Your browser does not support JavaScript!

Le choix d'une technique de filtration des eaux

30 mai 1991 Paru dans le N°146 à la page 52 ( mots)
Rédigé par : Michel JAY

— Matériel Perrier S.A.

[Photo : Figure 1.]

Les conditions de l’utilisation ou du rejet des eaux amènent fréquemment le concepteur à réaliser une filtration mécanique préalable pour rendre compatibles les caractéristiques physiques de l’eau avec ses conditions d’utilisation.

Or, beaucoup de paramètres interviennent pour déterminer la meilleure technique à mettre en œuvre. C’est pourquoi nous nous proposons d’examiner les principaux caractères qui entrent en ligne de compte dans le choix du type de filtration.

Caractéristiques de l’eau brute

Qualité de l’eau

Qu’il s’agisse d’une eau provenant d’une rivière, d’un lac, d’un pompage en nappe phréatique ou d’un effluent de station d’épuration d’eaux usées, ses caractéristiques ne sont pas constantes dans le temps ; elles dépendent en particulier de divers éléments examinés ci-après.

Température

La température habituelle de l’eau (+5 °C à +30 °C) n’a pas de conséquences sur le choix du dispositif de filtration. Au-dessus de 30 °C, par contre, la qualité des joints doit être examinée avec soin, ainsi que les effets de la dilatation des matériaux constitutifs de l’appareil de filtration.

Entre −5 °C et +5 °C, il faut envisager de faire tourner le filtre en continu à petite vitesse pour éviter le gel des parties non immergées.

Au-dessous de −5 °C, il y a un risque certain de gel, mais la marche continue du filtre peut être maintenue en vérifiant toutefois qu’il n’existe pas d’eau stagnante et qu’il ne puisse pas arriver de glaçons sur le filtre. La mise hors gel par calorifugeage ou chauffage peut être envisagée.

Matières en suspension

Ce paramètre est le plus important car il conditionne le choix du système au niveau du calibre des mailles du filtre.

La teneur en MES est habituellement exprimée en milligrammes par litre. Or, en matière de filtration mécanique, la seule mesure utilisable se chiffre en millimètres ou en microns. Il faudrait donc disposer d’une analyse granulométrique, qui est difficile à obtenir (peu de laboratoires sont équipés pour la réaliser) ; d’autre part, ce paramètre varie constamment. On en est donc réduit à opérer empiriquement, en se référant à l’expérience acquise sur des réalisations similaires dans le temps, puisqu’une rivière ne débite pas la même quantité ni la même qualité d’eau tout le long de l’année : en automne son débit est en général faible et elle recueille des débris végétaux (feuilles mortes...) ; au printemps son débit est élevé, elle contient beaucoup de MES et elle lessive les berges, ce qui entraîne des sacs plastiques, bouteilles, etc.

Présence d’algues

Les algues (de couleur brune ou verte) prolifèrent lors des grandes chaleurs. Elles se fixent sur les surfaces à vitesse nulle ou faible (bords de bassin, etc.) et se développent très rapidement, surtout dans les courants lents, et à faible vitesse de l’organe de filtration.

Moules d’eau

Elles suivent le déroulement de la vie animale : naissance, développement,

reproduction, mort. Il est pratiquement impossible d'arrêter le naissain, sorte de nuage microscopique, mais dès que la coquille est formée, une filtration à 100 microns résout très bien le problème de leur élimination.

En fait, le cumul d'une rotation lente, d'une filtration à 100 µ et d'une post-chloration à dose homéopathique (les moules d'eau y sont très sensibles, surtout le naissain) permet de s'en débarrasser.

Conditions de corrosion(salinité — pH — oxygénation)

Le pH normal de l'eau (5,5 à 8,5) n'a pas d'influence sur le métal de l'appareil de filtration. En dehors de ces limites, les matériaux devront être choisis avec soin, que ce soit les aciers ou les joints. Dans ce cas, il convient de s'orienter vers des matériaux en inox (type 316 L) ou des peintures en brai époxy.

L'eau chargée en chlorures (eau de mer) attaque les aciers ordinaires. L'acier inoxydable résout théoriquement l'attaque par oxydation, mais il supporte mal les variations de températures combinées aux alternances d'immersion et d'émersion, de même que les brouillards salins. La parade la plus simple est la protection de toutes les parties métalliques par une peinture antifouling combinée à une protection cathodique par anodes (à changer tous les 5 ans). Ce système est peu coûteux par rapport à l'emploi d'un acier inoxydable ; il faut également tenir compte de la teneur en oxygène de l'eau, qui peut la rendre oxydante ou réductrice.

Variation du débit

  • – L'écoulement peut être du type gravitaire (à surface libre) ou en charge (sous pression).
[Photo : Figure 2.]
[Photo : Figure 3.]

Écoulement gravitaire

Le niveau

L'écoulement peut être à niveau d'eau constant, par exemple, en sortie de décanteur. Il s'agit du cas le plus simple, l'organe de filtration sera à surface filtrante fixe donc minimum.

Lorsque le niveau d'eau amont varie, il faut prendre en compte les plus basses eaux (PBE) et les plus hautes eaux (PHE). Ces cotes définissent la hauteur de l'élément de filtration par rapport au radier.

[Photo : Figure 4.]

Le débit

Cette donnée, généralement connue, est indispensable, car elle conditionne le dimensionnement du filtre. Il faut en connaître la valeur minimum et surtout la valeur maximum.

Écoulement en charge

Le débit

Il est défini lorsque l'organe de mise en charge comprend une ou plusieurs pompes ; là aussi il faut connaître le débit maximum.

La pression

Elle dépend de celle fournie par les pompes ou par la charge du barrage ; elle est maximale lorsque le barrage est à sa cote maximum. Sa connaissance permet de calculer l'enveloppe du filtre (qui doit résister à 1,5 fois la pression maximale de service).

[Photo : Figure 5.]

L'eau filtrée

Les conditions à remplir par l'eau filtrée sont en général bien définies. Elles sont le plus souvent exprimées sous diverses formes :

  • * ne pas encrasser pompes et tuyauteries,
  • * turbidité minimum,
  • * respect de normes de rejet,
  • * possibilité de recyclage (pour les eaux de procédés),
  • * en cas d'irrigation, ne pas entraîner de dépôts dans les buses d'arrosage.

En outre, l'organe de filtration doit fonctionner sans intervention.

Écoulement gravitaire

Après filtration, l'eau est conduite dans un canal. Le concepteur doit prendre en

compter la perte de charge du filtre, qui peut varier de 5 à 50 cmCE (avant décolmatage).

Reprise par pompage

Après filtration, l’eau est reprise par une ou plusieurs pompes : c’est le schéma classique de la station de pompage pour irrigation. La bâche installée entre la filtration et l’aspiration des pompes doit être dimensionnée de telle manière que les pompes ne se désamorcent pas, en tenant compte notamment de l’augmentation du débit due au démarrage des groupes centrifuges.

Qualité de l’eau

La filtration mécanique, en supprimant une partie des matières en suspension, abaisse la pollution (chiffrée en DB05 et DCO), ce qui est difficilement quantifiable sans essais préalables.

Le choix de la maille de filtration est fonction de l’utilisation de l’eau, par exemple :

  • • protection des pompes : 5 mm,
  • • irrigation au canon ou au pivot : 1,4 mm,
  • • transport d’eau brute sur grande distance et faible vitesse : 600 microns,
  • • eau industrielle : 100 microns,
  • • irrigation au goutte à goutte : 32 microns,
  • • filtration eau potable : 25 microns,
  • • microfiltration : 10 à 0,1 micron.

Au-dessous de 0,1 micron, on entre dans le domaine de l’ultrafiltration, qui ne fait pas l’objet de cet exposé.

En fait, chaque problème est un cas particulier et doit faire l’objet d’une étude.

La filtration

Compte tenu des éléments fournis sur la qualité de l’eau brute, les variations de débit et de niveau, ainsi que l’objectif fixé par le concepteur, le constructeur du matériel de filtration peut étudier son projet en prenant en compte chacun des paramètres.

La maille de filtration étant définie, il en déduit la vitesse de filtration, vitesse qui tient compte de l’indice de vide de la toile, de sa résistance mécanique, etc.

Le débit divisé par la vitesse de filtration donne la valeur de la surface filtrante (si le débit varie, c’est le débit maximum qui est pris en compte).

Filtration d’eau à surface libre

La hauteur d’eau amont (entre le radier et les plus basses eaux-PBE) détermine les dimensions de l’organe de filtration. Cette hauteur d’eau peut varier (marnage) ou être fixe.

Si le niveau amont varie peu ou pas du tout, le choix se portera sur un tambour de filtration dont les dimensions seront déterminées en fonction de la surface filtrante nécessaire et du plus petit diamètre réalisé, compte tenu de la vitesse de sortie de l’eau.

On en déduit la longueur du tambour comme le montre l’exemple suivant.

Soit un débit fixe de 1 300 m³/h = 0,361 m³/s et une maille du filtre de filtration de 1,4 mm (demandée pour l’irrigation au pivot) ; la vitesse de filtration sera de 0,23 m/s et la surface de filtration nécessaire est de 0,361/0,23 = 1,57 m².

Si la variation du niveau amont est de 10 cm entre les PHE et les PBE, la vitesse de sortie de l’eau ne doit pas être supérieure à 1,1 m/s, ce qui donne 0,361 m³/s / 1,1 = 0,328 m².

L’abaque « vitesse de sortie » montre qu’un tambour de 1,80 m de diamètre est utilisable (figure 1).

La longueur du tambour est déterminée par une courbe portée sur la figure 2, où l’on voit qu’un tambour du type 18/8 convient parfaitement (figure 3). Le tambour est placé suivant le schéma porté sur la figure 4.

Si le niveau amont présente des variations importantes entre PHE et PBE, on doit choisir un tambour de grand diamètre (avec un coût de génie-civil important) soit un filtre rotatif dit « filtre à chaîne ».

Dans l’exemple précédent, où les variations de niveau sont de 2 m, le tambour de 1,80 m n’est plus valable : il faut alors choisir un filtre rotatif qui, aux plus basses eaux, doit donner un débit maximum et accepter les plus hautes eaux. Il est disposé suivant le schéma de la figure 5.

Filtration d’eau en charge

Trois paramètres permettent de déterminer rapidement le type de matériel à mettre en œuvre : le débit, la pression, la maille de filtration.

Comme nous l’avons vu précédemment, le débit divisé par la vitesse de filtration donne la valeur de la surface filtrante.

On doit observer que la vitesse de filtration doit être faible : les impuretés étant arrêtées par la toile métallique, il ne faut pas que la vitesse, par la pression qu’elle entraîne, permette leur incrustation dans la toile, auquel cas il s’ensuivrait, soit une impossibilité de nettoyage, soit la pollution du réseau aval.

C’est intentionnellement que les matériels à utiliser n’ont pas été décrits, chaque constructeur mettant en œuvre sa propre technique et sa technologie pour réaliser son matériel, ce qui demande expérience et compétence.

Cet article est réservé aux abonnés, pour lire l'article en entier abonnez vous ou achetez le
Acheter cet article Voir les abonnements