Your browser does not support JavaScript!

Le filtre-presse : moderne et rustique à la fois

30 septembre 1996 Paru dans le N°194 à la page 96 ( mots)
Rédigé par : Gérard CHOQUENET

Garder au filtre-presse cette rusticité qui lui apporte solidité, longévité, simplicité et fiabilité est un atout. Faire évoluer cette machine, la moderniser, la perfectionner, la rendre conforme aux normes de sécurité en vigueur sans en perdre ses caractéristiques de base est l'objectif. Aujourd'hui, il est possible de concevoir et fabriquer un filtre-presse totalement automatique grâce au nouveau système de halage des plateaux, et dont l'accès à la partie filtrante est aisée et rapide par sa conception du bâti. Tout cela en fait un appareil rustique et moderne à la fois.

La protection de l’environnement est aujourd’hui primordiale. La qualité de l'eau en fait une denrée rare et chère et sa production entraîne un problème de plus en plus actuel qui est celui des boues industrielles ou urbaines qu'il faut éliminer au moindre coût et si possible valoriser.

Le filtre-presse a une place importante à tenir dans de nombreuses industries où il peut concentrer les boues et être utilisé soit en process soit en fin de station. Dans tous les cas, le filtre-presse permet une séparation liquide/solide optimale, et les dernières évolutions qui en font un appareil 100 % automatique en font aussi un appareil 100 % actuel.

Qu’est-ce qu’un filtre-presse ?

Le filtre-presse est un appareil servant à filtrer sous pression les liquides chargés de particules solides en suspension. Le filtre-presse est composé de trois parties principales : le bâti, la partie filtrante et la centrale hydraulique.

Le bâti

Est formé d'un sommier fixe et d’un porte-cylindre reliés entre eux par deux longerons. Sur ces longerons reposent, par l’intermédiaire de poignées, une tête fixe côté alimentation, une tête mobile côté cylindre et un ensemble de plateaux recouverts de toiles filtrantes. La tête mobile se déplace perpendiculairement à l’axe du filtre-presse par l’action d’un vérin (cylindre) capable d’exercer une pression de fermeture de 250 à 300 bars.

Les filtres-presses sont équipés d’un vérin central unique, et même les plus gros appareils, dont la poussée du vérin peut dépasser les 1200 tonnes. Un seul vérin permet d’éviter les problèmes de mauvaise répartition de pression découlant de l'emploi de deux, voire quatre vérins.

Sur les presses ayant plus de 60 plateaux, il est possible d’adapter une tête fixe articulée autour d’un axe horizontal permettant de compenser une différentielle de longueur d’empilage des plateaux due à l’encrassement des toiles en partie basse après un certain nombre de cycles de filtration. Cette articulation de la tête a l’avantage également d’augmenter la durée de vie des toiles filtrantes et d’éviter des couples de torsion néfastes au bâti et au vérin.

La partie filtrante

Est composée par l’ensemble des plateaux recouverts de toiles filtrantes. Chaque plateau constitue avec son voisin une chambre de filtration ; les plateaux sont serrés les uns contre les autres par le vérin qui exerce sa poussée par l’intermédiaire de la tête mobile, laquelle poussée, maintenue pendant toute la filtration, équilibre la pression provoquée par l’injection des boues à l’intérieur des chambres.

Les plateaux en polypropylène ou en fonte, avec ou sans membranes, sont donc habillés d’une toile filtrante généralement en polypropylène mais dont la qualité, la finesse et la conception sont choisies en fonction de la granulométrie et des caractéristiques physiques du produit à filtrer. La profondeur de la chambre est calculée de façon à optimiser le rendement du filtre. L’entrée des boues s’effectue soit par un orifice central soit par un conduit latéral situé dans l’angle des plateaux.

La conception des filtres-presses à deux longerons latéraux permet de retirer facilement les plateaux par le dessus de l’appareil et pour cela les distingue des filtres dont les plateaux suspendus sous une poutre centrale rendent leur manutention longue et pénible. Le poids des plateaux peut en effet varier de 30 à 1500 kg et avoir des dimensions de 500 x 500 mm jusqu’à 2000 x 2000 mm, voire 2300 mm de diamètre.

La centrale hydraulique

Assure l’alimentation en huile du vérin ainsi que, dans les filtres à débâtis-

[Photo : Schéma du bâti.]
[Photo : Fig. 1 : Filtre-presse à plateaux de 1,5 × 1,5 m.]
[Photo : Fig. 2 : Vérin de fermeture sur filtre-presse.]
[Photo : Fig. 3 : Débâtissage protégé.]

sages mécanisés (halage successif des plateaux pour faire tomber le gâteau), la rotation du moteur hydraulique. En fait, après la filtration, la matière solide s'est déposée dans les différentes chambres entre les plateaux et forme dans ces chambres des gâteaux. Le moteur hydraulique entraîne en synchronisme deux chaînes placées sous les poignées des plateaux, de chaque côté de l'appareil, et munies chacune d'un chariot assurant le déplacement des plateaux les uns après les autres vers la tête mobile quand le filtre est ouvert. Les gâteaux prisonniers entre les plateaux sont alors libérés. La vitesse de débaîtissage varie de 8 à 20 coups par minute.

Suite à de récentes évolutions, les chaînes sont entièrement protégées (figure 3) de toutes projections de morceaux de gâteaux, d’eau de lavage ou de filtrat. Les chariots reviennent en arrière après le débaîtissage et peuvent ramener, lorsqu’il est utilisé, le pont de lavage des toiles au point de départ. La durée de vie des composants, la sécurité et la protection de l’opérateur sont considérablement augmentées, la maintenance facilitée.

Fonctionnement du filtre-presse

La filtration se fait suivant un cycle discontinu :

La fermeture, par le vérin hydraulique, permet d’assurer l’étanchéité de l’appareil et de compenser la pression de filtration. Elle entraîne automatiquement le passage à la filtration.

La filtration : les boues sont amenées à une pression de 6 à 30 bars par une pompe (centrifuge ou à membranes) et se répartissent dans les chambres ; les toiles qui couvrent les plateaux sont traversées par le « filtrat » et arrêtent les particules solides pour former les gâteaux. Le filtrat est évacué par des cannelures vers la sortie des plateaux.

La durée et la pression de la filtration sont variables suivant la nature et la concentration du produit à filtrer. On tend de plus en plus à réduire le temps de maintien en pression en utilisant des plateaux à membranes.

Ces plateaux à membranes sont faits en trois pièces : une membrane de part et d’autre d’une âme centrale. Les membranes sont gonflées à l’air ou à l’eau et viennent compacter le gâteau dans sa chambre. Ce compactage non seulement réduit le temps de filtration mais augmente la teneur en matières sèches du gâteau.

Certains cycles incluent également un lavage et/ou un séchage des gâteaux suivant les qualités de gâteaux requises.

L’ouverture : un détecteur permet de contrôler la fin de la filtration et donne l'ordre au vérin de reculer la tête mobile et donc de dégager le premier gâteau.

Le débaîtissage : la fin de recul de la tête mobile commande le démarrage du système de débaîtissage qui libère successivement les gâteaux de leurs chambres. Une barre placée le long de l'appareil permet à l’opérateur de stopper à tout moment cette opération et de la remettre en route à volonté.

Les auxiliaires

Le pont de lavage : pour augmenter la durée de vie des toiles et pour assurer leur efficacité, il est nécessaire de les nettoyer de temps en temps. Il est possible de les démonter des plateaux et de les laver à l’extérieur de l’appareil mais, grâce au pont de lavage, il est aussi possible de les laver in situ. Le pont de lavage est posé à cheval sur le filtre-presse et roule sur deux pistes latérales. Pour réaliser l'opération de lavage, on verrouille ce pont aux chariots de débaîtissage ; il se positionne alors dans l’intervalle entre deux plateaux.

Par l’intermédiaire d'un système électromécanique, deux rampes munies de buses et fixées au bout d’un compas articulé sont animées d’un mouvement de montée et baisse entre les plateaux. Dans un même temps, de l’eau sous pression à 30, 80 ou 100 bars est envoyée par les buses pour nettoyer les toiles. Le compas articulé conserve une distance constante entre toiles et rampes quelle que soit l’ouverture entre deux plateaux.

Le débaîtisseur automatique : le filtre-presse requiert généralement la présence d’un opérateur pendant la phase de débaîtissage. Cet opérateur est chargé d’aider à faire tomber le gâteau lorsqu’il reste collé dans la chambre. Par cycle, le temps nécessaire à cette opération (quatre minutes à un quart d’heure) peut être pénalisant pour le filtre-presse.

Depuis 1983, la mise au point du process permet d’assurer, sur beaucoup de produits, l’automaticité complète de

l’appareil sans aucune présence. Cependant, ce système n’est pas applicable à tous les produits.

Une dernière innovation est le débâtisseur automatique. Cet auxiliaire permet de remplacer la palette employée par l’opérateur pour détacher le gâteau de sa chambre. Un prototype de ce débâtisseur actuellement à l’essai sur des boues difficiles donne entière satisfaction et autorise à penser que nous avons enfin la possibilité de proposer sur le marché un appareil 100 % automatique quelles que soient les boues à filtrer.

Exemple de résultats de la filtration sur filtre-presse

Il s’agit d’une installation de taille moyenne sur des boues biologiques, appartenant à la société Oril, située à Bolbec. Cette société fait partie du groupe Servier et fabrique des principes actifs de pharmacie. Les boues à filtrer proviennent de la station d’épuration des eaux usées après traitement biologique et décantation et contiennent 1600 kg/jour de matières sèches. Ces boues étaient filtrées précédemment sur centrifugeuse qui permettaient l’obtention de 13 000 kg/jour de gâteaux à 12 % de sec. Un apport de chaux vive aurait permis d’obtenir environ 15 500 kg/jour de gâteaux à 30 % de sec mais la société Oril a préféré choisir le filtre-presse. Ce filtre-presse de 1000 × 1000 est équipé de 98 plateaux. Un conditionnement à 50 % de chlorure ferrique et 28 % de chaux porte à 2320 kg/jour le poids de matières sèches. Après filtration sur filtre-presse, 5800 kg/jour de gâteaux à 42 % de sec sont évacués et utilisés en valorisation agricole après stockage en bout de champs pendant les labours. Il faut noter que les gâteaux ainsi obtenus ne se remouillent pas.

Conclusion

Le but des études et recherches dans le domaine de la filtration sur filtre-presse a été et reste celui de conserver à cet appareil sa rusticité, sa solidité et sa grande fiabilité, et donc de pérenniser sa conception d’autrefois. Mais aussi, d’en faire une machine moderne en lui apportant toutes les améliorations possibles qui amèneront non seulement un automatisme complet mais aussi des performances et des résultats non égalés par d’autres moyens de filtration, c’est-à-dire une siccité maximale pour un volume de gâteaux minimal, une consommation énergétique bien en dessous de la moyenne et un coût de maintenance pratiquement négligeable puisque la seule matière consommable sont les toiles filtrantes qui ont elles aussi profité des progrès technologiques et peuvent assurer plusieurs milliers de cycles de filtration.

[Publicité : WEDECO]
Cet article est réservé aux abonnés, pour lire l'article en entier abonnez vous ou achetez le
Acheter cet article Voir les abonnements