L’ARKOMETHA, technologie en rupture
Le schéma du procédé (figure 1) est décrit dans le schéma ci-contre :
La technologie repose sur :
• Un fermenteur cloisonné en deux compartiments eux-mêmes subdivisés en secteurs de fermentation correspondant aux étapes de la fermentation dans des milieux biochimiques évolutifs (hydrolyse, acidogénèse, acétogénèse et méthanogénèse).
• Deux niveaux de température et un pH évoluant au cours du processus visant à sélectionner les espèces (dissociés ou non dissociés) et à maîtriser l’évolution des principaux métabolites de la fermentation. Ceux-ci deviennent à certains niveaux de concentration des inhibiteurs de la fermentation : NH₄⁺, NH₃, H₂S, H₂, etc. La concentration d’AGV serait plutôt une conséquence d’un mauvais équilibre du système plutôt qu’une cause. La gestion de la pression partielle d’H₂ est le facteur central pour une bonne réduction de la matière. Celle-ci induit la voie prise par la fermentation.
• Le fonctionnement dans une première étape à une température de l’ordre de 65 °C participe à l’hydrolyse thermo-enzymatique et permet également d’hygiéniser la matière organique (70 °C pendant une heure étant la température d’hygiénisation reconnue).
• Le fonctionnement de type tunnel, avec un front de matière, agité « par tranche », respecte l’évolution et la sélectivité des populations bactériennes et favorise l’auto-ensemencement par secteur.
• Un système de brassage du fermenteur, par un réseau de cheminées, permet d'injecter du gaz sous pression dans les secteurs de fermentation à des débits importants, engendrant un mouvement convectif de la matière épaisse, fluide.
[Encart : – Arkolia Energies]
[Photo : Schéma du procédé]
non newtonien. Les vitesses de gaz sont modulables et dépendantes de la viscosité de la matière, viscosité renseignée grâce au rapport débit/vitesse/durée.
Le bien-fondé
de la méthanisation
multi-étapes
Les travaux menés par ARKOLIA ENERGIES et ses partenaires ont montré le bien-fondé de la méthanisation multi-étapes en voie épaisse. La phase d’hydrolyse est favorable à une évolution rapide de l’acidogène (pH acide < 6 et production importante d’H₂), ce qui permet de maîtriser l’équilibre de l’acétogenèse à un pH proche de la neutralité. Celui-ci évolue dans les secteurs de l’ARKOMETHA au fur et à mesure de la minéralisation de l’azote. Nos travaux portent également sur la problématique de dilution des substrats secs par des liquides de dilution. Selon le lieu du système où est prélevé ce liquide on est confronté à des augmentations des éléments solubles, acides, azote ammoniacal et sel qui, à un certain taux, deviennent inhibiteurs. Le système doit pouvoir les évacuer.
Dans un système à flux piston on atteint un bon équilibre biochimique favorable à une cinétique de production de biogaz rapidement, aussi bien dans les étapes hyperthermophile, thermophile et mésophile. La montée en température ne pose pas de problème et se fait rapidement. Cela n’est pas le cas en sens inverse.
Même si nos travaux en cours ne permettent pas de l’affirmer encore de manière absolue (de par la multiplication des paramètres en jeu), le fonctionnement dans une première étape d’hydrolyse à 65 °C associé à une deuxième grande étape à 55 °C ou à 38 °C semble être la meilleure configuration. Les temps de séjour respectifs des étapes restent à optimiser en fonction de la nature des substrats. Chaque étape est subdivisée en étapes intermédiaires dans un nombre de secteurs dépendant aussi de la taille des fermenteurs.
La production de biogaz serait à peu près équivalente dans les deux configurations thermophile et hyperthermophile. La stabilité du milieu et la conservation de l’azote seraient favorisées avec une première étape hyperthermophile. Cela s’explique par la nature des espèces chimiques et la forme de l’azote minéralisé NH₄⁺/NH₃ produite en fonction de la température et du pH. La température agit également sur les seuils de solubilisation-gazéification des métabolites produits et sur la pression partielle d’hydrogène, l’hydrogène étant massivement produit lors de l’hydrolyse thermo-enzymatique.
La maîtrise du pH et de la température selon les étapes de la fermentation oriente la forme des espèces moléculaires et participe également à l’équilibre biochimique de la fermentation. La forme NH₃ libre pourrait dénaturer les protéines membranaires et augmenter la toxicité.
Un fonctionnement à 65 °C permet également l’hygiénisation de la matière à l’entrée du fermenteur. Une adaptation à 70 °C pendant une heure pour répondre aux normes sur l’hygiénisation est rendue ainsi facile.
Les limites du taux
de matière sèche
Les travaux portant sur la rhéologie nous ont amenés à ne plus raisonner en fonction du taux de matière sèche pour déterminer les limites de l’agitation mais en termes de viscosité de la matière entrante et en fermentation.
On devrait d’ailleurs, à notre sens, parler de matière épaisse plutôt que de matière sèche. Le terme matière sèche est infondé ou erroné pour plusieurs raisons.
La méthanisation en continu à forte concentration de MS présente des seuils et limites ou limitants. La matière en fermentation doit s’écouler soit naturellement ou sous l’effet d’une force ou pression.
La matière faite d’une partie solide et d’une partie liquide subit des séparations de phase. Il faut pouvoir garder le substrat homogène. Le brassage ne peut s’exercer que sur une matière suffisamment visqueuse et homogène faite d’une phase liquide et d’une phase solide.
La phase solide et la phase liquide sont indispensables pour permettre les échanges de métabolites, la diffusivité enzymatique et l’accessibilité des bactéries aux substrats. On retrouve dans les substrats en voie épaisse à la fois des fibres solides, des éléments en suspension et des éléments solubles. La solubilisation de la matière organique ne peut se faire que s’il y a un milieu suffisamment humide pour permettre la dilution.
L’optimisation des échanges et de la dégradation de la matière passe par un optimum de viscosité qui se traduit par un équilibre entre les éléments solides, solubles et le liquide.
Le comportement hydraulique et la viscosité des substrats dépendent de nombreux paramètres qui sont en substance les caractéristiques du substrat, le taux de fibre, le taux d’inerte, sa capacité d’absorption à une température donnée, les espèces chimiques, les réactions chimiques, la vitesse de dégradation dans un milieu donné.
Nous notons par exemple une différence fondamentale de comportement entre des ordures ménagères triées OM, des biodéchets et le fumier. Le taux de matière sèche favorable à l’écoulement, au brassage et aux échanges biochimiques peut se rapprocher de 30 % sur des OM, alors que sur le fumier celui-ci descend à moins de 20 %.
Les problématiques
de fond confirmées ou mises
en évidence
En voie épaisse (ou voie sèche) la problématique essentielle est de devoir diluer des substrats secs pour les ramener en dessous du seuil de non écoulement. On utilise le plus souvent une partie de la matière digérée et des jus après séparation de phase du digestat pour diluer les substrats secs entrants. On constate une accumulation problématique de métabolites qui, à une certaine concentration, sont inhibiteurs de la méthanisation. L’intérêt d’un écoulement piston est d’évacuer ces éléments.
On trouve l’accumulation d’AGV notamment sous sa forme propionate, des sels Na, Ca et surtout l’ammonium NH₄⁺ qui engendrent la basification du milieu plus favorable à la production de NH₃ et d’H₂S en orientant la voie sulfato-réductrice en compétition avec la voie de fermentation de l’acétogenèse. L’H₂S peut contribuer dans certaines conditions à la complexation des éléments métalliques nécessaires à la croissance bactérienne. L’infiniment mélangé qui nécessite de forte dilution et la recirculation de substrats fermentés favorise la concentration progressive d’AGV, de sels et d’azote minéralisé, un temps de séjour des espèces aléatoire et la confusion bactérienne. Ce qui nécessite des temps de séjour importants.
La méthanisation multi-étapes en voie
épaisse reposant sur une dissociation, notamment de l'acidogénèse et de la méthanogénèse présente de nombreuses possibilités d'intervention sur le process pour favoriser les voies de fermentation favorable à la production de biogaz et à l'évacuation des inhibiteurs de la fermentation. L'objectif poursuivi dans le cadre du programme des Investissements d'Avenir est de passer d'un pilotage pragmatique des installations à un pilotage prédictif et correctif sur serveurs locaux et à distance.
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