Il est nécessaire de disposer, pour la fabrication de dispositifs semi-conducteurs, d'eau désionisée, dite ultra-pure.
1. LA DÉMINÉRALISATION
L'obtention sur l'eau finale d'une minéralisation aussi faible que possible (on parle d'eau désionisée) entraîne la nécessité de retirer les éléments ioniques. Le déplacement des ions en solution est l'expression du courant électrique ; l'absence d'ions confère à l'eau une résistivité élevée, ce sera un moyen de contrôler le résultat obtenu.
Il nous reste à voir comment retirer la quasi-totalité des sels dissous ; ce sera le rôle de la déminéralisation, parfaire l'élimination des éléments en suspension : par la stérilisation et la filtration finale.
(1) Voir « L’EAU ET L'INDUSTRIE » n° 20 page 37 : « Les problèmes d'eau et leur solution à l’usine IBM de Corbeil-Essonnes (Essonne) ».
Il existe divers procédés de désionisation (distillation, échange d’ions, ultrafiltration, osmose inverse), nous nous limiterons au procédé utilisé à l’usine qui est l’échange d’ions et plus particulièrement aux résines échangeuses d’ions.
1.1. Historique
Les résines échangeuses d’ions sont un produit jeune (une trentaine d’années) bien que certains procédés échangeurs d’ions aient été utilisés depuis l’antiquité :
- — obtention d’eau douce à partir d’eau saumâtre (bois de Panama – MOÏSE-EXODE),
- — perte d’une partie de la salinité de l’eau de mer passant à travers certaines couches de sable – ARISTOTE.
Ce n’est qu’en 1850 que les Anglais THOMPSON & WAY découvrent l’échange de cations avec les alumino-silicates naturels ou zéolithes. Le premier adoucisseur d’eau (permutation calcium/sodium utilisant des alumino-silicates) date de 1903 (1). ADAMS et HOLMES découvrent les propriétés d’échange de cations des disques phonographiques (résine formol-phénolique). À partir de la deuxième guerre mondiale apparaissent sur le marché des résines cationiques (susceptibles d’échanger des cations) et anioniques (susceptibles d’échanger des anions) de synthèse. Ces produits n’ont cessé de se multiplier depuis.
1.2. Résines actuelles
Les résines échangeuses d’ions sont des substances granulaires insolubles comportant des groupements acides ou basiques susceptibles de permuter, sans altération, les ions positifs ou négatifs fixés sur ces radicaux, avec les ions de même signe se trouvant en solution dans le liquide à leur contact.
Cette permutation, appelée échange d’ions, permet de modifier la composition ionique du liquide objet du traitement.
R symbolise le groupement échangeur fixé sur la résine, et le squelette macro-moléculaire.
- — adoucissement de l’eau
2(R—Na) + Ca²⁺ ↔ (R—Ca—R) + 2Na⁺
L’échange se fait entre un ion calcium et deux ions sodium. L’élimination des éléments responsables de la dureté adoucit l’eau.
- — désionisation
échangeurs cationiques
(R—H) + M⁺ ↔ (R—M) + H⁺
L’échange se fait entre le proton H⁺ et un cation M⁺. échangeur anionique
(R—OH) + X⁻ ↔ (R—X) + OH⁻
L’échange se fait entre l’ion hydroxyle OH⁻ et un anion X⁻.
H⁺ + OH⁻ → H₂O
Le bilan des deux échanges revient à former de l’eau suivant H⁺ + OH⁻ → H₂O tout en éliminant les autres éléments ioniques.
Comme tout équilibre chimique, ces échanges sont régis par la loi d’action de masse.
L’épuisement (sens 1) ou la régénération (sens 2) cesse dès que l’équilibre est atteint pour l’élément considéré entre le liquide et la résine.
Les résines échangeuses actuellement les plus utilisées sont des produits de synthèse dont le réseau est formé d’un squelette macro-moléculaire tridimensionnel hydrocarboné. Ce squelette est exempt de toute propriété d’échange d’ions, il est nécessaire de lui adjoindre des groupements fonctionnels.
(1) En 1935, mise en évidence des propriétés d’adoucissement du charbon actif traité à l’acide sulfurique.
Échangeur cationique
- — SO₃–H⁺ : groupement sulfonique
- — CO₂–H⁺ : groupement carboxylique
- etc.
Échangeur anionique
- — (NH₂–R)⁺ OH⁻ : amine primaire
- — (NH–R)⁺ OH⁻ : amine secondaire
On distingue des résines à groupements forts ou faibles :
- — cationiques fortes (sulfonique),
- — cationiques faibles (carboxylique),
- — anioniques fortes (amines substituées),
- — anioniques faibles (amines primaires).
Les groupements fonctionnels forts sont susceptibles de provoquer la coupure de sel et donc d’échanger aussi bien les ions totalement dissociés que ceux faiblement dissociés. Les groupements fonctionnels faibles ne provoquent pas la coupure de sel et sont sans action sur les sels peu dissociés.
1.3. Les résines utilisées à l’usine
Les résines utilisées à l’usine IBM sont des produits de copolymérisation de styrène et de divinylbenzène.
Le pontage du polymère styrène par le divinylbenzène assure un certain taux de réticulation, une structure tridimensionnelle hétéroporeuse, et rend insoluble le polymère de base, qui le serait après fixation du groupement fonctionnel.
Les propriétés physiques et chimiques de la résine dépendent de sa structure (porosité) donc du taux de réticulation. La fabrication permet d’obtenir des billes de dimension telle que la perte de charge reste compatible avec la percolation. Ces produits sont caractérisés par différents paramètres :
- — la taille et la dispersion des grains ;
- — la capacité ou pouvoir d’échange : c’est la masse d’ions susceptible d’être fixée par l’unité de volume de l’échangeur considéré ;
- — la charge volumique, rapport du volume horaire de liquide à traiter au volume de résine ;
- — le taux de régénération, masse de réactif utilisé pour régénérer l’unité de volume d’échangeur ;
- — le rendement de régénération, rapport de la masse de réactif régénérant à la masse de réactif correspondant stœchiométriquement aux ions échangés ;
- — la fuite ionique, pourcentage des concentrations de l’ion à fixer avant et après traitement ;
- — l’attrition, usure mécanique des grains.
Ces caractéristiques font l’objet de spécifications qui permettent d’établir un choix lors de l’approvisionnement. Des contrôles permettent de suivre l’évolution dans le temps.
Les résines cationiques utilisées à l’usine IBM sont du type fortement acide (sulfonées) ; les résines anioniques sont soit fortement basiques du type 1 ou 2, soit moyennement basiques.
1.4. Le procédé mis en œuvre à l’usine
Le procédé met en œuvre des échangeurs d’ions en lits fixes, régénérés et saturés à co-courant, de haut en bas. Chaque appareil est constitué par un récipient en acier, ébonité sur la face interne, cylindrique ou tronconique, fermé, à axe vertical, contenant la résine. Celle-ci est placée au contact du dispositif collecteur de l’eau traitée soit directement soit par l’intermédiaire de crépines ou d’une couche de silex. On ménage au-dessus de la couche de résine un espace libre suffisant pour permettre son expansion lors des détassages et tenant compte du gonflement de la résine suivant qu’elle est régénérée ou saturée. (Schéma n° 1)
1.4.1. Épuisement
L’eau à traiter est admise à la partie supérieure du récipient par un système répartiteur, elle traverse successivement :— un échangeur cationique sous la forme H+,— un échangeur anionique moyennement basique,— un échangeur anionique fortement basique, les deux sous la forme OH- (Schéma n° 2).
Les sels, présents dans l’eau initiale, sont transformés en acides dans l’échangeur cationique. On suit le déroulement de cette opération par la mesure du TAF (titre en acides forts).
L’échangeur anionique moyennement basique fixe les anions totalement dissociés. À ce niveau restent en solution les acides faibles, silicique et carbonique, dont les anions vont être permutés sur l’échangeur anionique fortement basique.
L’utilisation de résine du type 1 améliore la rétention de la silice tout en diminuant la capacité totale.
Une autre possibilité, utilisée à l’usine, est d’avoir directement un lit anionique fortement basique du type 1 après le lit cationique ; ce lit permute à la fois les anions faibles et forts. L’exploitation de ce modèle doit être plus rigoureuse pour éviter le risque de polymériser la silice fixée, par une eau acide.
1.4.2. Régénération
Chaque récipient est équipé d’une batterie externe de vannes et de tuyauteries permettant d’exécuter les diverses opérations de régénération.
La chute de résistivité en sortie de la chaîne (cation-anion faible-anion fort ou cation-anion fort) signale la saturation des résines pour la fuite ionique fixée. La chaîne est isolée et on opère sa régénération :
Les différents lits sont d’abord détassés à contre-courant par un débit d’eau maximum sans mettre de résine à l’égout.
— Lits cationiques
La régénération se fait de haut en bas par de l’acide chlorhydrique environ normal, on utilise environ trois fois la quantité stœchiométrique de la saturation. L’opération de déplacement consiste à retirer par dilution l’excès de réactif régénérant.
Le rinçage permet de compléter l’opération précédente. (Schéma n° 3)
REGENERATION
— Lits anioniques
Les deux lits anioniques sont régénérés en série par de la soude environ normale dans le sens inverse de la saturation, on régénère d’abord l’anion fort ensuite l’anion faible, mais chaque bidon est régénéré à co-courant par rapport à la saturation. La soude est utilisée à 40 °C, ce qui améliore particulièrement l’élution de la silice et des matières organiques sur le lit fortement basique. L’anion moyennement basique est régénéré en série par l’excès de réactifs.
Le déplacement se fait suivant le même schéma que la régénération ; on rince ensuite l’anion faible seul, puis en série, dans le sens de la saturation, cation-anion faible-anion fort. Dès que la résistivité en sortie de la chaîne atteint 100 000 Ω × cm, on considère que l’opération de régénération est terminée.
1.4.3. Lits mélangés
La chaîne, cation-anion faible-anion fort, est capable de fixer la majeure partie de la salinité de l’eau influente ; cela se traduit par l’obtention d’une résistivité de 3 à 400 000 Ω × cm à 18 °C, avec un minimum à 100 000 Ω × cm.
Nous sommes encore très loin de la spécification finale (22 MΩ × cm), bien que la charge ionique contenue dans l’eau après la chaîne soit sans commune mesure avec la charge de l’eau initiale. Ces ions résiduels sont d’autant plus difficiles à piéger que leur concentration est faible.
Le dispositif à lits mélangés diffère essentiellement de la solution à lits séparés du fait que les deux résines, anionique et cationique, sont placées dans un même appareil. Ces résines sont intimement mélangées par un brassage à l’air comprimé ; l’ensemble se comporte comme une infinité d’échangeurs de cations et d’anions en série, ce qui permet d’obtenir une eau très pure et de qualité constante au cours du cycle avec un pH voisin de la neutralité. Par contre, à volume égal, la capacité est plus faible que dans le cas des lits séparés. Ces performances font que ce dispositif est parfaitement adapté aux besoins à ce niveau.
La régénération du lit mélangé, qui intervient dès que l’on constate une baisse de la résistivité de l’effluent, nécessite la séparation hydraulique par détassage à contre-courant des deux types de résine. L’anionique, plus légère, se place au-dessus. Une fois séparées, les deux résines sont régénérées séparément à partir de canalisations situées en haut à l’interface. Les anioniques sont régénérées à la soude chaude (40 °C) de haut en bas, pendant qu’un débit d’eau dit de blocage isole les cations. Ce blocage reste en place pendant le déplacement.
Les cationiques sont régénérées à l’acide chlorhydrique de haut en bas pendant qu’un débit d’eau de blocage isole les anions ; le blocage est maintenu pendant le déplacement.
Après vidange partielle de l’appareil, les résines sont à nouveau mélangées à l’air comprimé ; on termine le rinçage, en série de haut en bas, dès que la résistivité atteint 14 MΩ × cm pour les centrales primaires, 22 MΩ × cm pour les polissages.
2. LE DISPOSITIF INDUSTRIEL
2.1. Les besoins
— Qualitatifs
Nous avons vu la nécessité, pour l’Usine IBM, de disposer d’eau désionisée ultra-pure. Il convient de préciser les caractéristiques de cette eau :
- — le maintien d’une minéralisation aussi faible que possible se traduit par une spécification de résistivité 22 MΩ × cm à 18 °C et une teneur limite pour chaque élément métallique égale au ppb ;
- — la pollution particulaire doit être inférieure à 10 000 particules par litre d’eau (> 2 µm) ;
- — la pollution bactérienne doit être inférieure à 10 colonies par 100 ml à 37 °C.
Cette eau désionisée est produite à partir de l’eau de Seine clarifiée et décarbonatée. (Consulter le tableau de la page suivante)
— Quantitatifs
La consommation d’eau désionisée des lignes de fabrication de semi-conducteurs a été de 323 000 m³ en 1976, ce qui, en tenant compte de la climatisation, a demandé la production de 450 000 m³ d’eau à 14 MΩ × cm à partir de 800 000 m³ d’eau décarbonatée.
Cela fait apparaître un rendement de déminéralisation d’environ 60 %.
Bulletin d'analyse (moyennes sur 10 mesures couvrant une année)
Section EAU
EAU DÉCARBONATÉE
paramètres
Matières en suspension | |
---|---|
Résistivité | 2200 |
pH | 10 |
oxydabilité KMnO₄ acide | 3,4 mg/l |
D.C.O. | 6 mg/l |
Ca²⁺ | 36 mg/l |
Mg²⁺ | 3 mg/l |
Na⁺ | 22 mg/l |
K⁺ | 2,6 mg/l |
NH₄⁺ | 0 |
CO₃²⁻ | 12 mg/l |
HCO₃⁻ | 18 mg/l |
Cl⁻ | 38 mg/l |
SO₄²⁻ | 56 mg/l |
NO₃⁻ | 16 mg/l |
NO₂⁻ | 0 |
PO₄³⁻ | 0 |
F⁻ | 0,6 mg/l |
silice dissoute | 6 mg/l |
Fer | 0,02 mg/l |
Cette consommation annuelle se traduit par des pointes de 120 m³/h pendant les heures de production de l'usine.
2.2. Principe hydraulique
Pour satisfaire les besoins qualitatifs et quantitatifs, suivant les principes de déminéralisation que nous venons de voir, l'usine dispose de deux centrales de déminéralisation dites primaires qui délivrent une eau 4,14 MΩ × cm et de 3 centrales de polissage.
Il n'y a pas de stockage d'eau désionisée soit en cours de traitement soit au niveau final ce qui entraîne :
- — l'obligation de recirculer l'eau
- * au niveau de la distribution
- * entre les polissages et les centrales primaires
- — que les chaînes de déminéralisation ne fonctionnent pas à débit constant,
- — que les unités de production d'eau désionisée fonctionnent 24 h/24 h, 365 jours par an.
2.3. Traitements initiaux
L'eau décarbonatée contient un excès de chlore actif, ce chlore peut être à l’origine de deux types de dégradation sur les résines :
- — oxydation du squelette polystyrène (action lente non prépondérante),
- — oxydation des fonctions aminées des résines anioniques (action à cinétique rapide, prépondérante).
Il est donc nécessaire d’éliminer ce chlore ; c’est le rôle des filtres à charbon actif, utilisés en percolation.
Deux schémas de réaction sont proposés :
- C + 2 Cl₂ + 2 H₂O → CO₂ + 4 Cl⁻ + 4 H⁺ (réaction d’oxydation du charbon par le chlore avec consommation de charbon) - Cl₂ + H₂O → 2 HCl + ½ O₂ (réaction d’échange entre le chlore et l’oxygène, catalysée par le charbon actif qui, dans ce cas, n’est pas consommé)
L’expérience montre que l’on a une dégradation du charbon avec le temps, ce qui nécessite un changement périodique (tous les 2 ans).
Les lits de charbon actif sont lavés à contre-courant par une eau déchlorée tous les deux jours. Ce lavage a pour but d’éliminer les carbonates de calcium résiduels ayant traversé les filtres à sable, de renouveler les tranches de charbon actif en contact avec les concentrations élevées en chlore, d’empêcher la prolifération de bactéries dans les zones inférieures du lit où la concentration en chlore est quasiment nulle.
Le contrôle de l’action des charbons se fait par la vérification de l’absence de chlore en sortie charbon actif.
2.4. Traitement final
— Stérilisation
La présence de bactéries est à rapprocher de la pollution particulaire puisque la taille de ces micro-organismes est incompatible avec celle des dispositifs semi-conducteurs intégrés. Le risque de prolifération de ces micro-organismes, sur les résines tenant lieu de milieu de culture, rend nécessaire la mise en œuvre de moyens biocides puissants. L’eau initiale étant chlorée et n’ayant par la suite plus de contact avec l’air, on limite le risque en stérilisant avant emploi les canalisations et les récipients à l'eau de javel et les résines elles-mêmes à la stérésine.
Un traitement germicide permanent aux rayons ultraviolets sur eau avant filtration finale complète le processus.
— Filtration
L’élimination des particules en suspension se fait à deux niveaux :
- — d’abord dans les centrales de polissage sur des filtres en profondeur de porosité 1 µm ;
- — aux postes de travail ensuite, sur des membranes de porosité 0,45 ou 0,22 µm.
Les filtres sont suivis par la perte de charge qui détermine le changement.
[Schéma : Schéma n° 4 – Trois chaînes en service, une chaîne en attente de régénération. Cycle théorique : 350 m³]Centrale n° 1 (débit théorique : 60 m³/h)
2.5. Les centrales
La centrale n° 1, la plus ancienne, a été mise en service en 1969. Elle comprend un dispositif autonome de décarbonation qui n’est pas utilisé en régime normal mais qui peut secourir une défaillance du circulator (débit maximum : 60 m³/h). En fonctionnement normal, cette centrale est alimentée par l’eau du circulator. Elle est formée par quatre chaînes identiques, les récipients sont tronconiques :
- – filtres à sable,
- – filtres à charbon actif,
- – lits de résine cationique fortement acide,
- – lits de résine anionique fortement basique de type 1,
- – lits mélangés.
La conception hydraulique ne fait pas apparaître de chaînes individualisées ; c’est l’exploitation qui est faite suivant cette notion de chaîne au niveau des lits cationiques et anioniques. On ajuste les débits pour avoir un volume identique entre un cation et un anion homologues de manière à les régénérer en même temps.
Il y a au maximum trois chaînes en service ; la quatrième est en attente ou en cours de régénération.
Les lits mélangés sont indépendants des chaînes ; il y en a toujours un en attente.
Le débit théorique étant de 20 m³/h par lit, donc par chaîne, la capacité théorique de la centrale devrait être de 60 m³/h. En fait, les temps de régénération (7 h) et la valeur des cycles (350 m³) limitent ce débit à 40 m³/h. Le débit réel est fonction des besoins ; si trois chaînes sont systématiquement en service pendant les heures d’activité de l’usine, il est fréquent de n’en avoir qu’une pendant les week-ends ou la nuit.
La mise en service des lits mélangés est aussi liée aux besoins ; il faut en effet un débit minimum pour conserver le bon fonctionnement de ces échangeurs.
On peut donc avoir différentes combinaisons de fonctionnement. Le cycle théorique de la chaîne cation-anion est de 350 m³, celui des lits mélangés est de 2 000 m³ par lit.
L’exploitation est manuelle.
[Schéma : Schéma n° 5 – Centrale n° 2 (débit théorique : 100 m³/h)]La centrale n° 2 a été mise en service en 1972.
Elle est de conception légèrement différente de l’unité précédente mais plus performante. Les récipients sont cylindriques. Elle comprend quatre chaînes identiques :
- – filtres à charbon actif,
- – lits cationiques fortement acides,
- – lits anioniques moyennement basiques,
- – lits anioniques fortement basiques,
- – lits mélangés.
Les chaînes cation-anion faible-anion fort sont hydrauliquement individualisées, ce qui, avec la présence d’anion faible, différencie la centrale n° 2.
Cette centrale de la précédente. Le principe d’exploitation, bien que simplifié au niveau des chaînes, reste le même. On a toujours une chaîne et un lit mélangé au moins en attente ou en régénération.
Les débits unitaires de 40 m³/h font que le débit théorique maxi- mal devrait être de 120 m³/h, en réalité les temps de régénération (7 h 30 à 8 h) et la valeur des cycles (700 m³) sont tels qu'il est réellement de 100 m³/h. Ici aussi le débit est variable et plusieurs cas de figures sont possibles en fonction des besoins.
Un dispositif rend possible le recyclage de l'eau après lits mélangés vers l’aspiration des pompes de manière à maintenir un débit suffisant dans les lits mélangés lorsque la demande de l'usine est faible.
L'exploitation est manuelle à partir d'armoires de commande et de vannes pneumatiques.
2.6. Les polissages
L'eau désionisée, issue des centrales primaires, voit son traitement complété dans des unités de polissage dont le but est d’amener l'eau à la spécification demandée. Pour cela les centrales de polissage disposent :
— de lits mélangés,
— de batteries de filtre,
— de dispositifs bactéricides aux ultraviolets.
Des pompes de reprise de l'eau primaire assurent le débit dans les centrales et les boucles de distribution ; on leur adjoint des sur- presseurs pour maintenir une pression plus importante dans le réseau. Un dispositif de recyclage maintient un débit constant dans les lits mélangés et les filtres.
L'exploitation assure un maintien de la qualité de l'eau distribuée :
— par le contrôle des différents paramètres (pression, débit, résis- tivité, pollution, perte de charge),
— par le changement des filtres, chaque batterie comprend 3 carters de 42 cartouches de porosité 1 μm,
— par la régénération des lits mélangés intervenant pour un volume d'environ 40 000 m³.
Le principe est d'avoir toujours au moins un lit mélangé régénéré en attente.
La centrale n° 1 dispose d'une unité de polissage permettant un débit théorique de 60 m³/h (5 lits mélangés).
Deux unités de polissage sont associées à la centrale n° 2 ; elles per- mettent des débits théoriques de 60 m³/h pour l'une (4 lits mélangés) et 100 m³/h pour l'autre (6 lits mélangés). (Schéma n° 6)
Le dispositif bactéricide est plus sophistiqué que pour la centrale n° 1 et un recyclage de l’eau vers la centrale primaire est possible. (Schéma n° 7)
2.7. La distribution
Chaque unité de polissage dispose de barillets de distribution départ et retour. Entre ces barillets, l'eau désionisée circule en per- manence dans les boucles qui alimentent des antennes sur lesquelles sont branchés les différents utilisateurs.
Le contrôle de la qualité se fait par un suivi quasi permanent de la résistivité, de la pollution particulaire, de la pression. Mensuelle- ment, ce contrôle est complété par une analyse détaillée par spectro- graphie d’émission.
À côté des besoins d'eau désionisée propres à la production des semi-conducteurs, il existe une demande pour l’alimentation de certains circuits.
— Circuits de climatisation
— Eau glacée (5 — 10 °C)
L'eau désionisée à 1,4 MΩ·cm est conditionnée par du sulfite de sodium (antioxygène), des polyphosphates alcalins et du benzo- triazole (anticorrosion).
— Eau surchauffée
L’eau désionisée à 14 MΩ·cm est conditionnée par de l’hydrate d’hydrazine (antioxydant), des polyphosphates alcalins et des amines filmantes (anticorrosion).
— Eau de pulvérisation des humidificateurs d’air.
— Circuits de refroidissement
Il s’agit de circuits fermés :
— 11 — 16 °C,
— 26 — 31 °C.
Les paramètres du traitement sont contrôlés une fois par semaine.
3. CONTRAINTES D’EXPLOITATION
La production d'eau désionisée nécessite la mise en œuvre de moyens techniques et humains importants. Nous avons vu en détail, tout au long de deux articles, l'ensemble des installations. Celles-ci ne seraient rien sans la présence des personnes qui permettent leur bon fonctionnement.
Le maintien de la qualité de l'eau désionisée est le souci principal de l'équipe chargée du traitement des eaux ; ceci entraîne des contraintes non négligeables. Sur 25 personnes, 16 travaillent en 3 × 8, 365 jours par an, pour assurer l'exploitation des différentes unités de traitement. Les autres s’occupent des contrôles, de la gestion des réactifs (ex. : 700 tonnes d’acide chlorhydrique et 500 tonnes de soude utilisées en 1976 pour les régénérations).
[Schéma : Schéma n° 4] [Schéma : Schéma n° 2]du support technique et des études. En effet, la production d’eau désionisée n'est pas un procédé figé, elle demande à être optimisée en permanence tant sur le plan de la qualité que sur celui des coûts.
Cet aspect économique n'est pas négligeable compte tenu des moyens mis en œuvre. L’enveloppe budgétaire, qu'il s’agisse des investissements ou des frais d'exploitation, trouve son expression dans le prix de revient du m³ d'eau :
— eau clarifiée 0,55 f,
— eau désionisée 16,13 f.
Ces prix tiennent compte de l’amortissement des installations, du coût des réactifs et de la main-d’œuvre.
L'optimisation sur le plan de la qualité passe par des études et des expériences sur un matériau, l'eau, qui nous montre tous les jours davantage l’étendue de nos méconnaissances.
CONCLUSION
Malgré la complexité de l'entreprise, les contraintes d'exploitation et le sentiment très net de ne pas maîtriser fondamentalement l'ensemble des processus chimiques, le traitement des eaux, à travers l'expérience de tous ceux qui, à l'Usine, participent à ce travail, est une activité passionnante. Le sentiment de notre utilité est conforté par le fait que les résultats obtenus permettent de satisfaire les besoins de nos clients.
Bibliographie
— Cours résines échangeurs d’ions (I.B.M. — 1977), par M. Lumbroso,
— Documents internes I.B.M.
Nota. — Le traitement primaire, la décarbonatation et la centrale de déminéralisation n° 2 sont des réalisations Degrémont. La centrale de déminéralisation n° 1 est une réalisation C.E.C.A.
R. Dudon