Your browser does not support JavaScript!

La maintenance dans les installations de traitement d'eau

30 novembre 1989 Paru dans le N°132 à la page 41 ( mots)
Rédigé par : Gérard HUSSENET

Que l'origine de l’utilisation du terme « maintenance » soit anglo-saxonne ou non, cela préoccupe peu les spécialistes français du traitement de l'eau, exportateurs reconnus d’un savoir-faire et d’un savoir-gérer assez originaux. Ils n’en sont pas moins impliqués en raison du besoin constant qu’ont les hommes et leurs industries de ce bien universel et précieux qu’est l’eau.

Pourquoi et comment intégrer cette notion fondamentale du « maintien d’un système en état de fonctionnement » dans ces métiers de l’eau ?

Par la complexité des procédés mis en œuvre et des matériels utilisés, les installations de traitement d’eau s’apparentent aujourd'hui à des outils de production industrielle dont les incidents de fonctionnement, les dérives de performances (voire les arrêts) se déclinent en termes techniques, économiques, réglementaires et humains. Ils se traduisent par des pertes ou des arrêts de production d’eau (eau potable, eau de procédés industriels), ou par une dégradation de la qualité de l'eau traitée. S'il s’agit d'eau potable, cette dégradation pourra entraîner des incidences sur le réseau de distribution, et même sur la santé des usagers. S'il s’agit d'eau industrielle, les conséquences se feront sentir sur l'outil de production (chaudières, circuits de refroidissement) et sur les produits fabriqués. S'il s’agit d’eaux résiduaires, urbaines ou industrielles, c'est le milieu récepteur qui sera affecté.

Qu'il s’agisse de la remise en cause d'un service public, d’une pénalisation directe ou indirecte de la production industrielle ou d'une contrainte supplémentaire à l’environnement, des risques certains mettent en cause la fiabilité des installations de production et de traitement d'eau ; aussi, les réflexions techniques d’approche et les procédures de maintenance industrielle s’appliquent-elles à ce domaine d’activité vital qu’est l'eau, aussi bien dans les cités que dans la quasi-totalité des industries.

[Photo : Station des Mureaux (Yvelines) : télésurveillance]

À l'instar de certaines industries de pointe et de services sophistiqués, tels que l’informatique, l’avionique, la production et la distribution d’énergie électrique, etc., la maintenance appliquée au traitement de l'eau conjugue les efforts du concepteur, du constructeur, de l'utilisateur gestionnaire, ne serait-ce qu’en raison du fonctionnement systématique en « flux tendu » (sans avoir recours aux stocks de matières premières).

Les schémas de traitement intègrent des temps de procédés s’étalant de quelques minutes à quelques heures au plus ; or, les industriels ne possèdent que peu ou pas de stocks d'eau traitée (exception faite d’EDF pour ses centrales nucléaires)... Quant aux grandes villes, leurs châteaux d’eau ne leur procurent que des réserves comprises entre quelques heures et un jour.

Par comparaison avec maints pays étrangers, il est cependant aisé de mesurer les résultats atteints dans la fiabilité de la distribution d’eau potable en France, conséquence d’une politique de maintenance sans cesse améliorée.

Le rôle déterminant du concepteur constructeur des installations

Plus les procédés de traitement sont « intensifs », plus les équipements sont élaborés, plus le concepteur/constructeur doit intégrer les contraintes de l'utilisateur, ne serait-ce que pour garantir la pérennité des performances et la qualité de sa référence...

Obligations de fiabilité technique, respect des garanties techniques et économiques, font évoluer un contrat de « construction » vers un partenariat plus étendu, prolongé dans le temps, au-delà de sa réception définitive.

Le concepteur/constructeur propose de plus en plus un contrat de « fourniture d'eau quantité-qualité » au lieu et place d'une simple installation, via un contrat « fini » : c'est le produit global.

Anticiper la maintenance dès la conception de l'installation

Le projet d’installation « clés en main » est viable sous l'aspect « maintenance » dès lors qu'il intègre des réponses satisfaisantes dans les domaines suivants :

  • — définition des limites de garantie,
  • — contraintes d’exploitation liées à l’association de procédés (exemple : filière eau, filière boues),
  • — boucles de régulation, automatismes, sécurités,
  • — matériel de secours installé, stock de pièces de rechange, notice d'exploitation, d'entretien,
  • — qualité des matériels et matériaux employés,
  • — bilan d'exploitation pluriannuel, contrat d’exploitation éventuel, engagement après-vente (visite d’assistance technique, produits et services de conditionnement),
  • — conception générale, accès, matériel de levage, d’entretien, de réparation et de sécurité.

Ces exigences sont généralement atteintes lorsque le concepteur dispose d'une bonne expérience et d'un parc de références suffisamment important ou (et) lorsqu'il assure lui-même ou par ses filiales une activité d'exploitant. Le retour d’informations du terrain irrigue alors les bureaux d'études de données pratiques facilement prises en compte via les méthodes modernes de standardisation

et de conception (comme le CAO, généralisée dans notre cas).

Quels outils mettre à la disposition du futur exploitant ?

Outre la conception générale du projet, qui permet au futur utilisateur de prendre en considération la maintenance dans son étude comme dans son appréciation des offres, se développent depuis quelques années, y compris pour des installations de taille moyenne, des outils facilitant le contrôle, l'analyse, la décision, tant au niveau performances que maintenance. Parmi ceux-ci, on peut citer : la GTC, ou « Gestion technique centralisée », la télésurveillance et ses dérivés actifs (logiciels : Aquaveil-Superveil), la MAO ou « maintenance assistée par ordinateur ».

Dans leur principe, ils ne diffèrent pas des outils confiés aux exploitants de grands systèmes industriels ou de services : si les matériels sont communs, l'originalité des procédés et les multiples facteurs de variation font que les hommes des métiers de l'eau développent des programmes généralement plus complets, plus spécifiques et plus rapidement opérationnels :

— les « GTC » équipent systématiquement les grosses installations françaises et étrangères,

— les télésurveillances, avec ou sans acquisition, analyse de données et télécommandes, se développent sur tout type d'installation et rationalisent les interventions des exploitants ; associées à des systèmes experts, elles constituent dès à présent une aide à l'exploitation incomparable (exemple : le PressDeg),

— la « MAO » enfin, mise en œuvre dans la foulée de la construction, à partir d’éléments informatifs issus du bureau d'études concepteur, apporte une aide originale dans la maîtrise de la maintenance préventive et curative.

La MAO permet une relation complète et sans cesse réactualisée entre l'exploitant et son installation ; elle lui permet, en temps réel, de nombreuses interprétations :

— prévoir, et donc limiter l'incidence des arrêts techniques,

— analyser la criticité de certains équipements ou partie de procédés,

— programmer les interventions préventives,

— compléter l'installation,

— optimiser les équipes de maintenance préventive et curative sur les plans qualitatif et quantitatif (horaires, composition d'équipes, sous-traitance, contrats d'après-vente, etc.),

— gérer les stocks de pièces de rechange et de matériels standards, etc.

La MAO n'est nullement réservée aux installations importantes où, d’ailleurs, elle est systématiquement développée par nos soins lorsque notre partenaire nous associe à l'exploitation.

C'est ainsi que des logiciels adaptés aux installations les plus modestes évitent de recourir aux logiciels lourds adaptés aux grands ateliers industriels (aéronautique, mécanique, construction d'automobiles, etc.).

[Photo : Nice, Station de traitement des eaux usées : contrôle centralisé.]

Le diagnostic-préconisation

De nombreux ateliers de production industrielle bénéficient aujourd’hui dès leur construction d’une conception prenant en compte la maintenance, et de compléments de suivi tels que GTC, télésurveillance et MAO. Cette situation s'ajoutant à des procédés de production bien maîtrisés, car généralement physiques, chimiques, thermiques, mettant en œuvre des matières premières très contrôlées, permet la fabrication en continu de produits d'une très grande constance de caractéristiques : l’usine totalement robotisée est pour demain. La maintenance programmée supprimera tout arrêt de production...

Les hommes de l'eau ne sont pas aussi affirmatifs dans leur domaine car, à ce jour, certains procédés, en particulier biologiques, mettent en œuvre des organismes banals, et non encore des souches pures et sélectionnées ; d’autre part, la qualité de l'effluent brut (eau de rivière, eaux résiduaires urbaines et industrielles) est éminemment variable et le restera. La quantité d'eau à traiter subit également des variations, alors que les volumes et débits mis en œuvre rendent les procédés sensibles à des facteurs externes (température, pression...).

Il en découle que, outre l’application de procédés éprouvés, de matériels convenablement sélectionnés, de dispositifs de contrôle et d’aide à la décision en continu, les installations de traitement d'eau ne peuvent se contenter d'un bon état technique général pour assurer en permanence les performances garanties par le concepteur/constructeur. Sortant du domaine de la stricte maintenance technique, l'exploitant peut donc chercher à obtenir, à intervalles réguliers, une expertise diagnostic/préconisation lui apportant un éclairage supplémentaire :

— analyse fine du procédé : réglages — compléments — modifications,

— état de l'installation : réhabilitation,

— contrôle de performances,

— consommation énergie/réactifs,

— veille technologique : procédé et équipements,

— bilan économique,

— formation du personnel/réglementation,

— intégration dans l'environnement (odeurs, bruits, rejets, esthétique industrielle...).

Conclusion

Nous avons établi avec un certain nombre de partenaires, en particulier industriels, un tel type de relations qui tend à se développer, apportant à l'utilisateur, qui ne connaît souvent que son installation, le bénéfice de la large expérience des experts.

Les chaînes de traitement d'eau sont de plus en plus sophistiquées ; elles font appel à des techniques très pointues, telles que l’ozone, le charbon actif, la méthanisation des effluents concentrés et des boues, les cultures fixées (Biofor), les décanteurs accélérés (DensaDeg), des traitements spécifiques sur résines (UFD-dénitratation), des membranes, etc.

Concepteurs et utilisateurs de cette nouvelle génération ont un intérêt commun : celui de la pérennité des performances acquises grâce à la maîtrise immédiate des incidents de fonctionnement et par une maintenance technique élaborée permettant d’atteindre l’optimisation de l’installation (a fortiori si celle-ci a été conçue et réalisée dans cette optique). Un partenariat continu, vécu comme une collaboration du type diagnostic/préconisation, assure la veille technologique complémentaire indispensable.

Dans cette logique industrielle, la recherche de l'optimisation technico-économique des installations de traitement d'eau peut conduire à en confier l'entière responsabilité au concepteur/constructeur sous forme de sous-traitance d’exploitation, voire en concession incluant financement et maintenance.

Cet article est réservé aux abonnés, pour lire l'article en entier abonnez vous ou achetez le
Acheter cet article Voir les abonnements