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Le peroxyde d'hydrogène dans le traitement des boues

28 decembre 1981 Paru dans le N°60 à la page 47 ( mots)
Rédigé par : G. DE VRIENDT

La séparation et l’évacuation des boues provenant du traitement des effluents municipaux constituent bien souvent une opération délicate et coûteuse.

Les boues provenant des traitements primaire et secondaire contiennent de 1,5 à 2,5 % de matières sèches. Ces valeurs sont plus élevées dans le cas des boues digérées.

Bien que dans certains cas les boues puissent être épandues sans traitement préalable, il faut le plus souvent procéder à leur déshydratation, de façon à accroître leur teneur en matières sèches et faciliter ainsi leur évacuation.

Cet article présente brièvement plusieurs cas concrets où l’emploi de peroxyde d’hydrogène constitue un remède efficace contre les problèmes que l’on peut rencontrer dans le traitement des boues.

PROPRIÉTÉS DU PEROXYDE D’HYDROGÈNE

Le peroxyde d’hydrogène est un liquide incolore, inodore et miscible en toutes proportions dans l’eau. De formule chimique H₂O₂, sa masse molaire est de 34,02 g. Il est commercialisé sous la forme de solutions aqueuses de concentration en poids 35, 50 et 70 %.

Les principales caractéristiques physico-chimiques des solutions de peroxyde d’hydrogène sont les suivantes :

Concentration en poids :35 %50 %70 %
Poids spécifique à 20 °C (kg/dm³) :1,131,191,29
Point d’ébullition sous 1 atm (°C) :108115125
Point de début de congélation (°C) :–33–52–37
Volume d’oxygène gazeux libérable (0 °C, 1 atm) par litre de solution (l/l) :130197298

.

INTEROX-CHIMIE

Outre son pouvoir oxydant très élevé, le peroxyde d’hydrogène constitue pour les boues une source d’oxygène dissous très efficace, et ne laisse après décomposition aucun résidu polluant.

Totalement miscible dans l’eau, le peroxyde d’hydrogène se met en œuvre très facilement. Il peut ou bien être injecté au moyen d’une pompe doseuse, ou plus simplement être mis en œuvre par gravité.

LA DÉCANTATION SECONDAIRE

Les problèmes observés dans les décanteurs secondaires sont liés à la mauvaise décantabilité des matières solides qui sont entraînées vers la surverse.

Si l’on remarque des bulles montant à la surface du décanteur, il s’agit de dénitrification. À défaut d’oxygène, les bactéries réduisent les nitrates (et éventuellement les sulfates) et les bulles d’azote font flotter les boues. On peut remédier à ce problème en introduisant du peroxyde d’hydrogène au centre du clarificateur afin d’assurer une teneur en oxygène dissous voisine de 1 mg/l.

Le problème le plus fréquent est celui du bulking (foisonnement). Cet incident de décantation peut se produire malgré une teneur en oxygène dissous suffisante. Diverses causes sont à l’origine du bulking qui lui-même se présente différemment de cas en cas. Le bulking filamenteux se caractérise par la présence au sein du floc de bactéries filiformes enchevêtrées qui empêchent la décantation. Certaines de ces bactéries se développent quand l’eau est riche en sulfures (famille Thiothrix). Il faut alors éliminer la source vitale de ces bactéries, c’est-à-dire les sulfures présents dans les effluents bruts, par injection de peroxyde d’hydrogène à l’entrée du décanteur primaire. Parfois, le recyclage du liquide surnageant des digesteurs de boues constitue aussi une source de sulfures (organiques et inorganiques). Il suffit alors de traiter en continu cette seule ligne au moyen de peroxyde d’hydrogène. D’autres bactéries filamenteuses, du type Sphaerotilus par exemple, sont sensibles au peroxyde d’hydrogène.

[Photo : Bactéries filamenteuses.]

Le Sphaerotilus natans ne peut vivre dans une solution de plus de 5 mg H₂O₂/l. Il est dans ce cas préférable d’introduire des doses de choc dont les quantités dépendent de la concentration en MES (matières en suspension). L’expérience a démontré que la quantité minimum à mettre en œuvre est de 0,5 kg H₂O₂ 35 % par kg de matières en suspension. La durée minimum du traitement est de 3 cycles (âge de boues). L'injection de peroxyde d’hydrogène doit être effectuée dans la ligne de recyclage des boues, ou à l’entrée du bassin d'aération. Le peroxyde d’hydrogène n’est pas toxique pour la biomasse jusqu’à la concentration de 400 mg/l H₂O₂ 100 %. Il est déconseillé d'introduire des concentrations d'H₂O₂ aussi élevées à l'entrée du décanteur secondaire, car l’oxygène libéré peut alors faire flotter les boues.

TRAITEMENT DES BOUES

Les boues d’une station d’épuration contiennent une proportion très élevée de biomasse, capable d’épuiser rapidement l’oxygène dissous et de devenir septique. Ceci entraîne non seulement la production d’odeurs nauséabondes mais également une diminution des performances du traitement ultérieur.

L’addition de peroxyde d’hydrogène permet d’oxyder les sulfures malodorants, de restaurer l’aérobie et contribue à la bonne marche de l'installation.

Épaississement des boues.

Sous nos climats tempérés, l’épaississement des boues n’est généralement pas accompagné d’émissions d’odeurs. Cependant, dans certains cas, une température ambiante élevée et des temps de séjour importants conduisent au développement de sulfure d’hydrogène et aux problèmes de décantation subséquents.

L'introduction de peroxyde d’hydrogène dans la ligne alimentant l’épaississeur prévient la formation de sulfures et facilite ainsi l’épaississement de la boue.

Déshydratation des boues.

L’élimination de l'eau des boues se fait habituellement par épaississement suivi d'un passage de la boue sur un filtre (filtre rotatif, filtre à bande pressante ou filtre-presse) ou dans une centrifugeuse.

Le bâtiment filtres est souvent réputé être l'endroit le plus malodorant de la station d’épuration.

L’addition de peroxyde d’hydrogène doit être effectuée avant l’épaississement ou dans la ligne alimentant l’appareillage de déshydratation.

La quantité de peroxyde d’hydrogène à mettre en œuvre est très variable en fonction de l'anaérobiose des boues et de la teneur en sulfates. S’il est possible de déterminer la teneur en sulfures, on peut commencer les essais avec 2 à 5 parts d’H₂O₂ par part de sulfures.

À défaut de mesure des sulfures, on peut se baser sur la détermination empirique suivante : 50 à 200 cm³ d’H₂O₂ 35 % par m³ de boues. Des essais permettent d’optimiser cette dose.

Lits de séchage.

L’épandage des boues sur lits de séchage s’accompagne très souvent de dégagements d’odeurs nauséabondes.

L’addition de peroxyde d’hydrogène dans l’épaississeur, ou dans la ligne alimentant les lits de séchage, permet d’oxyder les sulfures, d’oxygéner les boues et contribue indubitablement à la déshydratation.

Un meilleur résultat est obtenu en conditionnant le lit de sable à sa mise en service. Il suffit d’épandre sur le lit nettoyé et égalisé 1 litre H₂O₂ 35 %/m² de sable.

Afin de faciliter cette opération, il est recommandé de diluer environ 5 fois la solution commerciale de peroxyde d'hydrogène.

[Photo : Lit de séchage.]

Conditionnement des boues.

Dans le cas de la déshydratation des boues sur filtres rotatifs sous vide, le conditionnement peut être avantageusement réalisé par l'emploi de sulfate ferreux et de peroxyde d'hydrogène. Ce procédé permet de réduire de plus de 20 % la quantité des boues produites, en supprimant l'emploi de chaux lié à la mise en œuvre d'un conditionnement classique au chlorure ferrique et à la chaux.

[Photo : Filtre rotatif sous vide.]

En outre, dans de nombreux cas, le gâteau de boues obtenu présente une meilleure siccité.

Cette technique est particulièrement avantageuse lorsque les coûts de transport liés à l'évacuation des boues ou les coûts d'incinération sont élevés.

Dans le cas de la déshydratation par centrifugation, l'ajout de peroxyde d'hydrogène au polyélectrolyte permet de réduire sensiblement la consommation de ce dernier produit et améliore le rendement de production de boues.

Les eaux provenant de la séparation des matières sèches et de la phase liquide contiennent très souvent d'importantes concentrations de sulfure d'hydrogène. Il est alors recommandé de traiter cet effluent avant son recyclage en tête de station, en oxydant l'H₂S au moyen de peroxyde d'hydrogène.

CONCLUSIONS

À tous les stades du traitement des boues, l'emploi de peroxyde d'hydrogène constitue un remède simple et efficace contre les problèmes d'anaérobiose et de septicité. Il permet de contrôler la fermentation des boues et de détruire les odeurs qui en résultent.

En outre, les nouvelles techniques de conditionnement basées sur l'utilisation d'H₂O₂ semblent très prometteuses et devraient permettre de réaliser des économies sur les frais de transport ou d'incinération des boues.

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