L’eau est un milieu vivant dont l'équilibre doit, impérativement, être assuré et maintenu tant sur le plan de la qualité que sur celui de la disponibilité des ressources.
Dans le domaine agricole en particulier, la diversification des cultures nécessite des quantités d’eau de plus en plus importantes afin d’assurer des rendements de plus en plus élevés.
La gestion et l'optimisation d’un réseau hydrographique, en vue d’obtenir d’importants volumes d’eau à certaines périodes clés de l’année, nécessite une technologie très élaborée, tant au niveau de l'acheminement du précieux liquide qu’au niveau des contrôles et de la régulation des débits.
La Compagnie Nationale d'Aménagement du Bas-Rhône et du Languedoc (BRL) : l’ingénierie de l'eau
Cette Société d’économie mixte assure, directement ou par le biais de certaines de ses filiales, l’étude, la réalisation et l’exploitation d'un ensemble d’ouvrages hydrauliques destinés à satisfaire les besoins de l'irrigation et des usines d'eau potable de la région Languedoc-Roussillon. Celle-ci s’étend sur une superficie de 250 000 ha, comprenant 230 communes (la superficie irriguée atteint 140 000 ha).
Forte de son expérience mondiale (11 barrages, 5000 km de canaux et de réseaux, 8 stations de traitement, 30 réservoirs...), la société BRL a pris en charge, conjointement avec l'IIAHMN, la maîtrise d’ouvrage de la réalisation HERS-Lauragais qui fait l'objet de ce qui suit.
Le projet Hers-Lauragais, une réalisation inter-régionale
La région du Lauragais, située sur les départements de l’Aude, de la Haute-Garonne, du Tarn et de l’Ariège, est implantée sur des bassins versants distincts : les bassins atlantique et méditerranéen.
Les apports pluviométriques sont beaucoup plus importants au niveau du bassin versant atlantique. Afin d’assurer une répartition géographique et temporelle homogène des apports pluviométriques, une série d’ouvrages a été réalisée afin de disposer de cette eau pour les bassins de l'irrigation.
Pour cela, il était nécessaire de mettre en place une organisation administrative originale. Les ouvrages réalisés concernent en effet, directement ou indirectement, plusieurs collectivités territoriales, les départements de l’Aude, de la Haute-Garonne, du Tarn et de l’Ariège et des ententes interdépartementales :
- — l’IAHMN (Institut inter-départemental pour l’Aménagement Hydraulique de la Montagne Noire) ;
- — l’IIABM (Institut inter-départemental pour l’Aménagement du Barrage de Montbel) ;
— une administration d’État : le Service de la Navigation ;
— une compagnie d’aménagement : BRL.
La mise en service du projet, sa réalisation actuelle puis la gestion des ressources et des volumes transférés ont aussi associé de nombreux partenaires, ce qui en fait une réalisation unique en matière de grande hydraulique.
Caractéristiques générales de l’installation
Deux barrages sont impliqués dans cette réalisation :
— le barrage de Montbel, destiné à collecter les eaux du bassin versant atlantique ;
— la retenue de la Ganguise, située à la limite des bassins versant atlantique et méditerranéen, et qui domine le sillon du Lauragais.
L’adducteur Hers-Lauragais assure l’interconnexion entre ces deux ouvrages afin d’effectuer une répartition optimale des ressources en eau, selon une méthode de régulation dite « par l’aval ».
En première phase d’aménagement les volumes transférés seront de 27 Mm³. Ils seront portés ultérieurement à 55 Mm³.
En hiver, une pluviométrie plus importante sur le bassin versant atlantique permet d’assurer le remplissage de la retenue de la Ganguise par transfert depuis le barrage de Montbel. Le débit moyen transféré pendant cette période est de 1,1 m³/s. Ce remplissage permet d’anticiper sur les besoins d’été des périmètres d’irrigation.
En été, la distribution d’eau d’irrigation s’effectue au moyen des différentes branches de l’adducteur Hers-Lauragais, au débit moyen de 1,6 m³/s, ce qui permet la desserte directe de plusieurs secteurs irrigués.
Des débitmètres ultrasoniques pour le contrôle et la régulation des transferts
Une connaissance précise des flux de liquides transférés dans les différents points du réseau est donc indispensable afin d’effectuer une répartition des ressources et de permettre la gestion hydraulique du système d’adduction. À cet effet, les informations de débit, niveau et de positionnement des vannes sont télétransmises à deux postes centraux interconnectés (IAHMN et BRL) assurant, ainsi, la supervision de neuf ouvrages.
L’IAHMN et BRL ont choisi nos débitmètres ultrasoniques Krohne pour effectuer toutes les mesures de débit sur l’adduction et la comptabilisation des volumes. Huit capteurs de mesure à ultrasons de diamètre 350 à 1 200 mm ont ainsi été mis en place sur l’installation.
Principe de la mesure
Les appareils choisis sont des débitmètres ultrasoniques du modèle à « manchette » à un ou deux canaux de mesure de type Altosonic UFM 400 ou 500. Les éléments de base de la mesure sont des céramiques piézo-électriques
pouvant fonctionner à la fois en émetteur et en récepteur. En fonction émission, la céramique, excitée par une force électromotrice (sous tension de 5 V), génère une onde ultrasonique de fréquence 1 MHz qui se propage à l'intérieur du liquide à mesurer. En fonction réception, la céramique, excitée par une onde ultrasonique, génère une force électromotrice. L’émetteur et le récepteur sont montés en opposition sur la manchette dans deux porte-sondes de mesure et constituent un canal de mesure. Celui-ci forme un angle de 45° avec l’axe de la conduite. Lorsque le liquide s’écoule dans la conduite, le temps de propagation des ondes ultrasoniques (temps de transit) dans le sens du courant TAB est plus court que le temps de transit à contre-courant TBA. La différence des temps de transit TAB-TBA est donc directement proportionnelle à la vitesse du liquide et donc au débit volumique existant à l'intérieur de la conduite.
Dans le cas de systèmes de mesure à un seul canal (série 400) les capteurs de mesure sont implantés de façon diamétralement opposée sur la manchette de mesure. Dans ce cas la mesure n’est possible que lors d’un régime d’écoulement turbulent (Reynolds supérieur à 3000).
Dans le cas de systèmes à deux canaux (série 500), ceux-ci sont parallèles et sont montés à une distance de 0,25 DN de l’axe de la conduite. La mesure reste possible, que le régime d’écoulement soit laminaire ou turbulent. Les deux canaux de mesure fonctionnent simultanément permettant d’obtenir une très bonne stabilité de la mesure.
Incertitude de la mesure (figure 4)
La construction « manchette » garantit à l'utilisateur une incertitude de mesure inférieure à +/- 1 % de la valeur mesurée sur les systèmes à un canal de mesure (série 400) et +/- 0,5 % sur les systèmes à deux canaux de mesure (série 500).
Cette excellente précision de la mesure est assurée par une méthodologie de construction très rigoureuse et par une calibration systématique de l’ensemble de mesure sur banc d’étalonnage (précision +/- 0,13 %) lors de la phase finale de contrôle de l'appareil. De plus, les capteurs Altosonic conservent leur précision optimale pour des vitesses de liquides très variables (0,5 à 18 m/s). La section de mesure est totalement lisse et aucun élément de mesure n’est en contact avec le liquide, ce qui supprime tout risque de dépôts ou d’abrasion au niveau du capteur de mesure. De plus, le capteur ne provoque aucune perte de charge singulière sur la canalisation, ce qui est particulièrement intéressant dans le cas d’écoulement gravitaire.
Maintenance
Les opérations de maintenance sur les ensembles de mesure sont réduites au minimum, du fait du mode de construction du capteur, lequel est constitué d'une simple manchette.
En cas de défaillance, les sondes piézorésistives sont extractibles et échangeables en charge (annexe 2).
Selon les précisions requises, CBL a choisi d’implanter des débitmètres ultrasoniques à simple tir (type UFM 400 — incertitude de mesure : +/- 1,0 %) ou double tir (type UFM 500 — incertitude de mesure : +/- 0,5 %).
Contraintes d'installation
Les contraintes d’installation des capteurs de mesure sont réduites et parfaitement compatibles avec les réalités du terrain :
Longueurs droites : 10 DN (capteur amont) 5 DN (capteur aval) pour l’UFM 500 ; 15 DN (amont) 5 DN (aval) pour l’UFM 400.
Charge en particules solides ou en bulles de gaz : maximum 1 % du volume.
Utilisation
Les débitmètres Altosonic doivent assurer différentes fonctions sur le réseau :
- — régulation de débit au niveau de l’adducteur, afin d’optimiser la courbe de remplissage et de vidange des deux retenues, opération contrôlée par le système centralisé en fonction des caractéristiques climatiques et des besoins des différents périmètres irrigués ; ces régulations sont mises en œuvre au moyen de vannes de régulation pneumatiques à boisseau sphérique avec système anti-cavitation ;
- — régulation de débit sur les ouvrages de restitution situés à l’aval de l’adducteur ;
- — limitation de débit au niveau de branches de l’adducteur. Les différents utilisateurs de l'eau d'irrigation disposent d’une dotation annuelle et d’un débit instantané maximum défini en fonction de la capacité totale du réseau. Les débitmètres ultrasoniques permettent donc de contrôler et de limiter, éventuellement, les débits afin que chaque branche de l’adducteur puisse disposer du volume et du débit instantané qui lui sont impartis ;
- — comptage des volumes d’eau transférés : les volumes d’eau transférés entre les deux retenues doivent être connus avec précision afin d’effectuer un bilan précis du fonctionnement du réseau. De plus, les volumes distribués au niveau des différentes branches de l'adducteur doivent être également évalués avec précision afin d’effectuer la facturation de l'eau consommée aux différents utilisateurs.
Les débitmètres ultrasoniques UFM 400 et 500 constituent un élément important du bon fonctionnement de l'adduction Hers-Lauragais. Par leur précision et leur fiabilité, ils contribuent à l'efficacité de cette réalisation.
L’auteur adresse ses remerciements pour leur collaboration à la Société BRL et à MM. René Poisson et J.-F. Blanchet.

