Au début de l’année 2002, le bassin Artois-Picardie comptait 119 stations d’épuration en domaine public (dont 106 suivies par les SATESE), de capacité inférieure ou égale à 1000 EH. Ce parc correspond à un peu plus de 25 % du nombre total de stations (à savoir 400 unités), pour 0,84 % de la capacité totale assainie (estimée à 6 300 000 EH). Leur nombre est amené à s’accroître dans les années à venir. Il ne s'agit pas de réhabilitation ou de renouvellement de l’existant, mais bel et bien d’une augmentation du nombre total d'ouvrages. L'âge moyen des stations est en effet de l’ordre de 12 ans.
Sous le poids de la réglementation, les réali-
[Photo : Station d’épuration (crédit : Agence de l'Eau Artois-Picardie)]
[Photo : Évolution du parc de stations (0 à 1 000 EH).]
lagunage naturel (38,4 %). Le traitement biologique par infiltration - percolation occupe moins de 10 % du parc. Les autres techniques sont quelque peu marginalisées (8 %).
Gestion des stations du bassin
Une majorité des stations de capacité inférieure à 1 000 EH sont exploitées en régie directe, avec 90 sites sur 119 au total. Les 29 installations restantes sont exploitées par différentes sociétés fermières.
[Photo : Répartition de la charge du parc par technique.]
Évolution de la répartition des techniques
- - La mise en œuvre des lagunages naturels est de plus en plus fréquente. Entre 1990 et 2000, cette technique représentait 48,1 % des stations contre 43,5 % sur la décennie précédente ; 54,2 % des lagunes naturelles ont ainsi moins de 10 ans.
- - Le pourcentage de boues activées est légèrement moins important depuis dix ans avec 31,5 % des réalisations contre 37 % entre 1980 et 1990.
- - L’infiltration - percolation gagne des parts avec 13 % des réalisations des dix dernières années contre seulement 6,5 % entre 1980 et 1990. Près de 64 % des traitements par infiltration - percolation ont moins de 10 ans. Ces installations se multiplient de sorte que le nombre d’unités double quasiment tous les dix ans. Ainsi 54 nouvelles réalisations ont été enregistrées dans les dix dernières années.
- - Les dix dernières années ont été défavorables au lagunage aéré, dont les parts.
Notons que le bassin dénombre plus de 1 472 communes de moins de 2 000 habitants (dont 1 405 communes de moins de 1 000 habitants), non raccordées à un système d'assainissement, soit une population de l'ordre de 490 000 habitants.
Certaines d’entre elles ont déjà lancé des études de schéma et engagé le zonage de l’assainissement dans le but de déterminer les zones d’assainissement non collectif et les autres, dont les eaux usées convergeront vers un système collectif d’épuration.
Un certain nombre de ces communes opteront pour l’assainissement collectif de tout ou partie de leurs eaux usées. Dans le Nord, le préfet a déjà arrêté 66 agglomérations, au sens de la Loi sur l’eau du 3 janvier 1992, auxquelles sera probablement associée une station d’épuration de moins de 2 000 EH.
Types des techniques mises en œuvre
Les deux techniques majoritaires sur le bassin sont le traitement biologique par boues activées (47,3 % de la capacité du parc) et le lagunage naturel (38,4 %). Le traitement biologique par infiltration - percolation occupe moins de 10 % du parc. Les autres techniques sont quelque peu marginalisées (8 %).
[Photo : Lagune naturelle de St Georges (62) gérée par le Syndicat de la vallée de la Canche.]
régressent un peu, mais surtout aux disques biologiques, qui n’ont vu qu’une nouvelle réalisation depuis 1985.
L’intérêt croissant pour les filtres plantés de roseaux au niveau national ne se répercute pas dans le bassin : aucune nouvelle installation de ce type n’a été recensée en domaine public depuis la construction en 1985 de la station expérimentale de Pont-Rémy (80), aujourd’hui jugée obsolète et amenée à disparaître très prochainement.
[Photo : Mode d’exploitation des stations 0-1 000 EH]
avec beaucoup de prudence : les dysfonctionnements observés proviennent-ils de la nature des matériaux utilisés, d’erreurs de conception ou de dimensionnement et/ou de spécificités locales ?
Lagunes naturelles : un peu plus de la moitié des lagunes naturelles avec un ou plusieurs bassins à macrophytes assurent un niveau D3, contre moins de 20 % de lagunes qui en sont privées. Les rendements obtenus sont légèrement supérieurs avec la première configuration. Les installations à macrophytes présentent pourtant une charge moyenne en DBO₅ plus élevée avec 57,4 %.
[Photo : Répartition des techniques par années]
Influence de la taille des agglomérations
Les techniques employées sont souvent en inadéquation avec les préconisations issues des fascicules et documents de référence (en particulier la circulaire du 17 février 1997). Ainsi plus de 35 % des traitements par boues activées ont une capacité nominale inférieure à 400 EH. Près de 40 % de ces installations sont des traitements séquentiels combinés (configuration en un bassin unique travaillant par cycles d’aération — vidange). Le lagunage naturel est bien représenté dans toutes les classes de capacité, avec une légère prédominance pour des capacités inférieures à 600 EH.
[Photo : Répartition des techniques par gamme de capacités]
Performances de traitement
Les performances épuratoires (mesurées lors des bilans SATESE) ont été rapportées à celles définies dans la circulaire du 17 février 1997.
- - Boues activées : ces techniques permettent d’atteindre les performances les plus élevées et 60 % d’entre elles atteignent le niveau D4 ;
- - Infiltration sur sable : la moitié des installations assurent un niveau de performance du niveau D4. Cette technique présente des rendements très comparables aux boues activées à part sur l’azote global. En revanche, le traitement par infiltration sur d’autres supports que le sable n’a guère été concluant : aucune installation de ce type ne respecte l’objectif D4. Néanmoins, vu son faible nombre, cette variante ne doit pas être définitivement écartée mais plutôt considérée contre 47,2 % pour les lagunes à bassins microphytes uniquement ;
- - Lagunes aérées : 3 lagunes sur 5 respectent le niveau D2 ;
- - Biodisque : l’unique installation respecte cet objectif ;
- - Lits bactériens : parmi les deux lits bactériens en configuration classique, un seul atteint le niveau D2. Le seul lit bactérien compact (qui a fait l’objet d’un suivi analy-
[Photo : Les constats dressés font apparaître la nécessité de mener une réflexion rigoureuse pour choisir une solution adaptée]
tique particulier) ne respecte pas cet objectif.
- Filtre planté de roseaux : le seul filtre planté de roseaux du bassin présente des résultats très médiocres.
Perspectives
Les constats dressés au terme de cette première phase font apparaître la nécessité de mener une réflexion rigoureuse pour choisir une solution adaptée. Le choix d'une technique impose en effet une analyse multiparamètres libre de tout a priori et basée sur quatre grands axes :
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les contraintes “Aval” : la prévention des pollutions et la reconquête de la qualité des eaux passent par la définition d’objectifs de réduction des flux de pollution par les services chargés de la police des eaux.
Les performances épuratoires à attendre par type de traitement ont été définies dans la circulaire du 17 février 1997. Ce texte associe d’ailleurs les niveaux de performance à des objectifs de qualité et à la capacité de dilution du rejet par l'exutoire.
Le choix d’une filière est donc très fortement conditionné par le niveau de performance à atteindre. Il s'agit d'être cohérent entre l'objectif de qualité assigné au milieu naturel et les performances du traitement mis en œuvre. Dans notre bassin, l’imposition aux collectivités de normes sévères conduit souvent à une seule technique (boues activées), onéreuse tant en investissement qu’en fonctionnement.
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les contraintes “Amont” : le choix et le dimensionnement des outils épuratoires dépendent des caractéristiques qualitatives et quantitatives de l’effluent à traiter. D'un point de vue hydraulique, les variations de débits, influencées principalement par la gestion du temps de pluie et du type de réseau mis en œuvre, doivent être estimées et constituent un paramètre important de choix. Les charges de pollution à l’entrée des installations (variabilité et concentrations en polluants) sont d'une part liées à la gestion du temps de pluie, mais aussi au type de population raccordée, qui peut être fixe ou variable. Le développement économique des communes rurales doit être suivi d'un traitement des eaux approprié.
En outre, aucune source d’eaux usées non urbaines et non maîtrisée ne doit être tolérée. Des conventions de rejet doivent être passées entre les producteurs éventuels et la commune, prévoyant si nécessaire des procédés spécifiques de traitement à la source avant rejet dans le réseau public de collecte. Certaines techniques réputées plus souples vis-à-vis de la nature de l’influent et/ou de la quantité d’eaux résiduaires à traiter peuvent être préférées en cas d'incertitude sur l’évolution des contraintes en amont.
Enfin, la taille de l'agglomération à desservir a une importance dans le choix d'une filière de traitement. La circulaire du 17 février 1997 définit les domaines d’application préférentiels des principales techniques en matière d’assainissement des communes rurales.
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contraintes liées au site d’accueil : l'harmonisation du couple site d’accueil — outil de traitement est fondamentale. En premier lieu, après s’être assuré de la compatibilité des documents d’urbanisme, le choix d'une technique peut être guidé par la qualité du sol et du sous-sol.
L’aspect hydrogéologique doit également être considéré. La proximité chronique de la nappe phréatique peut compliquer fortement la mise en œuvre du dispositif.
La surface au sol occupée par les ouvrages est importante même si ce facteur n'est pas limitant en milieu rural ; cependant, il est possible que la surface disponible soit limitée à proximité des points de production et/ou de rejet. Dans ce cas, il sera nécessaire de mettre en œuvre une filière de traitement intensive (boues activées, filtration sur supports grossiers) plutôt qu’extensive (lagunage naturel, lagunage aéré, infiltration-percolation).
Enfin, les besoins énergétiques peuvent désavantager les filières intensives en milieu isolé, privé d’alimentation électrique, au profit des filières rustiques.
L’intégration paysagère ainsi que la limitation des nuisances sonores et olfactives sont également des éléments importants à considérer.
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contraintes financières : ces contraintes sont bien entendu très sensibles et doivent être prises en compte dans le choix final. Les coûts de fonctionnement, trop souvent négligés et sous-estimés lors du choix, doivent être quantifiés et comparés. Ils doivent intégrer la nature des prestations à accomplir, la fréquence des visites, la qualification des personnels, la durée de chaque type d’intervention ainsi que les divers consommables et coûts énergétiques, complétés (dans la mesure du possible) par le coût de traitement des sous-produits, en particulier des boues.
Conclusion
La réflexion engagée par le groupe de travail “Petites Stations d’épuration” de l'Agence de l’eau Artois-Picardie a mis en exergue la prédominance des traitements par boues activées et par lagunage naturel sur le bassin. La tendance actuelle est d’ailleurs à la mise en œuvre quasi exclusive de ces deux techniques. Cependant, les performances épuratoires observées s’avérant décevantes, on peut s'interroger, au cas par cas, sur la pertinence de la solution technique proposée. Parmi les différentes phases d’un projet d'épuration (choix, conception, réalisation et exploitation), force est de reconnaître que la première étape, celle du choix de la technique, revêt une importance capitale.
Les solutions épuratoires proposées aux petites collectivités étant variées, le groupe de travail a jugé nécessaire de proposer aux maîtres d’ouvrage un outil efficace d'aide au choix basé sur une analyse multiparamètres ; il aura la forme d'une plaquette qui sera diffusée d'ici fin 2003, intitulée “Choisir sa filière d’épuration collective en milieu rural”.