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Le contrôle de l'oxygène dissous dans les eaux de chaudières par un analyseur de nouvelle génération

30 novembre 1990 Paru dans le N°141 à la page 57 ( mots)
Rédigé par : Patrick AUBIN

La plupart des praticiens considèrent, à tort, que l’analyse complète de l’eau est un luxe dont on peut se passer en effectuant quelques mesures ponctuelles ou sommaires. S’il est vrai que cette façon de voir peut suffire dans les trois quarts des cas, des problèmes graves, voire catastrophiques, apparaissent dans le quart restant.

En effet, contrairement à ce que l’on pourrait penser, l’eau est le fluide corrosif numéro un et les dégâts provoqués par la corrosion sont financièrement considérables ; cela peut aller de la vulgaire fuite d’eau dans un bâtiment jusqu’à des problèmes sérieux sur les installations nucléaires.

La plupart des eaux contiennent de l’oxygène dissous et c’est cet élément qui se révèle être l’agent corrosif principal ; dans d’autres cas, l’acidité peut prendre le relais. La corrosion est issue de réactions électrochimiques au sein desquelles le milieu corrosif est un électrolyte où certains ions captent des électrons du métal pour se réduire. Ce dernier, perdant des électrons, s’oxyde. Toute corrosion est ainsi décrite par des réactions dites d’oxydo-réduction, et la réaction de réduction s’effectue à la même vitesse que la réaction d’oxydation. En général, les réactions de réduction imposent la vitesse au système. La teneur en oxygène dissous de l’eau est alors un facteur capital. Cette teneur dépend à la fois de l’origine de l’eau et du type de circuit où elle est employée. En outre, ce n’est pas parce qu’une eau est traitée, que l’on est à l’abri de tous les dangers.

Les eaux des chaudières et notamment celles des installations nucléaires font l’objet de traitements et de suivis rigoureux par analyse. Les considérations technico-économiques ont conduit à la mise en place d’analyseurs en continu pour la surveillance des paramètres critiques, et la mesure d’oxygène dissous a été adoptée depuis de nombreuses années.

Si, sur le marché mondial des instruments de mesure de ce paramètre, il existe de nombreux appareils pour les eaux aérées, les spécifications de mesure sur les eaux de chaudières réduisent le nombre des fournisseurs. En effet, l’eau ne contient dans cette application que quelques ppb d’oxygène dissous. Les techniques habituellement utilisées sont la cellule de Clark et les électrodes spécifiques. Cependant, elles ne répondent pas, en utilisation in situ et en continu, aux attentes des techniciens chargés soit de l’installation, soit de l’utilisation.

Si le principe de la cellule de Clark admet une maintenance délicate et des temps de réponse lents, les électrodes spécifiques sont soumises aux interférences, à leur fragilité, à leur gamme de mesure et un conditionnement spécifique est souvent rendu nécessaire. De plus, les dérives des capteurs imposent un étalonnage par l’opérateur, qui peut être hebdomadaire voire journalier lorsque les eaux sont chargées.

Le problème posé en matière de mesure in situ et en continu d’oxygène dissous, que l’on peut généraliser à d’autres paramètres, est multiple :

  • « temps de réponse court (vis-à-vis du phénomène à surveiller),
  • « installation rapide et simple sur les circuits d’échantillonnage,
  • « simplification des opérations de maintenance,
  • « crédibilité sur la mesure.

Compte tenu de l’évolution des techniques électroniques et de l’expérience acquise sur un capteur d’oxygène dissous utilisé sur des chaufferies nucléaires, nous avons développé un instrument d’analyse bâti autour du concept d’« automate de physico-chimie ». Ce concept comprend un automatisme complet avec un système d’étalonnage intégré. Il assure un fonctionnement sûr et la maintenance est de type préventive.

Pour permettre une mesure fiable à taux bas, le principe du détecteur galvanique a été retenu, lequel donne un courant directement proportionnel à la quantité d’oxygène dissous, suivant une loi du type :

(O₂ = 1/K × I × exp. (xθ)), où :  

(O₂) = concentration d’oxygène,

  1. Connecteur du capteur d’oxygène
  2. Vis de fixation du capteur d’oxygène
  3. Tête du capteur d’oxygène
  4. Filtre
  5. Raccord auto-obturant rapide sortie fluide
  6. Raccord auto-obturant rapide entrée fluide
  7. Tubing inox du circuit hydraulique
  8. Ligne à retard inox
  9. Électrolyseur/cellule de conductivité
  10. Débitmètre
  11. Sonde de température du circuit
  12. Système de purge
  13. Coffret
  14. Équerre de fixation murale
[Photo : Fig. 1 Schéma hydraulique (version OCA 2020 A).]
[Photo : Fig. 2 Ajouts dosés d’oxygène.]

K = facteur de conversion de la concentration d’O₂ en courant, I = coefficient de correction de l’effet température, θ = température du fluide.

La figure 1 donne le schéma hydraulique de l’appareil pour les eaux douces et à basse pression (jusqu’à 15 bars). Pour répondre aux objectifs mentionnés ci-dessus, de nombreuses études ont été menées pour arriver au résultat obtenu et à la réalisation de cet analyseur, dont nous donnons ci-après quelques caractéristiques.

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Temps de réponse

La surface du capteur est concave, et de ce fait le film très mince de téflon est maintenu tendu et plaqué sur la surface du capteur, emprisonnant ainsi un volume minimal d’électrolyte, suffisant pour assurer le fonctionnement du capteur. Ce dernier est placé dans une cuve où l’implantation des orifices d’entrée et de sortie du fluide a été optimisée afin d’obtenir le meilleur rinçage. Le temps de réponse est dans ce cas inférieur à 10 s pour 90 % du signal.

Installation

La quasi-totalité des analyseurs comportent des spécifications à respecter pour leur installation, sous peine d’obtenir des résultats erronés. Dans la plupart des cas, ces spécifications sont contraignantes soit parce que les plages de fonctionnement sont étroites, soit parce que la surveillance des anomalies est laissée à l’opérateur, qui est obligé d’utiliser des appareillages complémentaires (comme un régulateur de débit) soit parce qu’elle l’oblige à assurer une maintenance superflue.

Notre instrument surveille en permanence les paramètres critiques que sont la température et le débit. Lorsque les valeurs limites sont dépassées, il informe l’utilisateur de l’anomalie par une alarme générale (visuelle ou sonore) et par un message spécifique sur un écran à cristaux liquides.

Lors de l’installation, l’accès aux paramètres s’effectue à l’aide d’un clavier ; il est ainsi possible d’assurer un fonctionnement immédiat et de bénéficier du maximum de renseignements sur l’état de l’appareil. Il se raccorde aux circuits hydrauliques par l’intermédiaire de raccords rapides auto-obturants, lui procurant une souplesse d’emploi lorsque les lignes d’échantillonnage le nécessitent.

Simplification des opérations de maintenance

De par sa conception, l’appareil effectue la calibration automatique de l’ensemble de la chaîne de mesure. Ce qui permet, dans le cas d’une eau de chaudière...

dière, de disposer d'un instrument physico-chimique qui va fonctionner plus d’un an sans interventions, et qui, surtout, va anticiper la fin de vie du capteur et diagnostiquer les anomalies. Il dispense ainsi d’une maintenance préventive effectuée trop tôt ou trop tard, grâce à son fonctionnement autonome.

Les messages d’erreurs ou d’anomalies de fonctionnement sont affichés en clair sur l’écran à cristaux liquides. Un véritable dialogue avec l’instrument sur ses conditions de fonctionnement est ainsi possible par l’intermédiaire du clavier simplifié. Ainsi, tout opérateur non spécialisé peut assurer la maintenance de premier niveau et la régénération de la sonde.

Le retraitement de la surface de la sonde est la seule opération de maintenance périodique (qui s’effectue sur des périodes supérieures à douze mois). Elle consiste en un remplacement de la membrane, ce qui ne nécessite aucun outillage spécifique ; quant au montage-démontage de la sonde (avec la régénération), il s’effectue en quelques minutes par un personnel non spécialisé.

Sûreté du fonctionnement

La sûreté du fonctionnement repose sur une bonne connaissance des facteurs physiques intervenant sur le capteur et sur la génération automatique d’un étalon d’oxygène précis. Périodiquement, l’unité centrale déclenche une série d’actions lui permettant d’étalonner le capteur et de révéler les anomalies.

Étalonnage

Il est réalisé en ligne, donc à la pression, à la température et au débit de mesure.

L’étalon d’oxygène est généré par l’électrolyse de l’eau. Le rendement de la cellule d’électrolyse (rapport entre l’oxygène généré et le courant passant dans la cellule) peut être faussé par la présence de composés réducteurs venant réagir à la place de l’eau sur l’anode. Pour de faibles concentrations, la fraction de courant consommée par ces composés atteint une valeur limite. Il reste donc possible de calculer la

[Photo : OCA 2000 (version monocoffret)]

pente de réponse du capteur en procédant à deux ajouts dosés d’oxygène tel que :

\[ K = \frac{i2 - i1}{C2 - C1} = \frac{Q}{C_f \times R_d} = \frac{i2 - i1}{I2 - I1} \]

formule dans laquelle :

K (θ) : facteur de conversion de la concentration d’oxygène en courant délivré par le capteur à température θ C1, C2 : deux ajouts dosés d’oxygène Cf : constante de Faraday Rd : rendement de la cellule d’électrolyse Q : débit I1, I2 : courants passant dans la cellule i1, i2 : courants passant par le capteur

Les ajouts dosés d’oxygène sont de l’ordre des valeurs d’oxygène mesurées initialement.

La mesure de débit est soit effectuée par un débitmètre (comptage d’impulsions), soit par un calcul du temps de retard existant entre la détection de la décroissance du taux d’oxygène et l’arrêt d’injection de l’étalon (temps T1 et T2 de la figure 2).

Dans ce cas, le modèle retenu est de la forme :

\[ Q = \frac{V_r}{(T1 + T2)/2 - T_\infty \exp. Bθ} \]

où :

Q : débit Vr : volume boucle de retard T1, T2 : temps de retard T∞ : temps de passage de l’O₂ dans la membrane de l’électrolyte B : coefficient de correction de l’effet température θ : température du fluide.

Contrôle d’anomalies

Ce contrôle s’opère en deux temps :

— pendant l’étalonnage : plusieurs paramètres sont contrôlés pendant l’opération ; leur évolution permet de valider la bonne génération de l’étalon oxygène et l’état du détecteur galvanique. Après plusieurs étalonnages infructueux, l’opérateur est averti de l’existence d’un dysfonctionnement. De même, est-il averti lorsque l’état d’usure du capteur est trop important. En cas d’anomalie persistante ou pour utiliser l’appareil dans des solutions très oxygénées, il peut étalonner le détecteur à l’air ;

— en dehors de l’étalonnage : l’unité centrale surveille le taux d’oxygène, le débit, la conductivité et la température, et les valeurs d’alarmes sont soit fixes, soit modifiables par l’opérateur.

L’oxygénomètre à contrôle automatique est construit en plusieurs versions pour couvrir les différentes applications des mesures de traces d’oxygène dissous (il peut comporter un boîtier d’analyse et un boîtier électronique de mesure séparés). Il peut ainsi assurer des mesures en basse ou haute pression sur des eaux douces, aussi bien que sur des eaux de mer traitées. Il mesure également la conductivité des eaux douces traitées. Grâce à la fiabilité de sa mesure et du fait de sa maintenance peu contraignante, l’OCA se révèle comme le premier analyseur d’oxygène dissous qui ait pu trouver place dans une boucle de régulation de contrôle de procédé.

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