Il concerne une voie particulièrement intéressante car elle permet de faire face à des variations importantes de débit, dans des conditions économiques avantageuses, suivant un processus qui comporte plusieurs phases :
- un traitement primaire, consistant à séparer les boues de l’effluent ;
- un traitement secondaire, au cours duquel l’effluent est traité par percolation à travers un lit de tourbe ;
(1) On en trouve également au Canada, en Grèce, en Espagne.
[Photo : Croquis perspectif de la station de Levis-Saint-Nom.]
— un traitement tertiaire, parachevant l'épuration des eaux avant rejet dans le milieu naturel.
L'élément essentiel de l'opération est la tourbe dont les propriétés ont été déjà utilisées par la Finlande, les U.S.A. et le Canada ; en France, le procédé a été mis au point par la plateforme d'essais de Colombes, en employant la tourbe brune, agglomérat de résidus ligneux formés dans les marais, riche en acides humiques et dont la propriété la plus importante est la possibilité de retenir jusqu'à cinq fois son volume d'eau.
De pH acide, sa capacité d'échange, qui dépasse fréquemment 100 meq pour 100 g de tourbe sèche, permet par l'intermédiaire des acides humiques, la séparation des cations alcalino-terreux et métalliques tout en favorisant le développement et la fixation des bactéries.
Nous décrirons les phases successives du traitement en prenant comme exemple la station de Lévis-Saint-Nom, récemment mise en service, qui a été inaugurée le 13 septembre dernier par M. Brossard, maire de la commune, en présence de M. Jacques Cohen, P.D.G. de la SECMAPP qui a construit les ouvrages sous la maîtrise d'œuvre de la Direction départementale de l'Agriculture des Yvelines.
Située dans un site classé, la station d'épuration dimensionnée pour 2 000 e/h traite les eaux résiduaires collectées sur une partie du territoire communal (figure 1).
Il était nécessaire pour la commune de faire réaliser une station de traitement des eaux résiduaires qui s'intègre le plus possible dans le site classé, n'engendre pas de nuisances olfactives et auditives et dont les coûts d'investissement et de fonctionnement soient aussi faibles que possible. Le procédé de lagunage sur lit de tourbe a donc été retenu.
Installée sur un terrain de 5 000 m², en bordure du chemin communal n° 1 dans la vallée de l'Yvette, le long d'un affluent de celle-ci, « la Rivière Morte » qui reçoit les effluents épurés, elle est entièrement assise sur du remblai de marne et d'argile.
[Photo : Plan de la station.]
Les eaux usées arrivent à la station d'épuration après avoir été refoulées dans une canalisation Ø 150 mm depuis un poste situé en amont dans la vallée.
Le traitement primaire
Il est constitué :
- - par un dégrillage effectué à l'aide d'un panier à mailles grossières placé dans la fosse de relevage ;
- - par un tamisage fin sur une grille de mailles 250 microns, opéré sur un tamis statique Philippe qui présente la particularité d'être auto-nettoyant par rinçage à l'eau, tout en assurant une parfaite séparation des matières à évacuer ;
- - par un dégraissage à l'aide d'un bac statique de trois mètres cubes placé dans la salle technique après le tamis.
Les boues recueillies au niveau du dégrillage sont évacuées en décharge avec celles décantées sur le tamis après avoir été comprimées à plus de 50 décaneutons dans un cylindre compacteur. Cet appareil, par l'action dynamique d'expulsion de l'eau et la pression intense, freine considérablement l'activité bactérienne et donc le développement des odeurs. Les boues atteignent ainsi une siccité de 30 à 60 % ; elles dégagent peu d'odeurs et sont évacuées en décharge.
Ajoutons que le local technique est installé dans une petite construction, d'aspect rural et rustique, qui s'insère parfaitement dans le site classé.
Le traitement secondaire
Après le traitement primaire, mis en œuvre pour éviter un colmatage prématuré des lits de tourbe,
[Photo : Vue de la station de Lévis-Saint-Nom]
l’effluent arrive de façon gravitaire dans trois bassins de 180 m² chacun, composés de la façon suivante de bas en haut :
- une couche de gravier 6-15 de 10 cm d’épaisseur,
- une couche de sable 0,5-4 de 10 cm d’épaisseur,
- une couche de tourbe dont l’épaisseur est de 40 cm environ.
L’étanchéité est assurée par la nature argileuse du remblai.
L’eau passe au travers de la tourbe, l’épuration se faisant par rétention des matières en suspension non retenues par le tamis, par adsorption et absorption au sein du tissu végétal fibreux, ainsi que par l’activité bactérienne qui s’y développe.
Le dimensionnement des lagunes est conditionné par le nombre d’équivalent-habitants et surtout par le débit nominal ; ici, le débit maximum de filtration retenu a été de 40 l/heure/m².
Sur les trois lagunes, deux sont en service pendant que la troisième est réservée aux opérations d’entretien.
Le circuit, à partir de l’entrée de la station, est totalement gravitaire et ne nécessite que l’énergie absorbée par le compacteur de boues (11 kWh par mois, le moteur de 3 kW ne fonctionnant que quelques minutes par jour).
Le traitement tertiaire
Compte tenu de la place disponible, il a été mis en place dans la tourbe existante une lagune de finition, qui assure une filtration finale avant rejet dans la rivière.
D’une surface de 1 600 m², elle retient une lame d’eau de 0,40 m d’épaisseur, ce qui permet une exposition aux rayonnements ultra-violets et la possibilité de planter des macrophytes, facteur complémentaire d’épuration.
Les résultats
La Sablaise des Eaux, qui exploite la station, a fait procéder par la SATESE (Service d’assistance technique à l’exploitation des stations d’épuration) à des analyses au terme desquelles les résultats suivants ont été constatés :
Points de prélèvement |
MES (mg/l) |
DBO5 (mg/l) |
DCO (mg/l) |
MO (mg/l) |
Observations |
Amont |
301 |
1 040 |
1 796 |
1 292 |
Rendement instantané global : 94,2 % |
Aval |
31 |
33 |
119 |
62 |
Rendement M.F.S. : 89,7 % — Rendement M.O. : 95,2 % |
Les résultats analytiques révèlent la bonne qualité de l’épuration.
Les rendements épuratoires instantanés sont élevés (rendements de la station hors lagune de finition). Ces résultats sont dus à l’importante concentration en pollution de l’influent (DBO5 et DCO fortes). Il semblerait que des arrivées d’effluents autres que domestiques s’opèrent dans le réseau communal d’assainissement.
L’abattement de la teneur en bactéries n’a pas encore été relevé, mais on a obtenu par exemple dans des installations semblables une réduction des coliformes de 10 000 à 800 000 à l’entrée à 0-24 à la sortie (pour 100 ml).
Les charges d’exploitation
Elles sont faibles et comportent essentiellement :
- le nettoyage journalier du tamis ;
- l’évacuation des boues (dans le cas présent elle est automatique) ;
- l’entretien soigné des lits de tourbe, ce qui est pratiquement de l’horticulture (le milieu étant très favorable à la croissance de plantes de toutes espèces), avec binage, sarclage et scarification de la première couche de tourbe ;
- le changement périodique de la tourbe, ce qui pourra être fait dans le cas présent, au minimum dans 5 ou 8 ans et que la SECMAPP prend à sa charge ;
- l’entretien de la lagune tertiaire.
Les frais sont ainsi de l’ordre de 15 F e.h./an (1982).
Les avantages du procédé se révèlent intéressants :
- frais d’exploitation faibles par rapport à un système classique ;
- adaptation particulièrement souple à un accroissement subit de la charge polluante, sans altérer le niveau de sortie ;
- insertion avec un minimum de place dans le cadre naturel et de façon indépendante des conditions climatiques, permettant une adéquation aussi bonne que possible avec les contraintes du site ;
- dégagement d’odeurs quasi nul, les boues n’ayant pas le temps d’évoluer ;
- écoulement gravitaire (d’où absence de bruits).
Ajoutons que le montant des travaux s’est élevé en 1982 à 723 000 F, ce qui représente une économie sensible (pouvant atteindre 50 %) par rapport à une station traditionnelle.
La charge financière communale n’a représenté que 20 % du total, le reste de la dépense se répartissant à raison de 35 % pour le Département et 45 % pour la Région.
R.G.