Your browser does not support JavaScript!

Le conditionnement des boues après déshydratation mécanique

29 janvier 1993 Paru dans le N°160 à la page 67 ( mots)
Rédigé par : Claude MAYNARD

La protection de l'environnement nécessite de supprimer les rejets de toutes sortes susceptibles de créer des pollutions. Parmi ces rejets, il faut citer les boues, résidus solides engendrés par les stations de production des eaux potables, les stations de traitement des eaux usées urbaines et des eaux industrielles. Dans cet article nous examinerons plus particulièrement l'utilisation des boues dans le domaine agricole. Ces produits, généralement excellents, présentent un caractère putrescible et une importante teneur en eau, qu'il faudra éliminer par un traitement à la chaux.

La protection de l’environnement nécessite de supprimer les rejets de toutes sortes susceptibles de créer des pollutions. Parmi ces rejets, il faut citer les boues, rési- dus solides engendrés par les sta- tions de production des eaux potables, les stations de traite- ment des eaux usées urbaines et des eaux industrielles. Dans cet article nous examinerons plus par- ticulièrement l’utilisation des boues dans le domaine agricole. Ces produits, généralement excel- lents, présentent un caractère putrescible et une importante teneur en eau, qu’il faudra éliminer par un traitement à la chaux.

Les différents traitements des rejets

produisent annuellement en France 3 millions de tonnes de boues humides, ce qui correspond à 600 000 millions de tonnes de matière sèche (MS), dont l’élimination pose de nombreux problèmes. 40 à 50 % sont mises en décharge (mais les sites se raréfient), 40 à 50 % sont utilisées comme engrais dans l’agriculture, soit par épandage direct après mélange avec de la chaux, soit sous forme de compost (mélange de boues avec des ordures ménagères broyées, ou avec de la sciure de bois ou avec de la paille) ; enfin 10 à 15 % sont incinérées. La décharge ou l’épandage nécessitent d’obtenir un produit de volume réduit, facilement manipulable et transpor- table, et qui, de plus, ne doit pas pol- luer. Un traitement préalable doit lui être appliqué, par adjonction de chaux (vive ou éteinte). Le mélange boue- chaux est réalisé en aval de la déshy- dratation mécanique, qui fait appel à dif- férentes techniques : filtre à bande sous vide, filtre à bande presseuse, filtre-pres- se, centrifugation.

* Pompes et Mélangeurs Michel Sarrazin.

Suivant le traitement mécanique appliqué et l’agent de coagulation mis en œuvre, les boues présentent un aspect, une structure, une texture et une teneur en MS différents, ce qui modifie leur comportement rhéologique (écoulement, compression, tension, cisaillement, adhésivité...).

Lors de la conception du mélangeur, il est nécessaire de prendre en considé- ration les contraintes liées aux pro- duits :

  • * qualité de la boue,
  • * coagulants et floculants utilisés,
  • * qualité de la chaux (vive ou éteinte),
  • * obligation de réaliser un mélange intime de la boue et de la chaux,
  • * détermination du temps de mélange et de contact des produits,

ainsi que celles imposées par les condi- tions d’exploitation :

  • * conditions de remplissage et de vidange du mélangeur,
  • * énergie mise en jeu,
  • * encombrement du mélangeur,
  • * facilité de mise en place de l’appareil, robustesse et facilité de maintenance,
  • * facilité de nettoyage lors d’un arrêt,
  • * règles de sécurité,
  • * toxicité notamment lors du traitement à l’aide de chaux vive.

Les nombreux essais effectués ont per- mis de solutionner les problèmes ren- contrés et de réaliser un appareil (figure 1) très adapté (MHPC), encore perfectible afin de pouvoir l’adapter aux nouvelles contraintes qui ne manque- ront pas d’apparaître dans un proche avenir : exigences technologiques ou mise en place d’une nouvelle régle- mentation. Cet appareil est également utilisé avec succès dans les installations de préparation de compost.

Le traitement

La chaux est un produit constitué prin- cipalement d’oxyde ou d’hydroxyde de calcium ; très avide d’eau, elle s’hydrate avec un important dégagement de cha- leur et une augmentation de son volume.

Le mélangeur type MHPC (figure 2) doit assurer un mélange très intime des par- ticules de boues et de chaux, afin de favoriser la réaction de déshydratation de la boue. La boue, généralement très cohésive, s’oppose à la fragmentation, et le mélangeur doit permettre d’obtenir un effet de cisaillement très important pour séparer les boues en fines parti- cules.

L’alimentation du mélangeur en boues s’effectue en continu, avec générale- ment un débit irrégulier. Le matériel de mélange doit absorber ces « pointes », avec le souci d’obtenir en permanence un produit de qualité constante, parfai- tement homogène, tout en garantissant un temps de séjour correct, déterminé par le rapport : Volume de la cuve/Débit total boue + chaux.

Compte tenu de la réactivité de la chaux, il se produit une réaction exo- thermique qui favorise la déshydrata- tion de la boue par élimination d’une partie de l’eau libre sous forme de vapeur.

Lors de la rotation, les mobiles, du fait de leur vitesse et de leur forme, pro- jettent la boue dans la partie supérieure de la cuve du mélangeur, tout en assu- rant la séparation de ses particules, leur mélange avec la chaux et le transfert du mélange, de l’entrée vers la sortie : il est indispensable que cette évacuation s’effectue sans recompactage.

On peut observer que lorsque le taux de chaux augmente, le produit devient beaucoup plus friable, du fait de la diminution des tensions superficielles existant à la périphérie des particules de boue et de l’augmentation de la teneur en MS.

[Photo : Schéma de l'installation.]
[Photo : Anatomie du mélangeur.]

L'installation de Poitiers

La station de traitement des eaux urbaines de Poitiers, comme toutes les stations, produit des boues, ce qui pose le problème de leur évacuation ; dans le passé, une grande partie était envoyée en décharge, le reste épandu par un très petit nombre d’agriculteurs locaux. Cette boue dégageait de mauvaises odeurs, génératrices de nuisances pour les riverains.

Les autorités locales, très soucieuses de la protection de l'environnement, ont dans un premier temps analysé les sols de la région. Ces analyses réalisées sous l'autorité des services du Ministère de l'Agriculture ont permis de mettre en évidence le fait que les terrains présentaient un pH de 6 et que, de ce fait, un apport de chaux d’environ 2,2 tonnes par hectare s’avérait possible.

Dimensionnement de l'installation

La station Poitiers d'une capacité nominale de 140 000 Eqh produit 2 200 t/an de matières sèches (MS), soit environ 4 t/h de boues humides, d’une siccité de 25 à 27 % à la sortie de la centrifugeuse (ce qui correspond à 1 000 kg/h de MS), auxquelles sont ajoutés 200 kg/h de chaux vive, pour obtenir une siccité finale de 32 à 37 %.

Pour assurer une mise en œuvre aisée, il est nécessaire qu’à la sortie du mélangeur les boues traitées se présentent sous la forme de boulettes pouvant alimenter des épandeurs agricoles classiques. Le malaxeur comporte à cet effet une cuve cylindrique horizontale, dans laquelle tournent des mobiles à pales creuses répartis sur toute la longueur du mélangeur, et comportant un léger recouvrement, afin de limiter les espaces morts. Pour une efficacité maximum, le taux de remplissage de la cuve ne doit pas excéder 50 à 60 %.

Le groupe d’entraînement comporte un variateur à courroie trapézoïdale piloté manuellement. Un tachymètre à cadran permet de surveiller la vitesse de rotation du mélangeur.

La puissance du groupe d’entraînement est donnée par la formule P = k1.S × Vp × k2, dans laquelle :

  • P : Puissance absorbée (en kW),
  • k1 : Coefficient lié au profil des pales utilisées,
  • Vp : Vitesse périphérique des mobiles (en m/s),
  • k2 : Coefficient déterminé par la rhéologie du produit.
[Photo : Figure 3.]

À la sortie de la centrifugeuse, la boue est reprise par une bande transporteuse afin d'être introduite dans la partie supérieure du mélangeur. L’alimentation en chaux vive se fait par l'intermédiaire d’une vis et d'une vanne à manchon, laquelle assure l’étanchéité du circuit de la chaux lors de l’arrêt de l'installation.

Le mélange chaux-boue s’évacue latéralement, tombe sur une bande et se déverse dans des bennes qui seront ensuite transportées vers les terrains d’épandage. Les boulettes obtenues, d’un taux de siccité de 35 % environ, sont suffisamment friables pour être épandues sans difficulté par les agriculteurs (figure 4).

Nous avons vu qu’un hectare de sol demandait un apport de 2 200 kg de chaux, ce qui permet l’élimination de 30 t de boues humides et l’apport d’éléments nutritifs complémentaires : 100 unités d’azote et 90 unités d’acide phosphorique (unité = 1 kg à l’hectare).

Ce type d’amendement, très adapté dans la région pour le maïs et le ray grass, doit être pratiqué après étude préalable ; d’autre part, un contrôle permanent s’impose afin de vérifier l’évolution et les besoins des sols en éléments nutritifs.

[Photo : Figure 4.]

Conclusion

Compte tenu du fait qu’il sera de plus en plus difficile de trouver des sites de décharge, les techniques de valorisation agricoles vont se développer, consistant soit à traiter les boues à la chaux, soit à les composter après les avoir mélangées à d’autres matériaux (paille, sciure, ordures ménagères broyées...). Ces opérations doivent respecter des normes de qualité afin de ne pas occasionner un transfert de pollution dommageable pour les sols, les produits agricoles, la santé humaine et l'environnement.

Cet article est réservé aux abonnés, pour lire l'article en entier abonnez vous ou achetez le
Acheter cet article Voir les abonnements