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La réfection des bassins de la sucrerie d'Arcis sur Aube (Aube)

30 mai 1979 Paru dans le N°35 à la page 33 ( mots)
Rédigé par : D FAYOUX, H LEBOURG et J.-l WILMART

La Société d’Intérêt Collectif Agricole (Sucrerie d’Arcis-sur-Aube) a été créée en 1974. Aujourd’hui, elle rassemble 1 200 adhérents qui emblavent annuellement 18 000 hectares.

L’usine traite annuellement environ 900 000 tonnes de betteraves avec un débit journalier de l’ordre de 10 200 tonnes. La production annuelle de sucre blanc cristallisé est actuellement de l’ordre de 120 000 tonnes.

[Photo]
[Photo : Pose du drain vertical.]

LA RESSOURCE EN EAU

Les eaux utilisées par la sucrerie proviennent essentiellement de deux apports :

• Un prélèvement en rivière (l’Aube) : environ 0,65 m³ à la tonne de betteraves. Ces eaux subissent les traitements suivants : – Filtration en colonne sur lit de sable, – Anti-tartre, – Algicide,

avant leur utilisation pour le refroidissement des machines tournantes (turbo-alternateurs, compresseurs, etc.) et elles sont recyclées jusqu’à leur dégradation thermique (25 à 30 °C). Elles rejoignent ensuite les eaux de lavage des betteraves.

• L’eau des betteraves :

Les betteraves apportent 75 % de leur poids en eau, c’est-à-dire 0,75 m³ à la tonne. Cette eau est recueillie sous forme de condensats lors de la concentration des jus sucrés. Après refroidissement et récupération éventuelle de calories, elle est en partie recyclée pour l’extraction du sucre en diffusion, et l’excédent rejoint les eaux de lavage des betteraves.

SORTIE DES EAUX ET TRAITEMENT DES REJETS POLLUANTS

Evacuation avec produits ou sous-produits :

  • • pulpes,
  • • écumes d’épuration des jus,
  • • mélasse,
  • • déchets divers (sables et herbes),
  • • etc.

En outre, une partie s'évapore au cours des différents stades de fabrication et notamment aux réfrigérants atmosphériques.

Evacuation des eaux usées :

Les eaux dégradées aux différents stades de la fabrication servent (avec un appoint d'eau recyclée des bassins) au lavage des betteraves. Elles se chargent en terre de déchets divers approvisionnés avec les betteraves, dont la quantité varie suivant la tare (10 à 30 % du tonnage de betteraves), à une concentration d’environ 100 à 150 g/l. Ces effluents contiennent essentiellement des matières minérales et organiques fermentescibles ; leur traitement est donc indispensable avant rejet dans le milieu naturel.

[Photo : Fig. 1. — Circuit des eaux et débits approximatifs 10 500 tonnes/jour de betteraves.]

Deux méthodes de traitement sont utilisées :

  • — épuration par épandage sur les terres labourables environnantes pour dépôt de leurs composants fertilisants. Cette technique est pratiquée en deux postes de jour (16 h/24 h) ;
  • — épuration en bassins, par lagunage (8 h/24 h). Le circuit est composé de plusieurs bassins (voir fig. 1) :
    • • un bassin de décantation (repère n° 1) d'une capacité de 90 000 m³ où les éléments solides se déposent. Les boues, après assèchement dans ce bassin, en inter-campagne, sont évacuées par camions vers les terres cultivables. La circulation des camions nécessite un fond roulable et une rampe d'accès ;
    • • un bassin de transit (repère n° 2) dont les terres déposées seront évacuées au cours des prochaines années ;
    • • un bassin de stockage-lagunage (repère n° 3) d'une capacité de 250 000 m³.

L'épuration se produit par lagunage et auto-oxygénation.

Une partie des eaux est recyclée en usine pour compléter les volumes à mettre en œuvre pour le lavage des betteraves. Une autre partie est déstockée à la rivière (lorsque leur qualité le permet) en juillet-août.

Afin de respecter la qualité des eaux de la nappe phréatique, l'infiltration des eaux de ces bassins doit être réduite au maximum. Ce sont les trois ouvrages cités ci-dessus qui ont fait l'objet des travaux dont il va être question maintenant.

LA RÉFECTION DES BASSINS

La sucrerie d’Arcis-sur-Aube a réalisé de 1974 à 1976 un important programme de travaux pour porter son débit de traitement de 7 000 t/jour de betteraves à 11 000 t/jour, et cette augmentation de production l'a amenée à reprendre dans leur ensemble les dispositifs de lutte contre les effets polluants de ses rejets d'eaux résiduaires.

Deux techniques ont été alors retenues pour le traitement de ces eaux résiduaires :

  • — l’épandage des eaux dans les terres labourables, en deux postes (de 5 h à 21 h) ;
  • — la décantation avec stockage-lagunage en bassin, en un poste de nuit (de 21 h à 5 h).

Les digues des bassins existants avant l'extension étaient dans un état médiocre et des menaces de rupture étaient redoutées. D’autre part, les capacités des bassins n’étaient plus en rapport avec les volumes à rejeter ; par ailleurs, ils ne présentaient pas

de sécurité suffisante quant aux infiltrations possibles des eaux stockées en direction de la nappe phréatique.

La réfection de ces bassins a donc été entreprise, échelonnée sur plusieurs années, avec les phases suivantes :

  • 1975 — Consolidation de 600 mètres de digue ;
  • 1976 — Réalisation d'un bassin à eaux décantées d'un volume de 250 000 m³ ;
  • 1978 — Réalisation d'un bassin à boues d'un volume de 90 000 m³.

Ces travaux de réfection et d’étanchage ont été conçus et réalisés sous l'égide de la Direction Départementale de l'Agriculture, d'après les études et avec les Conseils Techniques de la Division Mécanique des Sols et du Génie Civil du Centre Technique du Génie Rural des Eaux et Forêts d’Antony (C.T.G.R.E.F.).

CONCEPTION DES OUVRAGES

Données topographiques

La Sucrerie dispose d'une surface relativement faible pour l'implantation de ses bassins. Il est donc nécessaire de gagner en hauteur la capacité de stockage qu'il n'est pas possible d'avoir en surface. La hauteur d'eau habituellement stockée dans les bassins 1 et 3 est de l’ordre de 14 mètres.

De plus, le terrain étant fortement en pente en direction de la vallée de l'Aube, les digues de certains bassins ont par endroit une hauteur proche de 19 m par rapport au pied aval. Nous sommes donc en présence de véritables ouvrages d'art auxquels il ne manque plus que le nom de barrages.

Données géotechniques

Le substratum est constitué d'un massif de craie remanié par solifluxion mais fortement consolidé et peut-être inaltéré par endroit. Il a également été observé un certain nombre de passes alluvionnaires. La perméabilité moyenne du massif est de l'ordre de 10⁻⁵ m/s.

Les digues sont donc construites avec ce type de matériau provenant soit du surcreusement des fonds, soit de la démolition des anciennes digues. Compacté à l'optimum Proctor normal, ce matériau a une perméabilité de 10⁻⁷ m/s.

Toutefois, la craie friable et sans cohésion donne au compactage un massif ayant une forte anisotropie de perméabilité ; ceci ajouté aux dimensions inhabituelles pour un tel type d'ouvrage a conduit les concepteurs à prendre un certain nombre de précautions concernant le profil des digues et leur drainage.

Données hydrogéologiques

La nappe phréatique étant dans tous les cas plus basse que les fonds de bassin, il n'y a aucun risque de sous-pression avec soulèvement de l'étanchéité lorsque les bassins sont vides. Par ailleurs comme dans cette région la nappe alimente l'Aube, il est possible de tolérer une légère infiltration par les fonds de bassin car il n'y aura pas accumulation de dépôts polluants au droit des fonds.

Ces éléments ont conduit la Sucrerie d'Arcis-sur-Aube à adopter pour le bassin n° 3 un système d’étanchéité qui n'est pas absolu, mais qui pour une perméabilité résiduelle acceptable est beaucoup plus économique que les membranes classiques.

LE PROBLÈME DU BASSIN N° 1 DE 90 000 m³

L’étanchéité du bassin n° 1 devait satisfaire à des conditions bien particulières, car le fond de ce bassin doit permettre la circulation de camions lourds ainsi que les opérations de reprise des boues au chargeur ou à la pelle mécanique, ceci sans que son étanchéité soit menacée.

Il est nécessaire d'autre part d'y prévoir un système de collecte des eaux provenant du ressuyage des terres décantées, afin que celles-ci soient suffisamment solidifiées au moment de la reprise.

Compte tenu de tous ces éléments, et en considération de la place disponible et du volume minimum d'effluents à stocker afin d'obtenir une décantation convenable, la capacité utile du bassin a été fixée aux environs de 90 000 m³, sous une hauteur minimum de 13 m.

BASSIN N° 1

La différence de cote entre la crête et le point le plus bas du bassin est de 13,70 m. Le fond du bassin a une pente de 6 mm/m, la hauteur du talus extérieur varie suivant la pente du terrain, de 4 m à 19 m, toutefois une risberne de 5 m de large a été réalisée du côté le plus haut, à 12 m en dessous de la crête.

Les pentes de talus sont de 2,5/1 vers l'intérieur et de 2,2/1 vers l'extérieur.

[Figure : Fig. 2]
[Photo : Profil de digue avec drain vertical]

Pour pallier les effets de l'anisotropie du matériau mis en place, pouvant entraîner une imbibition des talus et leur glissement, un drainage vertical a été réalisé à l'aide d'un feutre synthétique non tissé, épais, Bidim U 64 (600 g/m²). Le géotextile remonte jusqu'aux deux tiers de la hauteur. Il est raccordé en bas sur une tranchée drainante remplie de graviers et munie d'un collecteur.

[Photo : Coupe type sur drainage]

Le dispositif de drainage permet la mesure indépendante des débits de fuites se rapportant à trois secteurs différents, à savoir :

  • A. Digue Ouest.
  • B. Digue Nord.
  • C. Digue Est.

Pour cette dernière, le dispositif de mesure du débit de fuite est installé au fond d'un puits vertical creusé au cœur du massif de raccordement avec les bassins 2 et 3. Ce puits est prévu pour permettre la mesure du débit de drainage de la digue située entre les bassins 2 et 3, après sa réfection.

Le fond du bassin devait être, on l’a vu, non seulement étanche mais capable de supporter un trafic d'engins de chantier. Une solution combinée étanchéité et consolidation a été retenue.

La fonction étanchéité est assurée par le système polymère-bentonite Dowell Schlumberger et la stabilisation du sol compacté a été renforcée par l'utilisation d'un sol-ciment. Le fond et la rampe d’accès ont ensuite été protégés par une couche d’enrobé, dont le seul rôle est d’assurer une protection mécanique contre les éventuelles agressions des engins de terrassement à la reprise des terres. Le fait d'obtenir un fond de bassin étanche constitue une difficulté supplémentaire pour l’enlèvement des boues. En effet, celles-ci ne pouvant plus se ressuyer et conservant une forte proportion d'eau, elles auraient subsisté à l’état liquide.

Un dispositif de drainage de fond de bassin avec collecte dans un puits de reprise a été expérimenté. Le système drainant est constitué d'un cordon de graviers ceinturant le fond de bassin et protégé par un feutre (Bidim U 34).

L'étanchéité des digues a été assurée par la projection d'un mélange polymère-bentonite (procédé Dowell Schlumberger Spray Seal). Les talus extérieurs ont été protégés par un engazonnement hydraulique, projection de graisse avec liant chimique et fertilisant.

[Photo : Coupe du bassin]

DES ESSAIS PRÉALABLES

On disposait avant de commencer les travaux d'un certain nombre d'informations essentielles sur la conception des ouvrages et leur étanchéité, car le bassin de stockage n° 3 avait été réalisé dans des conditions similaires en 1976. Toutefois, la solution retenue pour le fond du bassin n° 1 présentait des particularités, étant donné les caractéristiques de résistance mécanique requises pour ce fond.

Le Centre Technique du Génie Rural a donc déterminé les conditions optimales de traitement pour obtenir une perméabilité résiduelle inférieure à 10-9 m/s et une portance convenable. La formulation retenue fut finalement 2 % de M 179 (mélange polymère-bentonite) sur 10 cm et 2 % de ciment sur 30 cm.

Les caractéristiques du matériau sont alors les suivantes :

— densité sèche à l’optimum Proctor normal de 1,73 pour une teneur en eau de 19 %.

— perméabilité résiduelle mesurée après 15 jours de l'ordre de 4 × 10-9 m/s avec un indice portant CBR de 30. À titre de comparaison, le sol non traité a un indice CBR de 3 et le sol traité avec 4 % de ciment un indice de 66.

Un sol non traité présente un léger retrait après la période normale d’imbibition. Les sols traités ont un retrait négligeable dans le cas d'ajout de ciment et de M 179, nul dans le cas de sol traité uniquement avec le M 179. À noter que l'ajout de ce dernier produit n'a aucune influence sur l'indice CBR.

L'EXECUTION DES TRAVAUX

L'ensemble des travaux de terrassement a été confié à l'entreprise MULLER Frères de Boulay (Moselle). Les délais impartis à l'entreprise étaient d'un mois environ, pour un volume de terrassement de l'ordre de 120 000 m³. Le début des travaux a coïncidé avec la fin de la période pluvieuse de l'été 1978, ce qui a permis de travailler dans de bonnes conditions.

[Photo : Traitement de sol.]

L'exécution de ces travaux a posé un certain nombre de problèmes délicats à résoudre. Le manque de place en particulier limitait le nombre d'engins utilisables et impliquait une gestion rigoureuse des terres, car il était tout à la fois :

  • a) indispensable de démolir les digues existantes et d'en évacuer les mauvaises terres ;
  • b) nécessaire de monter les digues en parallèle et simultanément sur l'ensemble du bassin en tenant compte de la mise en place du drainage ;
  • c) impossible de stocker la terre et indispensable de trouver l'équilibre dans les mouvements de terre.

Les digues ont été montées avec un profil excédentaire et retaillées au fur et à mesure de l'avancement. L'épaisseur des couches compactées ne dépassait pas 30 cm et l'excédent de profil était environ de 50 cm.

Le matériel mis en œuvre a été le suivant :

Échelon principal

  • 1 bouteur D9H de 410 CV avec scarificateur ;
  • 3 décapeuses automotrices 631 CV de 23 m³ chacune ;
  • 1 bouteur D5 de 150 CV.
  • Tout ce matériel de marque Caterpillar.
  • 1 cylindre vibrant lourd WELLER 2501 de catégorie V4a.

Échelon d’accompagnement

  • 1 chargeur 966 de 3 m³, 1 pelle à godet de 600 l, 1 compacteur à pieu RICHIER – 12-14 t.

Échelon de traitement de sol

  • 1 répandeur pour le ciment et le M 179, CETTO de 7 000 litres.
  • 1 fraise rotative BOMAG, MPH 100 de 320 CV.

Un contrôle de chantier a permis de s'assurer de la bonne exécution des digues et de leur bon compactage. Le C.T.G.R.E-F. d’Antony a effectué ces opérations de contrôle avec son laboratoire mobile de chantier.

Les deux opérations, stabilisation et étanchéité, ont été dissociées car elles ne concernaient pas la même épaisseur de terrain. Toutefois, il était indispensable de les réaliser dans des délais suffisamment brefs afin de terminer le compactage avant la prise du ciment.

Le fond du bassin a donc été traité en deux jours, soit une bande de 2 000 m² par jour : le fond a tout d'abord été traité au ciment sur 30 cm, ensuite sur 10 cm avec du M 179, et finalement compacté aux conditions du Proctor normal. Un ajout d'eau fut nécessaire pour rétablir une teneur en eau correcte. L’étanchéité voie sèche fut remontée jusqu’à une hauteur d'environ deux mètres à partir du pied de digue.

La partie supérieure a ensuite été traitée en voie humide par le procédé « Spray Seal », en utilisant

[Photo : Unité de traitement Spray-Seal.]

un matériel d’aspersion spécialement mis au point par la Société Dowell Schlumberger pour ce type d’opération. Le chantier « Spray Seal » a duré environ deux jours et demi pour une surface totale à traiter de 13 800 m².

Les deux procédés « Spray Seal » et « Soil Sealant » sont deux types d’application d’une même technique utilisant un mélange de polymères et de bentonite afin de réduire la perméabilité du sol.

La bentonite utilisée est une qualité spéciale fabriquée pour Dowell Schlumberger par la C.E.C.A.

LE CONTRÔLE DES CONDITIONS DE TRAITEMENT

La Compagnie des Services Dowell Schlumberger a placé sur le terrain durant le chantier voie sèche son laboratoire de contrôle afin d’assurer une mise en place correcte du traitement M 179.

Le contrôle des conditions de compactage a été réalisé en utilisant un gammadensimètre Troxler, donnant en une seule opération la densité du sol et sa teneur en eau. Toutefois, pour cette dernière mesure, un contrôle systématique par une mesure pondérale a été effectué.

Des essais de laboratoire avaient défini au préalable les conditions optimum de traitement (laboratoire C.T.G.R.E.F. Antony).

Résultats des contrôles de chantier :

Densité sèche en fond de bassin ...... 1.77 ± 0.08  
Densité sèche en pied de digue ...... 1.72 ± 0.08  
Teneur en eau ........................ 16.5 ± 3.2  
Degré de saturation .................. 80 à 90 %  
Nombre de mesures .................... 36

Conditions optimum : 1.73 à 19 % de teneur en eau.

CONCLUSION

Sur une superficie réduite sans possibilité d’extension constituée d’un sol de nature très perméable, la Sucrerie d’Arcis-sur-Aube avait à résoudre un problème de bassin particulièrement délicat.

La nature du sol et l’obligation de gagner en hauteur le volume de stockage nécessaire à l’accroissement du débit de traitement ont obligé à concevoir les bassins comme de véritables ouvrages d’art dont ils ont les dimensions et les problèmes.

Les systèmes d’étanchéité comme les dispositifs de drainage étaient nécessaires tant pour assurer la pérennité des ouvrages que pour lutter contre la pollution.

L’utilisation de techniques simples, rustiques mais néanmoins parfaitement fiables a permis d’obtenir le résultat recherché, et ceci à des coûts raisonnables, sans aucune concession à la qualité d’exécution.

D. FAYOUX — H. LEBOURG — J. L. WILMART

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LA RÉFRIGÉRATION SÈCHE

ET LES CENTRALES NUCLÉAIRES

Pour traiter de cet intéressant thème d’actualité dont les incidences sur l’Environnement et plus encore sur l’Eau sont tellement évidentes, un colloque s'est tenu le 14 mars dernier à Paris, au Centre de Congrès de la Tour Olivier-de-Serres (15°), groupant plus de 400 participants, intéressés au sujet à des titres fort divers d'ailleurs.

Placé sous le haut-patronage du Ministre de l’Industrie, M. André GIRAUD, ce colloque était organisé conjointement par la Sté Française d’Énergie Nucléaire = S.F.E.N. (48, rue de la Procession, 75015 Paris, tél. 567.07.70) et l’Institut Français de l'Énergie = I.F.E. (3, rue Henri-Heine, 75016 Paris, tél. 524.46.14).

Nos lecteurs désireux d’obtenir une documentation sur les sujets traités pourront s’adresser à l'une des deux instances organisatrices. Il nous a paru intéressant toutefois de reproduire dans L'EAU ET L'INDUSTRIE une sélection des communications présentées dans le cadre de ce colloque et que nous estimons d'un intérêt particulier, à savoir :

  • — la présentation générale du thème, par M. Y. SOUSSELIER ;
  • — le point de vue d'un constructeur (Creusot-Loire), par M. D. DI PACE ;
  • — le point de vue de E.D.F., par M. Ph. AUSSOURD ;
  • — et le point de vue du Ministère de l'Environnement, par M. T. CHAMBOLLE.

La réfrigération sèche et les centrales nucléaires, présentation du thème,

par M. Y. SOUSSELIER,

président de la Commission des programmes de la S.F.E.N.

Dans notre pays, la demande en électricité est en constante augmentation ce qui oblige à la construction de centrales de plus en plus puissantes.

La recherche des sites s'avère de plus en plus difficile, si l'on veut dans l'intérêt de la communauté produire l’énergie électrique au moindre coût tout en respectant la protection de l’environnement et les contraintes essentielles concernant la construction de la centrale, son raccordement aux différents réseaux (routier, ferré, électrique).

On sait que pour obtenir de l’énergie mécanique, c'est-à-dire du travail, à partir d’énergie calorifique, c'est-à-dire de la chaleur, il faut nécessairement prélever de la chaleur à une source chaude et en restituer une partie à une source froide. Cette loi physique, à laquelle l'homme ne sait échapper, est exprimée par le principe de CARNOT.

Le rendement thermodynamique de la machine r est le rapport de l'énergie mécanique qu'elle a fournie M et de l’énergie calorifique qu'il a fallu lui fournir C. Notons que la chaleur résiduelle égale à

[Photo : graphique sans légende visible]

C-M (aux pertes près) doit être restituée à la source froide. Le principe de Carnot enseigne que, dans une machine réelle, η ne peut être que plus petit que l’écart de température relatif entre les sources, les températures étant exprimées en degrés Kelvin :

\[ \eta = \frac{M}{C} < \frac{T_c - T_f}{T_c} \]

soit \( \eta_c = 1 - \frac{T_f}{T_c} \)

degrés KELVIN

\[ T_f \text{ et } T_c \]

(degrés C + 273°)

On voit que le rendement sera d’autant meilleur que la température de la source chaude sera plus élevée et que celle de la source froide sera plus basse.

Dans une centrale thermique, la température de la source chaude qui est la chaudière est entretenue vers 540 °C par le combustible fossile, ou vers 270 °C par la fission nucléaire. La température de la source froide est entretenue par une circulation d’eau de 10 à 20 °C au-dessus de la température ambiante. La vapeur provenant de la source chaude se détend en faisant tourner la turbine qui constitue la machine, pour se condenser au contact de la source froide.

La turbine entraîne l’alternateur qui produit l’énergie électrique. Une partie de l’énergie produite, sous forme calorifique, mécanique ou électrique, est utilisée dans la centrale même, ce qui fait que, vue de l’extérieur, la centrale est une installation qui reçoit une énergie calorifique C, et qui fournit une énergie électrique E en rejetant une énergie p (perte) + F (chaleur résiduelle).

\[ C - E = p + F \]

Il s’agit d’évacuer dans l’environnement la chaleur résiduelle F.

La façon la plus simple consiste à se placer près d’un milieu aquatique naturel (mer, cours d’eau, etc.), de prélever un certain débit et de le restituer, après échauffement. On crée ainsi dans le milieu naturel une « tache thermique » dont l’effet doit être limité.

C’est pourquoi, on rejette aussi ces calories à l’atmosphère en passant par une installation appelée « réfrigérant atmosphérique » qui peut soit refroidir le rejet vers le milieu naturel, soit, et c’est le cas le plus fréquent, refroidir un circuit d’eau refermé sur lui-même.

La majorité des réfrigérants actuellement en service utilisent un phénomène physique bien connu : l’évaporation. Chacun sait qu’un liquide se refroidit plus vite si on le laisse s’évaporer. L’eau chaude qui a traversé le condenseur est précipitée soit sur des lattes de bois où elle est éclatée en une multitude de gouttes, soit sur des plaques où elle s’écoule sous.

forme de film et, dans tous les cas, une faible partie (1 à 2 %) s’évapore, refroidissant le reste.

C’est pour éviter cette consommation d’eau de 1 à 2 % du débit principal — laquelle représente un débit de 0,5 m³/s pour une tranche PWR de 900 MWe — qu’on a suggéré l’utilisation de la réfrigération dite « sèche ». Dans ce type de réfrigération, l’eau n’est pas mise en contact avec l’air ambiant, ce qui fait qu’aucune évaporation ne se produit. La chaleur est évacuée entièrement par conduction. Comme la conduction n’entre que pour 20 à 25 % lors de l’évacuation de la chaleur par voie humide, il en résulte qu’il faudra traiter 4 à 5 fois plus d’air pour évacuer la même quantité de chaleur.

[Figure : Schéma d’échangeur à tube et ailettes]

À ce propos, il faut dissiper une confusion fréquente : on oppose souvent les deux types de refroidissement en disant que la voie humide utilise l’eau et la voie sèche l’air. Il n’en est rien puisque le fluide caloporteur est l’eau dans les deux cas et l’air est le milieu récepteur dans les deux cas également. La différence est simplement que la réfrigération qui se fait par un transfert de chaleur dans les deux cas s’accompagne d’un transfert de masse dans le cas de la réfrigération humide.

Le but du présent colloque est l’examen du problème de la réfrigération sèche sous ses divers aspects : avantages, contraintes, effets sur l’environnement, coûts, limitations, réalisations, perspectives…

Y. Sousselier.

[Publicité : CEM Instrumentation-Mesure]
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