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Les apports de l'instrumentation numérique : l'exemple des capteurs

30 mai 2000 Paru dans le N°232 à la page 33 ( mots)
Rédigé par : Fabien HANTZER

Bien que différents par leur nature et leur finalité, les procédés du domaine de l'eau sont toutefois comparables à ceux mis en ?uvre dans l'industrie sur certains points. Ils sont fortement automatisés mais doivent être optimisés pour garantir un traitement efficace tout en réduisant les charges d'exploitation. Les principaux postes de coûts sont l'énergie, la maintenance et les produits chimiques. L?instrumentation numérique utilisée correctement en liaison avec des systèmes de contrôle adaptés va permettre de réduire les coûts de ces différents postes tout en améliorant les performances générales de l'installation.

Prenons l’exemple des capteurs : un capteur numérique se caractérise par son unité de traitement qui n'est plus constituée d'un ensemble complexe de composants analogiques mais d’un microprocesseur. Ce microprocesseur va apporter des améliorations significatives dans de nombreux domaines.

Les apports de l’instrumentation numérique dans la conduite des procédés

Les gains métrologiques

* Amélioration de la précision Grâce à l'utilisation d’un microprocesseur, il est possible de caractériser de façon précise le comportement d'un élément de mesure, il devient également beaucoup plus simple de corriger une grandeur d’influence telle que la température. La mise en œuvre de composants numériques permet par ailleurs de réduire le risque de dérive dans le temps souvent lié à l'utilisation des composants analogiques. Ceci permet de disposer aujourd'hui de capteurs de très grande précision à des prix compatibles avec les contraintes industrielles.

* Augmentation de la rangeabilité La rangeabilité est le rapport entre la gamme de mesure réglable la plus étendue et la plus faible ceci sans perte de précision. Ce rapport est bien nettement supérieur pour les capteurs à base de microprocesseur. Un capteur de pression conventionnel présente,

par exemple, une rangeabilité de 5 ; la version numérique permet, elle, d’atteindre 20.

[Photo : Synoptique de capteur numérique]

* Recul des limites d’application

La technologie numérique permet d’envisager l’utilisation de certains principes physiques au-delà des limites qu’imposaient, jusqu’à présent, les modèles analogiques. Les fonctions de traitement de signal autorisent, par exemple, l’exploitation des mesures de niveau écho (ultra ou micro-onde) dans des applications beaucoup plus contraignantes ou délicates qu’auparavant.

Les gains liés à la mise en œuvre et à la maintenance

* Interface utilisateur

Les résistances variables, cavaliers, ponts de soudure et autres moyens de réglage archaïques font désormais partie du passé. L’interface utilisateur est désormais adaptée à la technologie numérique : boutons poussoirs, touches optiques, affichage numérique ou alphanumérique… Si on le souhaite, on peut utiliser un outil de configuration externe : terminal de configuration portable ou PC. Ces progrès permettent d’améliorer sensiblement le confort de mise en œuvre, même pour des appareils complexes.

* Diagnostic

Un capteur numérique est non seulement capable de signaler un défaut mais aussi de donner des indications précises sur l’origine du problème. Le cas échéant, il peut même restituer un historique de l’apparition du défaut.

* Archivage des données

Les capteurs numériques sont plus performants et plus universels : ils comportent donc beaucoup plus de paramètres. Il est appréciable de pouvoir réaliser la fiche instrument de façon quasi automatique et d’archiver rapidement et simplement l’ensemble des paramètres sans risque d’erreur ou d’oubli. Ces informations peuvent être stockées sur support magnétique et mises à jour très facilement en cas de modification.

* Téléchargement des configurations

L’ensemble des paramètres ayant été mémorisé, il devient très facile de reconfigurer un appareil de rechange à distance en cas de panne du matériel d’origine. Cette possibilité est également très pratique lors des mises en service lorsqu’il est nécessaire de dupliquer une même configuration sur plusieurs capteurs.

[Photo : Le signal 4-20 mA est un frein à l’exploitation optimale des instruments numérique]

Les gains à l’exploitation

* Fonctionnalités

Grâce à leur “intelligence”, les chaînes de mesure numériques intègrent à présent un certain nombre de fonctions qui, jusqu’à présent, devaient être réalisées dans le système de contrôle-commande. Il est donc possible de distribuer l’intelligence et d’alléger ainsi le système central. Parmi les fonctions typiques les plus répandues, on peut citer la linéarisation (hauteur/volume, hauteur/débit…), les différences, les seuils, la régulation, le contrôle de dosage…

* Multiparamètres

Outre la valeur de mesure principale, le capteur peut délivrer des informations secondaires telles que la température, le cumul pour un débitmètre, la densité, la concentration, etc. Certaines sont mesurées, d’autres sont calculées ou extrapolées en fonction des variables primaires et d’un modèle.

* Autosurveillance

La valeur de mesure transmise est validée par un statut indiquant l’état opérationnel de la chaîne de mesure. Un dysfonctionnement de la mesure (capteur ou application) étant signalé, l’opérateur peut mettre en œuvre la procédure adaptée au plus vite. Dans certains cas, l’alarme peut précéder l’apparition du défaut permettant ainsi une forme de maintenance préventive.

Les gains en termes de communication

La communication est une fonction particulière des capteurs numériques ; c’est elle qui va permettre d’exploiter au mieux toutes les autres fonctions.

Le mode de transmission traditionnel (4-20 mA) n’est plus adapté aux nouvelles fonctions disponibles dans les capteurs numériques et constitue un véritable goulot d’étranglement empêchant ainsi une exploitation optimale des équipements.

Cela pénalise non seulement le matériel existant mais freine également les dévelop-

[Photo : La technologie hybride HART combine signal traditionnel pour la conduite et numérique pour la maintenance]

Comme on s'en doutait, il s'agit en fait d'une norme multistandard qui entérine une situation de fait. Huit réseaux différents sont regroupés au sein de la norme IEC 61158. Parmi ceux-ci, deux sont adaptés à une utilisation en process avec des capteurs et actionneurs intelligents : PROFIBUS PA et Foundation Fieldbus.

Bien qu’étant tous équipements portant sur de nouveaux capteurs. En effet, bien que la technologie permette de rendre les équipements encore plus intelligents et plus polyvalents, cela ne se justifie que si les utilisateurs ont le moyen d'utiliser ces avantages ; ceci est impossible si l’on se contente du seul signal 4-20 mA.

La technologie Smart

Le terme de capteur Smart s’utilise couramment pour désigner un capteur numérique doté d’une possibilité de communication. Les informations digitales sont modulées sur la boucle courant. La valeur moyenne étant nulle, le signal 4-20 mA n’est pas affecté et peut être utilisé de manière tout à fait conventionnelle. Un terminal portable ou un PC branché sur la boucle permet le dialogue avec l'instrument pour les opérations de configuration ou de maintenance.

Il est donc possible de lire et modifier les paramètres du capteur sans ouvrir le boîtier ni même se rendre sur site.

La technologie Smart ne constitue pas un bus de terrain. Il s'agit avant tout d’une aide à la configuration et à la maintenance.

Le protocole adopté aujourd'hui par la plupart des fabricants est le protocole HART.

Le bus de terrain

Cette technologie doit permettre l'interconnexion d’équipements hétérogènes de type capteurs-actionneurs sur un réseau informatique. Le réseau doit bien sûr être adapté aux contraintes particulières de ce niveau de communication en termes de temps de réponse, volume d’information, insensibilité aux perturbations électromagnétiques… C’est pourquoi l'on utilise le terme de bus de terrain pour le désigner.

Contrairement à la technologie Smart, les capteurs offrant une compatibilité bus de terrain ne disposent plus des sorties analogiques conventionnelles. Toute l’exploitation (mesure et configuration) est donc réalisée numériquement.

Cette approche procure de nombreux avantages sous réserve de remplir un certain nombre de conditions :

  • • Normalisation, pour garantir l’ouverture et la pérennité
  • • Interopérabilité, pour éviter les impasses
  • • Interchangeabilité, pour la souplesse et l'indépendance
  • • Agréé zone explosible, pour répondre aux besoins particuliers des industries chimiques et pétrochimiques.

La diffusion de ce concept a longtemps été freinée d'une part par son caractère novateur et d’autre part par l'absence de norme internationale. Ces obstacles sont en passe d'être vaincus.

Après 14 ans, la CEI (Comité Electrotechnique International) vient de voter le standard de bus de terrain. Deux dédiés au process, PROFIBUS PA et Foundation Fieldbus, ont des caractéristiques différentes. Il n’est pas possible de rentrer ici dans les détails techniques des deux propositions. On se contentera de citer quelques caractéristiques du bus PROFIBUS PA qui est assez bien adapté au domaine de l'eau et qui propose une offre relativement complète.

PROFIBUS PA signifie PROFIBUS pour Process Automation. C’est un bus de terrain ouvert conforme aux normes EN 50170 et IEC 61158. Il a été spécialement conçu pour répondre aux besoins spécifiques des procédés. Il peut notamment être utilisé en zone explosible. PROFIBUS PA permet la connexion de plusieurs capteurs/actionneurs sur la même paire torsadée.

[Encart : Normes IEC 61158 pour le bus de terrain PROFIBUS PA et DP WorldFip IPNet Foundation Fieldbus ControlNet Interbus SwiftNet]

L'alimentation des capteurs et la transmission digitale de l'information se font par le biais du même support cuivre. Il n’existe plus de sortie analogique sur les capteurs ni d’entrée analogique sur les actionneurs (sauf exception).

Les segments basse vitesse fonctionnent à 31,25 kb/s suivant le standard international IEC 1158-2. Ils sont couplés à un bus haute vitesse (12 Mb/s max) par l'intermédiaire d'un coupleur de segment. Ce coupleur a un triple rôle :

* l'adaptation des vitesses ;

* l'alimentation des appareils de terrain ;

* la séparation galvanique et barrière de sécurité intrinsèque (le cas échéant).

Aujourd’hui la grande majorité des instruments est encore exploitée par l'intermédiaire du 4-20 mA ; cependant, de plus en plus de constructeurs proposent des variantes communicantes permettant soit de faciliter la maintenance, soit de supprimer complètement les liaisons analogiques.

[Photo : Chaine de mesure de conductivité CLM et ses différentes options de sortie]

Exemple d’un capteur de conductivité Liquisys CLM 253

L’élément de mesure principal délivre un courant dont la valeur est proportionnelle à la conductivité du fluide. Une Pt 100 fournit l'information de température ; elle sera notamment exploitée pour ramener la valeur de conductivité à une température normée (20 °C). L’excitation consiste en une tension alternative appliquée aux bornes des électrodes. La fréquence et l'amplitude sont conditionnées par le type de cellule et la gamme de mesure.

Le microprocesseur va traiter l'ensemble des informations et permettra d’afficher soit une conductivité, une résistivité ou une concentration en fonction des besoins de l'application.

La mesure principale et la température sont disponibles sous forme de signaux 4-20 mA.

Des contacts signalent le franchissement de seuils.

[Photo : Exemple d’architecture sur bus de terrain PROFIBUS]

Par défaut.

L'appareil peut être livré avec trois options de communication :

Option 1 :

Pas de communication, tous les réglages se font via la face avant, seuls les signaux conventionnels sont disponibles en sortie.

Option 2 :

Technologie HART, les réglages peuvent être réalisés via la face avant mais aussi à distance en branchant un PC ou un terminal portable sur la liaison 4-20 mA.

Le système de contrôle continue d’exploiter les signaux 4-20 mA.

Option 3 :

Technologie bus de terrain (PROFIBUS PA). La liaison numérique est utilisée aussi bien pour la configuration que pour l’exploitation. Le capteur est inséré dans un réseau normalisé qui fédère des appareils de différents types voire de différents constructeurs. Toutes les informations transitent sur une seule paire, les échanges sont bidirectionnels.

[Encart : Caractéristiques et avantages du bus de terrain • Économique : Plusieurs appareils de terrain peuvent être connectés au bus sans besoin de ligne d’alimentation additionnelle. Séparateurs, barrières et cartes E/S pour la connexion sont inutiles. • Flexibilité : Des transmetteurs pour tous les différents paramètres du procédé peuvent être connectés. La modification ou l’extension de l’installation sont grandement facilitées. • Standards : Les paramètres de base sont communs à tous les constructeurs, les appareils deviennent donc interchangeables. • Efficace : Le système de contrôle-commande a accès à tous les paramètres du transmetteur, par exemple le nom de plusieurs valeurs dans un capteur multiparamètres.]

Conclusion

L'instrumentation numérique est une réalité depuis de nombreuses années, les instruments sont peu à peu devenus de petits systèmes informatiques que l’on répartit dans le process. Un des challenges des prochaines années consistera à optimiser l’exploitation de ce matériel en mettant en œuvre une communication adaptée. Le bus de terrain va donc se révéler incontournable si l'on souhaite améliorer encore la conduite de son installation. Plus de 40 000 instruments sont déjà exploités de cette manière.

Bien que fiable et standardisé, le réseau de terrain reste une nouvelle technologie ; il ne faut donc pas hésiter à se faire accompagner par des spécialistes pour que cette migration se fasse en douceur et que le temps d'apprentissage soit le plus réduit possible.

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