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Le développement des pompes à chaleur eau/eau de moyenne et grande puissances

28 février 1986 Paru dans le N°98 à la page 23 ( mots)
Rédigé par : J. DUPONT-CORBRAN

La mise en œuvre de pompes à chaleur est désormais passée dans le domaine des applications courantes, tant dans le secteur industriel que dans celui de la satisfaction des besoins calorifiques d’immeubles divers tels que ensembles immobiliers, hôpitaux, équipements scolaires, sportifs, tertiaires, etc.

Les techniques correspondantes sont assez bien maîtrisées par les constructeurs et pourtant les pompes à chaleur ont connu des fortunes diverses depuis leur remise à la mode à la suite des chocs pétroliers de 1973 et 1979 et de la crise de l'énergie qui a suivi.

[Photo : Fig. 1 - Evolution des ventes de PAC eau/eau et air/eau en France.]

La figure 1 montre à quel point l’évolution des ventes de pompes à chaleur en France a été sensible à la campagne publicitaire par E.D.F. en faveur du système PERCHE (pompe à chaleur en relève de chaudière) et surtout en ce qui concerne les équipements air-eau qui ont atteint le chiffre de 35 500 appareils vendus en 1982, principalement dans le secteur individuel... Hélas, le déclin déjà amorcé en 1983 n’a fait que s’accentuer depuis, et actuellement, les constructeurs sont très pessimistes pour l’avenir.

Ce déclin s’explique en grande partie par la déception des utilisateurs devant les performances obtenues par rapport à celles annoncées souvent à la légère ; or, pour que de tels systèmes tiennent la promesse des résultats escomptés lors du projet, il est nécessaire de maîtriser parfaitement l'ensemble des éléments techniques, économiques et financiers mis en jeu aussi bien au stade de la conception qu’à celui de la réalisation et de l’exploitation.

Il serait dommage que les déboires enregistrés dans le domaine des pompes à chaleur individuelles ou du petit collectif nuisent au développement des pompes à chaleur eau-eau de moyenne ou grande puissance qui ont un rôle important à jouer dans les applications tertiaires et industrielles car les sources d’énergie utilisable sont nombreuses : nappes aquifères peu profondes, effluents d’usines, stations d’épuration d’eaux usées, eau de surface, anciens puits, géothermie, etc.

L’EXEMPLE SUÉDOIS

Depuis plusieurs années, les Suédois se sont lancés résolument dans la construction et l’utilisation des pompes à chaleur eau-eau de grande puissance. Ainsi, Asea-Stal, l’un des groupes industriels les plus importants de Suède, a installé, en quatre à cinq ans, 42 groupes de pompes à chaleur de cinq à trente MW représentant une puissance calorifique totale de 700 MW environ (figure 2).

[Photo : Fig. 2 - Pompes à chaleur de 30 MW à Gotherburg utilisant les effluents d’une station d’épuration des eaux usées (3 600 m³/h par unité).]

Ces grosses unités utilisent comme source froide diverses ressources telles que l’eau des lacs, les effluents thermiques industriels, les rejets de stations d’épuration, etc. avec évidemment de très forts débits.

[Photo : Installation à Upplands utilisant un lac comme source froide]

en relation avec la taille des opérations (bien souvent à l'échelle d'une ville entière). Leur utilisation est en général combinée avec d'autres sources d’énergie pour la distribution de chaleur par l'intermédiaire de réseaux de chauffage urbain gérés par des régies municipales.

Jusqu’au premier choc pétrolier, la plupart des centrales électriques fonctionnaient au fioul et la crise d’énergie conduisit ici comme ailleurs le gouvernement suédois à rechercher des énergies de substitution.

C'est ainsi que fut envisagée la construction de treize centrales nucléaires, mais le grave accident survenu en 1979 à la centrale nucléaire d’Harrisburg (U.S.A.) remit en question ce vaste projet. Après référendum, la décision fut prise de ne conserver que les douze centrales nucléaires dont la réalisation était déjà décidée.

Quoi qu'il en soit, le coût de l'énergie électrique en Suède est resté relativement bas, ce qui, lié aux conditions climatiques, est très favorable à la rentabilité des pompes à chaleur de grande puissance.

À Upplands, au nord de Stockholm, deux pompes à chaleur de 22 MW utilisent l'eau du lac Mälaren comme source froide reliée à la station thermique par un tunnel de trois kilomètres de longueur (figure 3). Durant la période la plus froide de l’hiver, le débit pompé (à une température comprise entre +1 °C et +4,5 °C) est de l’ordre de 9 000 m³/h (figure 4). Le temps de retour brut de cette opération est de 4 ans !

FAUT-IL SUIVRE L’EXEMPLE SUÉDOIS ?

En fait, les conditions du marché en France sont bien différentes et pas seulement sur le plan des conditions climatiques ou sur celui du coût du kWh électrique, mais aussi sur celui de l'organisation commerciale, du développement des réseaux de chaleur et de leur taille. Les Suédois l’ont bien compris puisque pour attaquer les marchés étrangers, ils s’orientent vers la diffusion de pompes à chaleur plus modestes de 3 à 10 MW.

Cette action, déjà commencée aux États-Unis et en Islande, vise maintenant la France, l’Allemagne et les pays nordiques en vue d'exporter non seulement les matériels mais aussi la technologie et l'ingénierie suédoises.

LA PROCÉDURE AQUAPAC

En France, pour faciliter le développement des installations thermiques puisant l’énergie dans les nappes souterraines de faible profondeur, l'A.F.M.E., E.D.F. et le B.R.G.M. ont mis en place la procédure baptisée AQUAPAC applicable aux installations utilisant à des fins énergétiques l'eau des nappes souterraines de moins de 100 m de profondeur proposant aux maîtres d’ouvrages une garantie sur la découverte de la ressource par forage et le maintien de ses caractéristiques pendant cinq ans.

Les cotisations et commissions des maîtres d’ouvrages pour la garantie de recherche sont de 9 % et 1 % du coût prévisionnel du premier forage et celles concernant la garantie de pérennité sont de 2,5 % et 0,5 % du coût prévisionnel de l'ensemble des ouvrages. Les fonds de garantie sont gérés par une société de gestion. Des comités régionaux constitués de représentants de l'A.F.M.E., de l'E.D.F. et du B.R.G.M. jugent les dossiers présentés et prennent les décisions d'octroi des garanties et de paiement des indemnités ; ils s’appuient sur les recommandations de comités techniques où siègent des représentants régionaux de l'établissement public régional et des administrations chargées de la police et de la gestion des eaux.

Cette procédure, qui existe depuis peu de temps, devrait commencer à porter ses fruits ; toutefois, son application peut paraître un peu compliquée aux maîtres d’ouvrages qui désirent y faire appel... sans doute une certaine période de rodage est-elle nécessaire. Il faut préciser que cette procédure, de caractère incitatif, n'est pas obligatoire.

[Photo : Exemple de courbe de charge des besoins calorifiques à Upplands]

PACSYSTEM

Une autre initiative intéressante vient d’être créée sous la dénomination de PACSYSTEM par la Compagnie française de géothermie (C.G.F.), filiale du B.R.G.M. et de l’A.F.M.E. d'une part, et la Compagnie générale de chauffe d’autre part.

C.G.F. est spécialisée en hydrologie, particulièrement en ce qui concerne la modélisation du comportement des nappes aquifères et la maintenance des équipements de captage ; son activité est complémentaire de celle de la Compagnie générale de chauffe dans le secteur de la production et de l'utilisation de l’énergie calorifique et de la gestion des installations thermiques.

PACSYSTEM offre un large éventail de prestations telles que la conception des systèmes thermodynamiques, la mise en place de la procédure AQUAPAC, l'ingénierie financière, la réalisation clés en mains et l’exploitation des installations, avec garantie de résultats.

L'AVENIR DES PAC EAU-EAU

L’avenir des pompes à chaleur en France est lié aux options prises par les pouvoirs publics en matière d’énergie nucléaire pour la production nationale d’électricité. La rentabilité de ces équipements dépend en conséquence étroitement des conditions tarifaires d’E.D.F., notamment depuis la mise en place des tarifs avec « effacement des jours de pointe » dont l’objectif est d’adapter la tarification aux variations de l'offre et de la demande face aux fluctuations saisonnières de plus en plus marquées.

Par ailleurs, la direction régionale de l'industrie et de la recherche d’Ile-de-France a constitué début 1985 un groupe de travail dénommé « Gestion nappe albienne ».

[Photo : Pompes à chaleur York de 5,5 MW installées par la C.G.C. sur le réseau géothermique de Vaux-le-Pénil.]

Outre la présentation d’un cahier des charges techniques de réalisation et de contrôle des nouveaux forages, ce groupe de travail étudie « une meilleure utilisation des forages existants » et la DRIR invite les exploitants à mettre en œuvre tout projet de récupération de calories sur les pompages actuels, s’il peut s’avérer rentable.

Pour conclure, on peut voir dans les différentes initiatives récentes, dont nous avons cité quelques-unes, le signe prometteur du redémarrage imminent des pompes à chaleur eau-eau, de moyenne ou de grande puissance, dont l'utilisation a incontestablement sa place dans la conjoncture énergétique actuelle et future.

Dans l’intérêt de notre économie, souhaitons bonne chance à cette nouvelle vague de pompes à chaleur.

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