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Le verdissement des cimes 2ème partie : initiatives locales

30 septembre 1991 Paru dans le N°148 à la page 45 ( mots)
Rédigé par : Michel MAES

« Think globally, act locally »

Concevez globalement et agissez localement répétait René Dubos*.

Sage maxime. Trois récents colloques prenaient en compte cette recommandation sur la gestion de l’environnement urbain.

Les 3 et 4 octobre 1990, Idéal Télématique permettait aux élus et techniciens d’exposer à Paris leur façon pragmatique de résoudre les problèmes locaux (1). « Six mois de collecte, rédaction et vérifications ont abouti au Livre vert des actions locales qui, sans prétendre à l’exhaustivité, met en lumière une France peu connue, pas si ringarde que ça, parfois même en avance sur ses voisins européens : de quoi se rassurer à l’horizon 1992 » (P. Boyer, C. Leca, Idéal Télématique, octobre 1990). Du 6 au 8 février 1991 se sont déroulées les premières Rencontres européennes « Energies renouvelables et développement local », à Toulouse, organisées par le Comité de Liaison des Energies Renouvelables (CLER) et l’AFME. Enfin, le 21 février 1991, l’Association française du Conseil des communes et régions d’Europe conviait en Avignon les élus des villes de plus de 50 000 habitants à réagir sur le Livre vert de l’Environnement urbain préparé par la Commission des communautés européennes, document de réflexion qui recense les domaines prioritaires d’intervention : urbanisme, transport, patrimoine, mais aussi protection des espaces naturels dans la ville, industrie, gestion de l’énergie, de l’eau et des déchets.

À coup sûr, les mentalités changent et veulent changer. On est en train « d’acquérir une nouvelle citoyenneté par son comportement ». Cet esprit de gestion concertée de l’environnement s’exerce dans quatre directions principales : l’énergie, les déchets, les eaux usées et le risque naturel ou technologique.

Programme « Energies non conventionnelles »

Solaire thermique, chaufferies de biomasse et de biogaz, ces filières énergétiques paraissent bien maîtrisées, techniquement et économiquement. De nombreuses réalisations fonctionnelles le prouvent.

Solaire

L’image du « solaire » a trop souvent été dénaturée par des équipements sommaires, mal conçus, souffrant d’une carence de maintenance spécialisée. Chassant ces épouvantails, l’Office public des HLM d’Issy-les-Moulineaux, l’ADERIF (Association pour le Développement des Energies renouvelables en

* René Dubos, bio-agronome et humaniste d’origine française né à Hennebont, dans le Beauvaisis, professeur honoraire à l’Université Rockefeller de New York, est devenu, par ses nombreux ouvrages et travaux sur l’avenir de l’humanité, le maître de la pensée des sages.

(1) Colloque organisé conjointement par Idéal Télématique, le ministère de l’Environnement et de la Santé, l’Association des Maires de France et des Régions, l’Association des Maires et Conseillers Régionaux, l’Association des Communes Urbaines, etc.

Île-de-France) et l'AFME ont décidé de persévérer dans la « Houille d'Or » : le solaire. Résultat : une seconde mise en service des capteurs solaires pour 115 établissements, HLM, hôpitaux et piscines, dotés d'un système de télécontrôle Tecsol pour interroger à distance l'installation par Minitel, dispositif semblable à celui d'Issy-les-Moulineaux et de l'hôpital de Castres. À Nantes, un quartier « bio-climatique » s'étend sur 2,2 ha pour 80 logements sociaux bénéficiant de capteurs solaires, pompe à chaleur, isolation thermique renforcée, murs ou sols conçus pour le stockage de la chaleur solaire, testés par le CSTB (Centre scientifique et technique du bâtiment).

C’est pour le séchage des plantes aromatiques (thym, sauge, estragon) que l'énergie solaire est utilisée à Poët-Laval, dans la Drôme, où 500 m² de capteurs sur toiture évaporent plus de 1 t/j d'eau avec un débit modulable d’air de 50 000 m³/h. Mais c’est pour les activités communales que la mairie d’Aillon-le-Jeune, en Savoie, applique le principe du plancher solaire direct, qui consiste à alimenter un plancher chauffant à basse température par un fluide réchauffé par des capteurs solaires intégrés en toiture (800 kWh/m² de capteur/an), le solaire assurant ainsi le chauffage hivernal des locaux, la valorisation estivale grâce à la piscine et la production d’eau chaude en toute saison. La Savoie, département-pilote et novateur, vient d’être saluée par le CLER avec l’attribution à Michel Barnier, président du Conseil général de Savoie, du prix « Photon » pour son action volontariste en faveur des énergies renouvelables.

Biomasse et biogaz

Fait appréciable, une récente étude du CLER démontrait que la substitution de biomasse aux combustibles classiques, fioul, gaz et charbon, générait quatre à cinq fois plus d’emplois, à quantité égale d’énergie distribuée (C. Couturier, Solagro, revue AVE n° 1495). Ainsi, à Langeac, en Haute-Loire, la mairie a inauguré la chaufferie centrale (1,7 MW) alimentée en plaquettes de délignures et rondins issus de l’usine de La Cellulose du Rhône et d’Aquitaine de Tarascon (6 kt/an de plaquettes). À Vitry-le-François dans la Marne, la SAHLM Vitry-Habitat n’a pas hésité à remplacer les chaufferies indépendantes au fioul domestique par une chaufferie collective au bois (9 MW) pour plus de 1000 logements sociaux et trois groupes scolaires : sciures vertes, écorces de feuillus et résineux, plaquettes forestières, chutes de bois et copeaux font l’affaire (10 kt/an). De son côté, l'Association Savoyarde pour le Développement des Énergies Renouvelables du CLER, estimant le gisement de la grande agglomération chambérienne, d’une part en bois de rebut (3,7 à 4,7 kt/an) et d’autre part en palettes de réemploi (50 kt/an), propose diverses filières de valorisation soit en réutilisation (palettes, panneaux d’agglomérés), soit en incinération (chaufferie au bois de 50 MW ou incinérateur avec récupération de chaleur), propositions auxquelles l’AFME s’intéresse.

Pourquoi pas ? Il a suffi que quatre agriculteurs seulement de la Drôme se regroupent en CUMA, mettent en commun leur presse à sarments de vignes (52 ha de vignobles) et brûlent les bottes conditionnées dans des chaudières à combustion inversée (56 t/an de sarments récupérés), pour assurer le chauffage de leurs habitations, avec le concours de Rhonalpénergie et du CEDER (Centre d’Expérimentation et de Documentation sur les Énergies Renouvelables). Justement, Rhonalpénergie pilote une vaste opération de rénovation énergétique des lycées de la région Rhône-Alpes. Non seulement elle établit un diagnostic thermique avec les logiciels Éco et Gélyco et accomplit un réaménagement des équipements (230 sites scolaires), mais elle installe aussi des chaufferies au bois, entièrement automatisées, utilisant des déchets de bois bruts et humides, mélanges d’écorces et de sciures, comme pour les lycées de Bellegarde-sur-Valserine et de Cibeins dans l’Ain (A. Reveyrand, Rhonalpénergie, revue AVE, n° 1495).

Dans le Nord-Pas-de-Calais, l'ARE (Agence Régionale de l'Énergie) n’en fait pas moins : à côté de cette fonction d’assistance aux communes, entreprises, hôpitaux et lycées en maîtrise de l'énergie et des déchets, l’ARE s'est illustrée dans l'opération Triselec, « Poubelles bleues de Dunkerque », mais aussi « Bus énergie ». Une grande première européenne ! Dans la communauté urbaine de Lille, d’ici à 1993, huit bus fonctionneront au méthane épuré (lavage à l'eau sous pression) et comprimé en provenance de la station d’épuration de Lille-Marquette (12 000 m³/j de biogaz dont 2 000 disponibles). À l’économie de carburant des transports en commun (350 TeP/an) s’ajoute la réduction de la pollution atmosphérique du moteur diesel (fumées noires, émissions de CO et NOx).

[Photo : Biogaz de digestion. Un substitut au diesel pour transports en commun.]

Chassons les gaspis ! Les villes développent une véritable politique énergétique : c’est Colmar par son service « Énergie », c’est Aix-en-Provence avec son réseau chaleur-cogénération (turbine-gaz 2 MW). Une gestion rigoureuse de tous les postes de consommation dans un esprit d’intégration des contraintes environnementales, telles sont les règles de l’AFME qui ont sélectionné trois villes-pilotes pour la conduite d’une démarche expérimentale associant « énergie et environnement », il s’agit de Rochefort, Besançon et Nantes.

Ordures, second service

Dans le département du Bas-Rhin, la permanence de 225 décharges brutes et la survie de 75 dépôts sauvages dénoncent l’insuffisance de collectes des déchets encombrants (figure 2). Là comme ailleurs, la déchetterie apporte le moyen de gommer du paysage les dépôts anarchiques et d’encourager le recyclage de certains déchets et le tri des encombrants. Ainsi, à Haguenau et à Obernai, la création de circuits de récupération permet d’optimiser les recettes directes issues de la vente des matériaux et incite à l’ouverture de 38 autres déchetteries par les Sictom et Sivom concernés. Même schéma directeur dans le département du Tarn : suppression de 130 dépôts, surveillance

Des 17 unités de traitement, collecte et valorisation du verre et des déchets encombrants. À l'échelon régional, la solidarité s'organise. Le Conseil Régional Provence-Alpes-Côte d’Azur et l'Agence régionale pour l'environnement, avec l’ANRED, financent une étude globale destinée à mettre en œuvre un programme régional de traitement des résidus urbains (encombrants, inertes, déchets commerciaux et industriels, boues d’épuration…). En Franche-Comté, c’est l'Ascomade qui monte des opérations concrètes de collecte, d’élimination ou de valorisation des déchets (piles usagées, fréons) et lance des actions de communication et d’information (guides pratiques, ouvrages de sensibilisation).

Matériaux recyclables

Le tri sélectif des ordures ménagères ne requiert-il pas en premier lieu un geste écologique de la part des habitants ? Il convient de déposer les déchets recyclables dans une première poubelle et les autres dans une seconde. Ainsi la Communauté Urbaine de Dunkerque (CUD, 220 000 hab.), confrontée à la vétusté de ses usines d’incinération et à la saturation de ses sites de décharge, a-t-elle opté pour le tri sélectif et le principe de la seconde poubelle, la « Bleue » (capacité 120 l, réception des papiers, cartons, verres, métaux et plastiques). Acheminés au centre de tri Triselec, les déchets font d’abord l’objet d’un prélèvement manuel (impropres, cartons, bouteilles consignées, flaconnages plastiques, sacs et films plastiques, papiers), puis d’un tri magnétique par électro-aimant pour l’enlèvement du métal, d’un tri par aspiration des impropres non valorisables destinés à l'incinération, enfin d’un stockage en fin de ligne du verre non consigné ou brisé. Avec un taux de valorisation effective de 80 % (objectif 1991 : 15 kt triées, soit 20 % des 75 kt/an produites par les ménages de la CUD), le système Triselec peut intéresser toute ville ou groupement intercommunal représentant 100 000 habitants.

La campagne « Récup’Verre » en Midi-Pyrénées (2 800 conteneurs installés, 80 % des habitants desservis, 18 Mt/an de verre récupéré) orchestrée par l'ARPE est une opération réussie (30 MF de chiffre d’affaires associé). La collecte spécifique du PVC cristal par grands conteneurs est entreprise par le Sictom de Lons-le-Saunier, ayant passé un contrat de valorisation avec le Gecom qui s’engage à trouver un débouché au plastique, en application de la Directive européenne 85-339 liant les ministères de l’Environnement et de l’Industrie dans cette tâche (la rentabilité nécessite des communes de 20 000 habitants collectant un minimum de 20 t/an, avec des véhicules spécifiques ou des bennes traditionnelles équipées d’un aspirateur-broyeur 15 CV en sortie). Les plastiques agricoles de culture sous châssis sont stockés en Hérault par le Sivom de l'Étang de l’Or, puis adressés à la Sopave (Société des plastiques de l’Aveyron).

L'usine de Goncelin, en Isère, qui entrera en service dès 1992, transformera les ordures en deux produits commercialisables : l’humus en amendements organiques et les résidus combustibles en granulés déchlorés secs, stockables, utilisables dans des chaudières industrielles à charbon classiques, selon le procédé SEII (Société d’Entreprise Industrielle Internationale). Conditions de rentabilité : tonnage à traiter de 50 à 60 kt/an, soit l'équivalent de la production d’une ville de 150 à 200 000 hab., espace disponible de 4 ha en périphérie de la ville.

Déchets dangereux

L'opération-test DTQD (déchets toxiques en quantité dispersée) de 1989 en Savoie consistait d’abord à inviter, durant une période-test de quinze jours, le public détenteur de déchets toxiques (peintures, solvants, décapants ordinairement rejetés avec les ordures ménagères, dans les égouts ou les exutoires improvisés) à venir les déposer en déchetteries d’Aix-les-Bains et de Chambéry. Une entreprise conventionnée par l’AFBRMC et l’ANRED acheminait ensuite ces déchets vers un site de traitement pour une neutralisation physico-chimique, un enfouissement ou une incinération. La réussite de l’opération (800 personnes y ont apporté un total de 12 t en quinze jours) incite à la généralisation de la collecte sur le site de déchetterie en région urbanisée, et en container mobile pour les communes rurales.

[Photo : Décharge traditionnelle d’ordures ménagères. Une option communale souvent contraignante et problématique.]
[Photo : Station d’épuration des eaux usées. Un bilan épuratoire et économique assez douteux.]
[Photo : Lagunage. Une alternative d’épuration par soft-technology.]
[Photo : Centrale électro-nucléaire avec la surveillance de la radioactivité dans l'air, du niveau radiologique de l’environnement et des consignes de sûreté des réacteurs de type REP 900 MW.]

Incriminés dans le processus complexe de destruction de la couche d’ozone stratosphérique, les CFC (chlorofluorocarbures ou fréons) alimentent les appareils de réfrigération domestique dont on se débarrasse quand ceux-ci sont hors d’usage. Dans le Haut-Rhin, une enquête menée auprès des hypermarchés, négociants en électroménager et récupérateurs de ferraille, a permis de préciser la filière de mise au rebut de ces appareils, pour mieux les gérer. Le fréon est extrait, récupéré et conditionné en bouteilles afin d’être réutilisé. La même expérience-pilote a été conduite à la CUB (Communauté Urbaine de Bordeaux) auprès de 650 000 habitants occasionnant le traitement de 40 appareils/jour, mais le gaz est détruit par nettoyage à haute température dans une usine d’aluminium.

Aïe ! les déchets hospitaliers… problème épineux que le District d’Arcachon aborde en ouvrant un centre de réception, avant transport vers un centre spécialisé d’incinération des déchets infectieux. En effet, ces déchets spéciaux sont souvent mélangés avec les ordures ménagères ou dirigés vers des installations de combustion dépourvues de lavage de fumées, de système de déchloruration ou de foyer adéquat. Le département du Morbihan a élaboré un schéma directeur d’élimination des déchets hospitaliers apportant une répartition cohérente et une restructuration des dispositifs d’incinération : incinérateur de l’Hôpital de Vannes, de l’UIOM de Pontivy et de Lorient.

Save a drop !

Comment restaurer à moindres frais les qualités précieuses de l’eau souillée :

@ par lagunage

Parmi les options locales d’épuration des eaux usées (figure 3), il faut souligner le regain d’intérêt pour le lagunage. Les lagunages naturels, anaérobies, à microphytes, à haut rendement, et à macrophytes, avec le géoassainissement, sont des procédés d’épuration écologiques et économiques offrant de nombreux avantages par rapport au schéma classique : élimination des germes pathogènes, fiabilité, robustesse, réduction du coût d’investissement et d’exploitation, réduction de la consommation énergétique et de produits chimiques, valorisations du biogaz de digestion et des sous-produits, valorisations aquacole et agricole de la biomasse planctonique engendrée et des effluents épurés.

De fait, le Centre de recherches pluridisciplinaires de Mèze (Hérault) a su optimiser ces différentes écotechniques par la mise en place de plusieurs structures de valorisation telles que Aquasem (élevage de poissons exotiques), Aquamer (production de naissains de coquillages), Aquabio (production de poissons normalisés de laboratoire) et Aquadep (curage des lagunes et traitement des rejets vinicoles). La station de lagunage de Mèze est une grande première française (12 000 é-h desservis, 60 emplois créés, 100 000 visiteurs/an et un chiffre d’affaires imparti au tourisme scientifique de 2 MF/an).

À Rochefort, on a aménagé la plus grande lagune d’Europe (35 ha de lagunes, 35 000 habitants desservis). L’électricité nécessaire au fonctionnement des équipements électriques des ouvrages de prétraitement et de décantation, ainsi qu’au chauffage des locaux d’exploitation, provient d’une auto-production par conversion du biogaz des boues primaires.

À Baraqueville en Aveyron (1800 é-h seulement), mêmes options qu’à Mèze en Hérault :

— programme de recherches Aquapure sur les écosystèmes aquatiques (optimisation du lagunage, eutrophisation),

— valorisation des produits du lagunage (boues, phyto et zooplancton),

— production piscicole (élevage du brochet de repeuplement).

En Île-de-France aussi (lagunage de Vauciennes), mais où les conditions d’ensoleillement et de température limitantes défavorisant les vitesses de biodégradation nécessitent des besoins fonciers plus importants que dans les régions méridionales (emprise de 13 à 16 m²/hab.) (figure 4).

@ par géo-assainissement

En zone péri-urbaine ou rurale, l’assainissement classique se justifie difficilement. Des démonstrations sur des sites pertinents ont prouvé la valeur de l’assainissement autonome groupé comme technique alternative. La « bonne vieille fosse septique » réalise l’épuration des eaux domestiques, sans raccordement au réseau communal, mais à Athée-sur-Cher, en Indre-et-Loire, les matières de vidange résiduelles sont pompées par camion-citerne et réinjectées dans la station d’épuration collective (4 à 10 m³/j pour une station de 1800-2000 é-h recevant 100 m³/j d’effluent brut) ; toutes les boues sont acheminées chez les agriculteurs qui pratiquent l’épandage.

L’utilisation de fosses septiques de grandes dimensions a été retenue aux alentours de La Baule, pour les hameaux de Careil-sur-Guérande et Marlande-sur-Saint-André. Dans ce but, les cartes d’aptitude des sols à l’assainissement des communes rurales représentent un document technique et juridique indéniable pour opter à l’échelon communal ; aussi la DDE et la DDASS de Haute-Garonne ont-elles établi ces cartes pour les terrains peu filtrants de la commune de Bouloc (2045 habitants), qui draine ses effluents sans nuisances.

Le recyclage de l’eau vers le sol bénéficie des techniques éprouvées de l’irrigation et de l’épandage. L’expérience prouve que les effluents pré-traités constituent une ressource en eau complémentaire pour le milieu forestier, tout en réduisant la pollution du milieu naturel. Le CEMAGREF a constaté, à l’issue de deux années d’essais dans le massif de résineux des Maures (près de Cogolin dans le Var), une forte augmentation et diversification de l’activité végétale (pH du sol moins acide), ainsi qu’une nette diminution de l’inflammabilité.

Si la forêt méditerranéenne épure les eaux, la peupleraie l’absorbe : les eaux usées de la commune d’Oppède (1100 habitants), dans le Vaucluse, par exemple, irriguent après stockage en bassin de rétention (1700 m³) une plantation de peupliers (1 ha). La SCP (Société du Canal de Provence) et l’ARPE en retiennent les avantages suivants :

• réduction du débit après irrigation et épuration convenable des eaux rejoignant la rivière-exutoire,

• production de peuplier utilisable comme bois de déroulage,

• facilité d’entretien et faible coût d’exploitation.

Pour les boues résiduaires, la Chambre d’agriculture de l’Ain orchestre une vaste organisation d’épandage (5 à 7 kt MS/an) de boues issues d’une trentaine de stations d’épuration (capacité supérieure à 5 000 é-h) avec stockage et suivi analytique. Et l’assainissement des refuges isolés ? Abusivement laissé aux bonnes initiatives naturelles ! Le CEDER propose pour le CAF (Club Alpin Français) le principe du Clivus Multrum, toilettes sans eau à compost, et le met en pratique au refuge du Parmelan, en Haute-Savoie (géotextile séparant les urines, éliminées par évaporation solaire, des matières solides bioconverties).

Mitigation du risque local

Un vecteur du risque bénin : le moustique. L’EID (Entente interdépartementale de démoustication du littoral méditerranéen) traque l’anophèle (une dizaine d’espèces nuisibles pour l’homme sur la quarantaine que compte le littoral) dans cinq départements : les Bouches-du-Rhône, le Gard, l’Hérault, l’Aude et les Pyrénées-Orientales (cartographie de 50 000 ha de marais, dont 10 000 ha de gîtes larvaires fonctionnels). D’autres vecteurs de risque sévissent en bord de mer. De nombreux amateurs de fruits de mer se livrent à la pêche aux coquillages, et, chaque été, des intoxications se déclarent (300 cas en 1988 sur Fécamp), dues à la consommation de moules contaminées par une algue toxique, du genre Dinophysis (gastro-entérites bénignes, mais éventuelles atteintes neurologiques nécessitant un séjour en réanimation). En pays cauchois, un réseau d’alerte et de surveillance épidémiologique organisé par la DDASS de Seine-Maritime, l’IFREMER, le Laboratoire municipal de la Ville du Havre (agglomération de 250 000 habitants) et les pharmaciens « sentinelles » prévient les intoxications indésirables (12 cas seulement en 1989 sur Fécamp).

La surveillance locale de la radioactivité atmosphérique est aussi une préoccupation bien compréhensible, après les carences des informations officielles. En Tarn-et-Garonne, le contrôle de la radioactivité de l’air est assuré en continu par des balises situées autour de la centrale nucléaire de Golfech et près de Montauban, tandis que le niveau radiobiologique de l’environnement est contrôlé par prélèvements réguliers. De son côté, le Conseil général du Haut-Rhin, pour apaiser les inquiétudes de la population (manifestations des antinucléaires, occupations de terrains et grèves de la faim), créait dès 1988 la première Commission de surveillance de centrale nucléaire sur le site de Fessenheim. Cette Commission souhaite d’ailleurs que le débat de fond engagé sur la sûreté des centrales de type REP 900 MW soit approfondi par les autorités de sûreté du SCIN. D’ores et déjà, une première balise fonctionne à Strasbourg, exploitée par l’ASPA (Association de surveillance et d’étude de la pollution atmosphérique), le CNRS et la CRII-Rad (Commission de Recherche et d’Information Indépendante sur la Radioactivité).

À Rillieux-la-Pape dans le Rhône, point de demi-mesures ! Dans cette commune (32 000 habitants), où les risques nucléaires (trois centrales nucléaires dans un rayon de 100 km, dont celle du Bugey à 20 km) s’ajoutent aux risques chimiques (proximité de deux complexes pétrochimiques à Feyzin et Genay), la municipalité a fait construire un abri NBC (risques nucléaires-bactériologiques-chimiques) pouvant accueillir 500 habitants pendant 48 heures, délai prévu pour l’évacuation d’un nuage radioactif ou d’un effluent gazeux pollué. Terminons en saluant l’initiative du capitaine Munos, capitaine courageux, qui, pour la municipalité de Saint-Égrève (14 000 hab.) en Isère, a conçu un plan ORSEC opérationnel extrêmement précis : le capitaine Munos a dressé l’inventaire et la parade à tous les risques possibles à partir de scénarios-catastrophes pouvant surgir dans sa commune, de la rupture de barrage à la pollution chimique.

Nos élus sont unanimes : les remèdes aux problèmes de pollution, de nuisances, de déchets et de risques passeront par des solutions techniques, certes, mais aussi par une plus grande participation des administrés que nous sommes. D’accord ?… On se prend en charge ?

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