,
Proserpol
[Photo : Vue de l'installation]
En matière d’effluents industriels, deux grandes filières de traitement sont à prendre en considération : l'une, la filière biologique, s’applique à des effluents chargés en matières organiques, contenant des substances biodégradables ; l'autre, la filière physico-chimique, à des effluents toxiques pour les bactéries et contenant des polluants susceptibles d’être éliminés par décantation ou flottation. Pour commode qu'elle soit, cette classification schématique ne peut cependant avoir la prétention de prendre en compte la très grande diversité des effluents et des contextes de production.
Face à des effluents complexes, il est indispensable d’entreprendre une étude technico-économique approfondie qui, permettant d'appréhender la totalité de leurs caractéristiques (composition, débit...) et des paramètres du site, favorisera l’émergence de la solution adaptée au problème considéré. Depuis 25 ans, Proserpol s'est donnée pour règle et vocation de respecter cette approche qui privilégie la recherche de
[Photo : Principe de traitement par W.P.O. (Wet Peroxide Oxidation)]
Caractéristiques du flux à traiter
Débit : 20 m³/j (min.) – 24 m³/j (max.) |
DCO : 4 000 mg/l – 7 000 mg/l |
COT : 2 000 mg/l – 2 500 mg/l |
Chlorure : 80 g/l – 120 g/l |
Métaux
Étain : 500 mg/l – 1 000 mg/l |
Plomb : 10 mg/l – 20 mg/l |
Performances de traitement
Objectif – Performances obtenues
DCO : 3 000 mg/l – 1 500 à 2 000 mg/l |
COT : 1 600 mg/l – 900 à 1 000 mg/l |
Étain : 2 mg/l – < 0,1 mg/l |
Plomb : 0,5 mg/l – < 0,2 mg/l |
Coûts d’exploitation W.P.O.
Amortissement : 130 F/m³ |
Réactifs et énergie : 170 F/m³ |
La solution sur mesure clés en main inscrite dans une perspective de développement durable.
C’est précisément ce type de réponse qu’appelaient les effluents de l’atelier 4 de l'usine Morton S.A., spécialiste de la chimie fine implantée près d'Orléans (45) depuis 1965. Désormais filiale de Rohm & Haas, Morton S.A. emploie 141 personnes sur une surface de plus de 45 000 mètres carrés, dont une dizaine de milliers réservés aux ateliers. Sa gamme de production, extrêmement variée, s’adapte à la demande ponctuelle de ses clients : elle recouvre des produits tels que vernis, additifs pour peintures, agents de démoulage pour polyuréthane, adhésifs et additifs pour le verre. Plus d'un millier de produits, au total, peuvent ainsi être fabriqués sur les différentes lignes de production de l'usine. Le fait qu’aucune ligne sur le site ne soit strictement dévolue à un produit, associé à cette très grande diversité de production, rend le traitement des effluents liquides et solides (eaux usées, solvants chlorés, déchets industriels spéciaux et banals) d’autant plus complexe.
Lorsque Morton S.A. lance le projet d'un nouvel atelier de production de dérivés organo-métalliques qui générera environ 20 m³/jour d’effluents, c’est à Proserpol qu'est confiée la conception et la réalisation de l'installation de traitement.
L'ensemble de l’activité chimique préexistante produisait un peu moins de 20 mètres cubes d'effluents par mois, incinérés à l’extérieur par une société spécialisée.
Les volumes mis en jeu dans le nouvel atelier ont conduit Morton S.A. à retenir la solution de traitement sur site des effluents. Compte tenu de la nature des procédés initialement envisagés, l’effluent devait être chargé en chlorure d’ammonium. Il s'avéra que l'azote rejeté représentait à lui seul le quart de la charge azotée traitée par la station d’épuration urbaine avec laquelle Morton S.A. a passé une convention. Face à l’opposition du SIVOM et à la difficulté rencontrée pour valoriser le chlorure d’ammonium en engrais, Morton dut admettre la nécessité de changer de procédé de production. Le procédé mis en œuvre est à base de soude : les effluents sont désormais riches en chlorure de sodium.
Des effluents spécifiques délicats à traiter
[Photo : Morton (Semooy - 45) : réacteur d’oxydation]
Effluents caractérisés par la dureté de la DCO, l’abondance des métaux lourds, une forte salinité et leur faible volume à traiter, Proserpol s'est donc livrée à une analyse comparative de plusieurs types de traitement :
- classiquement employés pour la décantation des métaux lourds, les traitements physico-chimiques ne pouvaient être appliqués, en raison de la forte complexation des métaux lourds par des molécules organiques,
- un traitement biologique est pareillement échoué, la teneur en chlorure étant à ce niveau trop élevée,
- avec le procédé d’osmose inverse, ce sont des pressions osmotiques très importantes qu’il eût fallu vaincre,
- la charge en DCO trop élevée signifiant des coûts d’exploitation dissuasifs, la solution charbon actif se trouvait elle aussi éliminée.
À raison de 2 100 francs le mètre cube traité, et pour une vingtaine de m³ par jour, l’incinération ne représentait pas une alternative crédible : la décision de traiter in situ s’en trouvait validée.
L’inadéquation de ces procédés a souligné tout naturellement les avantages techniques et économiques de l’oxydation humide au peroxyde d’hydrogène (W.P.O. pour Wet Peroxide Oxidation).
Proserpol a donc organisé des essais à petite échelle, puis installé l’unité d’oxydation humide au peroxyde d’hydrogène, un an seulement après la construction de l’atelier quatre.
La solution de l’oxydation
L’installation se décompose en cinq étapes : la préparation de l’effluent, son traitement dans le réacteur, la neutralisation de l’effluent obtenu, son stockage avant filtration, sa filtration. L’effluent est tout d’abord stocké dans une cuve extérieure de 50 m³. Il doit ensuite être chauffé pour optimiser l’oxydation. Dès le départ, Proserpol a souhaité limiter la consommation énergétique nécessaire au traitement. Un économiseur a donc été placé en début de process. Il permet la restitution des calories de l'effluent oxydé chaud en sortie de réacteur à l’effluent froid à oxyder ; cet échange permet également de répondre à l’obligation de température des effluents rejetés fixée à moins de 30 °C. Les apports énergétiques nécessaires à la préparation de l’effluent sont donc faibles. Un second échangeur a été placé dans le trajet de l’effluent organo-métallique vers le réacteur d’oxydation, pour réguler à la température optimum de consigne.
Ainsi conditionné, l’effluent alimente en continu à un débit de 1 m³/h le réacteur d’oxydation. Pour éviter la corrosion (milieu oxydant, teneur en chlorure élevée), ce réacteur est émaillé. De l’eau oxygénée (H₂O₂) et un catalyseur sont ajoutés, ainsi qu’un acide ou une base pour ajuster le pH. La réaction d’oxydation est catalysée par un ion métallique selon ces modalités :
Méⁿ⁺ + H₂O₂ → Méⁿ⁺ + OH⁻ + OH•
Les ions radicalaires ainsi générés (OH•) sont très réactifs. Ils vont attaquer les liaisons moléculaires liant les atomes de carbone des molécules organiques et des complexes organo-métalliques. Les molécules organiques sont décomposées en acides organiques simples biodégradables, tandis que les métaux, à nouveau libres, sont remis en solution. Afin d’éviter tout phénomène de strippage des effluents, le réacteur est muni d'un condenseur, les condensats étant réinjectés dans l'installation pour y être traités à nouveau.
Les étapes suivantes se font à l’étage inférieur, ce qui permet un transport gravitaire de l’effluent, sans avoir recours à une pompe de relevage. Les effluents oxydés ne contenant plus que des acides organiques et des métaux en solution passent par un réacteur de neutralisation avec ajout de soude et d'adjuvants spécifiques. Ainsi, les acides sont neutralisés et les métaux lourds précipités. La cuve suivante permet le stockage avant filtration finale sur filtre presse. Le déchet produit est envoyé en centre agréé. L’effluent restant est dirigé vers deux cuves de stockage de 25 m³ chacune, avant rejet au réseau. Elles sont utilisées alternativement, pour les analyses de chlorures et de DCO avant rejet ou pour le remplissage.
en place d'une seconde cuve tampon donne une souplesse d'utilisation et une rigueur dans le contrôle. Par sécurité, un filtre à sable a été placé en aval du stockage avant rejet. Les boues issues du traitement des effluents de l’atelier quatre, ainsi que les boues provenant d'autres ateliers, sont dirigées vers un Centre Agréé. L'ensemble représente une dizaine de mètres cubes par mois.
Une sécurité à tous les niveaux
La sécurité est un souci constant de Morton S.A. Plusieurs options ont donc été choisies pour garantir les meilleures conditions de sécurité. L'atelier, y compris la station de traitement des effluents, a été construit en milieu anti-déflagrant. Autre mesure de sécurité mise en place par Morton S.A. : la station de traitement des effluents est gérée par la personne en charge de cette ligne de production. Cette double responsabilité impose à l’opérateur de maîtriser son procédé de production, au risque, si tel n'est pas le cas, d'avoir à gérer en aval des problèmes de traitement de ses effluents. La ligne de production, ainsi que le traitement des effluents, fonctionne sur trois postes par jour. Le principe de traitement retenu est du type continu, avec un débit de 1 m³/h. En outre, la qualité de l’étiquetage des différentes fonctions a été particulièrement soignée. Enfin, la permanence d’un contrôle informatique dans une salle adjacente renforce cette sécurité. Deux ordinateurs de type PC présentent les synoptiques des unités de traitement et de production. Proserpol en a mis au point le principe de fonctionnement, tandis que le développement était effectué par Morton S.A.
Conclusions et perspectives
Avec des performances supérieures aux objectifs, la station de traitement démontre la pertinence de la recommandation de Proserpol. Dans ce contexte de fabrication en discontinu de chimie fine et pour ce type d’effluents, le procédé W.P.O. s’avère le traitement idéal pour réduire de façon significative la charge organique et la teneur en métaux lourds, tout en présentant un attrait économique incontestable par rapport à l'incinération.
L’efficacité et la souplesse d'utilisation du procédé W.P.O. sur des effluents réputés difficiles à traiter en font un procédé séduisant appelé à de multiples développements.
En effet, l'expérience récente de Proserpol démontre que l'oxydation peut être mise en œuvre soit sur des effluents concentrés comme ceux de Morton S.A., permettant un rejet dans le milieu urbain, soit sur des effluents dilués comme ceux de l’Atelier Industriel Aéronautique à Bordeaux (33) où ils sont ensuite rejetés dans le milieu naturel avec une DCO de 150 mg/l.
[Publicité : EDITIONS JOHANET]