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Le compostage est il encore une réponse de l'élimination des déchets organiques ?

30 mars 1992 Paru dans le N°153 à la page 62 ( mots)
Rédigé par : Claude FAUGERON

Le compostage, bien que pratiqué depuis fort longtemps, reste un sujet extrêmement complexe soulevant de nombreuses questions : nature du déchet compostable, moyen d’éliminer les déchets ou méthode de production à usage agricole, compost, amendement ou fertilisant, limites d'emploi, réglementation, vulgarisation et commercialisation. La forte poussée écologique en faveur du recyclage et de la valorisation relance actuellement le compostage, mais quel compostage ? Les lignes qui suivent n’ont pas la prétention d’apporter des réponses détaillées et définitives, mais de contribuer à mieux interpréter le sens du mot compostage. Pour plus de détails nous renverrons le lecteur notamment aux publications de l'ANRED et de l'AGHTM, pour citer les principales sources françaises.

Depuis des siècles, agriculteurs et maraîchers, jardiniers professionnels et amateurs ont pratiqué le compostage sous une forme plus ou moins primitive. Les excréta, les détritus végétaux, le fumier animal, les ordures ménagères étaient accumulés en tas ou dans des fosses où on les laissait se décomposer tant bien que mal. Ceci impliquait peu, ou pas de contrôle, une conservation prolongée pour donner un humus satisfaisant, un rendement en azote des plus incertain et un souci de l’hygiène quasiment nul. Les premiers progrès importants furent accomplis il n'y a guère plus de soixante ans, d'abord en perfectionnant les méthodes anciennes, puis en se souciant de la salubrité. En 1920, le procédé Beccari fut l'un des premiers brevetés ; la méthode consistait, après un premier stade de fermentation anaérobie en cuve fermée, à assurer une phase finale en aérobiose par ouverture de volets d’aération. Le premier digesteur travaillant en aérobiose (grilles multiples de EARP-Thomas), principe maintenant généralisé, n’apparut qu’en 1939.

Cinq grandes catégories de procédés de compostage peuvent être dénombrées actuellement, quatre après le traitement physique : fermentation lente en andains, accélérée en cellules verticales closes, accélérée en cellules ou silos horizontaux, résidus de digestion méthanique, enfin cinquièmement, traitement biologique simultané dans une même enceinte. On peut y ajouter dans des cas particuliers la lombriculture.

Après ce rapide historique, où en est le compostage ? Tout d’abord, on remarque que si l'on parle beaucoup des déchets industriels et des déchets de consommation, les déchets organiques sont sous-estimés, voire oubliés. Or, par leur volume, leur tonnage et leur importance, ils représentent une masse énorme, estimée en France, en 1987, à 400 millions de tonnes, représentant une menace potentielle pour l’environnement, si leur élimination est mal maîtrisée, et en même temps un potentiel considérable de valorisation agricole, alimenté par plusieurs filières.

Le compostage en est une ; il peut se définir comme « une décomposition aérobie, thermophile, de déchets organiques par des populations mélangées de micro-organismes indigènes sous des conditions contrôlées, qui conduisent à un résidu organique partiellement stabilisé qui se décompose lentement quand les conditions redeviennent favorables » (Parr et Wilson).

L'ANRED – « Les Transformeurs » a depuis clairement défini les deux aspects essentiels du compostage.

C’est un mode de traitement des déchets organiques grâce à ses effets dans la lutte contre la pollution :

  • • hygiénisation par la chaleur, dégagée naturellement par la fermentation, qui permet de détruire les germes pathogènes et les parasites animaux et végétaux ;
  • • par cette chaleur, augmentation du taux de matières sèches et diminution du volume et du tonnage ;
  • • obtention d'un résidu stabilisé riche en matières humifiables, oligo-éléments et micro-organismes.

D’où un effet évident dans la lutte contre la pollution. Le produit final, si certains des composants initiaux le rendent impropre à la valorisation agricole, peut être introduit en décharge sous forme d’un flux déjà réduit. À une époque où la création ou le développement des décharges soulèvent d’énormes difficultés cet aspect est très positif.

[Photo : Fig. 1 : Cycle de l'azote et du carbone dans la décomposition en anaérobiose.]

C'est aussi un mode de production d’amendements organiques. C'est alors une réponse au défi de l’agriculture en reconstituant le cycle de la matière et en participant à son maintien.

L’effet « fertilisant » varie énormément suivant les matériaux initiaux ; il convient plutôt de parler de « biodisponibilité » caractérisée notamment par l’aptitude des éléments nutritifs à passer du compost dans le sol puis dans les végétaux. On peut aussi citer : l’aptitude à mobiliser ou immobiliser des éléments préexistants dans le sol ou encore à y répartir l’élément fertilisant. C’est ainsi que le recours au compost permet de réduire bien souvent la consommation de fertilisants. Le compost a également des effets sur les structures du sol, son activité microbienne.

Un bon procédé de compostage devra toujours respecter simultanément de nombreux principes fondamentaux : le triage des ordures et la récupération de certains produits, le broyage et la dilacération des ordures, le rapport C/N, le mélange ou le dosage des diverses catégories d’ordures, la teneur en eau, la température, l’aération, la flore microbienne, l’ensemencement, le pH, les conditions climatiques, la destruction des germes pathogènes et la lutte contre les mouches, la récupération de l’azote et autres éléments nutritifs, le temps requis pour le compostage, la qualité des composts, les aspects économiques du compostage, etc. Cette longue liste montre bien la complexité de l’art du compostage et certains de ses aspects contradictoires, tels que le rapport C/N (ratio carbone organique-azote organique), dont la valeur optimale pour le compostage n’est plus la meilleure pour le sol. Avec un rapport trop élevé, le carbone disponible est utilisé par les cellules microbiennes vivantes en retirant dans le sol l’azote qui y est contenu. Le sol est « dépouillé » de son azote et l’action fertilisante sera retardée, phénomène dit de « faim d’azote ». À l’opposé, pour convertir l’azote disponible en protéines, les micro-organismes consommeront le carbone disponible et élimineront l’excès d’azote sous forme d’ammoniac.

D’autre part, il faut faire attention à certaines affirmations au sujet de l’ensemencement. De nombreuses discussions ont eu lieu depuis 40 ans sur l’importance d’inoculums spéciaux, censés contenir plusieurs souches pures d’organismes cultivés en laboratoire ou d’autres facteurs biologiques : « enzymes », « hormones », « biocatalyseurs », etc., la formule de l’inoculum étant presque toujours tenue secrète par son inventeur. Or, en pratique, le succès du compostage sans inoculum pratiqué depuis quelques décennies dans le monde entier montre que l’apport de bactéries ou d’autres additifs ne correspond à aucune nécessité.

[Photo : Fig. 2 : Cycle de l’azote et du carbone dans la décomposition en aérobiose.]

L’importance relative donnée à tel ou tel des principes fondamentaux ci-dessus pourra conduire à des composts « finis » différents, physiquement, chimiquement, économiquement. Tout cela explique pourquoi le terme « compost » est bien souvent mal compris des agriculteurs qui établiront plutôt une classification en fonction de leurs besoins : humus et amendements organiques, terreaux, supports de culture, engrais organiques, engrais minéraux.

Les résultats d’essais sont la plupart du temps fragmentaires, et leur durée doit s’étaler sur plusieurs années. Le manque de standardisation d’une partie des méthodes de mesure et la dispersion des laboratoires qui les réalisent ne permettent pas non plus d’établir des références. Enfin l’expression de la demande des agriculteurs n’est pas toujours très claire, elle est perturbée par l’existence d’une très large gamme de produits, d’un grand éventail de prix et de supports publicitaires plus ou moins puissants.

Les responsables ont et auront donc à développer une démarche très homogène tendant à une gestion rationnelle de la matière organique dans les exploitations. À cet effet, après mise en place par l’ANRED et quelques Chambres d’Agriculture départementales d’un groupe « compost », un document, le « guide des utilisateurs d’amendements organiques », a été rédigé comportant :

— une fiche par production avec ces conseils sur les deux aspects essentiels : évaluation des besoins en matières organiques intégrant les caractéristiques du sol et de la culture ;

— choix d’un amendement (prix, mise en œuvre et qualité) ;

— des fiches thématiques (réglementation, aspects économiques).

Avant d’examiner quel pourrait être l’avenir du compostage, il est intéressant de faire le point sur la situation actuelle en prenant comme exemple la France et en reprenant la classification donnée par l’ANRED en trois grandes catégories.

Le compostage des sous-produits des collectivités locales

Les ordures ménagères

En 1989, 75 unités compostaient 6 % du tonnage collecté, soit en moyenne 5 200 tonnes.

[Photo : Effet du degré d'humidité sur la température d'une masse en compostage.]

Par jour, ce qui représente une production de l'ordre de 800 000 tonnes de compost urbain, dont 80 % environ sont commercialisés (ou plutôt écoulés), à un prix généralement bas (25 à 35 F/t). La qualité est souvent médiocre, la présence d'impuretés (plastiques, verres, etc.) est très importante, d'où une mauvaise image de marque. Pour remédier à cette dégradation, l'ANRED a créé, en liaison avec l'Afnor, la marque « NF-Compost Urbain », visant à donner aux utilisateurs des garanties indispensables d'une qualité acceptable et constante. Malheureusement, il faut reconnaître que la plupart des usines de compostage ne peuvent y satisfaire, ayant été choisies à leur origine pour leur coût faible en privilégiant l'aspect traitement-hygiénisation au détriment de la valorisation. Les refus ont longtemps été évacués en décharge à des coûts minimes ; il n'en est plus de même et la situation est à revoir.

Boues des stations d'épuration

Malgré une utilisation agricole poussée (45 %, soit 250 000 tonnes de matières sèches), leur compostage (avec des supports carbonés) reste marginal en France (environ une dizaine d'unités pour moins de 30 000 tonnes) avec pourtant des prix allant de 80 à 170 F/t suivant les cultures. Des réserves importantes sont à observer quant à la présence de métaux lourds dans les boues.

Les matières de vidange

Une bonne partie des quatre à cinq millions de m³ issus du curage des fosses septiques est éliminée en agriculture malgré de nombreuses contraintes (teneur en eau, accessibilité des sols, odeurs, servitudes, règlement sanitaire).

L'ANRED a lancé avec des vidangeurs des opérations de compostage (La Rochelle, Amiens, …) avec des supports carbonés.

Les déchets des espaces verts

Ces déchets (feuilles mortes, tontes de pelouse, déchets d'élagage et de taille) représentent des volumes très importants, dont 385 000 tonnes en Île-de-France. Leur volume encombre les décharges, alourdit leur coût d'enfouissement (environ 100 F/m³) et ils sont à l'origine d'odeurs désagréables. La collecte de ces produits est de mieux en mieux organisée et diverses solutions ont été apportées, dont notamment le co-compostage avec les boues d'épuration et/ou les matières organiques issues des collectes sélectives.

Le compostage des sous-produits des industries agro-alimentaires

Les déchets d'abattoirs

Ils ne sont pas encore abordés de façon systématique (nombre de chantiers opérationnels, marché disponible, avec ou sans supports carbonés, …), malgré leur richesse en matière organique, N et P et une teneur raisonnable en sodium.

Les déchets de distillerie

Pour le marc de raisin et les boues de lie, le compostage est une solution séduisante et semble-t-il économiquement raisonnable.

Les déchets des fruits et légumes

Pour le moment c'est une solution partielle (évaporation de l'eau).

Le compostage des déjections d'élevage

Celles-ci représentent des tonnages annuels considérables, environ 220 millions de tonnes. Le gisement potentiel est de l'ordre de 1,7 million de tonnes d'azote, 1,2 d'anhydride phosphorique et de 1,7 de potasse, dont 50 % pourraient être réellement disponibles.

Cas des lisiers

Encore peu d'expérience en France, malgré le problème posé à l'environnement : en général les opérations consistent à composter les lisiers avec des sciures ou des supports végétaux.

Cas des fientes de volailles

Bien souvent produites avec les autres déjections animales (ex. : en Bretagne) et se heurtant à une présentation peu favorable (eau, fermentation), une méconnaissance de leur valeur fertilisante et un manque d'organisation ; en revanche, le Japon est équipé de plus de 5 000 installations.

Réglementairement, l'utilisation agricole des déchets

Réglementairement, l'utilisation agricole des déchets est soumise à diverses réglementations et législations : normes techniques Afnor sur les amendements organiques NF U 44-051 et sur l'utilisation des boues de station d'épuration NF U 44-041, norme transposant la directive européenne du 12 juin 1986, protection sanitaire, avec les règlements sanitaires départementaux, le Code rural (article 219 et suivants), les décrets et circulaires relatifs à la protection sanitaire des milieux récepteurs. Des observatoires de qualité des sols sont mis en place. Enfin, rappelons, pour les résidus urbains, la norme « NF Compost Urbain » qui fait appel à des concentrations maximales pour certains indésirables. Elle paraît constituer un bon exemple de l'évaluation d'une qualité.

La nécessité d'estimer le facteur qualité

La nécessité d'estimer le facteur qualité est de mieux en mieux reçue, même pour les composts urbains où l'aspect physique a longtemps prévalu. La valeur agronomique d'un compost peut être évaluée de deux façons :

  • « a posteriori » avec essais en plein champ, valeur absolue, valeur relative, valeur globale ou valeur d'un composant : méthode longue ;
[Photo : Courbe typique de la température dans un volume considérable d'ordures urbaines mêlées en compostage aérobie.]
[Encart : Glossaire Aérobie-Aérobiose : Lorsque les matières organiques se décomposent en présence d'oxygène, le processus est dit « aérobie » (qui ne peut vivre sans air). Le travail de fermentation se fait en aérobiose. L'oxydation aérobie ne provoque aucune odeur désagréable. Anaérobie : Il s'agit alors d'une fermentation à l'abri de l'air, la décomposition putride des matières organiques s'effectuant en anaérobiose par réduction. Nota : Les odeurs sont dues non seulement à des processus qui ne restent pas entièrement aérobies mais aussi à la présence de substances fétides ne provenant pas de l'oxydation. Andains : Les déchets, après broyage et tri, sont disposés en files continues de section triangulaire (B = 6 m — H = 3 m — L = 100 m ou plus). Mais, dans les pays froids, pour démarrer la fermentation on travaille toujours en tas continu (de grande largeur et longueur avec H = 2 à 3 m) ; le risque d'anaérobiose est alors très grand.]

Tableau I

Éléments à prendre en compte pour le classement des composts urbains (selon le règlement particulier de la marque « NF-Compost Urbain »)

Tableau II

Examen « a priori »

CLASSES

ÉLÉMENTS A B
Granulométrie du compost (tamis à maille carrée en mm) < 40 < 40
Teneur en impuretés (% matières sèches)
• films plastiques et polystyrène de dimension supérieure à la maille ronde de 5 mm < 1,6 < 2,5
• lourds de dimension supérieure à la maille ronde de 5 mm < 6 < 12
• inertes totaux < 20 < 35
Teneur en métaux lourds (ppm mat. sèches)
• plomb < 800 < 800
• mercure < 8 < 8
• cadmium < 8 < 8
• nickel < 200 < 200
Effet visé Amélioration souhaitée Critères d’appréciation
Humus Stabilité structurale. C.E.C. Capacité de rétention en eau. Teneur en matière organique. K1. Couleur.
Engrais minéral Teneur en éléments majeurs. Teneur en méso-éléments. Teneur en oligo-éléments. Teneur en éléments nutritifs. Biodisponibilité.
Amendement minéral pH. Teneur en Ca. pH. Teneur en CaCO₃.

… mieux, évaluation « a priori » avec mesure en laboratoire d’un certain nombre de caractéristiques à effet positif ou négatif ou de critères dont le choix reposera sur l’effet principal visé. Cette estimation ne peut être complète que si l’on a aussi une appréciation du potentiel négatif qui caractérise le produit. Assez paradoxalement, ce potentiel négatif s’exprime en termes de qualité, celle-ci étant d’autant plus grande que le potentiel négatif est faible.

Les composantes à caractère rémanent caractérisent ce potentiel (inertes, micropolluants…) dont la présence constitue un frein à l’usage du compost, même si par ailleurs d’autres caractéristiques sont très attractives au plan agronomique (forte richesse en azote, mais métaux lourds d’un compost). Cette évolution dans la façon d’examiner le problème est à l’origine des progrès notables intervenus depuis une dizaine d’années.

Les besoins de l’agriculture en humus

Pour se nourrir, les plantes ont besoin d’éléments chimiques nutritifs :

  • a) des éléments majeurs : azote, phosphore, potassium ;
  • b) des éléments secondaires : calcium, magnésium, fer, soufre ;
  • c) des oligo-éléments : cuivre, bore, zinc, molybdène, etc.

Elles les absorbent au moyen de leurs radicelles qui explorent les solutions aqueuses existant dans les interstices inter-granulaires des sols. Pour passer dans les plantes, les éléments chimiques précités doivent se trouver soit sous forme soluble dans les solutions du sol, soit en « réserve nutritive » non entraînable par les pluies, c’est-à-dire fixés sur les agrégats du sol grâce au pouvoir absorbant de ceux-ci. En effet, à mesure que la plante absorbe ces éléments, les réserves fixées sur les agrégats passent progressivement en solution grâce à un remarquable mécanisme physico-chimique qui tend à maintenir constante la concentration de cette solution et assurer ainsi la continuité de l’alimentation végétale. Il est donc essentiel que les éléments nutritifs fournis par le sol ou apportés par les engrais soient mis provisoirement en l’état de réserves mobilisables par le pouvoir absorbant du sol. La nutrition des plantes est donc très nettement améliorée si aux agrégats du sol participent des corps possédant des propriétés absorbantes : l’humus est le plus efficace de ces corps.

L’humus est une substance organique, d’origine principalement végétale :

  • – douée de propriétés fixatrices, donc contribuant au pouvoir absorbant des sols,
  • – agissant en outre comme un liant dans la formation des agrégats,
  • – génératrice de certaines propriétés du sol, bénéfiques pour les plantes :
    • • perméabilité du sol à l’air et à l’eau,
    • • régulation de l’humidité en toutes saisons (notamment réserve d’eau en saison sèche),
    • • activité de la vie microbienne indispensable à la nutrition végétale,
    • • prolifération des vers de terre,
    • • comportement chimique assurant une meilleure utilisation des engrais artificiels.

Les agriculteurs sont de plus en plus conscients de la nécessité du maintien à un niveau correct de la valeur humique de leurs sols ; en même temps ils disposent d’informations techniques de plus en plus sûres concernant les composts issus des déchets organiques.

* * *

Compte tenu de ce qui précède quel peut être l’avenir du compostage ? À notre avis, le compostage en tant que mode d’élimination des déchets ne dispose que d’un avenir limité, faute de décharges disponibles ; le produit hygiénisé pourra cependant encore servir à la réhabilitation des anciennes carrières… Par contre, le compostage utilisé en vue d’une valorisation agricole devrait avoir un bon avenir devant lui malgré la crise agricole actuelle. Les composts aideront en effet à réduire la consommation en engrais coûteux grâce à la reconstitution de l’humus dans le sol et à ses propriétés d’échange nourricier. Les composts urbains, menacés par la présence de métaux lourds ou de produits toxiques, devraient voir cette menace atténuée par toutes les mesures en cours d’application : déchetteries, collectes sélectives des piles et batteries (qui aux USA apportent 75 % de la pollution en mercure et cadmium), développement d’éco-produits (recyclables et/ou biodégradables), etc.

Alors le compostage est-il le traitement à privilégier en matière de déchets ? Sans doute non, mais il représente une filière intéressante importante. Une étude complète préliminaire restera toujours nécessaire, puisque faire du compost est bien, à condition qu’il soit de qualité. Il faudra aussi répondre aux questions : pour quoi ? (type de cultures et de sols concernés), pour qui ? (mode d’emploi et aspects économiques)…

Il est vraisemblable qu’à plus ou moins court terme les composts de produits particuliers

ne constitueront que des sous-produits dont le mixage conduira à proposer à la vente des amendements organiques complexes adaptés à une demande très diversifiée. Il est symptomatique de constater que, malgré la sécheresse subie pendant dix années consécutives par diverses régions agricoles, la progression du Groupe Orval (dont le premier européen Angibaud) dans leurs activités de production et de vente d’engrais organiques est restée satisfaisante en 1990, avec plus de 210 000 tonnes commercialisées. Cet exemple illustre qu’au-delà des développements commerciaux, s’affirment une prime à la qualité et un plus grand souci d’utiliser des techniques de fertilisation douce.

En ce qui concerne les résidus urbains, nous pensons qu’à l’avenir les usines de compostage n’auront plus leur place, pas plus d’ailleurs que tous les autres monotraitements ; les futures usines seront conçues comme les centres de gestion intégrée de tous les déchets en associant de façon rationnelle tous les moyens, tri, séparation des toxiques, récupération en vue de recyclage, compostage pour les déchets organiques (sans oublier la cellulose des papiers = humus), incinération moderne avec récupération d’énergie et traitement complet des fumées, mise en décharge des déchets ultimes dans des conditions bien définies, et dans des cas particuliers bien spécifiques, recours à la méthanisation, voire à la lombriculture. Il ne suffira plus de fabriquer des sous-produits, mais d’organiser et assurer leur devenir complet.

En conclusion, il ressort que le compostage, malgré son très long passé, reste largement perfectible ; « il ne suffit plus de faire un tas et puis ça chauffe ». La conception doit être très complète, la gestion soignée, les principes fondamentaux ne doivent pas être oubliés. Il s’agit d’une technique très sensible aux méthodes appliquées comme c’est d’ailleurs le cas de tous les phénomènes biologiques. La réglementation participe à cette évolution, mais l’avenir passera par le développement d’actions interprofessionnelles avec les fournisseurs (exemple : le regroupement de deux chambres syndicales, ayant donné naissance à la Fédération des Fabricants des Amendements Organiques et des Supports de Culture) et avec les professions utilisatrices. Procéder autrement conduirait à se dévaluer, à se marginaliser et finalement à s’exclure de la communauté européenne bien au-delà de nos frontières.

BIBLIOGRAPHIE

Publications et colloques :

Ministère de l’Environnement à Paris et l’ANRED - Les Transformateurs à Angers ; Ministère de l’Agriculture ; AGHTM, plus particulièrement « Les résidus urbains » (1985) et la revue TSM ; Collection « Que sais-je » pour les sols (n° 352, 399 ; 398, 1395 et 1412) ; Annales agricoles ; Revues américaines : Biocycle et ses guides spéciaux, Solid Waste Management...

Livres et articles :

Beccari (1920), Apparatus for fermenting garbage ;

Carlyle & Norman (1941) Microbial Thermogenesis in decomposition of plant materials Part II, Factors involved ;

Demolon, Dynamique du Sol ;

Duthil, Éléments d’Écologie et d’Agronomie ;

Faugeron (L’Ingénieur Constructeur 1976), Inventaire des méthodes de traitement des résidus urbains ;

Golueke, Card & Mc Gauhey (1954), A critical evaluation of inoculums in Composting ;

Mc Gauhey & Gotaas (1955), Stabilization of wastes by composting ;

Gotaas (OMS 1959), Compostage et Assainissement.

Documentation des constructeurs français et étrangers. Anjou-Recherche, Compagnie Générale de Chauffe, des Syndicats Professionnels (SNID, SNAD,...) et des Associations d’ingénieurs et Techniciens de l’environnement (AFITE, IEGGE, etc.).

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