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Les réacteurs à CAP « Multiflo/Actiflo® » : la solution pour l'élimination des perturbateurs endocriniens et substances dangereuses

31 juillet 2012 Paru dans le N°353 à la page 68 ( mots)
Rédigé par : Kader GAID, Philippe SAUVIGNET, Frank BOURDON et 2 autres personnes

De nombreux micropolluants organiques présents dans les eaux usées sont mal éliminés dans les stations de traitement des eaux usées (STEU). Afin d'en réduire les rejets dans les milieux récepteurs, différents procédés appliqués en traitement tertiaire sont proposés. Cet article présente les résultats obtenus sur deux stations de traitement biologique sur lesquelles trois procédés ont été testés : procédé d'oxydation chimique à l'ozone, procédé d'adsorption sur un réacteur CAP (Actiflo®carb) et un procédé combinant de façon judicieuse l'ozone et le réacteur CAP. Les expérimentations permettent de souligner l'efficacité du procédé Actiflo®Carb tant en terme de qualité d'eau produite (turbidité, COD) qu'en terme d'efficacité vis-à-vis des composés responsables des perturbations endocriniennes. Le procédé d'oxydation chimique à l'ozone est très efficace mais présente l'inconvénient majeur de former des sous-produits. La combinaison O3/réacteur CAP semble être la plus prometteuse car elle allie l'efficacité de l'ozone aux avantages de l'adsorption du charbon actif sans pour autant produire de sous-produits.

Les expérimentations permettent de souligner l’efficacité du procédé Actiflo® Carb tant en termes de qualité d’eau produite (turbidité, COD) qu’en terme d’efficacité vis-à-vis des composés responsables des perturbations endocriniennes. Le procédé d’oxydation chimique à l’ozone est très efficace mais présente l’inconvénient majeur de former des sous-produits. La combinaison O₃/réacteur CAP semble être la plus prometteuse car elle allie l’efficacité de l’ozone aux avantages de l’adsorption du charbon actif sans pour autant produire de sous-produits.

Un grand nombre de substances organiques d’origine anthropique, comme par exemple, des pesticides, des produits pharmaceutiques, des produits de contraste iodés, des hormones naturelles et synthétiques, ainsi que des cosmétiques sont omniprésents dans les eaux usées urbaines. Ces eaux usées sont dirigées vers les stations de traitement dont le traitement biologique élimine celles qui sont biodégradables ou par des mécanismes de sorption mais a peu d’effet sur de nombreuses autres substances qui sont alors déversées dans le milieu récepteur (eaux de surface).

Mots-clés : réacteur CAP, Actiflo®Carb, pesticides, résidus pharmaceutiques, benzotriazoles, charbon actif en poudre.

Tableau 1 : Substances témoins actuellement préconisées en Suisse

GroupeSubstance
AntiepileptiqueCarbamazépine
AnalgésiqueDiclofénac
AntibiotiqueSulfaméthoxazole
Biocide / Inhibiteur de corrosionBenzotriazole
Pesticide / HerbicideMécoprop

Le projet de modification de l’Ordonnance Suisse sur la protection des eaux admet qu’une élimination de 80 % de ces substances avant rejet permet de réduire fortement l’effet négatif vis-à-vis de la faune et de la flore ainsi que des risques éventuels sur la santé humaine. C’est la raison pour laquelle de nombreuses études sont actuellement en cours, afin de mettre en œuvre des procédés de traitement tertiaire destinés à en réduire les rejets dans le milieu récepteur.

Il a été également admis que l’étude systématique de toutes les substances présentes dans les eaux usées serait longue et onéreuse, et qu’il est plus judicieux de sélectionner des substances témoins représentatives de familles de substances qui contribuent aux effets des perturbations endocriniennes. Ainsi, par exemple, le projet de modification de l’Ordonnance Suisse sur la protection des eaux (Detec, 2009) liste cinq substances témoins définies sur la base de différents critères, comme leur représentativité d’une famille de molécules et le fait qu’elles puissent être présentes à des concentrations élevées. Les cinq substances témoins choisies et les groupes de substances auxquels elles appartiennent sont :

Produits pharmaceutiques

Ils représentent la famille de substances la plus concentrée dans les eaux et dont l’effet négatif est effectivement prouvé. Trois molécules ont été choisies :

La Carbamazépine : très utilisée comme antiépileptique et antidépresseur. La prise de carbamazépine aboutit invariablement à un rejet de 2 à 3 % dans les eaux via les urines. Le reste est excrété par le corps sous forme de métabolites (Ferrari et al., 2003 ; Schénauer et al., 2002). Elle n’est éliminée dans les stations de traitement biologique que pour celles qui fonctionnent avec des âges de boues élevés (supérieurs à 20 j). Dans les eaux de surface, une concentration supérieure à 1 µg/L est souvent analysée (Gudérian, 2000). Pour conserver un bon état écologique, l’Ordonnance Suisse recommande une concentration maximum admissible de 0,5 µg/L dans les eaux de surface.

Le Diclofénac : utilisé comme antirhumatismal et analgésique. Sa consommation montre que 60 % de la dose absorbée se retrouve dans l’urine. Dans les eaux de surface dont la concentration excède 1 µg/L, on a constaté des modifications des cellules du foie, des reins et des branchies chez la truite arc-en-ciel (Jones et al., 2001 ; Scharf et al., 2002).

Le Sulfaméthoxazole : utilisé comme antibiotique pour les infections des voies urinaires et les inflammations pulmonaires. 85 % de la dose de sulfaméthoxazole absorbée se retrouve dans l’urine. Une concentration de 0,22 µg/L a été analysée dans les eaux souterraines (Gudérian, 2000).

Biocides

Utilisés dans divers secteurs de l’activité humaine et industrielle.

Le Benzotriazole est une des molécules les plus analysées dans les eaux usées. Les concentrations observées en eau de surface varient souvent entre 20 et 100 ng/L (Hart et al., 2004 ; Fries et al., 2009 ; Weiss et al., 2006).

Pesticides

Produits phytosanitaires connus pour leur efficacité vis-à-vis de nombreux micro-organismes ou animaux. Très utilisés en agriculture.

Le Mécoprop est la substance témoin préconisée pour les pesticides dans le projet de modification de l’Ordonnance Suisse sur la protection des eaux. Le Mécoprop est utilisé comme produit phytosanitaire et comme protection pour les façades et les toits plats (Götz et al., 2010).

Dans le cadre de notre étude, d’autres molécules sont également analysées en fonction de leur présence dans l’effluent de sortie de la STEU. Il s’agit de : Aténolol, Acide énolique, Bézafibrate, Clarithromycine, Gabapentine, Hydrochlorothiazide, Lévétiracétam, Acide Méfénamique, Méthyl-Benzotriazole, Métoprolol, N4-acétyl-Sulfaméthoxazole, Phénazone, Primidone, Triméthoprime, Valsartan, Venlafaxine.

Les traitements d’élimination de ces substances

Divers procédés de traitement sont possibles et sont classés selon le mécanisme d’élimination :

Les procédés d’oxydation chimique comprenant l’ozonation simple ou combinée à une addition de peroxyde d’hydrogène (H₂O₂), l’utilisation des rayonnements UV combinés à de l’ozone, à une addition de H₂O₂ ou d’oxyde de titane (TiO₂).

Les procédés d’adsorption sur charbon actif par injection de charbon actif au sein d’un réacteur CAP (Charbon Actif en Poudre), celui-ci pouvant être combiné à une injection d’ozone.

Les procédés membranaires comme la nanofiltration ou l’osmose inverse fonctionnant comme une barrière physique vis-à-vis de ces molécules.

Les résultats présentés dans cet article concernent le procédé d’adsorption sur charbon actif en poudre, le procédé d’oxydation à l’ozone et la combinaison de ces deux procédés.

Tableau 2 : Substances témoins pour l’analyse de micropolluants lors d’essais de Cham (Suisse)

GroupeSubstance
AntiepileptiqueCarbamazépine* ; Gabapentine ; Lévétiracétam ; N-acétylsulfaméthoxazole* ; Primidone
AntibiotiquesClarithromycine ; Sulfaméthoxazole ; Triméthoprime
AnalgésiquesDiclofénac* ; Acide méfénamique ; Phénazone
AntidépresseursVenlafaxine
BêtabloquantsAténolol ; Acide énolique ; Métoprolol
Médicaments pour la tensionHydrochlorothiazide ; Valsartan
HypolipémiantsBézafibrate
Biocide / Inhibiteur de corrosionBenzotriazole* ; Méthylbenzotriazole

* Substances témoins actuellement préconisées pour la GSckV (Suisse).

…deux procédés. Le tableau 2 résume les différentes substances testées.

[Photo : Figure 1 : Configuration des trois procédés testés.]

Présentation des tests et essais pilotes

Les tests se sont déroulés sur deux sites : sur la station de traitement biologique de Cham (Lucerne – Suisse) constituée d’un traitement par boues activées, d’une décantation secondaire et d’une filtration tertiaire, et sur la station de traitement biologique de la Communauté de communes d’Avranches constituée d’un bioréacteur à membrane.

La figure 1 illustre la configuration des tests effectués : ozonation seule, réacteur CAP (Actiflo® carb) ou combinaison ozone – réacteur CAP (Actiflo® carb). L’alimentation est issue de l’effluent de sortie des stations de traitement biologique (aval décanteur secondaire dans le cas de Cham et sortie BRM dans le cas de l’usine de la Communauté de Communes d’Avranches).

La qualité de l’effluent de sortie de la STEU est résumée sur le tableau 3, sur lequel on note une très bonne qualité d’eau traitée avec notamment une concentration moyenne en MES de 3,9 mg/L et une DCO de 18,3 mg/L sur la station de Cham. Le bioréacteur à membrane de la STEU de la Communauté de communes d’Avranches donne des performances excellentes avec une DCO moyenne de 13 mg/L. Il est à noter que les deux sites présentent un résiduel de carbone organique total très proche, autour de 7–7,5 mg/L en moyenne.

Tableau 3 : Qualité des eaux en sortie des deux sites

Site de Cham-Lucerne Site de Communauté de Communes d’Avranches
Moyenne Minimum Maximum Moyenne Minimum Maximum
MES (mg/L) 3,9 1,4 8,6 <1 0 1
DCO (mg/L) 18,3 10,8 37,5 13 <10 47
P total (mg/L) 0,48 0,16 1,01 0,3 0,1 0,8
pH 7,2 6,8 7,8 7,55 6,9 7,8
COT (mg/L) 7,4 5,1 12,8 7,33 5,55 11,6
Turbidité (NTU) 2,26 1,21 5,81 0,28 0,11 0,8

La composition chimique en molécules responsables des perturbations endocriniennes est présentée sur le tableau 4.

On note ainsi que, sur l’effluent de Cham, les concentrations en Benzotriazole (4 056 µg/L), Méthylbenzotriazole (2 539 µg/L), Diclofénac (1 174 µg/L), Hydrochlorothiazide (1 317 µg/L), Gabapentine (1 008 µg/L) et Sulfaméthoxazole (0,426 µg/L) sont particulièrement élevées. Sur l’usine de la Communauté de Communes d’Avranches, les concentrations sont similaires voire nettement plus élevées ; en particulier le Benzotriazole et l’Hydrochlorothiazide présentent des concentrations moyennes plus du double de celles de Cham-Lucerne.

Dans le cas d’Avranches, la présence d’un hôpital d’assez grande…

Tableau 4 : Concentrations en micropolluants des deux sites (Cham et Communauté de Communes d’Avranches)

Micropolluants Site Cham-Lucerne (Suisse) Site Communauté de Communes d’Avranches
Moyenne Minimum Maximum Moyenne Minimum Maximum
Aténolol (ng/L) 644 400 940 146 40 370
Acide énrolique (ng/L) 502 290 790 LQ LQ LQ
Bézafibrate (ng/L) 41 16 70 953 146 1 146
Carbamazépine (ng/L) 771 130 4 700 113 65 240
Clarithromycine (ng/L) 281 30 490 265 40 510
Diclofénac (ng/L) 1 174 640 1 900 984 590 1 700
Gabapentine (ng/L) 1 008 740 1 320 LQ LQ LQ
Hydrochlorothiazide (ng/L) 1 317 730 2 000 3 090 1 200 6 600
Lévétiracétam (ng/L) 54 40 80 LQ LQ LQ
Acide méfénamique (ng/L) 71 11 150 LQ LQ LQ
Méthylbenzotriazole (ng/L) 2 539 740 4 400 LQ LQ LQ
Métoprolol (ng/L) 343 210 460 42 20 80
N-acétyl-sulfaméthoxazole (ng/L) <20 57 43 75
Phénazone (ng/L) 82 76 88 32 25 57
Primidone (ng/L) 112 51 130 845 730 910
Sulfaméthoxazole (ng/L) 426 0 710 230 120 470
Triméthoprime (ng/L) 81 26 120 312 14 443
Valsartan (ng/L) 58 12 170 179 50 330
Venlafaxine (ng/L) 314 140 720 LQ LQ LQ
[Photo : Schéma du procédé Actiflo® Carb.]

Importance est probablement la cause de ces concentrations élevées. La taille des deux STEU est assez différente ; 300 000 équivalent habitants dans le cas de Cham-Lucerne et 40 000 dans le cas de la Communauté de communes d’Avranches. Ceci explique peut-être pourquoi le ratio de dilution et par conséquent, les concentrations soient plus élevées dans le cas d’Avranches. Dans les deux cas, le nombre d’échantillons est assez représentatif car ils s’étendent sur une période allant de 6 mois à 1 an et représentent plus d'une vingtaine de prélèvements.

Résultats

Les procédés d’adsorption sur CAP Multiflo et Actiflo® Carb

Les réacteurs CAP « Multiflo/Actiflo® Carb » sont connus pour leur efficacité vis-à-vis de l’élimination des matières organiques (Gaid et al., 2007). La mise en œuvre de ces procédés en vue de l’élimination des substances perturbateurs endocriniens a été testée sur les deux sites décrits précédemment afin d’observer l’efficacité du charbon actif utilisé dans un réacteur CAP et d'optimiser le coût opératoire en réduisant au mieux les doses de charbon actif injectées. Le Multiflo® Carb est caractérisé par la présence d'un lit de boue fluidisé au niveau du floculateur. Ce lit permet d’accélérer la floculation lors du passage de l'eau brute et permet une production de flocs plus denses et plus facilement décantables.

Le procédé Multiflo® Carb se présente avec :

  • Une première cuve de contact à CAP permettant d’accroître l’effet d’adsorption immédiat du CAP. Elle reçoit aussi la solution recirculée, prélevée à mi-hauteur dans le lit de boues des décanteurs ;
  • Une deuxième cuve relative à la coagulation permettant de déstabiliser les particules colloïdales présentes dans l'eau brute ;
  • Une troisième cuve liée à la floculation comportant un « draft-tube » associé à un mélange intensif qui assure la formation d'un floc homogène et la bonne répartition du polymère. Cette cuve reçoit un ajout de polymère permettant d’agglomérer et de faire grossir les flocs créés dans la seconde cuve. Ces flocs sont chargés en CAP.

Le décanteur Multiflo® CAP répond à la technique de séparation liquide-solide à contre-courant par le biais de lamelles disposées en surface du décanteur. Les boues déposées au fond du décanteur Multiflo® sont collectées et dirigées vers la zone centrale d’épaississement grâce à un racleur disposé à cet effet.

Afin d’assurer une concentration constante des boues extraites (20 – 30 g/L) et d’accroître les performances des décanteurs, un système de recirculation des boues est mis en œuvre. La vitesse au miroir sur le décanteur est de l’ordre de 16,0 m/h dans les conditions nominales sans entraîner une fuite en CAP.

L’Actiflo® Carb est connu pour sa compacité parce qu'il fait appel à la technique des flocs lestés qui permet d’atteindre des vitesses de décantation jusqu’à 10 fois supérieures à celles des décanteurs lamellaires traditionnels.

À leur arrivée sur l'unité Actiflo® Carb, l'eau à traiter traverse dans l’ordre :

  • une première cuve dite cuve d'injection de CAP, dans laquelle s'effectue le contact entre le CAP et l'eau à traiter et permet ainsi l’adsorption des micropolluants et matières organiques. Cette première cuve sert également de cuve de coagulation, dans laquelle s'effectue le contact avec le coagulant ainsi que l'injection d’acide sulfurique afin de caler le pH au pH de floculation recherché ;
  • une deuxième cuve de mélange rapide, dite cuve d’injection, dans laquelle on injecte le polymère et le microsable ;
  • une troisième cuve, à vitesse d'agitation plus modérée, dite cuve de maturation.

Chaque cuve est équipée d’un agitateur à axe vertical, à vitesse réglable. Le microsable est injecté dans la cuve d’injection et est destiné à initier la formation du complexe CAP-boues-microsable en vue d'une rapide décantation.

Le CAP, les boues hydroxydes et le microsable déposés au fond du décanteur sont collectés puis pompés vers des hydrocyclones. Les hydrocyclones permettent alors une séparation du microsable qui est réinjecté dans la cuve d’injection, alors que le CAP est récupéré au niveau de la surverse puis réinjecté dans la cuve de contact.

L'eau clarifiée est recueillie en partie haute de la zone de décantation par des goulottes de reprise. La forte densité du complexe sable-CAP-boues conduit à des vitesses de Hazen élevées et permet ainsi des vitesses au miroir se situant aujourd'hui entre 45 et 80 m/h. Fort de plus de 750 références de par le monde, l’Actiflo® est désormais un outil majeur de clarification à grande vitesse.

Réactifs et outils mis en œuvre pour les essais

Trois types de CAP ont été testés et utilisés. Le tableau 5 présente les différents charbons actifs en poudre qui ont été utilisés lors des tests selon un dosage variable entre 10 et 30 mg/L.

Tableau 5 : Divers CAP utilisés sur les deux sites

Produit Société Origine Granulométrie [µm]
SAE Super Norit Houille 15 (taille moyenne)
Picahydro AFP23 PICA Bois 15 (taille moyenne)
PHC AZ 1050 CSC GmbH Bois 40 (taille moyenne)

Lors des essais, les coagulants utilisés ont été le chlorure ferrique (FeCl₃, 41 %), polychlorure d’aluminium (PAX18) ainsi que le coagulant naturel Hydrex® 3818. Le dosage a varié entre 22-43 mg/L pour FeCl₃, 16-50 mg/L pour le PAX18 et 6,5-9,4 mg/L pour l’Hydrex® 3818. Dans les trois cas, les doses indiquées sont exprimées en produit commercial.

[Photo : Vues de l'implantation du pilote Actiflo® Carb sur la STEU de Cham/Lucerne.]
[Photo : Performances moyennes en fonction des divers types de CAP.]

Les essais ont été effectués à l'aide d’une unité mobile de 50 à 100 m³/h de capacité dont les équipements sont identiques à ceux d’installations industrielles de grande taille. Les installations ont été exploitées 7 jours sur 7 et 24 h sur 24 pendant 6 mois sur le site de Cham/Lucerne et 5 jours sur 7 pendant 1 an sur le site de la Communauté de communes d’Avranches. Les analyses ont été effectuées sur des échantillons ponctuels pris de manière aléatoire.

Résultats de traitement avec le procédé Actiflo® Carb

Les résultats obtenus sur le site de Cham-Lucerne montrent l’efficacité globale des charbons actifs Norit, Pica et CSC associés à un coagulant FeCl₃. Les dosages respectifs en CAP sont de 10 mg/L, de 40 mg/L pour le coagulant et de 0,5 mg/L pour le floculant.

Les performances d’élimination dépassent les 75 % pour l’Atenolol, Benzotriazole, Hydrochlorothiazide, atteignent les 80-90 % pour Benzafibrate, Carbamazépine, Clarithromycine, Triméthoprime, Venlafaxine, Métoprolol, Methyl-Benzotriazole, Acide Méfénamique, Primidone. Le rendement d’élimination est cependant inférieur à 20 % pour la Gabapentine, reste variable autour de 40-50 % pour l’Acide énolique, Sulfaméthoxazole, Valsartan.

L’utilisation de divers coagulants (chlorure ferrique, polychlorure d’aluminium et coagulant naturel Hydrex® 3818) a été comparée par rapport à un même charbon (Norit SAE super). La figure 5 montre bien le peu d’effet du coagulant par rapport aux performances d’élimination des micropolluants car les résultats sont similaires pour les trois types de coagulants.

[Photo : Performances moyennes en fonction des divers coagulants testés.]

Résultats du traitement par oxydation à l’ozone

Les tests d’ozonation ont été effectués dans des colonnes de 3 m de haut et 0,3 m de diamètre, induisant un temps de contact de 5 à 15 minutes en fonction du débit (2,5...

[Photo : Vue du pilote d’ozonation sur le site de Cham/Lucerne.]

– 7,5 m³/h). Ces colonnes peuvent fonctionner en série ou en parallèle. Les doses d’O₃ appliquées ont été de l’ordre de 8 mg/L pour un temps de contact moyen de 10 min. Les résultats obtenus illustrent bien l’efficacité de l’oxydation chimique à l’ozone dans les conditions opératoires décrites ci-dessus. Il apparaît ainsi que, mis à part la Gabapentine (66,6 %) et le Benzotriazole (77,6 %), toutes les autres molécules sont éliminées à plus de 80 %, avec des rendements atteignant les 99 % pour la Carbamazépine, le Diclofénac, l’Hydrochlorothiazide et le Sulfaméthoxazole (98 %).

Tableau 6 : Performances de l’ozonation vis-à-vis des micropolluants lors des essais de Cham/Lucerne

Ozonisation (8 mg O₃/L)

Substance C₀ (valeur moyenne) [ng/L] % d’élimination moyenne
Aténolol 500 95,0
Acide énolique 380 90,0
Benzotriazole 3 633 77,6
Carbamazépine 390 99,0
Clarithromycine 153 97,0
Diclofénac 813 99,0
Gabapentine 1 017 66,6
Hydrochlorothiazide 1 213 99,0
Lévétiracétam 81 94,0
Méthyl-benzotriazole 3 267 96,0
Métoprolol 313 97,0
Primidone 103 90,2
Sulfaméthoxazole 297 98,0
Triméthoprime 29 82,5
Valsartan 81 93,7
Venlafaxine 267 96,0

Tableau 7 : Structure des sulfonamides étudiés

Sulfonamide
– Sulfamérazine (C₁₃H₁₂N₄O₂S)
– Sulfaméthoxazole (C₁₀H₁₁N₃O₃S)
– Sulfachloropyrazidine (C₁₄H₁₀ClN₄O₃S)

La question principale relative à l’utilisation des procédés d’oxydation chimique peut se poser en termes de sous-produits. Il est en effet connu que l’oxydation à l’ozone peut engendrer des sous-produits en liaison avec le type de substance organique présente, les conditions opératoires et la matrice de l’eau.

C’est ce qui a été établi vis-à-vis de la formation de sous-produits et dérivés des pesticides, des bromates par oxydation des bromures, des acides acétiques halogénés, du formaldéhyde après oxydation de matières organiques (substances humiques et autres), etc.

Les tests d’ozonation effectués par Veolia Environnement Recherche et Innovation en laboratoire sur trois sulfonamides (tableau 7) ont montré la fragmentation obtenue à travers la variation des sous-produits analysés (figure 7).

Les résultats d’analyses obtenus par diverses techniques de chromatographie liquide et gazeuse couplées à des spectromètres de masse (chromatographie bidimensionnelle en phase gazeuse et chromatographie liquide couplées à des spectromètres de masse à haute résolution) illustrent les différents sous-produits obtenus par ozonation de pesticides et produits pharmaceutiques (figure 8) (Gervais et al., 2011 ; Bouchonet et al., 2011 ; Souissi et al., 2011 ; Ingrand et al., 2003).

La figure 8 illustre bien le potentiel de formation de sous-produits lors de l’ozonation de molécules organiques. L’application de ce test sur la matrice de l’effluent de sortie de la STEU de Cham a confirmé la présence de sous-produits. Ceci permet de penser que ce schéma réactionnel peut être valable pour un grand nombre de molécules présentes dans les effluents de sor-

[Photo : Fragmentation des trois sulfonamides.]
[Photo : Figure 8 : Empreinte LC-HR (MS) de l’ozonation de l’Estrone Sulfate.]

10 min et des dosages en CAP de 5–10 mg/L. Les résultats obtenus sur le site de la communauté des communes d’Avranches ont démontré un gain de l’ordre de 10 à 15 % de la performance moyenne d’élimination des divers micropolluants, avec des moyennes d’éliminations de l’ordre de 85 à 92 % au lieu des 70 % constatés sur le site de Cham/Lucerne. De plus, ces performances ont été obtenues avec des doses de CAP en renouvellement réduites par rapport aux essais effectués avec le CAP seul.

Il est également possible qu’avec les procédés d’oxydation chimique, le mécanisme réactionnel obtenu sur une molécule particulière conduise aux produits finaux CO₂/H₂O mais il ne saurait être généralisé. L’exemple de l’ozonation des sulfonamides est assez pertinent.

Tableau 8 : Performances de divers CAP en couplage avec ozonation.

Substances Unité O₃/CAP Pica AFP 23 O₃/CAP Norit SAE Super
Entrée Sortie % élim. Entrée Sortie % élim.
Diclofénac µg/L 0,839 0,149 82 1,093 0,034 97
Carbamazépine µg/L 0,982 0,024 98 1,288 0,014 99
Hydrochlorothiazide µg/L 2,333 0,077 97 3,658 0,146 95
Metoprolol µg/L 0,033 0,010 69 0,050 0,010 76
Sulfaméthoxazole µg/L 0,195 0,045 77 0,256 0,030 88
Aténolol µg/L 0,150 0,013 80 0,142 0,018 82
Benzotriazole µg/L 5,211 0,108 98 11,075 0,301 97

Combinaison O₃ / réacteur CAP (Actiflo-carb)

L’efficacité sélective de l’Actiflo-carb et les sous-produits formés par ozonation nous ont conduits à envisager une combinaison des deux procédés. L’ozone est donc introduit directement au niveau de la cuve de contact du CAP permettant plusieurs avantages :

  • Utilisation du même temps de contact que le CAP ;
  • Faibles dosages en ozone ;
  • Adsorption sur le CAP des sous-produits de l’ozonation ;
  • Réduction des dosages en CAP en fonction de l’efficacité de l’O₃.
[Photo : Figure 10 : Synthèse des performances par molécules couplage O₃ / réacteur CAP.]

Les conditions opératoires décrites. Ce rendement peut être nettement amélioré en intervenant sur les dosages des deux réactifs tout en maîtrisant le dosage d’ozone afin d’en éviter les sous-produits.

[Encart : Références bibliographiques + Bouchonnet S., Kinani S., Souissi Y., Bourcier S., Sablier M., Roche P., Boireau V., Ingrand V., 2014, Investigation of the dissociation pathways of metolachlor, acetochlor and alachlor under electron ionization - application to the identification of ozonation products, Rapid Communications in Mass Spectrometry, Vol.25, Issue 4, p.93-103. + Detec, Département Fédéral de l’Environnement, des Transports, de l'Énergie et de la Communication, 2009, Eintrag von organischen Spurenstoffen in die Gewässer, GSchV, Suisse. + Ferrari B., Paxéus N., Lo Giudice R., Pollio A., Garric J., 2003, Ecotoxicological impact of pharmaceuticals found in treated wastewaters: study of carbamazepine, clofibric acid, and diclofenac, Ecotoxicology and Environmental Safety, 55 (3), p.359-370. + Fries E., Kiss A., 2009, Korrosionsinhibitoren in der aquatischen Umwelt: Benzotriazole in Main, Hengstbach und Hegbach, Mitt Umweltchem Ökotox, p.6-8. + Gaid K., Sauvignet Ph., 2007, Les réacteurs CAP « Multiflo-Actiflo », L’Eau, L’Industrie, Les Nuisances, n° 304, p.49-56. + Gervais G., Bichon E., Antignac J. Ph., Monteau F., Leroy G., Barritaud L., Chachignon M., Ingrand V., Roche P., Le Bizec B., 2011, Differential global profiling as a new analytical strategy for revealing micropollutant treatment by-products: application to ethinylestradiol and chlorination water treatment, Chemosphere, Vol.83, n°11, p.1553-1559. + Götz C.W., Thomann M., 2010, Organische Spurenstoffe aus dem Siedlungsgebeit. Mikroverunreinigungen – wie weiter, Umwelt Perspektiven, (5), p.78-85. + Guderian R., 2000, Handbuch der Umweltveränderungen und Ökotoxikologie: Terrestrische Ökosysteme. Band 2A. Springer Berlin. + Hart D., Davis L., Erickson L., Callender T., 2004, Sorption and partitioning parameters of benzotriazole compounds, Microchemical Journal, Vol.77 (1), p.9-17. + Ingrand V., Henry G., Beausse J., de Roubin M.R., 2003, Analysis of steroid hormones in effluents of wastewater treatment plants by liquid chromatography – tandem mass spectrometry, Journal of Chromatography A, Vol.1020, p.99-104. + Jones O.A., Voulvoulis N., Lester J.N., 2004, Human pharmaceuticals in the aquatic environment: a review, Environ. Technol., Vol.22, p.1383-1394. + Scharf S., Gans O., Sattelberger R., Hohenblum P., 2004, Monitoring of selected estrogenic hormones and industrial chemicals in groundwaters and surface waters in Austria, Science of the Total Environment, Vol.333, p.185-193. + Schenauer S., Grommelt H.J., 2002, Hormonaktive Substanzen im Wasser – eine Übersicht, 2/02 S, p.156-165. + Souissi Y., Bourcier S., Sablier M., Boireau V., Ingrand V., Pascal R., Bouchonnet S., 2014, Characterization of by-products issued from ozonation of Acetochlor, 20th IOA World Congress - 6th IUVA World Congress, Paris. + Weiss S., Jakobs J., Reemtsma T., 2006, Discharge of three benzotriazole corrosion inhibitors with municipal wastewater and improvements by membrane bioreactor treatment and ozonation, Environ. Sci. Technol., Vol.40, p.7193-7199.]

Conclusions

Les réacteurs CAP (Multiflo®-carb et Actiflo®carb) répondent de façon efficace pour un grand nombre de micropolluants présents dans les effluents de sortie des stations de traitement biologique. Ils ne génèrent pas de produits de transformation. L’efficacité de l’ozone a été prouvée, basée toutefois sur des dosages et des temps de contact élevés. Si l’efficacité de l’ozone est optimale, il n’en demeure pas moins la présence de sous-produits formés lors des réactions d’oxydation, dont on ne connaît pas l’effet de perturbation endocrinienne. La combinaison O3/réacteur CAP conçu selon notre dispositif opératoire présente l’avantage de traiter la majorité des micropolluants présents dans l’eau sans pour autant conduire à la formation de sous-produits.

Il s’agit ainsi de poursuivre dans la voie d'une amélioration constante de la qualité des rejets des stations de traitement biologique afin de protéger de manière efficace les milieux récepteurs. La démarche de OTV - Veolia Eau est de proposer à ses clients des solutions d’ensemble les plus flexibles possibles, en recherchant autant que faire se peut les conditions de fonctionnement les plus optimales.

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