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Les fissures du barrage Marne

30 juillet 1987 Paru dans le N°111 à la page 64 ( mots)

Les barrages-réservoirs construits par l’I.I.B.R.S. (Institution interdépartementale des barrages-réservoirs du bassin de la Seine) ont deux objectifs essentiels : la défense contre les crues et le renforcement des débits d’étiage. Trois ouvrages principaux participent au programme de régularisation des eaux de la Seine et de ses affluents : le barrage de Pannecière-Chaumard, le barrage Seine et le barrage Marne. Un quatrième ouvrage, le barrage Aube, est en construction.

Le barrage Marne, d’une capacité de 350 millions de m³, crée à la cote 139,70 une retenue de 4 800 hectares située à une quinzaine de kilomètres au sud-ouest de Saint-Dizier et alimentée par dérivation des eaux de la Marne et de la Blaise. Établi sur les terrains argileux de la Champagne humide, ce réservoir englobe à l’est celui de Champaubert-aux-Bois, construit entre 1935 et 1938. La retenue est limitée par deux des digues surélevées de cet ancien réservoir et huit digues nouvelles de clôture ; en outre, deux digues de cloisonnement submersibles isolent des bassins nautiques dans la partie nord-ouest et la partie sud de la retenue. Les huit digues de clôture présentent une longueur totale de 18,2 km ; la plus élevée d’entre elles, située au sud, la digue de Giffaumont, atteint une hauteur de 19,5 m alors que les autres mesurent moins de 10 m. La restitution des eaux à la Marne est assurée par une prise d’eau et un canal situés au nord-ouest de la retenue.

L’implantation du réservoir Marne avait été retenue par décision du 5 juin 1962 du ministère des Travaux publics et des Transports, après avis du conseil général des Ponts et Chaussées. Les travaux, déclarés d’utilité publique par décret en Conseil d’État en date du 6 juin 1966, ont débuté en 1969.

La construction des digues s’est déroulée de 1969 à 1972. La mise en eau de la retenue a été réalisée sur deux ans.

En juin 1974, la cote 134,75 est atteinte puis une vidange progressive amène le niveau des eaux à la cote 128,80 après l’hiver 1974-1975 ; enfin, à la cote 139,37 en juin 1975. La retenue normale se situe à la cote 139,70 (exceptionnellement à 140).

Depuis cette mise en eau, quatre types de désordres ont été observés.

Les désordres constatés

Désordres de 1975 sur la digue de Giffaumont

Fin 1975, les premières anomalies se manifestent par des fissures qui sont constatées sur la digue Giffaumont ; d’autres fissures apparaissent durant le printemps 1976 exceptionnellement sec.

Des investigations par puits, sondages, essais de laboratoire et calculs de stabilité sont réalisées. Elles entraînent dès cette époque des travaux de remplacement des matériaux de la digue aux endroits fissurés, un bouchage des fissures par un coulis de mortier et l’organisation d’un système de surveillance et d’auscultation.

Glissements de terre végétale sur le talus aval

Ces glissements se produisent sur les parties les plus raides et généralement après des pluies abondantes. Pour y remédier, il faut améliorer l’accrochage de la couche superficielle grâce à un système de drainage et de fascinage.

[Photo : Plan d’ensemble]

Glissements de talus aval des digues secondaires

Les glissements observés ne se limitent pas à la terre végétale, notamment sur la digue de l’Argentolle.

Ces glissements s’observent sur une longueur d’environ 600 mètres sur les 18 kilomètres de digues.

Glissements de talus amont de digues secondaires

En septembre 1984, un glissement de la digue de l’Argentolle se manifeste sur 40 mètres environ avec apparition de signes précurseurs analogues en différents autres endroits.

Ces glissements sont dus à deux causes : — la pente de 2,5/1 est un peu forte pour les matériaux constituant les talus, — les matériaux effectivement utilisés présentent des caractéristiques mécaniques qui sont inférieures à ce qui était prévu à l’origine du projet et qui se dégradent au cours du temps.

Les argiles des digues sont sensibles à l'eau et aux phénomènes atmosphériques, dessiccation et gel notamment.

Les solutions techniques

Il faut imperméabiliser le chemin de crête pour empêcher l’eau de s’infiltrer et protéger les talus des chocs thermiques. Pour cela, une recharge en matériaux de un mètre d’épaisseur permettra de mettre l'argile en compression et de la protéger du gel et du soleil.

Cet apport aura deux conséquences : — le freinage de la dégradation de l’argile, — une nette amélioration de la stabilité mécanique de l’ensemble.

Il permettra en outre de baisser la pente des digues.

Les travaux en cours

Les travaux de renforcement sont importants : 550 000 tonnes de pierres, dont 150 000 tonnes en 1985 et 250 000 tonnes en 1986-1987, vont constituer l’enrochement. Ces pierres, dont le calibrage est spécifique, sont extraites d'une carrière située à Gudmont, à une cinquantaine de kilomètres. Le transport est assuré par camions, à raison de 1 500 tonnes par jour ; il s’agit d’un calcaire solide et peu friable.

Pour commencer les travaux d’enrochement sur les pentes amont des digues de Giffaumont, Châtillon et la Carpière, la vidange du réservoir a débuté dès le mois de juillet car les travaux de réparation devaient être terminés avant le 31 décembre 1986. En effet, pour absorber des crues éventuelles, le barrage devait être opérationnel en janvier 1987.

Le largage des eaux s’est effectué progressivement : — pour éviter d’inonder les terres riveraines par un flux trop important dans la Marne, — pour ne pas perturber la flore et la faune aquatiques.

En fin de vidange, 19 millions de m³ d’eau seulement devaient rester stockés dans le réservoir.

Cette vidange exceptionnelle tient lieu de vidange décennale.

Sur les pentes aval des digues, où des glissements ont été constatés, il est prévu d’enlever la couche de terre végétale engazonnée, d’étaler du gravier et du sable sur une épaisseur d'un mètre et de recouvrir à nouveau par de la terre végétale.

Dans leur état actuel, et surtout après la tranche de travaux en cours de réalisation, la stabilité générale des digues et de leur fondation n’est pas en cause.

L’agence de bassin Seine-Normandie apporte une participation financière de 40 % pour l’ensemble des travaux hors taxes, sous forme de subvention.

Outre sa participation financière aux études préalables et aux travaux de première imperméabilisation effectués en 1984, ses financements ont été les suivants :

Tranches des travaux

1ʳᵉ tranche (Automne 1985) : 20 MF – aide de l’agence : 6,74 MF 2ᵉ tranche (Automne 1986) : 34 MF – aide de l’agence : 11,5 MF

Le coût total des travaux est estimé à 91 millions de francs T.T.C.

Extrait de la revue « Seine-Normandie » de novembre 1986. Photos de J.-F. Mondout.

[Photo : PROFIL TYPE IV.]
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