Gérard CHOQUENET
Choquenet SA
Le filtre-presse est un appareil qui sert à filtrer, par injection sous pression entre des plateaux verticaux, des liquides chargés en matières solides (tels, par exemple, que les effluents décantés des stations d’épuration). Le filtre-presse peut se décomposer en trois parties principales : le bâti, la partie filtrante et la centrale hydraulique.
Le bâti
Le bâti de nos filtres (figure 1) est formé d’un sommier fixe et d’un porte-cylindre reliés entre eux par deux longerons sur lesquels reposent une tête fixe (du côté alimentation) et une tête mobile (du côté serrage). La tête mobile se déplace perpendiculairement à l’axe du filtre-presse par l’intermédiaire d’un vérin hydraulique qui assure la fermeture de l’appareil sous une pression de 250 à 300 bars. Ce peut être un vérin à simple effet, lequel assure le serrage par une pompe manuelle ou électrique, ce qui nécessite de déplacer manuellement la tête mobile lors de l’ouverture de l’appareil ; ce peut être un vérin à double effet qui réalise par une pompe électrique la fermeture et l’ouverture de l’appareil. Tous ces filtres sont équipés d’un seul vérin central (même les plus gros filtres dont les vérins peuvent exercer des poussées de plus de 1200 tonnes). Certains fabricants utilisent deux, voire quatre vérins.
La partie filtrante
La partie filtrante est composée d’un ensemble de plateaux chambrés ou/et à membranes, reposant par l’intermédiaire de poignées sur les longerons du filtre-presse (figure 2).
Ces plateaux (en polypropylène ou en fonte) sont habillés d’une toile filtrante, généralement en polypropylène ou en coton, et dont la qualité et la finesse varient selon la granulométrie du produit à filtrer. La profondeur de la chambre est déterminée de façon à obtenir l’épaisseur optimale du gâteau (dépôt de matières solides). L’entrée des boues s’effectue soit par l’orifice central, soit par un conduit latéral situé dans l’angle du plateau. La conception du filtre avec ses longerons latéraux permet de retirer facilement les plateaux par le dessus de l’appareil, ce qui le distingue des filtres dans lesquels les plateaux, suspendus à une poutre centrale, posent des problèmes de manutention et de temps lorsqu’il faut changer un plateau qui peut peser de 30 à 1500 kg. Le nombre des plateaux, leurs dimensions (qui s’échelonnent de 500 × 500 mm à 2000 × 2000 mm), la qualité de la toile filtrante, la pression de filtration, l’épaisseur du gâteau, sont des paramètres établis en fonction du produit à filtrer et déterminés soigneusement, préalablement à la mise à l’étude de chaque filtre-presse.
La centrale hydraulique
Elle assure l’alimentation en huile du vérin hydraulique, ainsi que, dans un filtre à déblayage mécanisé, la rota-
tion du moteur hydraulique de commande ; nos appareils étant munis d’un système de halage des plateaux permettant de réaliser l’opération de « déshabillage ». À cet effet un moteur hydraulique entraîne en synchronisme deux chaînes placées sous les poignées des plateaux, de chaque côté du filtre-presse, et comportant chacune un chariot muni de deux doigts (dont l’un est baissé quand l’autre est levé), qui permettent de ramener les plateaux les uns après les autres vers la tête mobile quand le filtre est ouvert, le moteur hydraulique inversant son sens de rotation à chaque élévation de pression. La vitesse de déshabillage varie de 8 à 20 coups-minute.
Les chaînes et les chariots courent tout le long du filtre dans un chemin en forme d’oméga.
Fonctionnement
Le cycle de fonctionnement se compose de quatre phases principales : la fermeture, la filtration, l’ouverture et le déshabillage.
La fermeture par le vérin de serrage permet d’assurer l’étanchéité de l’appareil et entraîne automatiquement le passage à l’opération de filtration (figure 3).
Lors de la filtration, les boues sont amenées à une pression variant de 6 à 25 bars par l’intermédiaire d’une pompe (centrifuge ou à membrane) ; la toile qui habille les plateaux est traversée par le « filtrat » tandis que les matières solides arrêtées forment le « gâteau ». Le filtrat est évacué par les cannelures vers la sortie des plateaux. Le temps de filtration est variable suivant la nature et la concentration en matières solides du produit. La pression est commandée par la pompe d’alimentation, mais on tend de plus en plus à réduire le temps de maintien à la pression maximum en utilisant des plateaux à membranes. Ces membranes sont gonflées à l’air ou à l’eau et permettent de compacter la boue dans sa chambre ; cette compression mécanique diminue le temps de filtration et améliore la teneur en matières sèches du gâteau.
L’ouverture se situe à la fin de la filtration ; lorsque plus aucun filtrat ne s’écoule, le gâteau est formé, le vérin recule la tête mobile et dégage le premier gâteau.
L’opération de déshabillage intervient alors : à la fin de l’ouverture, le moteur hydraulique démarre et les chariots mis en mouvement vont ramener les plateaux les uns après les autres vers la tête mobile. Une barre de commande placée le long du filtre permet à l’opérateur de stopper à tout moment le déshabillage et de le remettre en route.
Le pont de lavage
Le pont de lavage (figure 4) permet de laver les toiles et de les décolmater sans avoir à les démonter, et ceci d’une façon automatique. Il est posé à cheval sur le filtre et roule sur les longerons latéraux. Pour réaliser l’opération de lavage, on verrouille ce pont sur les chaînes de déshabillage ; il se déplace alors en même temps que les chariots et chaque fois qu’un plateau est ramené il se positionne dans l’intervalle entre deux plateaux. Par l’intermédiaire d’un système électromécanique, deux rampes munies de buses et fixées en bout d’un compas articulé sont animées d’un mouvement de va-et-vient entre les plateaux. Dans un même temps une pompe à haute pression envoie dans les rampes de l’eau à 30, 80 ou 100 bars, suivant le degré d’encrassement de la toile. La distance entre les plateaux et les rampes reste constante quelle que soit l’ouverture et même dans le cas où les plateaux sont inclinés.
Les dernières évolutions
La figure 5 montre le système de débâtissage tel qu’il a été décrit précédemment. On pouvait reprocher à ce système le fait que les chemins de roulement des chaînes, ouverts à leur partie supérieure, pouvaient recevoir des parties de gâteaux lors du débâtissage et des projections d’eau lors du lavage des toiles en provenance du pont de lavage. Les chaînes et les chemins de roulement se détérioraient ainsi rapidement, surtout en présence de boues corrosives. D’autre part, dans ce système, les chariots effectuaient un tour complet par le dessous du chemin de roulement pour revenir à leur point de départ, ce qui conduisait à dételer le pont de lavage des chaînes lorsqu’il atteignait l’extrémité du filtre-presse et à le ramener manuellement à son point de départ.
La figure 6 présente le nouveau système de déshabillage breveté, dans lequel les chemins de roulement n’étant plus ouverts, les chaînes sont protégées de toutes projections de gâteau ou d’eau. Les chariots sont pourvus d’un décrochement permettant de les relier à la chaîne par la partie inférieure du chemin de roulement. Dans ce système les chariots ne réalisent plus une rota-
tion complète et reviennent en arrière après le halage du dernier plateau. Le pont de lavage qui est lié aux chaînes suit donc le mouvement des chariots et revient automatiquement à son point de départ.
Les avantages
Ce nouveau système de déshabillage offre un double intérêt : il permet en effet de conserver la conception du bâti à deux longerons latéraux et il apporte des avantages particuliers du fait de sa conception.
Avantages liés à la conception du bâti
Comme il a été exposé précédemment, le filtre-presse est un appareil ouvert, et il est donc aisé par l'intermédiaire d’un pont roulant, d’un palan (ou même manuellement pour les petits appareils) de sortir un plateau par le dessus pour le remplacer ou en changer la toile filtrante. Le système de déshabillage étant placé sur le côté de l'appareil, à hauteur d’homme, il est aisé d’y accéder, ce qui est un avantage par comparaison aux filtres-presses dont les plateaux sont suspendus et avec lesquels il faut disposer d’un outillage spécial pour sortir les plateaux ; l’accès au système de déshabillage situé également au-dessus des plateaux est difficile. En outre, le dispositif est exposé aux vapeurs éventuellement nocives dans le cas où le produit à filtrer est chaud.
Avantages liés au déshabillage
La mécanique : chaînes, axes et galets de chaînes, pignons et chemins de roulement n’étant plus exposée aux projections diverses, se trouve protégée de la corrosion et de l’abrasion ; la durée de vie des composants est donc considérablement allongée, ce qui présente un intérêt appréciable.
Le retour des chariots sur leurs pas permet de ramener mécaniquement le pont de lavage à son point de départ et d’automatiser l’ensemble de l’installation. Il en découle une amélioration importante de la sécurité et de la protection de l’opérateur, les pièces en mouvement n’étant plus directement accessibles. Le cas échéant cette protection est renforcée par la pose le long du filtre-presse d’un système de barrière optique émettant un champ de rayons infrarouges qui, lorsqu’il est traversé par un obstacle, stoppe instantanément les mécanismes. Enfin ces améliorations augmentent de façon appréciable l’esthétique et le fini de l'ensemble de l’installation.
Conclusion
En dépit de ces innovations le filtre-presse garde les caractéristiques d’un appareil rustique, simple et fiable, le souci qui a guidé ses concepteurs étant de conserver ces qualités tout en recherchant l’automatisme total. C’est ainsi que grâce aux plateaux à membranes et à des toiles filtrantes appropriées un déshabillage automatique a pu être obtenu dans la plupart des cas, assurant la chute du gâteau sans l’intervention manuelle. Nous cherchons à obtenir ce résultat dans le cas de certains produits colmatants et visqueux avec l’espoir d’atteindre cet objectif dans un délai aussi proche que possible.