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Le lit fluidisé rotatif

30 avril 1996 Paru dans le N°191 à la page 44 ( mots)
Rédigé par : Gérard CHARBONNIER, Hervé BOURVEN et Giovanni PITTALIS

Avec le procédé du " lit fluidisé rotatif ", développé depuis plusieurs années mais encore peu utilisé en France, les unités de traitement des déchets urbains et des boues disposent d'une technologie performante en termes de combustion, de coût d'exploitation et de non-pollution.

Durant ces récentes dernières années est apparu un besoin grandissant de conserver les ressources et de protéger notre environnement. Les contraintes croissantes résultant de cette évolution ont permis le développement de nouvelles technologies pour traiter les déchets.

Un de ces procédés est le « Lit Fluidisé Rotatif », qui constitue un bel exemple de transfert de technologie du domaine de la production d’énergie vers le domaine du traitement des déchets urbains.

Fonctionnement

La technique de combustion en lit fluidisé est apparue dans les années 50 et a d’abord concerné le grillage de minerais, les boues urbaines puis le charbon. Les applications pour la combustion d’ordures ménagères et de déchets industriels ne datent que d’une vingtaine d’années.

Dans les systèmes à lit fluidisé, l’air de combustion est soufflé vers le haut à travers la couche de solides constituant le lit jusqu’au soulèvement des particules et la création d’une masse en suspension « fluidisée ».

L’air, lors de son ascension à travers le lit, forme des bulles de taille croissante qui brassent les solides et provoquent un mélange rapide de toutes les particules. La masse de solides en suspension, composée à 99 % par du sable et à 1 % par le combustible, a un comportement assimilable à celui d’un liquide en ébullition. Les fortes turbulences qui agitent le sable sont proportionnelles à la quantité d’air insufflée sous le lit.

Une nouvelle génération de lit fluidisé dense, appelée « lit fluidisé rotatif », a été conçue afin de traiter les déchets ménagers, combustible plus délicat car pauvre et hétérogène.

Grâce à la création d’un mouvement rotatif au sein du lit, la combustion des résidus non homogènes et comportant des matériaux inertes non fluidisables devient possible.

Le foyer du lit rotatif est rectangulaire et muni d’une sole inclinée à double pente. L’alimentation en air de la sole compartimentée en plusieurs zones permet de contrôler la vitesse de fluidisation dans chacune des zones correspondantes :

  • - la zone centrale est fluidisée à faible vitesse (0,8 à 1 m/s).
  • - les deux zones extérieures sont fluidisées identiquement et à plus forte vitesse (1,5 à 2 m/s).

L’écart de densité du lit entre la zone centrale et les zones extérieures crée deux mouvements rotatifs opposés, de forme elliptique, qui convergent dans la zone centrale (mouvement ascendant à l’extérieur et descendant au centre).

Une conception originale de la chambre de combustion permet de diriger la circulation au moyen de déflecteurs en béton réfractaire qui contrôlent l’expansion du lit et minimisent l’entraînement de particules vers le haut du foyer.

L’excellent brassage transversal permet d’assurer une température homogène dans l’ensemble du lit, même avec un seul point d’introduction du combustible.

La température du lit est contrôlée entre 650 et 700 °C par la répartition de l’air de combustion dans le foyer. Cette température, bien inférieure au point de ramollissement des solides, empêche la formation d’agglomérats ; ainsi les problèmes de prise en masse rencontrés dans les lits fluidisés denses classiques sont évités.

Le ballast du lit fluidisé, après avoir été porté à la température d’ignition des combustibles, fournit toutes les qualités d’une bonne combustion qui peuvent se résumer par la « Règle des trois T ».

Température uniforme

Grâce à l’agitation du lit, l’inertie thermique et la grande surface de contact des particules, la distribution thermique est assurée parfaitement et homogénéise la température du lit.

Turbulence

Les combustibles injectés dans le lit fluidisé sont mélangés vigoureusement, augmentant ainsi leur réactivité pendant la phase de combustion.

Temps de résidence

Le temps de résidence du combustible couplé avec la surface importante de contact avec le sable du lit fluidisé permet une combustion complète.

  1. Foyer à lit fluidisé
  2. Chaudière
  3. Cyclone
  4. Traitement fumées
  5. Filtre
  6. Silo à sable
  7. Silos à cendres
  8. Air primaire
  9. Air secondaire
  10. Déchets
  11. Cheminée
  12. Recyclage fumées

Avantages

La souplesse du procédé

est capable d’incinérer des déchets très variés, à la fois en nature et en capacité calorifique ; il accepte des déchets compris dans la plage 1100 à 4000 kcal/kg et a déjà incinéré :

  • des ordures ménagères (une préparation réduite ramenant leur taille à 300 mm étant suffisante),
  • des boues de station d’épuration,
  • des boues de procédés industriels,
  • des boues de pétrole,
  • des terres industrielles contaminées,
  • des refus de compost.

Les boues peuvent être traitées mélangées avec d'autres déchets et une proportion de boues de 20 à 30 % est possible.

L'équilibre du four est obtenu à la fois en jouant sur la répartition air de fluidisation/air secondaire et sur la quantité de fumées recyclées, ce qui permet, pour un four dimensionné pour un PCI moyen de 2000 kcal/kg, d’accepter une baisse du PCI à 1100 kcal/kg ou une hausse du PCI au-dessus de 3500 kcal/kg. Cette particularité lui permet de s’adapter à de multiples schémas d’évolution du PCI moyen des déchets (voir diagramme de combustion).

Les temps d’arrêt et de démarrage (grâce à l’inertie thermique importante du lit) sont très courts et permettent un fonctionnement discontinu du four (16 h/jour par exemple), dans le cas d’un gisement de déchets évolutif. En effet, lorsque l’on arrête l’air de fluidisation, le lit de sable forme une couche dense, qui constitue une réserve de chaleur importante et dont la perte thermique est minime.

Après 14 heures d’arrêt, la température des gaz dans la chaudière chute de 850 °C à 300 °C, mais la température du lit ne baisse que légèrement.

Au terme d’un arrêt total de trente heures, la pression de la chaudière est tombée à 12 bars. La chaleur du lit est conservée et la température normale de fonctionnement est atteinte vingt minutes seulement après la mise en service de l’alimentation en air de fluidisation et en déchets. La première vapeur utilisable pour la production d’électricité est générée dix minutes plus tard.

Un système qui ménage tout particulièrement l’environnement

Maîtrise des résidus solides – conditions d’évacuation

Mâchefers

Les hautes performances de combustion limitent la teneur en imbrûlés dans les mâchefers à une valeur inférieure à 0,5 % dans toute la plage de variation de la capacité horaire du lit. Le produit récupéré est donc sec, inerte et peut, après déferraillage, être réutilisé comme remblai routier.

Cendres volantes

Les cendres récupérées sous la chaudière et le cyclone sont soit valorisées, soit mises en CET de classe n°2, conformément à la circulaire du 10 janvier 1996. Les cendres volantes récupérées sous le filtre et les équipements de traitement des gaz sont amenées aux équipements de neutralisation.

Ils peuvent être de deux types :

• neutralisation directe par mélange avec un béton spécifique contenant des additifs chimiques liant étroitement les produits dangereux au béton, • lavage des cendres (incluant un dispositif de traitement d'eau) et mélange des insolubles avec un béton courant.

Dans les deux cas de figure, le produit final est récupéré sous forme de pellets et est mis en décharge de classe n°1.

Qualité des rejets gazeux et liquides

Rejets gazeux

La technologie du lit fluidisé rotatif permet de réduire notablement les émissions atmosphériques de polluants.

NOₓ

L'introduction de l'air en deux flux (air de fluidisation et air secondaire), le maintien de la température du lit sous 800 °C et le faible excès d'air total limitent la production de NOₓ.

Dioxines et furannes

Les très bonnes qualités de la combustion dans le lit rotatif (intensité, turbulence, excès d'air) limitent la formation de précurseurs organiques et d'imbrûlés solides et gazeux : les teneurs de dioxines et furannes des fumées et des cendres volantes sont bien inférieures à celles d'une grille.

Rejets liquides

Les eaux récupérées sous la fosse de réception des ordures ménagères sont réinjectées dans le lit fluidisé et ne nécessitent donc aucun traitement.

Le système d'extraction et de refroidissement des mâchefers à l'aide d'une vis à double enveloppe (refroidie à l'eau) supprime tout contact entre les mâchefers et l'eau : il n'y a ici aucun rejet liquide à traiter.

La limitation du bruit et des odeurs

L'unité d'incinération, et notamment la fosse de réception des déchets, est située dans un bâtiment clos, ce qui permet d'éviter toutes émissions d'odeurs. L'air de combustion du four, aspiré dans la fosse, apporte un balayage important de ce volume ; les gaz odorants, lors de la combustion des déchets dans le lit fluidisé, sont éliminés grâce à la qualité de celle-ci (turbulence, température, temps de séjour, excès d'air).

Les mâchefers, qui sont secs et qui contiennent moins de 0,5 % d'imbrûlés, sont stockés dans des silos métalliques ; dans les unités utilisant le LFR, il n'existe pas de zones extérieures de stockage de mâchefers avec tous leurs inconvénients (eau de percolation, odeurs...).

Tous les équipements bruyants sont placés dans un caisson d'isolation phonique, ce qui permet le respect des normes en vigueur.

Une maintenance et un coût d'exploitation réduits

L'absence de partie mobile dans les zones de haute température augmente la fiabilité du système et diminue le coût de la maintenance.

Le fonctionnement de l'unité d'incinération est entièrement automatisé et le système de commande positionne de lui-même les équipements à leur point de fonctionnement optimal. L'ensemble des appareils est piloté depuis la salle de commande à partir de consoles informatiques.

Les paramètres principaux régulés sont : la température du lit, la température de sortie du four, l'excès d'air, la charge calorifique, la pression des fumées.

Conclusion

Le système d'incinération par lit fluidisé rotatif est un système éprouvé. Il est particulièrement bien adapté pour les fours d'une capacité de 2 à 16 t/h.

Près de 80 usines fonctionnant avec ce type de lit fluidisé ont été construites par la Société Ebara au Japon. Les premières usines fonctionnent depuis 1976 et trois capitales européennes (Berlin, Madrid, Moscou), ainsi que les villes de Gien et de Mulhouse ont retenu le système du lit fluidisé rotatif pour leurs unités de traitement (déchets ménagers ou refus de compost).

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