Le procédé de distillation à effet de serre est fort ancien et la première installation relativement importante date de 1870 : elle fut mise en place près d'une exploitation de nitrates au Chili pour abreuver les mules affectées au transport du minerai. Un distillateur solaire de 4 460 m² produisant 20 m³/jour y fonctionna jusqu’en 1908 !
Depuis, de nombreuses installations ont été réalisées, souvent de conception fort simple, mais dont la production modeste était assortie de difficultés d’exploitation qui les ont fait abandonner (l'Australie, la Grèce et l'Espagne sont les pays qui ont le plus utilisé cette technique).
Le distillateur solaire « à cascades »
Le principe du distillateur-serre consiste à chauffer une saumure par ensoleillement dans un espace confiné : l’air de l’intérieur est surchauffé et saturé de vapeur d'eau qui se condense au contact de la paroi relativement froide du verre ; les gouttes d'eau douce s’écoulent sous le vitrage incliné à 30° environ et peuvent être recueillies dans une gouttière.
[Photo : Fig. 1 — Coupe du distillateur.]
Les facteurs influant sur le rendement du distillateur sont les suivants :
- — la vitre doit être inclinée de façon optimale pour évacuer les gouttes d’eau le plus rapidement possible et offrir la plus grande surface exploitable pour utiliser l'effet de serre ;
- — le volume confiné doit être aussi réduit que possible, ce qui justifie la structure en escalier des bacs d’évaporation ;
- — le matériau constituant les bacs ne doit pas réfléchir l’énergie pour que celle-ci serve uniquement au chauffage de l'eau : la paroi horizontale doit être noire et isolante ; pour simplifier la réalisation, notre système « DEMINESOL » utilise un composite fibre de verre-polyester noir, isolé par une mousse de polyuréthane ;
- — l'évacuation de la chaleur latente de condensation de l’eau sur le vitrage augmente en fonction de la vitesse du vent jusqu’à 10 m/s.
[Photo : FIGURE 2]
[Photo : FIGURE 3]
[Photo : Fig. 4. - Rendement journalier, en fonction de l’ensoleillement.]
L’exemple des graphiques des figures 2 et 3 montre comment varie le rendement en fonction de l’ensoleillement sur le site d’expérimentation de Perpignan, au Sud de la France. Le rendement théorique est le rendement calculé selon une modélisation informatique réalisée au Laboratoire de thermodynamique et énergétique de l’université de cette ville.
Le rendement journalier, en fonction de l’ensoleillement, est indiqué dans la figure 4 : des conditions climatiques comme celles de Perpignan permettent de dépasser aisément les 5 l/m²/jour, en mai.
Une amélioration très sensible du rendement (50 %) est possible en ajoutant une structure alvéolaire utilisant l’effet « Francia » à la surface de la couche de saumure, permettant ainsi de réduire la réflexion du rayonnement incident ainsi que la perte d’énergie occasionnée par l’émission de cette surface.
La station « DEMINESOL »
Le module Deminesol (figure 5) utilise des matériaux communs à la fabrication des capteurs solaires : vitres, profilés d’aluminium, joints en caoutchouc. Les conditions d’environnement difficiles ont nécessité l’utilisation de matériaux insensibles à la corrosion : vannes, tubes, récipients sont en matière plastique. La surface de vitrage du module est de 2 m² et sa production nominale est donc de 10 l/jour.
Une installation produisant un mètre cube par jour est décrite ci-dessous :
— elle comprend 96 modules répartis sur 1 000 m² environ ;
— l’eau de mer ou l’eau saumâtre se trouve stockée dans une bâche (1) au niveau du sol ;
— la pompe à bras (2) permet d’élever l’eau jusqu’à la bâche supérieure (3) ;
— un dispositif à pression constante (4) assure l’alimentation de chaque sous-ensemble élémentaire de distillateurs ;
— un jeu (5) de vannes manuelles à ouverture rapide permet le remplissage et rinçage de chaque sous-ensemble de distillateurs ;
— un collecteur supérieur (7) distribue simultanément l’eau dans les distillateurs ;
— un collecteur bas (14) ramène l’eau de mer ou saumâtre en excès vers le stockage (1) ;
— un deuxième collecteur bas (9) conduit l’eau distillée vers un ensemble de traitement d’eau (10) ;
— l’eau potable est ensuite transférée dans la bâche (11) ;
— une pompe manuelle (12) permet le soutirage de l’eau potable.
Avant d’alimenter les distillateurs, l’eau subit une chloration (grâce à des comprimés chimiques) qui évite ainsi d’en assurer la pureté biologique.
[Photo : Station de production solaire d’eau potable.]
Après distillation et avant son stockage, l'eau est reminéralisée par passage sur un lit approprié.
À la sortie, l'eau traverse un filtre à charbon actif qui en parachève la qualité.
Les besoins à satisfaire
Les pays dont les besoins en eau potable sont mal assurés se répartissent autour de la planète dans les zones subtropicales des continents. De plus, les îles de dimension réduite ne disposent pas de réserves souterraines naturelles et connaissent également le problème d’approvisionnement en eau potable.
L'ONU, très sensible à ce problème, a institué la Décade internationale de l'eau potable pour organiser un vaste effort de solidarité en faveur des pays les plus démunis.
À côté des installations du type « usine de dessalement » adaptées à la production de grosses quantités d'eau pour des villes, le besoin de petites unités réclamant peu de moyens de mise en œuvre et de maintenance, à l'usage de petites communautés, est immense.
Le Deminesol répond à ce besoin : en effet, une seule personne peut assurer la mise en œuvre d'une station et sa maintenance. La simplicité du procédé permet de pallier les défaillances éventuelles (défauts d’étanchéité, vitre brisée, etc.) avec des moyens très réduits.
La conception modulaire permet en outre d’adapter l'installation en fonction de la demande.