LE TRAITEMENT DES EAUX USÉES AVEC RECYCLAGE PARTIEL
parIngénieur, chargé du traitement des eaux résiduaires et des problèmes de dépollution
A. INTRODUCTION
La prise de conscience de la nécessité du traitement des effluents industriels liquides n'est pas nouvelle pour la Compagnie IBM. Très tôt elle s'est préoccupée de l'impact de ses activités sur l’environnement. À l'usine IBM d’Essonnes, la stratégie adoptée a été :
- 1° de se conformer à la réglementation française,
- 2° de répondre aux enquêtes des organismes officiels tels que l'Agence de Bassin, le B.R.G.M., etc.,
- 3° de considérer l'ensemble des règles que le groupe IBM s'est imposé comme un objectif à atteindre en 1979.
En matière d’environnement, IBM a en effet édicté des règles très précises, et ces règles fixent entre autres des valeurs limites à ne pas dépasser avant tout rejet dans le milieu naturel. Il est également précisé pour la mise en œuvre desdites règles qu’au cas où la règle IBM est plus exigeante que la réglementation nationale, c’est la valeur IBM qui doit être appliquée.
Ainsi, dès 1956, a été construite sur le site d’Essonnes une première station d’épuration pour traitement à la fois des effluents sanitaires et des effluents industriels. Cette station a été modifiée à plusieurs reprises pour faire face tant à l'accroissement du personnel qu’aux nouvelles productions, et fut finalement remplacée en 1975 par une station moderne, plus performante.
Comme nous l’avons vu dans une première partie de cette étude des problèmes de l'eau à l'usine de Corbeil, tant pour la production (refroidissement d’équipement, rinçage des pièces en cours de fabrication) que pour les usages domestiques (toilettes, restaurant) ou généraux (climatisation, arrosage) : les eaux de refroidissement non polluées chimiquement sont généralement recyclées, tandis que les eaux de rinçage, polluées chimiquement, sont, suivant les cas, recyclées ou évacuées vers la station d’épuration et, après traitement, rejetées dans le réseau urbain de la ville de Corbeil-Essonnes ou à la Seine.
B. – LES RÉSEAUX SÉPARATIFS
Ces réseaux répondent à trois nécessités :
- — obligation créée par la réglementation actuelle de collecter les eaux séparément selon la nature et la concentration des produits polluants qu’elles renferment, et de les acheminer vers le traitement spécifique adopté ;
- — meilleur traitement de la pollution : les volumes sont réduits et chaque réseau aboutit à une station de traitement spécialisée ;
- — utilisation rationnelle des eaux grâce à la recirculation.
L'Usine IBM possède ainsi neuf réseaux séparatifs :
- — réseau « solvants mélangés »
- — réseau « J 100 »
- — réseau « perchloréthylène »
- — réseau des eaux pluviales
- — réseau des eaux-vannes
- — réseau d’eaux usées industrielles :
- — concentrées,
- — diluées,
- — recyclées,
- — de lavage des filtres.
B.1. Réseau « solvants mélangés »
Ce réseau collecte la majorité des solvants usés de l'usine (alcool isopropylique, acétone, acétate de butyle, xylène, trichloréthylène, flugène, N-méthyl pyrrolidone, etc.) à l'exception des photoresists « J.100 » (*) et autres, qui sont récupérés en bidons.
Les critères d’évacuation sont les suivants :
- — compatibilité totale avec les matériaux du réseau et les autres solvants collectés,
(*) Le « J.100 » est un stripper des résines : il renferme du perchloréthylène, du phénol, de l’orthodichlorobenzène et de l’acide dodécylbenzène sulfonique.
Par ailleurs des produits chimiques variés sont utilisés en grandes quantités à l'usine d’Essonnes. Évacués sans soins suffisants ils pourraient occasionner une pollution des eaux superficielles ou des eaux souterraines. En fonction de leur nature (solvants, acides...) les produits chimiques après usage sont soit évacués vers la station d'épuration du site IBM et traités (acides, bases, sels), soit collectés séparément (solvants).
Dans le cas où ils sont collectés séparément, ils peuvent être ou régénérés et réutilisés, ou revendus à des sociétés n’exigeant qu'une moindre qualité (par exemple perchloréthylène réutilisable en nettoyage à sec), ou encore enlevés par des sociétés spécialisées dans le traitement des déchets industriels et agréées par les autorités françaises (cyanure, cuivre).
La description du traitement des eaux résiduaires à l'usine d'ESSONNES sera présentée ci-après en quatre parties :
- B. – Les réseaux séparatifs
- C. – La station (traitement centralisé, traitements spécifiques)
- D. – Les contrôles
- E. – Le recyclage partiel
- — absence de risque d’encrassement, bouchage du réseau ou blocage des pompes de relevage,
- — récupération séparée non intéressante tant par la quantité que par la répartition des postes utilisateurs dans l’Usine.
B.2. Réseau « J.100 »
Ce réseau collecte gravitairement le J.100 usé du plus gros utilisateur, en citernes.
B.3. Réseau « perchloréthylène »
Le perchloréthylène usé est récupéré gravitairement dans deux citernes de 50 000 litres. Il est destiné à la réutilisation en nettoyage à sec après distillation. La quantité éliminée est proche de 1 500 tonnes par an.
B.4. Réseau des eaux pluviales
Il collecte les eaux de refroidissement qui ne sont pas en contact avec les produits chimiques ainsi que les eaux pluviales du Site (parkings, toitures, drains...). Ce réseau chemine en galeries et aboutit directement à la Seine après passage à travers une installation de dessablage.
B.5. Réseau des eaux-vannes
Il récupère les eaux sanitaires, les eaux usées des deux restaurants du Site et, après avis du Conseil Supérieur d’Hygiène Publique de France, les eaux usées industrielles concentrées après leur traitement à la station d’épuration. Ce réseau est raccordé à l’égout urbain et aboutit à la station d’épuration d’EVRY/CORBEIL.
B.6. Réseaux d’eaux usées industrielles
Ils collectent les bains usés concentrés de produits chimiques, les eaux de rinçage en contact avec les produits et les eaux usées des centrales de production d’eau désionisée, pour les acheminer vers la station d’épuration.
Ces réseaux sont au nombre de quatre, désignés chacun par une abréviation logique :
- — EUID = eaux usées industrielles diluées.
- — EUIC = eaux usées industrielles concentrées.
- — EDUR = eau désionisée usée recyclée.
- — ELF = eau de lavage des filtres.
B.6.1. Réseau d’eaux usées industrielles diluées : EUID
Ce réseau collecte les effluents de régénération des centrales d’eau désionisée, l’eau désionisée des rinçages après solvants, l’eau de Seine après utilisation, l’eau désionisée du premier bac de rinçage après les acides. Le débit journalier est de 2 500 m³. Le pH moyen est basique du fait de l’excès des effluents de régénération anionique.
B.6.2. Réseau d’eaux usées industrielles concentrées : EUIC
Ce réseau collecte les bains concentrés usés des différents acides et bases utilisés dans l’Usine, les métaux lourds et leurs sels, le permanganate de potassium, à l’exclusion des effluents cyanurés.
Les produits complexants, tels l’EDTA ou les bains de cyanures ne sont pas évacués dans le réseau mais détruits par le centre de traitement de PEC à HOMBOURG.
B.6.3. Réseau d’eau désionisée usée recyclée : EDUR
Il collecte l’eau désionisée des deuxième et troisième rinçages après un bain acide ou basique, à l’exclusion de toute autre qualité d’eau.
B.6.4. Réseau d'eau de lavage des filtres : ELF.
Ce réseau collecte les eaux de lavage des filtres et des préfiltres ainsi que les boues du décanteur-circulator de la centrale DEGREMONT pour les acheminer vers la station d’épuration.
Ces différents collecteurs d’eaux industrielles usées sont alimentés par des antennes placées, suivant le cas et suivant les bâtiments, en plafond du sous-sol et dans les galeries, ou dans le sous-sol technique. Les antennes et les collecteurs sont repérés au moyen de bandes adhésives portant la dénomination du réseau ainsi que le sens d’écoulement du fluide. Les réseaux d’eaux usées industrielles ont été réalisés en PVC 6 bars pour les antennes et en PVC armé fibre de verre 10 bars pour les collecteurs.
OUVRAGES DE RELEVAGE
Compte tenu du niveau des terrains, plus élevé à la station d’épuration qu’aux bâtiments, il est nécessaire de relever par pompage les eaux usées industrielles. Ces eaux sont donc acheminées gravitairement vers des ouvrages comportant des bâches-tampons, puis relevées vers les bassins de traitement de la station d’épuration. Les ouvrages, au nombre de 6 sur le site, ont été dimensionnés et aménagés en fonction du débit et de la nature des eaux à relever.
L’ouvrage le plus important (fig. 4), situé sous la station d’épuration, relève séparément les eaux usées industrielles concentrées des deux bâtiments, les eaux usées industrielles diluées d’un bâtiment et de la station de production d’eau désionisée, ainsi que les eaux de lavage des filtres et les extractions de boues provenant de la décarbonatation de l’eau de Seine, leur total représentant environ 2 000 m³ par jour.
Cet ouvrage comprend trois bâches en béton :
- — Une bâche pour les eaux usées acides concentrées, d’une capacité de 12 m³. Cette bâche est recouverte de peinture antiacide de type VITON. Elle est équipée de deux pompes horizontales de 10 m³/h, le corps et la roue étant en graphite, garant de la bonne tenue aux produits chimiques véhiculés. Le démarrage et l’arrêt des pompes sont assurés par des contacteurs à mercure.
- — Une bâche pour le relevage des eaux usées industrielles diluées, de 48 m³. Compte tenu de la nature des produits à véhiculer, il a été choisie une peinture antiacide de type Hypalon. La bâche est équipée de trois pompes horizontales de 55 m³/h à corps et roue en graphite et à démarrage automatique.
- — Une bâche pour les eaux de lavage des filtres, de 53 m³, non revêtue de peinture antiacide. Cette bâche est équipée de deux pompes immergées de débit nominal de 200 m³/h, à démarrage automatique.
Enfin, l’ouvrage comprend un puisard de reprise des eaux de drainage et des eaux de refroidissement des pompes, équipé d’une pompe d’épuisement de 10 m³/h à démarrage automatique. Pour pallier toute inondation des pompes-acides, l’ouvrage est équipé d’une pompe de 100 m³/h raccordée à la station d’épuration.
Vu l’importance stratégique de ces ouvrages de relevage, ils sont secourus, en cas de coupure électrique, par un groupe électrogène de secours, comme le reste de l’installation d’ailleurs.
C. – LA STATION
C.1. Traitement centralisé
La station regroupe, d’une part, le traitement des eaux usées industrielles diluées et des eaux de lavage des filtres, d’autre part, celui des eaux usées industrielles concentrées. Géographiquement, l’installation peut aussi être divisée en deux parties :
- — une zone principale regroupant à l’extérieur les différents bassins de traitement et, à l’intérieur du bâtiment, le traitement des boues, le stockage et la préparation des réactifs, la salle de contrôle et d’analyse, et les armoires électriques de commande ;
— une zone annexe située dans la centrale de production d’eau désionisée, regroupant le reste des dispositifs de stockage et de dosage des réactifs, avec leur armoire de contrôle et de commande.
C.1.1. Traitement des eaux usées industrielles diluées (EUID)
EAUX BRUTES ↓ NEUTRALISATION (acide ou chaux) ↓ REACTIFS (polyelectrolyte) ↓ DECANTATION ┌──────────┴──────────┐ SURVERSE BOUES ↓ ↓ AÉRATION CONCENTRATION ↓ ↓ SEINE FILTRE ROTATIF ↓ BENNES
Ces eaux alimentent un canal de mesure de débit, puis elles sont neutralisées soit par une injection d’acide sulfurique, soit par une injection de lait de chaux, dans un bassin de 700 m³ appelé bassin de neutralisation. Une agitation permanente au moyen de 3 agitateurs assure l’homogénéisation. Les eaux chargées et neutralisées sont reprises par des pompes verticales de 100 m³/h pour être envoyées dans le décanteur de 260 m³. Une injection de floculant dans la canalisation d’amenée des eaux facilite la décantation des matières en suspension et diminue leur teneur dans l’eau décantée. La concentration des matières en suspension passe de 670 mg/l à 6 mg/l en moyenne, ce qui représente un rendement d’élimination de 99 %. Le pH est maintenu entre 6,5 et 8,5.
Les boues décantées sont extraites périodiquement par pompage du décanteur et envoyées dans un concentrateur ramenant la teneur en eau des boues de 98 % à 90 %. Les boues concentrées alimentent deux filtres rotatifs sous vide, lesquels permettent d’obtenir des boues pelletables.
La surface filtrante par filtre rotatif est de 10 m². La teneur en eau est ramenée après cette opération à 70 %. Les boues « sèches » sont mises dans des bennes et évacuées journellement vers une carrière, à raison de 10 m³, soit environ 12 tonnes. L’autorisation de mise en décharge a été obtenue de l’Administration compétente après examen d’une analyse des boues et d’essais de lixiviation démontrant la stabilité de ces boues (tableau 1).
Tableau 1. – Analyse des boues
Paramètres | Valeurs en % en poids de matières sèches |
---|---|
pH | 8 |
densité | 1,26 kg/l |
Fe | 1,5 |
Al | 43 |
Cu | 0,1 |
Zn | < 0,05 |
Pb | < 0,14 |
Sn | 0,03 |
Cr | 0,002 |
Ni | 0,012 |
Na | 0,07 |
K | 0,07 |
Ca | 21,60 |
Si | 3,40 |
NH | 0,45 |
F | < 0,02 |
L’eau en surverse du décanteur est dirigée gravitairement vers le bassin d’aération finale. Un surpresseur d’air permet d’accroître si nécessaire la teneur en oxygène de l’eau avant le rejet en Seine.
Dans ce bassin également, deux pompes de 100 m³/h permettent d’utiliser l’eau rejetée pour arroser une partie du site. Une troisième pompe de 40 m³/h alimente la station d’épuration en eau de service (lavage des toiles de filtre, préparation des adjuvants de floculation, préparation du lait de chaux). Cette utilisation de l’eau rejetée permet d’économiser environ 100 000 m³ annuellement.
Le bassin est également équipé d’un pH-mètre pour mesure avant rejet à la Seine, et d’une pompe de 1 m³/h alimentant le laboratoire de la station où s’effectue le contrôle permanent.
C.1.2. Traitement des eaux usées industrielles concentrées (EUIC)
— Réduction
La première étape du traitement des EUIC est la réduction du chrome hexavalent soluble en chrome trivalent, et la réduction du permanganate. Ces réductions s’opèrent en continu dans un réacteur rapide (brevet DEGREMONT) appelé « Turbactor ».
L’agent réducteur utilisé est le bisulfite de sodium. Le chrome hexavalent apparaît dans l’eau sous forme de chromate CrO₄²⁻. L’équation de réaction s’écrit :
2CrO₄²⁻ + 3HSO₃⁻ + 7H⁺ → 2Cr³⁺ + 3SO₄²⁻ + 5H₂O
Cette réaction s’effectue, comme le montre l’équation, en milieu acide. La cinétique de réaction est très rapide si le pH est inférieur à 3. La réaction est pilotée par une chaîne de mesure et de régulation du potentiel d’oxydo-réduction. Cette réaction de déchromatation est assurée d’un rendement d’environ 78 %. La quantité de réactif consommée (bisulfite de sodium) est supérieure d’environ 20 fois la quantité stœchiométrique nécessaire. Cette anomalie s’explique aisément : en effet, les eaux usées industrielles concentrées contiennent, en dehors des chromates et du permanganate, d’autres oxydants puissants tels l’eau oxygénée.
— Neutralisation – Précipitation
Après réduction, les eaux usées industrielles concentrées sont envoyées dans la fosse de neutralisation de 130 m³, après mesure du débit. Une addition de lait de chaux sous la dépendance d’une chaîne de régulation de pH produit la précipitation des hydroxydes métalliques et du fluorure de calcium. Une agitation mécanique homogénéise le contenu de la fosse.
Le pH dans la fosse est maintenu entre 9,5 et 10,5.
Les équations de réaction s’écrivent :
2HF + Ca(OH)₂ → CaF₂ + 2H₂O 2H₃PO₄ + 3Ca(OH)₂ → Ca₃(PO₄)₂ + 6H₂O H₂SO₄ + Ca(OH)₂ → CaSO₄ + 2H₂O 2Cr³⁺ + 3Ca(OH)₂ → 2Cr(OH)₃ + 3Ca²⁺ 2NH₄F + Ca(OH)₂ → CaF₂ + 2NH₄OH Mn²⁺ + Ca(OH)₂ → Mn(OH)₂ + Ca²⁺ 2HNO₃ + Ca(OH)₂ → Ca(NO₃)₂ + 2H₂O
À titre d'information, la quantité théorique de boues produite par 100 kg d’acide est de :
sels insolubles | solubles | |
---|---|---|
HF | 195 | |
H₃PO₄ | 158 | |
H₂SO₄ | 139 | |
Cr³⁺ | 99 | |
NH₄F | 105 | |
Mn²⁺ | 162 |
Depuis la fin de l’année 1977 et après avis du Conseil Supérieur d’Hygiène Publique de France et de l’Inspection des Établissements Classés, l’effluent neutralisé est envoyé dans un décanteur de 45 m³. Les boues de ce décanteur sont mélangées avec celles du concentrateur des EVID, conditionnées à la chaux et filtrées sous vide. L’eau claire de la surverse de ce décanteur est envoyée dans les eaux-vannes de l’usine, après réajustement du pH par adjonction d’acide sulfurique et contrôle.
Les sels solubles tels les nitrates seront traités par la station d’épuration municipale d’EVRY/CORBEIL.
C.2. Traitements spécifiques
En plus de la station d’épuration sont en place deux traitements au poste : l’un pour le cuivre, l’autre pour le silicium.
C.2.1. Traitement du cuivre
Il permet de débarrasser les effluents du cuivre qu’ils contiennent. L’épuration chimique du cuivre non-complexé peut être réalisée facilement ; cependant la présence d’ions ammonium dans les eaux usées et formant des complexes cupro-ammoniaqués stables et solubles de formule générale :
Cu(NH₃)₄²⁺
inhibe les réactions de précipitation chimique.
Le traitement chimique appliqué consiste en la précipitation du cuivre sous forme de phosphate, par action de phosphate di- ou trisodique. La précipitation a lieu dans un domaine de pH situé entre 5 et 8 et elle met en œuvre les réactions suivantes :
3Cu²⁺ + 2Na₃PO₄ → Cu₃(PO₄)₂ + 6Na⁺ Cu²⁺ + Na₂HPO₄ → CuHPO₄ + 2Na⁺
Il faut noter que CuHPO₄ et Cu₃(PO₄)₂ sont insolubles dans l’eau mais solubles dans les acides et en milieu basique.
[Figure : Fig. 8. — Procédé de traitement au phosphate d’effluent contenant du cuivre.]Ce procédé permet de ramener la teneur initiale de cuivre de 5 g/l à 10 mg/l (environ), après traitement (fig. 8).
À titre indicatif la solution de traitement a la composition suivante :
- — acide phosphorique : H₃PO₄ = 17,7 g/l
- — phosphate trisodique : Na₃PO₄ = 60 g/l
- — eau désionisée : H₂O = 970 g/l
Les boues de cuivre sont décantées dans une citerne et éliminées périodiquement par une entreprise spécialisée et agréée.
C.2.2. Traitement du silicium
Ce traitement a été mis en place pour limiter les risques de colmatage des tuyauteries d'évacuation et afin d’éviter l'abrasion des pompes de relevage. Il est situé sous la salle « produisant » les déchets de silicium et consiste en la floculation du silicium au moyen de perchlorure de fer et de soude. Les boues formées sont envoyées toutes les six semaines dans le concentrateur de la station d’épuration.
D. – LES CONTRÔLES
Le bon fonctionnement et le contrôle de la station d’épuration sont assurés de diverses manières :
- — une visite au titre de « l’Assistance Technique au Bon Fonctionnement des Stations d’Épuration »,
- — une analyse mensuelle sur un échantillon moyen de 24 jours, effectuée par un laboratoire agréé,
- — une analyse des boues, annuelle,
- — un contrôle continu et permanent assuré par des capteurs physiques et physico-chimiques centralisés dans le poste de commande de la station.
Les paramètres physiques mesurés sont :
- — débit,
- — pH,
- — résistivité,
- — turbidité,
- — fluorure par électrode spécifique,
- — oxygène dissous.
Les capteurs physico-chimiques, de type colorimétrique, mesurent :
- — l'ammoniaque,
- — la DCO,
- — le sulfate,
- — le nitrate,
- — le cuivre,
- — le chrome hexavalent.
Tous ces capteurs délivrent, en cas de dépassement de seuil, une alarme. L’exploitation des capteurs est remplacée depuis cette année par un système informatique connu sous le nom de « projet C.A.P.R.I. » (Contrôle Automatique des Pollutions et des Rejets Industriels). Les buts essentiels de C.A.P.R.I. sont :
- — contrôler le niveau des rejets en continu,
- — optimiser les consommations de réactifs et d’énergie,
- — gérer les réactifs et les installations.
Cette installation se compose de (fig. 9) :
- — un système 7, équipé d’un sérialiseur-désérialiseur (SERDES),
- — un ensemble de trois multiplexeurs fournissant des sorties digitales et des sorties analogiques et permettant la lecture des entrées digitales et analogiques,
- — un ensemble de capteurs et d’asservissements répartis sur toute la station d’épuration,
- — une liaison rapide avec un ordinateur 360.
Les caractéristiques des entrées/sorties sont les suivantes :
Entrée digitale DI’s : sous forme d’un contact présentant les caractéristiques suivantes :
- Niveau 1 : contact ouvert R > 1 MΩ
- Niveau 0 : contact fermé R < 50 Ω
Ce contact doit supporter une tension mini de 5 V à ses bornes (contact ouvert) et un courant mini de 2 mA (contact fermé).
Sortie digitale DO’s : se présente sous forme d’une impulsion de 160 ms et de 12 V d’amplitude. Les courants maxima sont :
- I appel : 250 mA
- I permanent : 100 mA
- I résiduel : 3 μA
Ces signaux sont destinés à commander des relais qui doivent comporter une diode de protection.
Entrée analogique AI’s : ces informations doivent être fournies sous la forme d’un courant pouvant varier de 4 à 20 mA (4 mA correspondant au bas de l’échelle de mesure et 20 mA au haut de l’échelle) et pouvant attaquer une charge comprise entre 0 et 400 Ω.
USINE DE CORBEIL-ESSONNES
DÉPARTEMENT GÉNIE CHIMIQUE
IBM FRANCE
UNITÉ DE TRAITEMENT DES EAUX
EAUX USÉES INDUSTRIELLES
15-12-1977
Tableau n° 2. – RÉSULTATS DE FONCTIONNEMENT
DÉFINITION DES CAPTEURS | Moyenne | Unité | NB | Val. mini | h mn | Val. maxi | h mn | Éc. type | Ths % | HSH | HSB | |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
OXYGÈNE DISSOUS / AÉRATION | 10,000 | mg/l | 62 | 10,000 | 13 07 | 10,000 | 13 07 | 000,00 | 6,0 | |||
SULFATES / AÉRATION FINALE | 162,000 | mg/l | 05 | 133,000 | 13 27 | 179,000 | 14 07 | 019,21 | 250,0 | |||
CHROME VI / AÉRATION FINALE | 35,300 | γ | 21 | 27,200 | 13 02 | 39,200 | 14 32 | 003,09 | ||||
FLUOR / AÉRATION FINALE | 09,500 | mg/l | 63 | 07,600 | 16 47 | 12,600 | 14 02 | 001,80 | 8,0 | 39,6 | 10,0 | |
RH / TURBACTOR | 285,000 | mV | 295 | 214,000 | 18 12 | 500,000 | 17 12 | 054,75 | 0,2 | 1,3 | 490,0 | |
pH PRÉCIPITATION EUID | 08,300 | pH | 160 | 03,000 | 17 41 | 11,600 | 18 23 | 002,27 | 8,4 | 37,5 | 11,5 | 8,0 |
pH AÉRATION FINALE | 08,400 | pH | 4 | 07,900 | 17 32 | 09,500 | 16 02 | 000,29 | 9,5 | 5,0 | ||
pH NEUTRALISATION EUID 2 | 08,300 | pH | 54 | 06,800 | 17 47 | 10,000 | 14 37 | 000,87 | 2,0 | 11,1 | 9,5 | 6,5 |
DÉBIT EAU DÉCANTÉE EVID | 150,000 | m³/h | 62 | 150,000 | 13 02 | 150,000 | 13 02 | 000,00 |
MOY H TRAV = HEURE TRAVAILLÉE COMPRISE ENTRE 6 h ET 22 h
© Sortie analogique AO’S : caractéristiques identiques à celles de l’AI’S, la charge devant être comprise entre 0 et 300 Ω.
L’association ordinateur / capteurs permet :
- — une centralisation d’un grand nombre de points de mesure,
- — des résultats immédiats entre des mesures d’origines différentes,
- — un contrôle permanent du fonctionnement des capteurs et une acquisition de données,
- — une possibilité de revoir des données vers une centralisation et un traitement ultérieur, pour des statistiques, gestion des coûts de fonctionnement, etc.,
- — un relevé des alarmes enregistrées.
Ainsi l’ordinateur délivre journellement un tableau comportant (voir tableau n° 2) :
- — le nombre de mesures,
- — la concentration moyenne,
- — la concentration maximum et l’heure,
- — la concentration minimum ainsi que l’heure.
Les valeurs moyennes de l’eau rejetée en Seine sont consignées dans le tableau ci-contre.
E. – LE RECYCLAGE PARTIEL
1. Eau sortie station
des études sont en cours pour recycler l’eau plutôt que de la rejeter dans le milieu naturel. Parmi les réalisations déjà existantes nous pouvons citer :
- — l’utilisation de l’eau rejetée pour l’arrosage du site, faisant une économie de 700 m³/j ;
- — l’utilisation de cette même eau comme eau de service de la station d’épuration (lavage des toiles de filtre, préparation des solutions d’adjuvants de floculation, préparation du lait de chaux et nettoyages divers), permettant l’économie d’environ 350 m³ par jour.
Tableau n° 3. – VALEURS MOYENNES EN 1976
Paramètres | Valeur moyenne | Valeur maxi | Législation |
---|---|---|---|
pH | 8,1 | 8,9 | 5 – 9,5 |
Matières en solution | 463 | 808 | — |
Matières en suspension | 5,9 | 19,5 | 30 |
NH₄⁺ | 3,5 | 9,2 | — |
NO₃⁻ | 45 | 89,5 | — |
SO₄²⁻ | 135 | 313 | — |
Cl⁻ | 23 | 110 | — |
F⁻ | 3,0 | 19 | 15 |
BO₃³⁻ | 14,1 | 21,0 | 40 |
Cr hex. | 0,01 | 0,01 | 3 |
Cr hex. | non décelable | 0,02 | 0,1 |
Fe | 0,01 | 0,02 | — |
Cu | 0,02 | 0,04 | — |
Ni | 0,06 | 0,56 | — |
Cr total | < 0,02 | 0,04 | — |
Cd | 0,01 | 0,02 | — |
Pb | 0,08 | 0,36 | — |
Zn | 0,11 | 0,6 | 15 |
Eau désionisée recyclée usée : après mise en place complète du réseau d’eau désionisée recyclée, il sera possible de réutiliser cette eau en la réinjectant en tête du traitement de l’eau désionisée moyennant un certain nombre de précautions. Ce recyclage est estimé à 1 200 m³ par semaine pour l’ensemble du site. Il pourra être automatisé et monitoré par conductivité et mesure de la teneur en fluor. Un dépassement de seuil amènerait les eaux à la station d’épuration pour traitement.
CONCLUSION
En guise de conclusion à nos trois articles publiés successivement dans cette revue, évoquant « les problèmes de l'eau et leur solution à l'usine IBM de Corbeil-Essonnes », il nous paraît de notre devoir de mettre en relief l'effort humain permanent que requiert le bon fonctionnement d'un ensemble aussi complexe de traitements de l'eau à différents stades et sous différentes formes. Ajoutons que les conceptions et les réalisations décrites sont toutes en perpétuelle évolution technologique, dans le but de tendre à leur perfectionnement continu.
Un tel aspect humain doit se manifester par une vigilance quotidienne sans défaillance des équipes responsables, d’une part pour assurer aux fabrications en extension, comme aux services de l'usine, l'eau nécessaire — en quantité et en qualité — d’autre part pour améliorer sans cesse la qualité des eaux finalement rejetées. Bien entendu une telle vigilance va jusqu’au plan d’alarme à déclencher en cas de pollution accidentelle, lequel impose de pouvoir arrêter les ateliers de production séparément ou dans leur totalité.
Ainsi l'effort immense, incontestable, entrepris et poursuivi par l'usine de Corbeil depuis plus de vingt ans dans le domaine de l'eau traduit-il bien cette volonté d'IBM de participer activement pour sa part à l’œuvre collective d'amélioration de la gestion de l'eau et de lutte contre la pollution, tout ceci de façon à contribuer à une protection toujours plus efficace de notre environnement.
B. GROSS et pour les deux articles précédents : Y. POUPON et R. DUDON