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La mesure de l'oxygène dissous par une sonde à électrodes découvertes

30 novembre 1984 Paru dans le N°87 à la page 49 ( mots)
Rédigé par : Hans ZÜLLIG

La protection efficace des eaux implique la mesure de l'oxygène dissous, aussi bien dans les cours d'eau et les lacs que dans les bassins de boue activée des stations d’épuration ; cela nécessite des appareils de mesure fiables et précis, d’entretien minimal.

Principes de la mesure

Un couple galvanique composé d’une électrode noble et d'une électrode de métal commun crée une différence de potentiel. Pour la mesure de l’oxygène dissous, l'électrode noble est en or ou en amalgame d'argent, la seconde électrode en zinc, en fer ou en plomb.

Le couple d’électrodes, trempé dans une solution aqueuse, telle que l'eau naturelle, plus ou moins minéralisée, engendre un potentiel dd, dans le cas présent, à la réaction anodique (métal commun) :

2 Me —> 2 Me²⁺ + 4 e⁻ (électrons)

Les électrons, transmis par le circuit, sont disponibles à la cathode (métal noble) pour réduire l’oxygène selon la formule :

4 e⁻ + O₂ + 2 H₂O —> 4 OH⁻

En l’absence d’oxygène, le système est polarisé et aucun courant ne circule ; en présence d’oxygène, et au-dessus d’un seuil de potentiel déterminé, le système fournit un courant dont l'intensité est proportionnelle à la concentration d’oxygène dissous.

La réaction consomme de l’oxygène. C’est pourquoi l’eau, au voisinage des électrodes, doit être constamment renouvelée.

Dans la plupart des cas, les électrodes baignent dans un électrolyte concentré, recouvert d'une membrane perméable à l’oxygène, mais imperméable aux autres solutés. La membrane atténue certains effets perturbateurs, mais augmente la fragilité du capteur et crée, en pratique, des problèmes d’entretien.

Or, il s'est avéré que la mesure de l'oxygène dans les eaux superficielles et souterraines, ainsi que dans les boues activées des stations d’épuration biologiques (eaux résiduaires urbaines et industrielles) peut très bien s‘opérer par des capteurs à électrodes découvertes, à condition qu’ils soient munis d’un dispositif de nettoyage continu. Le système offre alors des avantages incontestables et décisifs, puisqu’il réduit l’entretien quasiment à zéro et permet de réaliser une construction extrêmement robuste, sans que la précision et la reproductibilité de la mesure en pâtissent.

Les capteurs d’oxygène à électrodes découvertes se prêtent particulièrement aux mesures continues et de longue durée. Ils constituent aussi le maillon essentiel des circuits de régulation de l’aération dans les bassins de boue activée des stations d’épuration.

La sonde Züllig à électrodes découvertes

Notre sonde (figure 1) se compose, en principe, d'un tube de matière synthétique, portant à son extrémité inférieure deux anneaux métalliques plans, formant le couple d’électrodes dont la surface est constamment nettoyée par une pierre abrasive (figure 2) mise en rotation, serrée par un ressort et entraînée par un moteur à courant alternatif situé dans la tête de la sonde. L’eau dans laquelle s’effectue la mesure est maintenue en circulation constante autour des électrodes par le mouvement alternatif du récipient qui les entoure (figure 3), et qui renouvelle plus de 98 % de son contenu en l’espace d’une minute.

Le courant de mesure est transmis dans la tête de la sonde par deux fils isolés. L’effet de la température est compensé par une thermistance.

La cathode est formée d'un amalgame d'argent ; l'anode est en zinc ou en fer. Les pierres abrasives sont en carborundum lié à la céramique ; dans certains cas on utilise des pierres diamantées.

La longueur de la sonde peut être choisie selon les besoins dans une gamme variant de 80 cm (courte) à 180 cm (longue) et même 320 cm (en deux pièces). Certaines exécutions sont, en outre, prévues pour des applications spéciales, telle que la mesure de l’oxygène en plongée, jusqu’à 30 m de profondeur. Dans les eaux

[Photo : Figure 1]
[Photo : Figure 2]

particulièrement chargées en matières en suspension, on dispose d'un gobelet muni d’un racleur ou d’une brosse, avec un orifice d’éjection spécial. Dans les pays très ensoleillés, la sonde peut être protégée par un parasol réfléchissant. Pour la mesure en milieu corrosif, par exemple dans l'eau de mer, les pièces les plus exposées sont fabriquées en PTFE.

Ainsi, il est possible, dans chaque cas concret qui se présente, de prévoir un appareillage « sur mesures ».

Conditions d'exécution des mesures

La mesure de l’oxygène dissous est ainsi possible entre des pH variant de 6,7 à 9,0 et à des conductivités spécifiques supérieures à 300 µS/cm.

Les variations dans la composition des solutés de l’eau, dans les limites rencontrées dans les eaux de consommation ou les eaux usées urbaines, n'affectent guère la mesure de l’oxygène (tableau 1). En cas de composition spéciale (par exemple dans l’eau de mer ou les eaux résiduaires industrielles) il est toujours possible de réaliser une précision suffisante, pour autant que les composants soient plus ou moins constants et que l’étalonnage ait lieu dans une eau de nature semblable. Il en va de même avec des pH se situant au-dessus de 9,0.

L'effet de la température est compensé entre des limites de +5 et +30 °C.

Les domaines d’application

La sonde peut efficacement être utilisée dans les cas ci-après :

a) Mesure et régulation de la concentration d’oxygène dans les bassins de boue activée des stations d'épuration La sonde à oxygène trouve ici son application principale : la concentration d’oxygène dans les boues activées doit être maintenue au-dessus de 0,5 mg/l et, pour des raisons d’économie d’énergie, elle ne devrait pas dépasser 2 mg/l environ ; or, les besoins en oxygène, fonction de la pollution organique biodégradable, peuvent varier du simple au multiple entre le jour et la nuit, ou entre des périodes d’activité intensive de l’industrie, du tourisme, etc., et des périodes creuses. De ce fait, en asservissant l’intensité d’aération à la

[Photo : Figure 3]

Tableau 1 : Influence des solutés sur la mesure de l'oxygène dissous

(sonde à électrodes découvertes, sonde Züllig)

Soluté (en mg/l) Électrodes Az-1 (1) Électrodes At-1 (2)
Potassium > 1000 > 1000
Sodium > 1000 > 1000
Magnésium > 1000 > 1000
Calcium > 1000 > 1000
Aluminium < 20 < 20
Plomb < 3,0
Cadmium < 3,0 < 3,0
Zinc < 3,0
Chrome total < 0,1 < 0,1
Fer (dissous) < 0,2 < 0,2
Fer (total) < 1,0 < 3,0
Manganèse < 0,1 < 0,1
Cuivre < 1,0 < 3,0
Nickel < 0,1 > 20
Cobalt < 0,1 < 3,0
Cyanure < 50 < 50
Nitrite < 3 > 90
Nitrate > 1500 > 1300
Sulfate > 1500 > 1300
Sulfure < 2,0 < 0,1
Phosphate > 100 > 100
Chlorate > 2000 > 2000
Chlore actif < 10
Hydrocarbures < 200 < 300

concentration d’oxygène, on peut économiser de 20 à plus de 50 % d’énergie électrique.

Des circuits de régulation sont adaptables à tous les systèmes d’aération (aérateurs rotatifs ou à air surpressé) ; ils comprennent l'affichage analogique ou numérique des concentrations d’oxygène et une commande manuelle à volonté.

L'entretien (à la portée de tout responsable de station) se limite au remplacement de la pierre abrasive, après plusieurs mois de fonctionnement, et à celui des électrodes après plusieurs années de services (ces travaux se font en un tournemain). L’étalonnage est également très simple : la sonde est plongée dans l’eau claire saturée d’oxygène et réglée d’après une table ou un abaque en fonction de la température et de la pression atmosphérique.

La sonde et le système de régulation sont particulièrement adaptés aux stations d’épuration traitant des eaux résiduaires industrielles biodégradables, telles que les eaux usées de l’industrie agricole et alimentaire, du textile, du bois, de la cellulose, du papier, du cuir, des produits chimiques, du pétrole, etc., c’est-à-dire dans tous les milieux favorables aux boues activées. Le matériel peut éventuellement être adapté aux conditions particulières du milieu.

b) Contrôle des eaux de surface : cours d'eau, lacs, étangs, mer

L’oxygène constitue l'un des éléments indispensables à la vie aquatique : les poissons, et surtout le frai et les alevins, sont particulièrement sensibles aux variations de sa teneur dans l’eau. Les salmonidés, par exemple (truite, féra, perche, saumon, ombre, etc.) ne sont pas viables au-dessous de 6 mg O₂/l, et même les carpes en exigent au moins 3 à 4 mg/l. Le manque d’oxygène n’affecte pas seulement les poissons, mais aussi les plantes aquatiques, les larves d’insectes, bref, la multitude des éléments vivants qui assurent l’équilibre écologique.

Les contrôles limnologiques ne sont donc pas un luxe, mais une nécessité. Notre sonde a fait également ses preuves dans ce domaine : elle est utilisée pour les stations de contrôle fluviales, lacustres et côtières (fixes ou mobiles), où sa fiabilité et son entretien sommaire sont particulièrement appréciés. Ces stations sont généralement équipées, en même temps, pour la mesure et l’enregistrement de la température, du pH, de la conductivité électrique, du niveau et du débit des cours d'eau. Elles permettent notamment de suivre sur une longue période la composition d’une eau et, d’autre part, de déceler instantanément les pollutions accidentelles.

c) Contrôle des eaux de consommation

L’eau circulant dans les réseaux d’alimentation en eau potable doit contenir de l’oxygène en dissolution (à 80 % au moins). Dans le cas contraire, il existe un danger de corrosion, soit que les couches protectrices de tartres se dissolvent, soit qu’elles ne se forment pas dans les conduites neuves. On a donc intérêt à contrôler la teneur de l’eau en oxygène dans les puits, ou à la fin du traitement, avant introduction dans le réseau.

Notre sonde est également utilisée dans ce domaine. Les mesures sont généralement transmises directement à la centrale de commande du réseau, ce qui permet d’intervenir rapidement en cas d’anomalie. Ici aussi, la simplicité de l’entretien constitue un grand avantage. Il faut noter que la présence de chlore, aux concentrations appliquées dans les réseaux, ne gêne pas la mesure de l’oxygène.

Conclusion

La sonde à oxygène à électrodes découvertes constitue un outil précis, robuste et fiable, capable de fonctionner pendant de longues périodes sans surveillance ni entretien.

Elle aide à guider la marche des stations d’épuration tout en permettant de réaliser des économies substantielles d’énergie.

Elle permet de surveiller la qualité des eaux superficielles et de sauvegarder l’équilibre écologique.

Elle contribue, enfin, à assurer une qualité élevée des eaux de boisson.

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