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Les grandes pompes pour transport d'eau

30 juillet 1991 Paru dans le N°147 à la page 73 ( mots)
Rédigé par : Cord-henrich LAUX

[Photo : Fig. 1 : Dispositions les plus courantes des roues à aubes dans les pompes de transport d’eau, de construction horizontale et verticale.]

Les pompes de transport d’eau s’emploient pour le refoulement d’eau potable vers les villes situées à plus haute altitude que les sources qui les alimentent (Caracas, Venezuela), pour l’irrigation des plantations éloignées (Moghan, Iran), pour l’amenée d’eau de refroidissement dans des centrales thermiques érigées à proximité de mines de charbon (Tutuka, Afrique du Sud). Des pompes de transport pourvoient en eau de mer les points d’injection distants de centaines de kilomètres (Uthmaniyah, Arabie Saoudite). Cette eau de mer est alors injectée dans le champ pétrolifère au moyen de pompes spéciales, pour produire la pression nécessaire à l’émergence du pétrole brut.

Choix adéquat des pompes de transport d’eau

Les pompes de transport d’eau comportent en toutes dispositions des roues à aubes, installées en position horizontale ou verticale (figure 1). Les détails de construction les plus courants des pompes de ce genre sont représentés sur la figure 2. Le choix optimum, pour une pompe destinée à cet usage, impose au constructeur les critères suivants, dont il lui faut dûment tenir compte.

Analyse de l’eau

Dans les cas où l’utilisateur indique dans sa spécification que l’eau est propre, la limite supérieure de la vitesse de rotation n’est déterminée que par la pression disponible à l’entrée de la roue à aubes (NPSH). Le matériau utilisé pour le corps de pompe sera la fonte ductile (sphéroïdique) ou l’acier coulé, avec des roues à aubes réalisées le plus souvent en acier au chrome.

Dès que l’eau contient des matières solides en suspension ou en solution, il faut limiter la vitesse de rotation, du fait que la perte de matériel par abrasion augmente avec la troisième puissance de la vitesse d’écoulement. C’est pour cette raison qu’on donnera toujours la préférence à une pompe travaillant à vitesse de rotation plutôt faible.

Les matériaux employés ici seront les mêmes que pour l’eau propre. Toutefois, les parties qui sont exposées à des vitesses élevées, telles que les anneaux à labyrinthes, sont pourvues d’un revêtement de stellite, aux fins d’assurer une différence de dureté d’au moins 50 DB entre les surfaces d’étanchéité, l’une fixe et l’autre en rotation.

Lorsqu’il s’agit de refouler un liquide corrosif, tel que l’eau de mer, il faut abaisser à des valeurs encore moindres les limites de vitesses auxquelles l’érosion du matériel se produit. Dans les pompes à eau de mer, le matériau choisi pour la bâche et les roues à aubes est un acier inoxydable 316, tandis que les bagues d’usure sont pourvues d’un revêtement de stellite.

Hauteur d’aspiration

Le NPSH disponible à l’entrée, aux pompes de transport, se monte normalement à une valeur NPSH de 11 à 18 m, ce qui signifie que ces pompes

[Photo : Fig. 2 : Pompe de transport d’eau.]

… doivent être implantées à une profondeur de 1 à 8 m au-dessous du niveau d’aspiration le plus bas.

Disposition avec pompe nourricière

C’est la hauteur d’amenée à l’entrée de la pompe qui limite la vitesse de rotation de cette dernière. Mais plus la vitesse est basse, plus grand sera en revanche le diamètre de la roue à aubes, et avec lui les dimensions de la pompe tout entière, dont le coût augmentera en conséquence.

Aux fins de réduire les frais investis dans l’installation de la pompe, il peut être avantageux de recourir à une pompe nourricière établie pour la faible hauteur de charge existante et servant à l’amenée d’eau à la pompe principale, dont la vitesse de rotation peut alors être plus élevée. Le plus souvent, ces deux machines assemblées seront d’un coût inférieur à celui d’une pompe principale tournant à faible vitesse.

Disposition sans pompe nourricière

Si l’on ne tient pas compte des frais plus élevés dus au coût de la pompe en elle-même, l’installation d’une pompe unique, sans étage d’amenée, présentera les avantages suivants :

  • — diminution de l’encombrement (permettant de réduire le coût du bâtiment) ;
  • — réduction du nombre de tuyaux et organes de fermeture (abaissement supplémentaire du coût de l’installation) ;
  • — réduction de l’approvisionnement en pièces de réserve ;
  • — suppression du train d’engrenages.

Nombre de pompes

Plus le nombre de pompes installées pour le même débit total est grand, plus il est aussi possible de réduire, à vitesse de rotation constante, la hauteur de charge nécessaire à l’entrée des roues. En revanche, le choix d’un grand nombre de pompes va de pair avec la grandeur de chacune d’elles et par là avec un abaissement du rendement d’ensemble. Il y a donc un nombre de pompes optimum qu’il faudra déterminer suivant les conditions existant aux limites du système, en tenant compte des éléments ci-après :

  • — Place nécessaire. Le coût du bâtiment ainsi que les frais de fourniture et de montage d’équipements auxiliaires augmentent avec le nombre des pompes à installer.
  • — Pompe de réserve. Il faut prévoir pour chaque système de pompe un certain nombre de machines de réserve. D’une manière générale, il faudrait disposer pour chaque groupe de trois pompes en service, d’une machine complète de réserve prête à démarrer.
  • — Surcharge. La répartition du débit total sur de nombreuses pompes de même grandeur peut conduire, en service, à certaines difficultés. Au cas où plusieurs pompes d’un système sont déclenchées, il peut arriver que celles qui restent en service viennent à fonctionner dans un domaine défavorable de leur ligne caractéristique (risque de cavitation par marche en surcharge).
  • — Puissance absorbée. Lorsque la puissance absorbée par les pompes est importante, il est indiqué de répartir cette charge sur plusieurs machines, pour réduire la pointe de courant lors du démarrage. C’est en particulier le cas lorsque l’alimentation du système de pompage n’est assurée que par un réseau électrique de faible capacité.

Durée de service

En répartissant la hauteur de refoulement nécessaire sur plusieurs étages, au lieu de la concentrer sur un seul, on abaisse les vitesses périphériques à la roue et par là les vitesses relatives à la surface des aubes :

(H_total = Σ u²/2g = const)

C’est un facteur de haute importance dans le cas d’une eau sablonneuse ou corrosive. La hauteur de refoulement fournie par chaque roue est moindre dans une pompe à plusieurs étages que dans un seul étage avec les mêmes conditions de marche, de sorte que les vitesses dans les labyrinthes sont plus basses, dans le premier cas, ce qui se traduit par une plus longue durée de service à la machine. Cela signifie que le rendement de la pompe à un seul étage diminuera, avec le temps, plus rapidement que dans la machine multicellulaire (fig. 3). Il est important de prévoir les pompes de transport pour un service permanent de longue durée. Une fiabilité absolue ainsi qu’une longue durée de service sont donc des qualités de haute importance.

Coups de bélier

Les pompes de transport d’eau sont souvent insérées dans des systèmes de conduites de grande longueur, où il convient de tenir compte des phénomènes de coups de bélier qui peuvent s’y produire, et pour la réduction desquels l’emploi de machines avec un moment d’inertie important peut apporter un avantage. C’est pour cette raison que la préférence se portera, le cas échéant, sur des pompes à vitesse modérée, eu égard au plus grand effet de volant (PD²) de leurs masses en rotation.

[Photo : Fig. 3 – Écarts dans le rendement optimum des deux pompes, l’une à un étage et l’autre à deux étages, en fonction de l’augmentation du jeu des labyrinthes (débit et hauteur de refoulement constants).]
[Photo : Pompe de transport pour eau de mer, du type HPDM 600-750-24/42 (Débit Q = 2,835 m³/s, hauteur de refoulement H = 384 m, puissance absorbée P = 12 820 kW). Matériaux : Corps de pompe ASTM-A-296-Ca-6NM Roue à aubes ASTM-A-296-CF3M Arbre AISI 329]
[Photo : Coupe en travers d’une pompe de transport d’eau à un étage.]

Entretien

Les pompes de transport d’eau sont fréquemment destinées à des contrées dans lesquelles on ne dispose guère de personnel de surveillance bien qualifié. Il est donc important d’assurer au mieux la simplicité d’entretien des pompes.

Il est avantageux de construire les pompes de ce genre avec un plan de joints horizontal. Cette construction permet un démontage facile, sans qu’il soit nécessaire de séparer les brides de raccordement aux conduites d’aspiration et de refoulement.

Pour les pompes verticales, la préférence va à la disposition avec bâche tubulaire, dans laquelle le rotor tout entier, avec le diffuseur, peut être retiré du corps en bloc. Les frais d’entretien sont ainsi réduits au minimum.

Optimisation de la pompe

Le premier pas dans cette étude consiste à déterminer la plus haute vitesse de rotation possible. Elle dépend de la charge disponible à l’entrée (NPSH), de même que du choix de la disposition de la roue ou des roues à aubes, à simple ou double entrée.

L’appréciation de la vitesse maximale est dictée par l’équation suivante :

\[ n_{\text{max}} = \frac{SS_{\text{asp}}}{(Q_{\text{côté}})^{0.5}} \,(NPSH\,Q\%)^{0.75} \]

Le chiffre d’aspiration caractéristique, rapporté au \(NPSH_{\text{cum}}\) et au débit correspondant au plus haut rendement, peut être évalué entre \(SS_{\text{asp}} = 170\ldots 190\), dans le système métrique. Ce chiffre d’aspiration est constant sur un large domaine de n. \(Q_{\text{côté}}\) est le débit par côté de roue, au meilleur rendement.

\(NPSH_{\text{cum}}\) est l’énergie totale nécessaire à l’entrée de la roue dans aucune perte de hauteur, et il faut que le NPSH disponible soit au moins égal ou supérieur à \(S_{\text{rot}} \times NPSH_{\text{cum}}\). Le coefficient de sécurité \(S_{\text{rot}}\) dépend de plusieurs facteurs :

  • — genre de liquide refoulé (eau potable, eau de mer),
  • — vitesse périphérique à l’entrée de la roue à aubes,
  • — matériau de la roue à aubes,
  • — grandeur et genre de construction de la machine,
  • — et enfin, garantie donnée pour la durée de service de la machine.

Le second pas de l’étude portera sur le choix de la vitesse de rotation spécifique :

\[ n_q = \frac{(Q_{\text{côté}})^{0.5}\, Z_{\text{rot}}}{H_{\text{tot}}^{0.75}} \]

Le rendement atteint par la pompe dépend en premier lieu de la vitesse spécifique de celle-ci. Dans les pompes à double entrée, les meilleures valeurs du rendement seront atteintes dans un domaine de \(n_{\text{rot}}/\text{étage}\) entre 25 et 45. Aux fins d’obtenir les meilleurs rendements possibles, on choisira les valeurs de \(n_{\text{rot}}\) les plus élevées de cette gamme, ce qu’on pourra obtenir par un choix convenable du nombre d’étages. Le rendement peut en outre être influencé par la conformation hydraulique de l’écartement des étages, le diamètre extérieur du diffuseur, et enfin par le diamètre de l’arbre.

Comparaison entre les pompes à un et à plusieurs étages

Les pompes de transport d’eau sont, dans le cas le plus usuel, équipées d’une entrée double, car les hauteurs de charge disponibles sur l’aspiration sont normalement assez faibles. La simplicité de surveillance et d’entretien, propre aux pompes à plan de joint horizontal, leur fait le plus souvent donner la préférence. De ce fait, ce sont dans de nombreux cas des pompes horizontales à double entrée et à un ou plusieurs étages qui trouvent application.

En s'insérant directement dans la conduite entre l’arrivée de l’eau et le refoulement. D’une façon générale, on peut dire que les pompes de ce genre, à un étage, se prêtent au transport de l’eau sur des hauteurs de refoulement atteignant jusqu’à 200 m, valeur qui peut même être encore quelque peu augmentée s’il s’agit d’eau propre.

La figure 4 montre des pompes à deux étages et à double entrée construites pour des hauteurs de refoulement de plus de 200 m, avec deux tubulures d’aspiration et une disposition de roues à aubes exactement symétrique par rapport à la bride de refoulement, ce qui assure la compensation totale de toutes les poussées axiales. D’autres avantages de cette disposition sont l’excellente conformation hydraulique de l’entrée, l’encombrement restreint, avec un poids minimum, et la répartition régulière des efforts dans la conduite de refoulement.

Plus d’une centaine de grosses pompes de ce genre, à deux ou trois étages, en disposition inversée par rapport à l’axe médian, sont en service dans le monde entier (figure 2).

Le tableau I fait ressortir, à l’appui d’un exemple, la différence entre deux pompes de ce genre, l’une à double entrée et à un étage (figure 5), l’autre à double entrée également, mais à deux étages (figures 2 et 4). Cette comparaison repose sur des conditions de refoulement identiques dans les deux cas : débit refoulé Q = 1 600 l/s, hauteur de refoulement H = 430 m, et vitesse de rotation du rotor n = 1 750 tr/min.

On peut conclure de cette comparaison qu’une pompe à un étage est en général d’un coût moins élevé, du fait qu’elle nécessite un moindre nombre de pièces. En revanche, elle sera en général plus lourde, elle aura le plus souvent aussi un rendement plus bas du fait d’un n plus faible. Par suite des vitesses d’écoulement plus élevées dans les canaux de la roue à aubes et dans les labyrinthes, elle ne peut être recommandée pour le refoulement de liquides contenant du sable ou des agents corrosifs.

Tableau I — Différences entre les pompes à un et à deux étages

Éléments Pompe à un étage Pompe à deux étages
Nombre de tours spécifiques par roue 17 (100 %) 28 (168 %)
Diamètre de la roue à la sortie des aubes (en mm) 968 (100 %) 724 (75 %)
Rendement 88 % 89 %
Vitesse d’écoulement dans la spirale double 100 % 72 %
Écartement des paliers 100 % 125 %
Diamètre de l’arbre 100 % 100 %
Poids du rotor 100 % 100 %
Vitesse dans le labyrinthe 100 % 72 %
1ʳᵉ vitesse critique (dans l’axe) 100 % 70 %
Flèche de l’arbre 100 % 135 %
Poids de la pompe* 100 % 85 %

*Il arrive dans certains cas qu’une pompe à deux étages soit plus légère que l’exécution à un étage. Le diamètre de la pompe à deux étages est moindre (à même puissance), et les deux étages peuvent être soumis séparément à l’épreuve de pression ; c’est pourquoi une réduction du poids est possible dans la disposition à deux étages.

Conclusion

Pour l’équipement de grandes stations de pompage, nous avons livré, parmi de grosses pompes mises en service depuis maintes années, des unités d’accumulation d’une puissance de 234 600 kW par machine, ainsi que des pompes de transport d’eau avec des puissances atteignant jusqu’à 60 000 kW par unité.

Il va de soi que tous les travaux et études de construction et de réception de telles machines n’ont été possibles qu’à l’aide d’essais sur modèles réduits. Cette méthode est appliquée depuis plusieurs décennies pour le développement et l’amélioration incessants de nouvelles machines hydrauliques. Par ce moyen, il est possible de contrôler le débit, la hauteur de refoulement, le NPSH nécessaire, ainsi que le rendement avant la mise en fabrication des diverses pièces d’une machine. D’autre part, l’essai sur modèle permet d’observer les conditions d’écoulement à l’entrée d’une pompe, par une fenêtre en plexiglas, de sorte qu’on peut prendre à l’avance les mesures de correction qui pourraient s’avérer nécessaires. Pour la transposition du modèle réduit à la pompe en grandeur d’exécution, il est important de veiller à un contrôle sévère de la qualité.

En plus des références relatives à l’exécution antérieure de pompes similaires, par leurs grandeurs en données de service, les spécifications stipulent très fréquemment, aujourd’hui, des contrôles de marche à pleine vitesse, en usine. Il s’agit par là de prouver que la pompe exécutée a un fonctionnement mécanique irréprochable, en particulier quant aux vibrations et à la valeur du NPSH.

L’assise de la machine au banc d’essai étant complètement différente de la stabilité assurée sur les fondations dans l’installation définitive, le comportement mécanique à l’essai en usine peut être tout autre, sous le rapport des vibrations, qu’après installation sur place. Quant au NPSH, il a été prouvé déjà plus d’une fois que la valeur obtenue en essai à vitesse réduite peut servir de base, par une relation du second degré, au calcul sous d’autres conditions. Il faut cependant observer certaines marges de sécurité, au-delà du NPSH à 3 %, pour tenir compte d’un service de durée ininterrompue.

À côté de travaux de recherches dans le domaine de l’hydraulique, d’éminents progrès ont été réalisés dans le choix des matériaux. Il est ainsi possible d’examiner, en tenant compte du liquide spécifié et des vitesses effectives, les matériaux prévus dans la construction de la pompe. Sur la base de ces divers travaux de recherches, une garantie de longue durée de service peut être assurée.

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