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La politique du Sedif en matière de travaux sans tranchée

30 mars 1996 Paru dans le N°190 à la page 42 ( mots)
Rédigé par : Jean-claude DRUOTON

Le Syndicat des Eaux d'Ile-de-France prend en compte les préoccupations des municipalités quant à la préservation du cadre de vie et à la diminution des nuisances imposées à la population lors du renouvellement des canalisations vétustes. Dans ce sens, il favorise le développement des techniques sans tranchée, parmi lesquelles se situent : la mise en place des canalisations par forage dirigé ou par micro-tunnelage, le remplacement place par place des conduites en fonte et des branchements par des méthodes d'extraction, la réhabilitation des ouvrages par différentes techniques de chemisage structuraux ou non.

Présentation du SEDIF

Le Syndicat des Eaux d’Île-de-France est un établissement public intercommunal à vocation unique : l’alimentation en eau potable. Il couvre un territoire de 144 communes, toutes situées en zone urbaine dense.

Cet établissement public est dirigé par un Comité de 144 élus désignés par les communes. L’exécutif est assuré par un bureau composé de douze membres, présidé par Monsieur André Santini, ancien ministre, député des Hauts-de-Seine et maire d’Issy-les-Moulineaux.

Le réseau de distribution, à partir des trois usines, respectivement situées sur la Seine, la Marne et l’Oise, est composé de 8 700 km de canalisations, de 100 mm à 2 500 mm de diamètre, et de 550 000 branchements. Il délivre en moyenne 1 million de m³ d’eau potable par jour, à une population de 4 millions d’habitants.

Tendance des investissements du SEDIF

Le territoire desservi par le SEDIF présente aujourd’hui une certaine stabilité du point de vue de l’urbanisation. La consommation d’eau potable a plutôt tendance à diminuer du fait de la conjoncture économique actuelle.

Hormis la construction des canalisations intercommunales nouvelles au titre de la sécurité de l’approvisionnement, les travaux prévus dans les plans d’investissement du SEDIF concernent plus particulièrement le renouvellement ou le renforcement des canalisations existantes et des ouvrages hydrauliques qui leur sont associés.

Précisons que ces travaux se situent dans des voiries en service dont le sous-sol est déjà fortement occupé par tous les réseaux des concessionnaires.

L’évolution des exigences : la préservation du cadre de vie

Or les municipalités ont engagé, ces dernières années, d’importants travaux de restructuration et de rénovation de cette voirie urbaine. En conséquence, les élus locaux souhaitent que les tranchées ne dégradent pas, tant l’état, que la durée de vie de ces ouvrages, pour lesquels ils ont investi.

En outre, l’amélioration du cadre de vie et le souci de la qualité de vie de leurs concitoyens et électeurs font partie de leurs préoccupations quotidiennes. La prise en compte de cette politique par les opérateurs leur impose désormais d’intégrer dans la programmation et l’organisation des chantiers de canalisations des notions environnementales fortes.

Sur ce dernier point, il convient de signaler l’existence d’un protocole, passé entre le SEDIF et ses opérateurs, permettant d’améliorer l’aspect des chantiers, la sécurité des usagers de la voirie et des riverains, de limiter les nuisances visuelles et sonores ainsi que les gênes de toute nature (accès aux équipements publics, aux propriétés privées et au stationnement).

Les élus locaux sont ainsi de plus en plus sensibles à une nouvelle notion apparue pour caractériser ces désagréments : le coût social induit par les travaux. Ce coût social recouvre des incidences qui se traduisent en :

  • • perturbations apportées à la circulation piétonne et automobile avec bouchons, pertes de temps, accidents, pollution de l’air ;
  • • dégradation ou perte de jouissance provisoire du domaine public, des ouvrages d’aménagement et des équipements de confort urbain ;
  • • conséquences économiques relatives à l’activité commerciale locale en termes de perte ponctuelle de chiffre d’affaires ou de glissement définitif de clientèle, mais également :

• conséquences macro-économiques telles que la raréfaction des matériaux de remblai et la saturation des décharges.

La politique du SEDIF

Ce sont les élus locaux qui décident de cette politique. Ils sont :

• gestionnaires dans leurs communes et la préservation des investissements communaux leur est chère,

• représentants des habitants et usagers et la réduction des nuisances et gênes subies est un de leurs soucis principaux,

• cependant comptables des investissements du SEDIF : le coût des travaux réalisés doit être avantageux.

Cette politique consiste à :

• pousser les entreprises avec lesquelles travaille le SEDIF à plus d’imagination et de créativité pour que ces exigences soient respectées,

• favoriser les essais de techniques innovantes et les évolutions de procédés connus,

• promouvoir ces innovations sur un champ d’application propre à en optimiser les effets et les coûts.

En continuité des techniques déjà mises en œuvre depuis de nombreuses années (fonçage, fusée, tubage), c’est donc tout naturellement que le SEDIF a favorisé le développement, depuis 1990, des nouvelles technologies sans tranchées, car elles apportent une réponse aux préoccupations visées plus haut.

Il en a été ainsi pour les trois grandes familles de procédés :

• réalisation de canalisation par foration : forage dirigé, micro-tunnelage,

• remplacement place pour place des conduites en fonte et des branchements en plomb existants par des méthodes d’extraction de l’ancien tuyau,

• la réhabilitation par les différentes techniques de chemisage structurant ou non.

Cependant, et compte tenu :

• des exigences spécifiques à la distribution de l’eau potable,

• des caractéristiques des terrains les plus fréquemment rencontrés en Île-de-France,

• et, enfin, des matériaux des conduites existantes à rénover ou renforcer, les procédés présentés ci-après ont été plus particulièrement développés sur le domaine du SEDIF.

[Photo : Forage dirigé : vue arrière de l’engin de forage en action.]
[Photo : Extraction d’une canalisation : vue du treuil hydraulique utilisé pour extraire par tirage la canalisation en place.]

Le forage dirigé par hydrojets

Il est actuellement employé préférentiellement pour poser des conduites souples jusqu’au diamètre 200 mm. Les tronçons, d’une longueur moyenne de 60 m, sont réalisés par forage sous l’action de jets de bentonite sous haute pression.

Cette technique nécessite la connaissance de la nature du terrain à forer et le repérage précis de l’encombrement du sous-sol.

La tête de forage possède une face inclinée qui, rotation arrêtée, permet d’orienter la trajectoire pour contourner les obstacles lors du trajet aller. À cette fonction est associée une sonde émettrice qui permet à l’opérateur de maîtriser et corriger, si besoin est, la position de la tête de forage.

Lors du trajet retour, un aléseur (ou un train d’aléseurs) élargit le trou pilote au diamètre voulu et tracte la canalisation nouvelle en polyéthylène.

Cette technique est avantageuse quand, réalisée sous trottoir ou chaussée, elle permet l’économie de la réfection du revêtement.

Les constructeurs développent actuellement des matériels plus performants pour ouvrir le champ d’action du procédé : accès à des sols plus compacts, tronçons de plus grandes longueurs.

Le remplacement, place pour place, de conduite fonte par extraction

L’encombrement croissant du sous-sol rend les travaux de terrassement difficiles et fréquemment dangereux. Cela a conduit à rechercher des solutions permettant de réutiliser l’emplacement directement occupé par la conduite à rénover ou renforcer. Le procédé consiste donc en l’extraction, par tirage, de l’ancienne conduite (en fonte) pour introduire à sa place la conduite définitive.

Avantages :

• éviter un encombrement inutile du sous-sol par la réutilisation de l’emplacement devenu disponible, et ce sans risques vis-à-vis des autres réseaux,

• réduire la pollution du sol par l’enlèvement du matériau de la conduite périmée,

• apporter des améliorations au réseau : la conduite posée, en polyéthylène, peut être de diamètre supérieur, elle est insensible à la corrosion, elle est autobutée et ne comporte plus de risques de fuites par les joints.

Le remplacement, place pour place, de branchements en plomb

La rénovation des branchements comportait l’obligation de perturber des espaces privatifs auxquels les particuliers sont particulièrement attachés. Le remplacement place pour place par extraction, qui a nécessité la mise au point d’équipements spécifiques adaptés aux tuyaux en plomb, apporte une solution efficace.

Avantages :

• une seule fouille, à l’emplacement de la prise sur conduite, suffit pour réaliser une extraction de branchement,

• le matériel, compact, ne nécessite qu’une fouille d’encombrement réduit sur le domaine public,

• les équipements de traction du tuyau plomb sont introduits à partir de l’emplacement du compteur (cave, regard)

• l’ancien tuyau en plomb est extrait et le nouveau, en polyéthylène, est mis en place en une seule opération.

Le swage lining

Certaines conduites en service ne demandent qu’à être reconditionnées pour améliorer leur étanchéité et leur durée de vie. Les différentes solutions de chemisages répondent au problème. Mais une conduite de distribution d’eau potable (comme de gaz) doit aussi permettre la réalisation de raccordements ou de prises de branchement étanches.

Le procédé swage lining, technique intermédiaire entre le chemisage et le tubage, consiste à introduire dans l’ancienne canalisation, une conduite en polyéthylène préalablement rétreinte. Libérée, cette nouvelle conduite se placera contre l’ancien tuyau. La perte en diamètre est compensée par le gain en perte de charge. La nouvelle conduite, à elle seule, assure les exigences requises et en particulier permet la réalisation, sur un matériau bien connu, le PEhd, des prises pour branchements ou raccordements avec d’autres conduites.

Le micro-tunnelage

Ce procédé consiste en l’automatisation du fonçage horizontal pratiqué de longue date. Il est destiné à la mise en œuvre de conduites ou de fourreaux rigides, de diamètres 300 à 800 mm.

Le micro-tunnelier, outil de creusement télécommandé, est constitué de :

• une trousse coupante articulée et orientable,

• un corps métallique emboîté sur le train de tubes,

• une tête de foration entraînée par moteur électrique ou hydraulique,

• un dispositif d’évacuation des déblais par tarière ou circulation de boue bentonitique,

• un appareillage laser de contrôle directionnel, cible interactive et circuit vidéo.

Il fait partie d’un ensemble qui comprend :

• un système de poussée (centrale hydraulique et vérins),

• un pupitre de commande,

• une unité de traitement des boues et d’évacuation des déblais.

L’emploi des micro-tunneliers se justifie dans les cas où des terrassements profonds et importants seraient nécessaires, ainsi que pour les traversées de points singuliers (carrefours à forte circulation, voies ferrées, autoroutes, …).

[Photo : Extraction d'un branchement plomb : vue du branchement vétuste enroulé autour du treuil d’extraction.]
[Photo : Swage lining : chemisage d’une conduite vétuste par une canalisation en PEHD. Vue du dispositif utilisé pour restreindre le diamètre de la canalisation en PEHD et la tirer vers la conduite à rénover.]

Les résultats

À ce jour, environ 25 % des chantiers de canalisations sont réalisés pour le SEDIF par une ou l’association de plusieurs de ces techniques.

Certains de ces chantiers ont été des premières mondiales, d’autres détiennent encore des records dans leur spécialité. Il en est ainsi du chemisage, à Pierrefitte en 1993, d’une conduite de diamètre 800 mm par le procédé swage lining ou des 450 m de micro-tunnelage, en diamètre 800 mm, à Montmorency en 1995, dont un tronçon de 170 m sans station de poussée intermédiaire.

Notons, au passage, que le développement de ces procédés a nécessité ou entraîné d’autres progrès dans le domaine : des composants des canalisations, des outillages, exemple la soudure bout à bout du polyéthylène ou les robots d’intervention dans les conduites, des équipements « accessoires » d’investigation vidéo, de détection des conduites, de radars de sols… D’autre part, sous l’angle réduction des nuisances sonores, il convient de souligner que des études comparatives ont démontré, lors de l’emploi des techniques sans tranchée, une réduction moyenne du bruit émis, proche de 50 %.

Les perspectives sur le domaine du SEDIF

L’évolution des capacités des procédés et leur maîtrise par les opérateurs amènent le SEDIF à penser que, à l’échéance de l’an 2000, 50 % des chantiers de canalisations, en zone urbaine dense, devront être réalisés avec utilisation de techniques sans tranchée, avec une part croissante de remplacements place pour place par extraction, pour faire face à la densification des réseaux enterrés.

D’autre part, l’évolution de la réglementation (directive plomb) entraînera le développement de la rénovation des branchements par l’utilisation accrue (60 à 65 %) de la technologie extraction. Parallèlement, la réalisation des branchements neufs avec emploi des techniques en sous-œuvre se maintiendra au taux actuel de 85 %.

Conclusion

Le SEDIF a pu démontrer que lorsqu’un Maître d’ouvrage et ses partenaires ont la volonté d’aboutir, les techniques sans tranchée pour pose de canalisations et de branchements peuvent apporter des solutions techniquement fiables et économiques pour la collectivité.

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