En effet, ces boues présentent un taux de croissance qui se situe, à charge massique constante, aux environs de 10 % par jour. Si la charge en DBO augmente dans des proportions de 1 à 5 ou 1 à 10 en l’espace d’un ou deux jours, une installation à boues activées doit s’adapter à des charges massiques qui vont, au début, augmenter dans les mêmes proportions ; la conduite d’une station d’épuration dans de telles conditions s’avère toujours délicate.
L’installation d’une floculation au moyen d’un floculant minéral au niveau de la décantation primaire permet d’atténuer ces pointes de charge mais la biomasse doit s’adapter à un milieu sensiblement modifié.
[Photo : Schéma de principe de la station de traitement des eaux usées de Saint-Etienne en Dévoluy (Hautes-Alpes).]
Le procédé Biosorbe qui utilise une biomasse fixée sur du charbon actif permet de pallier les inconvénients que présentent, dans ces cas-là, les installations à boues activées.
FONCTIONNEMENT D’UNE INSTALLATION
Après avoir passé à travers les ouvrages de dégrillage et de dessablage, les eaux à traiter sont floculées au moyen de sulfate d’aluminium ou de chlorure ferrique avec adjonction d’un polyélectrolyte. Les eaux floculées sont ensuite clarifiées soit par décantation soit par flottation (voir schéma).
À la sortie du clarificateur, l'eau arrive dans un bassin tampon où elle subit une brève phase d’aération, de manière à obtenir de 6 à 8 mg/l d’oxygène dissous avant le passage sur les filtres à charbon actif. À la sortie des filtres, l'eau est envoyée directement vers l'exutoire.
À intervalles réguliers, les filtres sont lavés à l’air puis à l'eau ; les eaux de lavage sont recueillies dans un bassin tampon, puis recyclées en tête de l'installation.
Les boues déposées dans le clarificateur peuvent être stockées dans une cuve d'où elles seront évacuées périodiquement pour subir une déshydratation mécanique.
CARACTÉRISTIQUES DU PROCÉDÉ
Au cours de la floculation, l’abattement de la pollution, mesurée en DCO ou DBO5, est de l’ordre de 75 % et les filtres à charbon actif détruisent 70 % du reste.
On obtient ainsi des rendements supérieurs à 90 % pour l’élimination de la DBO. Notons aussi que les détergents et les phosphates sont éliminés pour plus de 90 %.
Dans le tableau suivant figurent quelques résultats obtenus à la station de Saint-Étienne-en-Dévoluy :
|
Entrée |
Eau floculée |
Eau filtrée |
% global |
DCO mg/l |
314-483 |
106-190 |
46-49 |
86-90 |
DBO5 mg/l |
138-200 |
48-75 |
4-17 |
97-91 |
PO4-3 mg/l |
17-19 |
2,8-4,2 |
1-0,6 |
93-97 |
Déterg. mg/l |
4-6 |
2-6,3 |
0,3-0,3 |
92-94 |
On remarque que, comme pour la plupart des procédés physico-chimiques, la majeure partie de l’élimination de la pollution s’effectue au niveau de la floculation. Les bactéries fixées sur le charbon actif ne détruisent que 20 % environ de la charge polluante arrivant en tête de station.
La biomasse fixée sur le charbon présente deux caractéristiques : sa faculté de mise en veilleuse et son adaptation rapide aux variations de charges.
Les expériences faites dans diverses conditions ont montré que les micro-organismes fixés sur charbon n’ont besoin d’aucune charge minimum pour subsister et qu'ils recouvrent rapidement leur activité lorsque l'installation est remise en service.
Il est donc possible de concevoir une installation dont la population raccordée en morte saison soit de 500 HE et qui admette durant les week-ends ou au moment des vacances les eaux de 5 000 HE.
À titre d’exemple, la station de Saint-Étienne-en-Dévoluy possède une population permanente de 400 HE et le nombre d’habitants raccordés passe à 7 000 en l’espace de deux jours, au moment des vacances d’hiver.
[Photo : Évolution de l’efficacité d’un filtre lors de sa remise en service.]
Lorsque le filtre a atteint son régime stationnaire, son rendement reste constant et l'on ne constate pas de phénomène de saturation.
Le charbon actif constituant la masse filtrante conserve ses propriétés sans qu'il soit nécessaire de le régénérer. Les frottements produits lors des rinçages à contre-courant provoquant des pertes par abrasion, il faut prévoir annuellement un apport de charbon actif de 5 à 8 % de la masse filtrante.
VOLUME DES INSTALLATIONS
Les installations occupent une surface au sol restreinte, ce qui permet de les couvrir complètement lorsqu’elles sont implantées en zone montagneuse. En effet, les eaux à clarifier étant floculées, on peut remplacer les décanteurs primaires classiques par des séparateurs lamellaires qui, pour un même débit, occupent environ huit fois moins de surface au sol ; d’autre part, les décanteurs secondaires d'un procédé biologique sont remplacés par des filtres qui sont quatre fois moins étendus.
[Photo : Station entièrement couverte à Saint-Etienne en Devoluy (7 000 H E)]
Une installation traitant un débit maximum de 120 m³/h (avec l’installation de déshydratation des boues et les annexes) ne nécessite donc qu’une superficie de 250 m² (voir illustration). La couverture d’une telle station représente une dépense supportable, surtout si l’on tient compte des avantages qui en résultent des points de vue de l’exploitation et de l’entretien du matériel.
FRAIS D’EXPLOITATION
Mis à part le coût de la main-d’œuvre, les frais d’exploitation sont directement proportionnels aux débits d’eau traitée ; ils comportent en particulier des dépenses de floculant minéral, du polyélectrolyte et d’électricité.
a) le floculant minéral
On utilise généralement soit le sulfate d’aluminium soit le chlorure ferrique. L’expérience montre que la quantité de floculant minéral nécessaire à une bonne floculation et à l’élimination des phosphates varie en fonction du degré de pollution de l’eau à traiter, mais que l’on peut en moyenne tabler sur un dosage du sulfate d’aluminium correspondant à 13 g/m³ d’Al (150 g de sulfate d’aluminium cristallisé).
b) le polyélectrolyte
La consommation en polyélectrolyte est inférieure à 1 g/m³ de produit en poudre pour le traitement de l’eau ; à cela s’ajoute le polyélectrolyte éventuellement nécessaire à la déshydratation des boues.
c) l’électricité
La consommation en énergie électrique varie considérablement si l’on envisage une clarification par décantation ou par flottation. Dans le cas d’une installation équipée d’un décanteur lamellaire on doit compter, pour le traitement de l’eau, une dépense en énergie électrique de 30 W h par m³ traité.
Coût d’exploitation
Sur la base d’un prix de :
- 0,70 F le kilo de sulfate d’aluminium,
- 20,00 F le kilo de polyélectrolyte,
- 0,30 F le kW h,
nous obtenons un coût de traitement de 13 à 14 centimes par m³. Ce chiffre ne tient pas compte de la main-d’œuvre nécessaire à l’exploitation (équivalent à un demi-poste de travail).
On peut dire, pour résumer, que le système Biosorbe permet de construire des stations d’épuration capables d’assurer l’épuration correcte des eaux urbaines et qu’il apparaît particulièrement bien adapté à la situation que connaissent les stations touristiques durant les week-ends et pendant les vacances.
De plus, la faible surface au sol nécessaire à l’installation permet, lorsque le climat l’exige, de couvrir les ouvrages pour une dépense raisonnable.
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