Il est possible de distinguer deux catégories de niveaumètres : ceux qui sont en contact physique avec le fluide dont le niveau est à mesurer, et ceux qui ne le sont pas. Les médiums peuvent être solides ou liquides. Cet article ne traite que des fluides.
Niveaumètres en contact avec le fluide
À titre d’exemple, prenons le flotteur conventionnel avec potentiomètre. Si cet appareil présente l’avantage certain d’un fonctionnement facile à comprendre, il comporte également de graves faiblesses.
Celles-ci sont dues, en partie, au contact entre le flotteur et le fluide et, en partie, à l’usure des pièces mobiles ; de fréquentes variations de niveau entraînent à coup sûr des réparations et, dans le cas contraire, la constance du niveau pendant de longues périodes risque de bloquer le mécanisme du flotteur. Par ailleurs, les impuretés transportées par le fluide sous forme de particules risquent de se coller au flotteur et de perturber son fonctionnement, si bien que la fiabilité d’un niveaumètre travaillant dans ces conditions dépend plus ou moins de l’état du fluide.
Niveaumètres sans contact avec le fluide
L’utilisation d’un niveaumètre qui n’est pas en contact avec le fluide permet d’éviter tous les désavantages précités. Étudions par exemple la technique de mesure par ultrasons (rappelons que le domaine des ultrasons se situe en dehors des fréquences entendues par l’oreille humaine, c’est-à-dire à plus de 20 000 Hz). En peu de mots, l’opération consiste à mesurer le temps que met un signal ultrasonique pour atteindre la surface du fluide et retourner à l’émetteur (qui, entre-temps, s’est transformé en récepteur).
[Figure : Principe de fonctionnement du transducteur]
Le temps t (durée de propagation du son du transducteur jusqu’à la surface du fluide et retour) suit la formule :
t = 2 L / c, d’où : L = ½ × t × c.
« c » représente ici la vitesse du son dans l’espace compris entre transducteur et surface du fluide.
Si cet espace est rempli d’air atmosphérique, la valeur de c est de 343 m/s à 20 °C, avec un coefficient de température α de +0,2 %/°C, positif pour accroissement de température, négatif pour chute de température. Si l’on ne tient pas compte de cette variation de la vitesse du son en cas de variation de température, les erreurs de mesure peuvent prendre l’ampleur démontrée par l’exemple suivant pris sur un niveaumètre à ultrasons contrôlant le niveau en amont d’un déversoir en V d’un canal ouvert. Le niveau du fluide en amont du déversoir représente le débit dans le canal. Ce débit est calculé suivant la formule qv = k × h^2,5 dans laquelle qv est le débit traversier (en m^3/h), k est une constante en fonction de la géométrie du déversoir en V, h est la distance entre la pointe de l’ouverture en V et le niveau du fluide.
Pour un transducteur à ultrasons placé à un mètre au-dessus de la pointe du V et pour une variation du niveau en amont du déversoir de 0,2 m (ce qui correspond à une plage de mesure pour le débit de 0 à 100 %), une variation de la température de l’air entre transducteur et surface du fluide de 20 à 25 °C entraîne une réduction de la vitesse du son de 0,2 %/°C × 5 °C = 1 %.
Le niveaumètre fait alors une erreur de 1 % sur la distance mesurée entre transducteur — surface du fluide — transducteur, c’est-à-dire qu’il calcule une distance de :
2 × 1 × 1 / 100 = 0,02 m,
plus courte à 25 °C qu’à 20 °C. Cette erreur de mesure de 0,02 m correspond, pour une plage de mesure de 0 à 0,2 m, à une erreur de :
0,02 × 100 / 0,2 = 10 % de h dans la formule qv = k × h^2,5, qui devient alors :
qv_mesuré = k × h^2,5 × 1,27
En langage clair, cela signifie que pour la mesure en canal ouvert, une augmentation de 5 °C de la température de l’air compris entre transducteur et surface du fluide en amont du déversoir en V entraîne, si elle n’est pas compensée, une erreur de mesure de 27 % pour le débit traversier.
[Photo : Niveaumètre à ultrasons utilisé sur un chenal de mesure pour contrôler le débit du fluide en canal ouvert.]
Niveaumètre à ultrasons avec compensation pour variations de la vitesse du son
Un niveaumètre à ultrasons récemment mis au point comporte, outre un transducteur et un convertisseur de signaux, une compensation automatique des erreurs de mesure dues aux variations de la vitesse du son.
Le transducteur est doté d’un disque en céramique piézoélectrique faisant fonction d’émetteur de sons quand il est alimenté en tension alternative électrique, et de génératrice de tension alternative quand il est alimenté en signaux sonores. Pour permettre la compensation automatique pour variations de la vitesse du son, le transducteur est équipé d'une barre de référence située à une distance connue (L₀) du transducteur. Une fraction du signal ultrasonique émis par le transducteur est réfléchie par la surface du fluide, une autre par la barre de référence. Le transducteur reçoit ainsi deux signaux réfléchis.
Le temps t₀ de la propagation d’un signal sonore jusqu’à la barre de référence et retour est donné par t₀ = 2(L₀ / c) et le temps t₁ de la propagation d’un signal sonore jusqu’à la surface du fluide et retour par t₁ = 2(L₁ / c) où L₁ est la distance à mesurer.
La solution de ces deux équations donne L₁ = L₀ × (t₁ / t₀).
On a ainsi éliminé le facteur de la vitesse du son c et donc ses variations éventuelles. L₀ étant connu et t₀ et t₁ étant mesurables, il est possible de calculer L₁.
[Photo : Schéma du fonctionnement du niveaumètre à ultrasons.]
Le principe du fonctionnement est illustré par la figure 3 qui montre le transducteur et les blocs fonctionnels du convertisseur de signaux : l’émetteur C émet un signal court de tension alternative par le commutateur électronique A vers le transducteur qui convertit la tension alternative en signal ultrasonique ; l’émetteur C enclenche simultanément avec l’émission du signal deux compteurs horaires dans le récepteur B. Après un temps t₀, le signal de retour revient de la barre de référence, par A vers B, où il arrête l'un des compteurs horaires. Quand le signal réfléchi par la surface du fluide arrive, après un temps t₁, il arrête l’autre compteur horaire, puis le circuit électronique calcule la distance L₂ comme suit : L₂ = L₀ × (t₁ / t₀).
Pour obtenir l'indication du niveau du fluide par rapport au fond d’un réservoir, l'unité de sommation E est alimentée par une tension en provenance du potentiomètre ADJ 1, et le niveau du fluide est exprimé par le signal : H = L₃ – L₂.
Dans l’amplificateur F, le réglage de la plage de mesure doit permettre au générateur G de fournir un signal de sortie de 0 ou de 4 à 20 mA, ce qui correspond à la plage de 0 à 100 %.
Exemples d’application des niveaumètres à ultrasons
[Photo : Principe de la mesure de débit avec le niveaumètre à ultrasons pour canalisations ouvertes.]
Pour mesurer le débit d'un fluide en canaux ouverts, on utilise un déversoir ou un chenal de mesure assurant un niveau du fluide dont la hauteur est fonction du débit.
Ce niveau est contrôlé avec un niveaumètre à ultrasons dont le convertisseur de signaux a été réglé pour calculer le débit en fonction de la géométrie du déversoir ou du chenal de mesure. Nous avons réalisé un système de commande pour assurer l'enclenchement et le déclenchement contrôlés des pompes par rapport au niveau ainsi mesuré.
[Photo : Principe de la régulation des pompes.]
L'application du transducteur à ultrasons monté avec un convertisseur de signaux qui assure, en mesurant les niveaux, l’enclenchement et le déclenchement des pompes ; le transducteur existe en plusieurs versions en fonction de ses applications, y compris pour fonctionnement en milieu déflagrant (figure 6).
[Photo : Diverses versions du transducteur à ultrasons.]
Libéré de tout contact avec le fluide, le débitmètre à ultrasons, qui élimine la plupart des problèmes rencontrés avec les niveaumètres classiques, constitue un progrès appréciable dans son domaine.