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Le traitement des eaux de recyclage industrielles par rayonnement ultraviolet

30 juillet 1986 Paru dans le N°102 à la page 57 ( mots)
Rédigé par : H ANDRIESSEN

L'évolution technologique sous leurs aspects physiques et mécaniques des équipements de traitement d’eau par rayonnement ultraviolet permet d’envisager aujourd'hui de nouvelles applications notamment dans le traitement des eaux de recyclage industrielles.

Dans de nombreuses applications industrielles où des liquides aqueux sont utilisés en recyclage dans un circuit fermé, l'un des problèmes essentiels qui se pose est la prolifération des micro-organismes, ce qui entraîne des dangers pour la santé, des changements dans la composition des produits chimiques nécessaires au bon fonctionnement du circuit, ainsi que des diminutions de son rendement. Pour combattre le développement de ces micro-organismes, le moyen classique consiste à ajouter un bactéricide dans le fluide ; la réaction d'immunisation des bactéries nécessite en premier lieu une augmentation de la concentration du produit, puis son remplacement par un autre procédé, ce qui est une cause d’augmentation des frais d'exploitation. L'utilisation des rayonnements ultraviolets, qui n’entraînent aucun effet d’immunisation, constitue une parade à ces inconvénients. Leur efficacité dépend de l’administration de la dose nécessaire pour inactiver les micro-organismes et descendre ainsi au-dessous du taux de concentration maximum admissible des germes en cause.

Pour en juger les résultats, il faut prendre en compte chacun des éléments intervenant dans le procédé, à savoir :

  • — la source du rayonnement ;
  • — le but à atteindre ;
  • — les moyens de transfert du rayonnement.

La source du rayonnement ultraviolet

Les rayons ultraviolets font partie du rayonnement électromagnétique ; leur gamme de longueurs d’ondes s’étend entre 100 et 400 nanomètres. Dans la gamme située entre 200 et 300 nanomètres, l’énergie des photons est telle que physiquement, une interaction de deux types différents peut être provoquée avec la matière qui aborde ces quanta :

  • - distorsion de liens chimiques hétéropolaires par activation des électrons de liaison ;
  • - distorsion de liaisons homopolaires par dissociation de molécules organiques.

Pour la plupart des micro-organismes, l’absorption maximale des rayonnements a lieu entre 250 et 260 nanomètres, comme le montre la figure 1 ; les membranes des protéines et acides nucléiques sont alors endommagées et l'ADN et l'ARN sont localement mutés, ce qui empêche la reproduction de la cellule. Chaque molécule et chaque liaison chimique est ainsi activée par un quantum spécifique.

Les lampes à décharge à basse tension de vapeur de mercure sont utilisées comme source d’énergie dans

[Photo : Absorption moyenne du rayonnement électromagnétique par les micro-organismes.]
[Photo : Lampe de décharge à basse tension de vapeur de mercure (type P.A.)]

Cette gamme de longueurs d’ondes (voir figure 2). Elles sont constituées d’un tube en quartz transparent à la longueur d’onde recherchée, dans lequel règne un vide poussé. Des électrodes revêtues de mercure sont insérées à chaque extrémité de ce tube ; en leur appliquant un potentiel électrique suffisant, on crée une décharge électrique qui vaporise et ionise le mercure présent, lequel émet alors un spectre de longueurs d'ondes dont le maximum d’émission, en cas de vide poussé, se situe à 253,7 nanomètres, ce qui correspond à la longueur d’onde létale pour les micro-organismes.

La finalité du traitement par rayons ultraviolets

Le but final d’un traitement par rayonnement ultraviolet est la désactivation d'un nombre maximum des micro-organismes visés ; or, pour chacun de ceux-ci, l’énergie spécifique nécessaire à sa destruction totale ou partielle est fonction de sa composition chimique et de sa structure : ainsi, ce sont les dimensions et l'épaisseur de sa membrane cellulaire qui déterminent sa sensibilité au traitement.

Cette énergie est définie par le produit d’une intensité spécifique appliquée pendant un temps suffisant pour permettre à la réaction photochimique de se produire ; elle s’exprime en joules par m².

La variation de ces deux paramètres (intensité et temps) dans un milieu contenant une population donne des résultats variables suivant la dose d’énergie appliquée. Le tableau explicite cette notion pour ce qui concerne les E. coli.

Pour atteindre l’effet maximal, les micro-organismes doivent être soumis à une dose d'irradiation pendant une durée correspondant à son temps de contact moyen avec la lampe. Les doses minimales à 253,7 nanomètres requises pour la destruction de 90 % des différents micro-organismes habituellement rencontrés sont connues.

Les composants qui reçoivent le traitement peuvent se trouver en solution et/ou en suspension. Dans ce dernier cas, les dimensions des particules jouent également un rôle dans l'absorption observée. Enfin, il peut se produire, outre les effets destructeurs causés par les rayons, un phénomène appelé photo-réactivation : c’est une mutation de réparation souvent constatée qui se produit sous l’influence d’enzymes formés par l’irradiation provenant de la lumière visible. La mutation peut avoir lieu dans les micro-organismes qui sont toujours vivants, mais détruits jusqu’au point où la reproduction n’est plus possible. L’administration de doses plus élevées diminue la concentration des survivants, de même que le taux des mutations par photo-réactivation… d’où l’intérêt de disposer d’une source puissante de rayonnements ultraviolets.

Les moyens de transfert de rayonnement

Le rendement effectif du rayonnement (c’est-à-dire l'intensité utile de l'irradiation) est fonction de plusieurs facteurs : le coefficient d’absorption, la qualité des matières en suspension, l'épaisseur de la couche traitée, la température de fonctionnement de la lampe et la transmissibilité des matériaux structuraux.

Dose (J/m²) Pourcentage des E. coli détruits
1,3 10
2,6 18
3,2 33
9,1 50
13,1 63
20,9 80
26,1 86
30,0 90 (10⁻¹ diminution de la population)
39 95
51 98
60 99 (10⁻² diminution de la population)
69 99,5
81 99,8
90 99,9 (10⁻³ diminution de la population)
120 99,99 (10⁻⁴ diminution de la population)
150 99,999 (10⁻⁵ diminution de la population)

Dose à 253,7 nm requise pour la destruction de E. coli

Les deux premiers paramètres dépendent eux-mêmes des matières en cause. Dans la conception de l'équipement de transfert de la radiation, on peut en tenir compte en le dessinant de manière que le liquide subisse un brassage suffisant pendant son parcours, soit par un écoulement en régime turbulent, par un passage perpendiculaire à la direction des lampes, par une entrée tangentielle (si le débit passe longitudinalement dans l’équipement) et/ou par des mélangeurs statiques dans le passage entre deux lampes.

L'intensité transmise peut être augmentée en amincissant la couche traitée, ce qui permet l'application d'une dose plus élevée à des débits plus importants, tout en minorant l’effet de photoréactivation.

Afin d’obtenir des performances optimales, il est nécessaire d'immerger les lampes dans le milieu à traiter et de les positionner de telle manière que l’épaisseur du liquide à irradier soit minimalisée : pour cela, chaque lampe est placée dans un tube en quartz à transmissibilité élevée ; le quartz sert de séparation entre la lampe et le liquide, comme isolation électrique et thermique. Pour éviter toute absorption parasite due à des dépôts sur le tube en quartz, un système de nettoyage mécanique est prévu, constitué de bagues en matière synthétique sélectionnée au profil étudié pour permettre un résultat parfait, en se basant sur le principe du balai d’essuie-glaces.

Pour réaliser le niveau voulu de désinfection, on peut choisir soit une chambre d’irradiation de grand volume où le liquide ne passe qu'une seule fois, soit une chambre de petit volume où le liquide est recyclé à plusieurs reprises dans une boucle indépendante du circuit à désinfecter.

On peut, en outre, prévoir d’automatiser l’équipement de rayonnement en fonction des besoins, opération qui peut englober le nettoyage, le contrôle du débit, celui du dosage par rapport au débit, ou/ et à l’intensité des lampes. Il est également possible d’introduire des sécurités supplémentaires par couple sur le fonctionnement des lampes à courant continu.

Applications

Leur nombre est très élevé : ainsi, grâce à l’utilisation de lampes à haut rendement, avec des intensités allant jusqu’à 300 W/m², on peut traiter des liquides colorés ou à haute teneur de particules suspendues (émulsions d’huile par exemple) en obtenant des résultats tels que ceux représentés sur la figure 3.

[Photo : Fig. 3. - Résultats du traitement U.V. appliqué à divers liquides.]

Afin d’appliquer des doses suffisantes aux liquides fortement absorbants, un système de recirculation permet de compléter les différents effets décrits ci-dessus et d’obtenir, en tout point du liquide, une dose d’irradiation suffisante ; en effectuant plusieurs passages dans l’équipement de traitement, chaque unité de volume du liquide recevra en effet la dose qui lui est nécessaire.

Cette technique peut concerner des liquides très chargés et/ou fortement absorbants. Ses applications sont multiples dans des domaines aussi variés que la métallurgie, l’agro-alimentaire, l’industrie graphique, etc. Elles permettent souvent d’éviter les inconvénients des bactéricides, des consommations de tampons chimiques, etc.

* * *

Conclusion

Grâce aux progrès technologiques réalisés, le traitement aux rayonnements ultraviolets connaît un intérêt nouveau et poussé, dans des procédés nouveaux englobant le traitement bactériologique des eaux usées industrielles, normalement utilisées en circuit fermé. Ces nouvelles applications sont possibles par l’utilisation de hautes intensités (jusqu’à 300 W/m²) et par l’amélioration de différents aspects mécaniques et électriques de l’équipement de rayonnement.

Il faut noter que les coûts d'utilisation de ces procédés sont dans la plupart des cas inférieurs à ceux des techniques classiques.

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