C’est le pourcentage des impuretés retrouvées dans l'eau de purge, par rapport à celles qui sont entrées avec l'eau alimentaire ; nous examinerons ci-après ses conséquences sur la propreté des générateurs, sur l'utilisation d’une nouvelle approche du suivi des chaudières à vapeur, ainsi que sur le développement d’une nouvelle conception du traitement interne des eaux de chaudière.
Dans une chaudière à vapeur, il doit s’établir un équilibre entre la quantité de sels (solubles ou insolubles) apportée par l’eau alimentaire d’une part, et la quantité de sels éliminée par la purge d’autre part.
Soient (figure 1) : Cₐ, la concentration d'un certain sel dans l'eau alimentaire et Cₚ la concentration de ce même sel dans l’eau de purge ; Vₐ le volume d’eau alimentaire et Vₚ le volume d’eau de purge mesurés durant une même unité de temps ; le sel considéré sera égal à 100 % si :
Vₐ × Cₐ = Vₚ × Cₚ
LES PROBLÈMES LIÉS AU MAUVAIS TRANSPORT DES ÉLÉMENTS EN CHAUDIÈRE
Si le transport des différentes impuretés apportées par l'eau alimentaire ne s’effectue pas à 100 %, cela signifie que ces impuretés se sont déposées dans la chaudière.
Or, il est connu que les dépôts qui se forment sur les surfaces d’échange d’une chaudière, quelle que soit la nature de la substance déposée, peuvent affecter sérieusement la production de vapeur du générateur de trois façons.
Tableau 1Conductivité thermique des divers tartres
Matière | | Conductivité thermique | |
---|---|---|
KCal/m.h°C | | W/(m.K) | |
Acier de fabrication de la chaudière | | 39,0 | | 44,7 |
Phosphate de calcium | | 3,15 | | 3,6 |
Magnétite (oxyde de fer magnétique Fe₃O₄) | | 2,5 | | 2,9 |
Sulfate de calcium | | 2,0 | | 2,3 |
Phosphate de magnésium | | 1,9 | | 2,2 |
Carbonate de calcium | | 0,8 | | 0,9 |
Analcite (Na₂O.Al₂O₃.4SiO₂.2H₂O) | | 1,1 | | 1,3 |
– Perte de rendement : la plupart des dépôts retrouvés en chaudière possèdent un excellent pouvoir isolant comme l'indique le tableau 1, comparant leur conductivité thermique.
– Rupture de tubes par surchauffage locale : dans une chaudière à vapeur, la température de l'eau est fixée par la pression de service du générateur. Par conséquent, les dépôts isolants qui se trouvent du côté « eau » produisent une élévation de la température externe du tube de chaudière.
Cette élévation de température, qui dépend de la nature du dépôt, de son épaisseur et du flux thermique du générateur, pourra être telle que l'on atteindra la température de surchauffe du métal (figures 2 et 3).
Rupture de tube par corrosion sous dépôt : la plupart des dépôts que l’on retrouve sur les surfaces d’échange sont des dépôts poreux sous lesquels se concentrent les différents sels solubles dont certains, notamment la soude caustique, peuvent provoquer de graves corrosions.
LA MESURE DU TRANSPORT EN CHAUDIÈRE : UNE NOUVELLE APPROCHE DANS LE SUIVI DES RÉSULTATS
D’une manière générale, la méthode de suivi actuelle consiste à maintenir les différents paramètres fixés par le constructeur de la chaudière ou le traiteur d’eau.
Ces paramètres étant correctement suivis, on attend généralement l’ouverture de la chaudière pour vérifier l’efficacité du traitement, aussi bien en ce qui concerne la corrosion que la propreté.
C’est ainsi que l’on vérifie généralement :
- que la dureté soluble en chaudière est nulle, ce qui permet de supposer que toute la dureté entrée dans la chaudière a réagi avec les phosphates ;
- que le taux de phosphate résiduel disponible pour précipiter la dureté entrant avec l’eau alimentaire est suffisant ;
- que le rapport silice sur TAC est maintenu dans les limites permettant à la silice de rester à l’état ionisé.
Une nouvelle approche plus rationnelle, et qui permet d’être tenu constamment informé de la quantité de dépôts restant dans la chaudière, consiste à utiliser la notion de transport en chaudière pour effectuer des bilans de transport sur les éléments susceptibles de se déposer, c’est-à-dire : la silice, la dureté et le fer.
Pour les effectuer, on applique le raisonnement suivant : tous les éléments entrant dans la chaudière et dont le transport s’effectue à 100 %, subiront le même rapport de concentration. Il suffit alors de comparer le rapport de concentration des éléments susceptibles de se déposer au rapport de concentration d’éléments particulièrement solubles tels que les chlorures ou le sodium.
Soit
- THₐ : Dureté de l’eau alimentaire
- THc : Dureté de l’eau de chaudière
- SiO₂ₐ : Silice de l’eau alimentaire
- SiO₂c : Silice de l’eau de chaudière
- Feₐ : Fer de l’eau alimentaire
- Fec : Fer de l’eau de chaudière
- Naₐ : Sodium de l’eau alimentaire
- Nac : Sodium de l’eau de chaudière
Le transport de la dureté sera égal à :
THₐ × Nac × 100 -------------------- THc × Naₐ
Pour tenir compte du fait que la dureté et le fer se trouvent à l’état précipité, il est nécessaire d’effectuer les analyses de dureté et de fer totaux après acidification et remise en solution des échantillons.
Exemple :
Eau alimentaire
- Dureté totale acidifiée : 0,1 mg/l
- Fer total : 0,16 mg/l
- Silice : 4,2 mg/l
- NaCl : 14,5 mg/l
Eau de chaudière
- Dureté totale acidifiée : 1 mg/l
- Fer total : 0,66 mg/l
- Silice : 190 mg/l
- NaCl : 650 mg/l
Transport de la dureté 1 × 14,5 × 100 / 0,1 × 650 = 22,30 %
Transport du fer 0,66 × 14,5 × 100 / 0,16 × 650 = 9,20 %
Transport de la silice 190 × 14,5 × 100 / 4,2 × 650 = 100 %
Dans le cas ci-dessus, on se rend compte que seulement 22,3 % de la dureté et 9,2 % du fer, entrant dans la chaudière, ressortent par la purge de déconcentration.
La méthode du calcul du taux de transport des éléments en chaudière, à condition d’être utilisée sur des échantillons d’eau suffisamment représentatifs pour limiter les erreurs dues aux variations inévitables dans la qualité de l’eau alimentaire, permet donc de prévoir la tendance aux dépôts dans les chaudières vapeur, la quantité de boues éliminée par les purges d’extraction demeurant inconnue.
TRANSPORT PLUS : UNE NOUVELLE CONCEPTION DU TRAITEMENT DES EAUX DES CHAUDIÈRES À VAPEUR
Les chaudières à vapeur, dans leur majorité, utilisent une eau alimentaire de bonne qualité, consistant en un
mélange soit d'eau adoucie et de condensats, soit d'eau déminéralisée et de condensats. Ces eaux contiennent néanmoins des traces de dureté (0,05 à 2 ppm) et d’oxydes de fer (0,01 à 0,5 ppm).
Un Transport de ces éléments inférieur à 100 % conduit inévitablement aux problèmes évoqués plus haut.
Deux types de traitement sont actuellement utilisés pour éviter les dépôts de tartre dans les chaudières : le plus courant est le traitement à base de phosphates par lequel on précipite la dureté sous la forme de phosphate de calcium (dépôt qui se présente sous la forme d’une poudre blanche peu adhérente) pour éviter la formation de dépôts durs sur les surfaces d’échange.
Les traitements chélatants du type NTA ou EDTA, introduits au début des années 1960, ont permis d'obtenir des chaudières plus propres qu’avec les phosphates, à condition de maintenir un minimum résiduel de produits. Cependant, le maintien de résiduels trop élevés conduit à des phénomènes de corrosion, aussi bien au niveau du système d’alimentation des chaudières, que dans les chaudières elles-mêmes. La diminution du taux résiduel que l’on pratique parfois pour éviter ces phénomènes ne permet plus de juguler les inévitables variations de qualité de l'eau alimentaire.
Le traitement appliqué aux chaudières alimentées avec une eau déminéralisée, mélangée à des condensats, consiste généralement à réguler le pH et l'alcalinité par l'utilisation judicieuse de phosphates mono-di-tri-sodiques. Les principaux dépôts que l’on retrouve dans ce type de chaudière sont dus aux oxydes de fer provenant du réseau de condensats et du réseau d'eau alimentaire.
Après de longues recherches en laboratoire, nous avons mis au point un programme de traitement nouveau, appelé Transport Plus, basé uniquement sur l'utilisation de polymères spécifiques, qui a pour objectif l'obtention d'un transport à 100 % de la dureté, du fer, de la silice par la purge de déconcentration sans l'inconvénient de la corrosion, lié à l'utilisation des chélatants.
Méthode de recherche
Depuis des années, nous avons développé diverses méthodes pour déterminer les causes et les remèdes des problèmes de dépôts et de corrosion en chaudière. Ceci inclut la définition du problème, les recherches en laboratoire, les études sur pilote et enfin les tests en vraie grandeur industrielle.
Tests de laboratoire
L'évaluation des produits de traitement d’eau alimentaire de chaudière se fait en plusieurs étapes. Après un premier dégrossissage, avec des tests de laboratoire, les produits sélectionnés sont passés sur la chaudière test de dégrossissage.
La durée normale d’un test est d'une semaine, au cours de laquelle sont effectués des bilans du Transport des éléments à travers la chaudière, ainsi que des pesées de la quantité de dépôt située sur les surfaces d’échange.
La chaudière illustrée sur la figure 4 peut fonctionner à des pressions allant jusqu’à 200 bars, avec des flux thermiques de 785 kW/m²/h (675 Th/m²/h) ; la production de vapeur est de 25 kg/heure.
La figure 5 indique l’état de surface des résistances chauffantes après différents essais réalisés sur la chaudière test.
Les produits ayant été satisfaisants sur la chaudière test sont ensuite passés sur une deuxième chaudière pilote. Cette chaudière de recherche (figure 5) permet de simuler pratiquement tous les problèmes rencontrés industriellement. Elle contient tous les équipements que l’on peut rencontrer dans une chaufferie moderne.
Par conséquent, il est possible d’obtenir des renseignements précieux sur l’application possible d’un traitement sur l'eau alimentaire de chaudière.
Les performances sont obtenues en mesurant la vitesse d’encrassement, le Transport des éléments et
Le taux d’hydrogène dans la vapeur (indication sur la tendance à la corrosion) durant l'essai.
La vitesse d’encrassement est mesurée grâce à des thermocouples placés dans les zones test (figure 6).
Les conditions utilisées pendant les essais du programme à base de polymères étaient les suivantes (les flux thermiques utilisés sont représentatifs des tubes écrans et des tubes de sole des chaudières du type package).
Résultats
Après une série de tests de mise au point, la formulation définitive du programme Transport Plus a été testée sur la chaudière pilote pendant une durée de 60 jours avec des incursions volontaires de dureté ou des baisses volontaires de dosage du traitement.
Pendant les 8 premiers jours, le dosage du produit fut respecté et l'on obtint un transport calcium de 118 % et magnésium de 101 %. Le dosage fut réduit à 50 % du dosage prévu pendant 6 jours. Le transport du calcium se maintint à 96 % et le transport du magnésium chuta à 81 %. On ne nota cependant pas d’augmentation de température (figure 7) sur les thermocouples.
Le dosage fut alors réduit à 30 % du dosage initial. Le transport du calcium baissa à 89 % et celui du magnésium à 78 %.
À ce niveau, la température des tubes s’est élevée de 10 °C dans la section horizontale, ce qui indiquait un début d’entartrage (figure 8). Le traitement fut ensuite ramené au dosage normal pour 15 jours. La température chuta de 10 °C dès les premiers jours, et les
transports du calcium et du magnésium montrèrent de 122 % à 111 %, ce qui indique une bonne aptitude du programme au nettoyage.
Durant les 30 derniers jours du test, se sont succédées des périodes avec et sans traitement.
Les essais pilote ont donc montré l'aptitude du programme à effectuer le Transport à 100 % ainsi qu'à récupérer une situation compromise par des variations de pollution de l'eau alimentaire, chose impossible à obtenir avec les traitements à base de phosphate.
Résultats des tests industriels
Après avoir franchi l'étape du pilote de laboratoire, le programme (dénommé Transport Plus) a été testé sur des chaudières industrielles il y a maintenant plus de trois ans.
Depuis, plusieurs milliers de chaufferies ont adopté le programme de traitement à base de polymères qui leur permet d'obtenir un transport à 100 % du calcium, du magnésium, du fer et de la silice, évitant ainsi la formation de dépôts sur les surfaces d'échange.
Corrosion
Les mesures d'hydrogène sur la vapeur ont montré l'absence de corrosion interne (tableau 2).
Tableau 2
Transports de la dureté et du fer, Taux d'hydrogène dans la vapeur obtenus lors de tests industriels
% Transport – ppb Hydrogène – précédent
Cas | Pression (bars) | Avant | Après | Avant | Après | Précédent traitement |
---|---|---|---|---|---|---|
1 | 100 | 99 | 112 | 2,5 | 2,5 | Phosphate |
2 | 65 | 64 | 171 | 3,3 | 3,1 | NTA |
3 | 55 | 146 | 180 | 3 | 3 | NTA |
4 | 40 | 61 | 156 | 3 | 3 | EDTA + Polymère |
5 | 40 | 122 | 166 | 6,8 | 3,2 | NTA |
Prévention des dépôts
Les bilans de Transport effectués sur des échantillons moyens représentatifs ont montré la capacité du programme à base de polymères spécifiques de maintenir les surfaces d'échange exemptes de dépôt (tableau 2).
La constitution de ces tableaux est réalisée à partir de moyennes.
Exemple : Chaudière 15 bars
Alimentation : eau décarbonatée à la chaux et adoucie et retour de condensats (50 % du total).
Traitement : phosphate disodique 30 ppm en chaudière.
Les figures 9 à 12 sont obtenues à partir de la réalisation des bilans de transport sur des échantillons prélevés toutes les 8 heures, et moyennés par semaine.
Effet nettoyant
À chaque démarrage sur des chaudières non préalablement nettoyées, le Transport est monté à plus de 100 %, prouvant ainsi l’effet nettoyant du produit. Cet effet avait déjà été remarqué lors des essais sur le pilote comme nous l’avons cité précédemment.
Cet effet nettoyant s’explique par la propriété que possède le programme de solubiliser la dureté. Toutefois, en présence d'une épaisseur de dépôt anormalement élevée, il est préférable de procéder à un lessivage à l’acide avant le démarrage du traitement.
Cette chaudière (C.E. VU 40) fonctionne à 100 bars ; l'eau alimentaire est constituée de 10 % d’eau d’appoint déminéralisée et de 90 % d'eau de retours de condensats. Le traitement consistait à maintenir 5 à 10 ppm de phosphate en chaudière avec 10 à 20 ppm d’alcalinité caustique.
CONCLUSION
L’utilisation de la méthode des bilans de transport des éléments contenus dans l’eau de chaudière permet de mettre en évidence la tendance aux dépôts en continu sans nécessiter l’arrêt de celle-ci pour inspection. Cette méthode de suivi du Transport a également permis de mettre au point un nouveau programme de traitement basé uniquement sur la technologie des polymères. Ce nouveau programme assurant le Transport à 100 % de la dureté, du fer, de la silice par les purges de déconcentration de la chaudière permet d’être certain de la propreté des surfaces d’échange avec toutes les conséquences bénéfiques que ceci entraîne du point de vue de la sécurité d'exploitation, ainsi que de l’amélioration des échanges thermiques.