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Le traitement des boues d'une station d'épuration industrielle à St Dizier

29 septembre 1995 Paru dans le N°184 à la page 69 ( mots)
Rédigé par : Jean-jacques MERGENTHALER et Serge LANDES

Le traitement et la déshydratation des boues dans l'industrie agro-alimentaire posent le problème de la complexité des rejets à traiter. Une nouvelle station d'épuration industrielle construite à Saint-Dizier en est l'exemple type, où les exigences très sévères de l'exploitant sont respectées tout en alliant l'optimisation, le respect de l'environnement, l'hygiène et la sécurité du personnel. Elle démontre qu'il est possible de concilier les impératifs de production avec un traitement des rejets automatique et continu. Cette usine de production de crèmes glacées est entrée dans sa première phase de démarrage en avril 1995 et travaillera à son optimum à la fin de l'année. Construire une station d'épuration ayant des rejets aussi variés en fonction des saisons relève de la prouesse technique. La maîtrise d'?uvre en a été confiée à 100% à la société Krüger.

Nous allons décrire dans cet article comment sont traitées et comment sont principalement déshydratées les boues dans la nouvelle station d’épuration industrielle de Saint-Dizier. Cette station automatisée a été construite pour traiter les effluents et rejets d’une usine de production de crèmes glacées.

La première étape de démarrage a commencé en avril 1995 et la station pourra travailler en régime totalement continu à la fin de l’année.

Nous verrons comment les exigences très sévères de l’exploitant sont respectées tout en alliant l’optimisation, le respect de l’environnement, l’hygiène et la sécurité du personnel.

Voici quelques chiffres qui permettront de mesurer la taille de la station :

  • * Traitement des effluents : 800 m³/jour
  • * DCO : 6 000 kg/jour
  • * DBO5 : 3 530 kg/jour
  • * Matières en suspension : 750 kg/jour

La station d’épuration

La station est équipée d’un traitement biologique et physico-chimique classique dans ce type d’industries. L’usine doit traiter environ 750 kg/jour de graisses alimentaires de nature et de composition extrêmement variées, provenant d’une fabrication de glaces et de crèmes glacées.

Ces graisses alimentaires sont d’origine végétale et animale, c’est-à-dire du lait, des émulsions de crèmes dans l’eau, des liants de crèmes glacées, protéines du lait, gélifiants, morceaux de fruits divers, émulsifiants, etc.

Toutes ces contraintes conduisent à utiliser un procédé particulier qui doit :

  • * Être évolutif car il est possible d’étendre ultérieurement les installations pour faire face à une éventuelle augmentation de capacités de production de crèmes glacées dans l’usine.
  • * Être adaptable sur mesure. En fonction de la pollution amenée sur la station, il existe la possibilité de traiter à partir de 1/3 de la charge maximale de production, ceci permettant de répondre aux exigences saisonnières de ce type d’industrie. En effet, la grosse production et la consommation se feront en été, alors qu’en hiver, l’activité est plus réduite.
  • * Respecter l’environnement, qui correspond aux mesures de rejets en vigueur. Une attention toute particulière a été portée sur le respect des nuisances olfactives par utilisation d’une station de désodorisation (dont nous verrons le principe ultérieurement), et sonores ; en effet, dans les bâtiments, tous les appareils bruyants sont insonorisés. Ces diverses installations permettent au personnel de travailler dans un meilleur confort et avec des conditions de sécurité accrues.
  • * Travailler en continu. Cette station entièrement automatisée peut être gérée par télésurveillance. L’usine travaille actuellement (activité saisonnière maximale) sept jours sur sept et 24 heures sur 24.
  • * Respecter les exigences de production. En effet, actuellement, la station accepte et absorbe le double de la pollution annoncée au moment de la définition du cahier des charges et des spécifications concernant les rejets au début du projet. Ceci montre la capacité d’évolution et de modularité du système pour s’adapter aux diverses exigences de capacités de production très variables dans ce type d’industrie.

Toutes ces contraintes et problèmes ont été résolus en utilisant successivement :

[Photo : Fig. 1 : Schéma de principe de la déshydratation.]
  • • Un dégrilleur qui a pour fonction d’arrêter les grosses particules non biodégradables supérieures à 1 mm (principalement l’aluminium, les emballages, le verre, les plastiques d’emballages, etc.).
  • • Un dégraisseur destiné à éliminer les graisses par flottation. Les graisses et crèmes surnagent à la surface de l'eau et elles sont raclées et évacuées vers le bassin d’hydrolyse pour y être biodégradées.
  • • Un bassin d’hydrolyse : on y injecte de l'air à raison de 500 m³/h, ce qui permet la biodégradabilité des graisses. Ce phénomène engendre une chute de pH dans le bassin et l’on est obligé de rétablir celui-ci par injection de lait de chaux pour réajuster le pH à 7.
  • • Épaississeur de boues : l’épaississeur de boues reçoit des boues inertes du bassin d’hydrolyse et les boues produites par la station biologique. L’épaississeur de boues a pour but de concentrer les boues afin de les traiter par déshydratation. Dans l’épaississeur, les eaux claires sont évacuées en surface et celui-ci est dimensionné de manière à pouvoir stocker les boues sur trois jours, ceci en cas de défaut dans le circuit aval de traitement et déshydratation des boues.

Le débit moyen journalier des boues est de 200 m³ avec un taux de matières sèches de 1 910 kg/jour.

Nous allons voir maintenant comment ces boues concentrées sont traitées.

La déshydratation

Il convient d’enlever le maximum d’eau contenue dans les boues et, pour cela, les boues en sortie d’épaississeur sont envoyées sur une centrifugeuse par l’intermédiaire d’une pompe. La solution de la centrifugeuse a été choisie car elle présente les avantages suivants :

  • • La centrifugeuse est un appareil totalement fermé ; c’est une enceinte close.
  • • Elle évite la formation d’aérosols.
  • • Elle permet de mieux capter les sources de nuisances.
  • • Elle permet de travailler en continu.
  • • Elle est couplée à une station de désodorisation.

La station de désodorisation

L’ensemble des gaz provenant principalement de la centrifugeuse est envoyé sur un média filtrant naturel composé d’écorces d’épicéa et de tourbe blonde, qui a une capacité d’absorption très importante et ceci sans adjonction de produits chimiques et réactifs supplémentaires.

Le volume global de ce média filtrant est de 30 m³. Par expérience, il convient de changer cette masse filtrante tous les cinq ans environ.

La pollution induite par ce système est minime car la dégradation des écorces se fait naturellement.

La station de dilution de polymères

Afin d’améliorer encore davantage l’efficacité de la centrifugeuse, des agents de floculation appelés polymères sont injectés en amont de celle-ci.

Les polymères sont des polyacrylamides se présentant sous forme de poudre ou d’émulsions et servent à agglomérer et à floculer les boues.

Cette unité de dilution a fait l'objet d’une attention toute particulière car celle-ci est une station mixte pouvant travailler avec des polymères liquides ou poudres.

Quels sont les principaux éléments de la station ?

  • • Une cuve de stockage équipée d’un aspirateur afin de permettre un confort d’utilisation pour l’exploitant, car cette aspiration évite la formation de poussières par rapport à un changement de la cuve manuel.
  • • Une pompe pour du polymère liquide dans le cas d’utilisation de polymère dilué.
  • • Un doseur de poudre à double vis interactives assurant une excellente précision de dosage d’une part, et cette double vis est autonettoyante, ce qui est très appréciable car les polymères poudre sont très hygroscopiques et la moindre trace d’humidité peut bloquer le doseur.
  • • Le doseur de poudre est également équipé d’un volet de fermeture automatique évitant ainsi les remontées d’humidité dans le doseur.
  • • Un cône de dissolution permettant de créer un tourbillon d’eau appelé vortex. La poudre tombe en pluie dans le tourbillon d’eau, ce qui permet une dissolution très efficace de la poudre. Le même principe est utilisé pour dissoudre par exemple de la colle à papier peint dans un seau.
  • • Une cuve cylindrique de maturation avec agitation évitant ainsi les volumes morts et les angles morts. Le temps de maturation habituellement utilisé est de 1 à 2 heures.
  • • Une cuve cylindrique de dosage, dans laquelle tombe le polymère maturé.
  • • Une pompe doseuse de polymère.
  • • Une unité de dilution comprenant une arrivée d’eau, un rotamètre, une vanne de réglage et un mélangeur statique, ceci afin de diluer le polymère maturé et l’amener à une concentration optimale à l’entrée de la centrifugeuse.

Cette station est très compacte car les

[Figure : Schéma de principe de la station de dilution des polymères liquides/poudres.]

Les dimensions au sol sont réduites 1600 x 1200 mm d’une part, et elle est adaptable aux exigences de production car l’on peut préparer des solutions de polymères concentrés (par exemple, 5 g/l) ou des solutions diluées (1 g/l par exemple), d’autre part.

Chaulage

Afin de recycler les rejets au maximum, les boues déshydratées subissent ensuite un chaulage pour atteindre un taux de siccité de 17 %, ce qui permet de stocker les boues sous forme de tas et d’amas.

En effet, si le taux de siccité est supérieur, la boue est trop humide et trop fluide. Ces boues chaulées sont ensuite utilisées en épandage agricole.

Les agriculteurs voisins de la station sont demandeurs et les boues sont vendues, « retournant ainsi à la terre ».

L’incinération est plus coûteuse et les boues ne sont pas valorisées, l’incinération étant principalement utilisée dans le cas où l’on ne peut épandre les boues en raison de la présence de métaux lourds ou autres produits dangereux pour l’environnement.

En conclusion, cette station d’épuration modèle permet d’allier souvent l’inconciliable, c’est-à-dire les exigences et contraintes de l’industrie, le respect de l’environnement par utilisation par exemple de la station de désodorisation, le recyclage, l’hygiène et la sécurité du personnel, l’optimisation et la souplesse d’utilisation pour un exploitant.

Remerciements

L’auteur souhaite remercier tout particulièrement la société Krüger pour l’aimable soutien qu’elle apporte à cette étude.

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