur muni d’une antenne. Il permet la localisation selon trois axes jusqu’à 1,50 m de profondeur, même dans des conditions difficiles, avec une précision de l'ordre du centimètre. Les tubes communicants sont dotés d'une technologie RFID. Le tag RFID permet la détection et la localisation précise du tube enterré. Il constitue également une véritable carte d’identité et un carnet de maintenance de la canalisation : type de fluide véhiculé, type de matériel, numéro de série, date de fabrication, chronologie des actes de maintenance… Les éléments clés sont enregistrés dans les tubes et sont communiqués aux opérateurs en quelques secondes, via des ondes radios et un détecteur adapté.
« Cette technologie, étroitement liée au système d'information géographique (SIG) de la collectivité, apparaît tout à fait complémentaire puisque la donnée peut désormais être renseignée et/ou consultée in situ », souligne Jean-Charles Bal. La position précise de la conduite, sa nature et toutes sortes d'informations seront désormais accessibles depuis la surface, à tout opérateur équipé d'un récepteur. Indispensables au maintien de la qualité, à la performance du service et à la maîtrise du prix de l'eau, la connaissance et l'identification du patrimoine enterré sont des éléments fondamentaux pour le maître d’ouvrage, qu’il s’agisse de sa responsabilité en matière de localisation des réseaux souterrains ou de l'aide à la gestion de son patrimoine.
Services dont la facturation, le calcul du rendement du réseau, la détection de fuite et la surveillance quotidienne de la qualité de l'eau.
Des outils logiciels plus ciblés permettent de prioriser les interventions sur les fuites ou d’optimiser la consommation énergétique d'un réseau. Wit, par exemple, propose un outil pour suivre l’évolution de la performance énergétique afin notamment d'optimiser la consommation en profitant des tarifs heures creuses mais aussi de piloter des pompes à débit variable. Il est aussi possible de faire de l’effacement électrique, c’est-à-dire d’arrêter le pompage ou la station de production pour écrêter les pointes de consommation électrique en accord avec EDF. « L'effacement électrique demande une très bonne connaissance de son réseau », insiste Damien Lehembre de Saur, acteur historique de la gestion déléguée de services à l'environnement reconnu pour son ancrage territorial. Il faut modéliser l’hydraulique du réseau en s’appuyant notamment sur l'historique des mesures de production et de consommation. « Nous avons lancé cette démarche avec des partenaires français et étrangers », précise-t-il. Schneider Electric ambitionne de donner une valeur supplémentaire en optimisant la gestion énergétique de l'installation à tous les niveaux, fonctionnement des pompes et achat de l’énergie sur les marchés. « Nous sommes persuadés que la facture énergétique va exploser dans les prochaines années », commente Fabrice Renault.
Remonter la donnée en temps réel
Outre l'acquisition des données des compteurs et des capteurs grâce à de nombreux protocoles filaires ou radio ouverts et propriétaires (ModBus, MBus, WBus, Prios, etc.), les concentrateurs Mios disposent d'une base de données SQL Server embarquée pour le stockage local et l'horodatage des valeurs à la source et permettent une communication avec les superviseurs en Webservice à travers de nombreux types de communication (GMS, GPRS, 3G et bientôt 4G).
Outre l'utilisation de standards correspondant aux « best practices » du web et de l’IT, l'avantage de l'utilisation des webservices réside dans la possibilité de remonter la donnée en temps réel, que ce soit la donnée de comptage, mais également les alarmes et les défauts techniques. Avec une MiosBox ou une MiosCube, remonter les informations de capteurs ou de compteurs se résume à s’abonner à un service web « terrain », garantissant une souplesse intéressante pour les opérateurs de réseaux. Au-delà de la remontée des informations, les concentrateurs Mios permettent également le contrôle-commande à distance grâce à leurs modules d'entrées/sorties déportées (sorties TOR, sorties analogiques) et leurs fonctions d’automatismes multilingages (Ladder, scripts, etc.).
Mios dispose également des outils software avec l'ensemble de ses concentrateurs, notamment MiosVision (un superviseur permettant la création de dashboards techniques et énergétiques directement embarqué sur la MiosBox) et son nouveau service MiosCloud, une solution de supervision multi-MiosBox ou multi-MiosCube qui permet une gestion centralisée des équipements terrains et la possibilité de créer des interfaces dans les différents métiers de l'eau et de l’énergie. Cette souplesse dans les architectures des systèmes d'information reposant sur des standards ouverts du monde de l’IT permet de faciliter le déploiement des réseaux intelligents pour les exploitants.
page peut être estimé entre 30 et 40 millions d’€. Ne serait-ce que 10 % de réduction serait une belle économie ! » (voir encadré).
Jean-François Courteheuse, directeur général d’IXEL, insiste sur le fait qu'il existe des équipements simples et bas prix qui permettent de générer les contacts heures creuses/heures pleines des compteurs tarif jaune d’ERDF qui en sont dépourvus d’origine, et qu'il existe des passerelles permettant le raccordement de n’importe quel compteur posé par ERDF à n’importe quel équipement de GTB en Modbus.
L’intelligence dépend de tous les maillons de la chaîne
À terme, le réseau intelligent inclura l’ensemble du cycle de l’eau, de la surveillance de la ressource naturelle à la distribution puis au drainage des eaux pluviales et au traitement des eaux usées. Mais attention, « le réseau n’est pas intelligent en soi », prévient Michel Jacquet, directeur commercial de Sensus France. « Il s’agit d’une chaîne dont l’efficacité est égale à celle de son maillon le plus faible. Par exemple, si l’on veut augmenter le rendement de son installation, il est nécessaire d’avoir des compteurs extrêmement précis car ce sont les derniers pourcents qui sont les plus difficiles à gagner, une fois que les grosses fuites sont détectées ».
Les petites fuites représentent au final des quantités importantes d’eau perdue : une fuite de chasse d’eau de 5 litres par heure totalise 43,8 m³ par an, un filet d’eau au robinet 87 m³ par an. Or, les fuites inférieures à 3 litres par heure ne sont rapidement plus détectables avec les compteurs mécaniques car leur précision se dégrade rapidement. « Il faut également intégrer l’aspect social, précise-t-il, car le métier des agents de terrain évolue vers des tâches plus techniques. Il faut, avant tout, se poser des questions sur les objectifs à atteindre, pour faire quoi, et comment on veut travailler ».