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Les normes européennes dans le domaine de l'eau potable

28 decembre 1982 Paru dans le N°70 à la page 30 ( mots)
Rédigé par : C. GLEIZES

Un programme d'actions des Communautés Européennes en matière d'environnement a été élaboré en 1973, remanié et complété en 1977 puis 1981, pour prendre en compte la qualité des ressources naturelles et du cadre de vie dans la définition et l'organisation du développement économique. L'environnement y est conçu de façon assez large et considéré comme l'ensemble des ressources naturelles endommagées ou surexploitées du fait du développement économique et social. C'est aussi la qualité du cadre et des conditions de vie. Ce programme comporte depuis son origine une double préoccupation : d'une part assurer sur des bases communes la protection des milieux naturels et des habitants dans les États membres et d'autre part éviter que des écarts dans la politique des États membres dans ce domaine induisent des distorsions importantes de concurrence.

La politique communautaire de l'environnement vise à réaliser ce double objectif en assignant à la Communauté et aux États membres la réalisation d'actions qui peuvent se regrouper dans les trois grandes catégories suivantes :

— réduction des pollutions et des nuisances, — gestion rationnelle de l'espace et protection de la faune et de la flore, — actions de soutien : recherche, actions de sensibilisation et de formation.

Dans la première catégorie se situent les actions relatives à la réduction des nuisances acoustiques et de la pollution atmosphérique, et à la gestion rationnelle des eaux. Dans ce domaine de la gestion des eaux, la Communauté a adopté trois directives concernant :

— la qualité requise des eaux superficielles destinées à la production d'eau alimentaire, — les méthodes de mesure et la fréquence des échantillonnages et de l'analyse des eaux superficielles destinées à la production d'eau alimentaire, — la qualité des eaux destinées à la consommation humaine.

Contrairement à divers programmes d'environnement d'autres instances internationales comme les Nations Unies, l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS), l'Organisation de Coopération et de Développement Économique (OCDE), qui se traduisent par des études et des recommandations, celui des Communautés Européennes se traduit par des directives contraignantes pour les États membres. La directive a force de loi et s'impose aux États membres avec un caractère de contrainte juridique. Toutefois les États membres ont le choix des moyens internes législatifs, réglementaires ou administratifs pour appliquer les objectifs et les principes contenus dans une directive qui doit donc être reprise dans la législation de chaque État membre.

I - DIRECTIVE CONCERNANT LA QUALITÉ REQUISE DES EAUX SUPERFICIELLES DESTINÉES À LA PRODUCTION D'EAU ALIMENTAIRE (n° 75.440 du 16 juin 1975)

Cette directive définit les exigences auxquelles doit satisfaire la qualité des eaux superficielles destinées à être utilisées pour la production d'eau alimentaire après avoir subi un traitement approprié. Il s'agit donc de la qualité de l'eau brute dans son milieu naturel avant son prélèvement et son traitement ultérieur pour utilisation.

Les eaux superficielles sont classées suivant leur qualité en trois catégories A1, A2, A3, chaque catégorie correspondant à un procédé de traitement-type :

A1 : traitement physique simple et désinfection (filtration rapide et désinfection).

A2 : traitement normal physique, chimique et désinfection (préchloration, coagulation, floculation, décantation, filtration, désinfection).

A3 : traitement physique, chimique poussé, affinage et désinfection (chloration au break-point, coagulation, floculation, décantation, filtration, affinage sur charbon actif, désinfection).

Ces trois catégories A1, A2, A3 de la qualité des eaux sont définies par 46 paramètres dont les valeurs sont fixées dans une annexe avec pour chaque paramètre et pour chaque catégorie une valeur guide et une valeur impérative. Cependant, pour certains paramètres, une des valeurs guide ou impérative n'est pas fixée et parfois (cobalt, nickel, vanadium) aucune valeur n'est indiquée. Ces valeurs numériques doivent être ultérieurement complétées.

Les principales obligations faites aux États membres sont les suivantes : — fixer pour tous les points de prélèvements ou pour chaque point les valeurs des paramètres qui doivent être respectées. Les valeurs ainsi fixées ne peuvent être moins contraignantes que les valeurs impératives lorsqu'elles sont indiquées. La Communauté recommande d'adopter les valeurs guides plus contraignantes que les valeurs impératives.

aucune valeur ne figure dans l’annexe, les États membres peuvent ne pas fixer de valeurs,

– prendre les dispositions nécessaires pour que les eaux superficielles soient conformes aux valeurs fixées,

– définir, dans le cadre d'une politique d’objectifs de qualité, un plan d’actions avec fixation d'un calendrier pour l’amélioration de la qualité des eaux brutes notamment celles de catégorie A3,

– ne pas utiliser des eaux brutes de qualité plus mauvaise que A3 sauf dérogation exceptionnelle accordée par l’État membre et notifiée à la Commission.

Les principales valeurs impératives qui ont été fixées sont les suivantes :

A1 A2 A3
Coloration mg/l 20 100 200
Température °C 25 25 25
Nitrates mg/l 50 50 50
Zinc mg/l 3 5 5
Arsenic mg/l 0,05 0,05 0,1
Cadmium mg/l 0,005 0,005 0,005
Chrome mg/l 0,05 0,05 0,05
Plomb mg/l 0,05 0,05 0,05
Sélénium mg/l 0,01 0,01 0,01
Mercure mg/l 0,001 0,001 0,001
Baryum mg/l 0,1 1 1
Cyanure mg/l 0,01 0,01 0,05
Sulfates mg/l 250 250 250
Phénols mg/l 0,001 0,005 0,1
Hydrocarbures mg/l 0,05 0,2 1
Carbures aromatiques mg/l 0,0002 0,0002 0,001
Pesticides mg/l 0,001 0,0025 0,005

Il n’existe pas, dans la législation française actuellement en vigueur, de disposition concernant la qualité minimale des eaux brutes. En effet seule une obligation de résultat est exigée des distributeurs d'eau conformément à l'article L 19 du Code de la Santé publique et au décret 61-859 du 1ᵉʳ août 1961 qui prévoient que toute eau livrée à la consommation doit être potable.

Une première application de cette directive a été faite dans le cadre de la politique des objectifs de qualité des rivières mise en place par la circulaire du 17 mars 1978 dans le cadre de la loi du 16 décembre 1964 relative au régime et à la répartition des eaux et à la lutte contre leur pollution. Ainsi les classements A1, A2, A3 des eaux brutes sont utilisés dans l’élaboration des cartes départementales d’objectif de qualité qui sont des documents d'orientation représentant de façon synthétique les objectifs que se fixe le département dans le domaine de l'eau.

L'application sanitaire de la directive sera faite sur les bases suivantes :

– pour les eaux dont la qualité est égale ou meilleure que A3, l’adaptation du traitement aux caractéristiques de l'eau brute sera faite au niveau départemental. Cela est possible car l’article 3 du décret susvisé du 1ᵉʳ août 1961 a prévu que la réalisation ou la modification de toute adduction d'eau potable doit être autorisée par arrêté du préfet après avis du conseil départemental d’hygiène,

– pour les eaux de qualité plus mauvaise que A3 il est prévu une autorisation ministérielle.

Il est cependant nécessaire de modifier le décret du 1ᵉʳ août 1961 pour fixer les modalités de surveillance de la qualité des eaux (notamment de l’eau brute) et indiquer les principaux éléments de la procédure d'autorisation.

II — DIRECTIVE RELATIVE AUX MÉTHODES DE MESURE ET À LA FRÉQUENCE DES ÉCHANTILLONNAGES ET DE L’ANALYSE DES EAUX SUPERFICIELLES DESTINÉES À LA PRODUCTION D’EAU ALIMENTAIRE (n° 79-869 du 9 octobre 1979)

Cette directive fixe pour chacun des 46 paramètres retenus pour la classification de la qualité des eaux brutes :

– la limite de détection, la précision et l'exactitude auxquelles doit répondre la méthode d’analyse utilisée,

– la ou les méthodes de référence.

Elle fixe également les fréquences minimales annuelles d'échantillonnages et d’analyses en fonction :

– de la pollution desservie par le captage,

– de chacun des paramètres qui sont classés en trois catégories (I, II, III) :

  Catégorie I : pH, coloration, matières en suspension, nitrates, DBO, DCO.  
  Catégorie II : fer, manganèse, phénols, coliformes.  
  Catégorie III : cadmium, chrome, plomb, mercure, hydrocarbures, pesticides, les paramètres courants (catégorie I) étant mesurés plus fréquemment,

– de la qualité de l'eau brute (A1, A2, A3). Les eaux de mauvaise qualité doivent faire l'objet de plus d’analyses que les eaux de bonne qualité.

III — DIRECTIVE RELATIVE À LA QUALITÉ DES EAUX DESTINÉES À LA CONSOMMATION HUMAINE (n° 80-778 du 15 juillet 1980)

Cette directive ne vise plus l'eau dans son site naturel mais l'ensemble des eaux livrées à la consomma

tion humaine soit directement (réseau d'eau potable, eau de table), soit indirectement (fabrication de denrées alimentaires). Ces eaux peuvent avoir ou non subi un traitement. Cette directive ne s'applique pas aux eaux minérales, ni aux eaux médicinales.

Les dispositions visent essentiellement :

  • les normes de potabilité (qui sont données par 62 paramètres),
  • les différents types d’analyse de contrôle nécessaire ainsi que les fréquences des prélèvements,
  • les méthodes d’analyse permettant l'appréciation quantitative des concentrations.

a) Les normes de potabilité

62 paramètres choisis pour leur représentativité de la qualité des eaux destinées à la consommation humaine sont énumérés en annexe de la directive. Pour 40 de ces paramètres une concentration maximale admissible est imposée et un niveau guide est recommandé. Pour les autres des niveaux guides sont seulement proposés et les États membres ne sont pas tenus d'utiliser les paramètres correspondant tant que le Conseil des communautés n’a pas arrêté une concentration maximale admissible.

Ces paramètres sont regroupés dans les rubriques suivantes :

  • A : Paramètres organoleptiques : couleur, turbidité, odeur et saveur.
  • B : Paramètres physico-chimiques : température, pH, chlorures, sulfates, magnésium.
  • C : Paramètres concernant des substances indésirables : nitrates, nitrites, ammonium, hydrocarbures, phénols, agents de surface.
  • D : Paramètres toxiques : arsenic, cadmium, chrome, mercure, plomb.
  • E : Paramètres microbiologiques : coliformes totaux, streptocoques fécaux, clostridiums sulfitoréducteurs.

En outre dans le cas où l’eau subit un traitement d'adoucissement ses caractéristiques doivent respecter une concentration minimale en ce qui concerne la dureté totale (60 mg/l d'ions Ca) et l’alcalinité (30 mg/l d'ions HCO₃), le pH et l’oxygène dissous (sans valeur fixée pour le moment) de façon à éviter pour ces trois derniers paramètres que l'eau soit agressive.

Les normes actuellement en vigueur sont fixées par l'arrêté du 10 août 1961 qui devra être modifié. Il est envisagé de modifier la législation de la façon suivante :

1° Des normes seront fixées par voie réglementaire. Les paramètres concernés seront :

a) ceux pour lesquels la directive a fixé une concentration maximale admissible sauf • pour deux paramètres où la norme sera plus sévère : couleur et turbidité, • pour trois paramètres où il sera demandé à la commission une dérogation pour fixer des normes moins sévères : azote kjeldahl, hydrocarbures et phénols.

b) ceux pour lesquels la directive a fixé seulement un niveau guide mais qui paraissent suffisamment importants pour exiger une concentration à ne pas dépasser : chrome, dureté totale, cuivre, zinc.

Pour les principaux paramètres les valeurs suivantes seront adoptées :

Paramètres organoleptiques

Coloration ... 15 mg/l (échelle platine-cobalt)  
Turbidité .... 6 m (disque de Secchi)  
Odeur ........ absence avec un taux de dilution de 2 à 12 °C  
Saveur ...... absence avec un taux de dilution de 2 à 12 °C

Paramètres physico-chimiques

Température ........ 25 °C maximum  
pH ................ compris entre 6,5 et 9,5  
Chlorures ........... 250 mg/l  
Sulfates ............ 250 mg/l  
Magnésium .......... 50 mg/l  
Dureté totale ....... 50 degré français

Substances indésirables

Nitrates ............ 50 mg/l  
Nitrites ............ 0,1 mg/l  
Ammonium ........... 0,5 mg/l  
Fer ................. 0,2 mg/l  
Manganèse ........... 0,05 mg/l  
Cuivre .............. 1 mg/l en écoulement  
..................... 3 mg/l après stagnation de 12 heures  
Zinc ................. 5 mg/l  
Azote kjeldahl ....... 2 mg/l  
Hydrocarbures ....... 0,1 mg/l  
Phénols ............. 0,001 mg/l

Substances toxiques

Arsenic .......... 0,05 mg/l  
Cadmium .......... 0,005 mg/l  
Chrome ........... 0,05 mg/l  
Mercure .......... 0,001 mg/l  
Plomb ............ 0,05 mg/l

Paramètres microbiologiques

Coliformes totaux ........ absence dans 100 ml  
Coliformes fécaux ........ absence dans 100 ml  
Streptocoques fécaux ..... absence dans 100 ml  
Clostridium sulfito-réducteurs ............... absence dans 20 ml

2° Pour certains paramètres, seule une recommandation sera faite par circulaire : il s'agit des paramètres pour lesquels seul un niveau guide a été donné et qui n’ont pas fait l'objet d’une concentration à ne pas dépasser (cf. paragraphe 1.b précédent).

La circulaire du 15 mars 1962 relative aux instructions générales concernant les eaux d’alimentation et la glace alimentaire devra être également reprise.

a) Analyses de contrôle : type et fréquence

L’annexe II de la directive fixe les analyses types nécessaires au contrôle de la qualité des eaux souterraines et la fréquence minimale des prélèvements correspondants.

Trois types de contrôles sont prévus :

  • — un contrôle minimal : C1 qui concerne seulement certains paramètres des catégories A, B et E,
  • — un contrôle courant : C2 qui concerne seulement certains paramètres des catégories A, B, C et E,
  • — un contrôle périodique : C3 qui concerne les analyses prévues en C2 plus certains paramètres fixés par l'autorité nationale.

La périodicité des analyses est prévue pour chaque type de contrôle en fonction de la population concernée ou du volume d'eau distribuée.

L’article 6 du décret du 1er août 1961 prévoit que la périodicité des analyses de contrôle pratiquées sur les réseaux d’adduction d'eau est fixée par le préfet. Les modalités de contrôle minimum ont été définies par l'arrêté du 15 mars 1962. Ce texte devra être révisé pour introduire les fréquences minimales en fonction des populations concernées.

b) Méthodes d’analyses

Pour les paramètres caractéristiques de la qualité des eaux, la directive indique que les méthodes d’analyses de référence permettent d’apprécier les concentrations des éléments présents dans l’eau.

Il est précisé que les laboratoires utilisant d'autres méthodes doivent s’assurer qu’elles conduisent à des résultats équivalents ou comparables à ceux obtenus par les méthodes de références.

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