Plutôt que de fournir un aperçu complet des techniques de conception des filtres, ce présent texte est destiné à éclairer les paramètres pratiques du fonctionnement du processus de filtration sur sable.
par Dr , Directeur à la C.I.B.E. (Direction des Laboratoires, Chaussée de Waterloo 764 B — 1180 BRUXELLES).
Des raisons pratiques d’édition nous ont engagé à traiter ici seulement du matériau de filtration, le sable, en réservant pour une deuxième partie les principes d’action et modalités d’application de cette technique.
1ère PARTIE LE SABLE, MATÉRIAU DE FILTRATION.
1. LA FILTRATION
1.1. La filtration constitue une technique chimique de séparation et de fractionnement des matières — plus particulièrement, la phase liquide de la phase solide. Elle est un des processus importants dans l’ensemble du traitement des eaux. On peut y distinguer grosso modo deux variantes en fonction du résultat recherché :
- — Dans la première variante, on tente de récupérer la phase liquide, donc le filtrat ;
- — L’autre variante peut jouer un rôle important dans des processus annexes ; elle est axée sur la récupération de la phase solide, comme les boues des stations de traitement. Dans le cadre présent, il s’agit essentiellement de bassins d’assèchement des boues au moyen de lits filtrants à base de sable. Cette technique est cependant moins utilisée dans nos climats et elle intervient moins directement dans le traitement des eaux.
D’une manière générale, nous ne traitons pas dans la présente contribution de la filtration en tant que technique de récupération de la phase solide. Nous nous limiterons à l’épuration de la phase liquide même.
1.2. La filtration sur sable en usine est en quelque sorte une imitation de l’opération naturelle de percolation des eaux des précipitations à travers les sols sablonneux par laquelle se reconstituent notamment les nappes d’eau souterraines. On enregistre pour des sables bien classés d’un diamètre moyen de grain assez fin, par exemple de l’ordre de 0,2 mm, une vitesse moyenne de percolation ou « perméabilité » de 1 à 2 · 10⁻⁴ m/sec.
On considère généralement que la fonction principale du sable dans la filtration est celle du tamis. Nous verrons cependant plus loin que cet effet n’est que partiel et n’est pas le principe fondamental de la filtration.
1.3. Dans le domaine du traitement de l’eau, on peut distinguer au moins trois principes fondamentaux de filtration sur sable, dont deux d’entre eux présentent encore de nombreuses variantes secondaires. Tout d’abord, on isole les tubages des puits drainants par un matériau poreux approprié composé de gravier et de sable.
Cependant, dans la plupart des applications, les techniques de filtration proprement dites font appel à des installations ou filtres constitués en surface. On y distingue les filtres lents et les filtres rapides. Les premiers sont apparentés à des techniques de recharge artificielle des nappes par infiltration sur lit de sable tandis que les seconds se présentent essentiellement sous deux formes distinctes selon qu’il s’agit de filtres à écoulement gravitaire ou filtres sous pression. Les filtres lents sont caractérisés par une charge superficielle ou encore une vitesse moyenne d’écoulement de l’ordre de 10 à 30 cm par heure. Les filtres rapides, par contre, se caractérisent par une vitesse moyenne d’écoulement de 2,5 à 10 m par heure.
Les filtres ultra-rapides sous pression atteignent parfois des vitesses de 15 à 20 m par heure. Les vitesses citées ci-dessus sont des vitesses moyennes calculées par rapport à la surface totale des bassins en opération. Elles se distinguent donc des vitesses réelles de l’eau au travers des interstices du milieu filtrant ou encore de la vitesse de percolation. Nous reviendrons plus loin sur ce point.
2. SABLE — GRAVIER D'ISOLEMENT DES PUITS CAPTANTS
Pour éviter l'entraînement de particules du sol telles que les sables fins ou la craie, selon les formations géologiques dans lesquelles le puits a été creusé, les parties drainantes sont souvent isolées des puits proprement dits. Cette opération est nécessaire pour permettre à la fois une protection des pompes d'exhaure et pour éviter l'entraînement de matériel fin dans les eaux transportées. Si cet effet n'était pas évité, le sous-sol au voisinage des puits pourrait éventuellement devenir caverneux et ainsi causer une instabilité dans le terrain. Pour l'isolement des puits, un double tubage est mis dans le sol et l’espace annulaire entre les deux tubes est isolé par un mélange sable/gravier.
Ce mélange doit comprendre au moins 50 % (en poids) de matière présentant une dimension quatre à cinq fois supérieure à la dimension de la matière de la formation géologique dans laquelle le puits est foré. Si le rapport est supérieur à 10, en d'autres termes, si le sable d'isolement est plus gros que la valeur-guide citée ci-dessus, il y a des risques sérieux d'entraînement de matières du sous-sol. Par contre, si le rapport est inférieur à 4, il y a de fortes chances que la capacité totale du puits ne pourra pas être utilisée à cause d'un colmatage trop grand de la matière d'isolement. À titre indicatif, vous voyez dans la fig. 1 l'illustration de la structure d'isolement, tandis que la fig. 2 représente une courbe de tamisage typique pour un sable du sous-sol bruxellien.
3. CARACTÉRISTIQUES ESSENTIELLES DES SABLES FILTRANTS — PRÉLIMINAIRES
3.1. Les performances hydrauliques imposées au sable des filtres lents sont nettement inférieures à celles des filtres rapides. Ainsi, dans le cas de filtres lents, peut-on se contenter de sable fin, puisque la vitesse moyenne de filtration requise est habituellement de l’ordre de 2 à 5 m par jour. Exceptionnellement, la fourchette se situe entre 0,6 et 12 m par jour.
3.2. Dans la filtration lente, une bonne partie de l'effet est obtenue par la formation d’une couche de filtration comprenant les matières extraites de l'eau. Au début de l'opération, ces matières comprennent notamment des micro-organismes capables de réaliser, outre la filtration, une dégradation biochimique des matières organiques. Cet effet dépend aussi de la surface totale des grains constituant le matériau filtrant.
En effet, la probabilité de contact entre les constituants indésirables de l'eau et la surface du milieu filtrant augmente proportionnellement à la grandeur de la surface totale des grains. Une hauteur de 0,6 m de sable à grains de 0,15 mm de diamètre présente la même surface qu'une hauteur de 1,4 m constituée de grains de 0,35 mm de diamètre. Il est donc évident qu’il n'y a pas d’intérêt, dans le cas de la filtration lente, à accroître inconsidérément la dimension des grains.
3.3. Dans le cas de la filtration rapide, des performances hydrauliques plus importantes que dans la filtration lente sont requises. La granulométrie du milieu revêt dès lors une importance de premier plan.
3.4. Le diamètre réel des sables employés dans la filtration lente se situe entre 0,15 et 0,35 mm. Il n’est pas nécessaire d'utiliser un sable gabarité. Il est néanmoins souhaitable que le coefficient d'uniformité (voir plus loin) soit inférieur à 3, si possible à 2. L’épaisseur minimale de couche requise dans la filtration lente est de 0,3 à 0,4 m, quoique l'épaisseur efficace ne soit que de l'ordre de 2 à 3 centimètres.
3.5. Les exigences réelles pour le sable dans la filtration lente sont donc de nature essentiellement chimique, en d’autres termes, la pureté et l'absence de matières indésirables, plutôt que relatives à la granulométrie. Par contre, les performances des filtres rapides exigent des sables de granulométrie bien précise.
4. CRITÈRES DE PURETÉ DES SABLES FILTRANTS
4.1. Les considérations qui précèdent indiquent qu'il n’est pas souhaitable d’utiliser un sable « tout-venant » étant donné qu'il contient une série d'impuretés indésirables. Or, outre le fait qu'il soit de granulométrie appropriée, le sable d'un filtre devra être exempt d’argile, de poussières et de débris de toute autre nature. La proportion de chaux, de calcaire et de magnésie devra être inférieure à 5 %, et la norme, valeur limite-guide de qualité, devra être de moins de 2 % pour les parties solubles à 20 °C en 24 heures dans l’acide chlorhydrique à 20 %.
Les sables neufs peuvent être sélectionnés en fonction des critères de pureté indiqués ci-avant.
4.2. Dans une station de traitement, la pureté du sable utilisé devra être examinée régulièrement. Outre les indications fournies par l’évolution des pertes de charge des lits filtrants, l’analyse et l’aspect de l'eau de lavage pendant l'opération de lavage des filtres devront être surveillés. Une attention particulière doit également être accordée à la formation de concrétions ou d’agglomérats. La présence d’agglomérats indique un lavage insuffisant et, partant, la possibilité de formation de zones de développement microbiologique indésirable dans le lit filtrant.
4.3. La détermination des agglomérats peut être effectuée de la manière suivante : prélever un échantillon représentatif (2 à 3 l au moins) à plusieurs endroits de la couche et à une profondeur de 15 cm mesurée au départ de la surface libre d’un filtre fraîchement lavé. Les fractions ainsi récoltées sont réunies sur un tamis de vide de maille de 2,5 mm et le tamis est agité lentement en imposant un mouvement vertical dans un récipient rempli d'eau. Après que le sable non aggloméré a traversé le tamis, le volume des agglomérats est mesuré dans une éprouvette et mis en rapport au volume total tamisé. On obtient ainsi l'indice de BAYLIS : le pourcentage volumique des agglomérats par rapport au volume de sable humide prélevé dans le test.
4.4. En aucun cas, l'indice de BAYLIS ne sera supérieur à 1, sous peine d’assister à une altération trop considérable du lit filtrant. Une bonne masse filtrante a un indice de BAYLIS inférieur à 0,2 et la filtration est meilleure si l'indice de BAYLIS est inférieur à 0,1. La dégradation de la masse filtrante, ou, du moins, la diminution de son efficacité, est le résultat d'une agglutination de ses grains. Plusieurs causes sont possibles : lavage insuffisant, existence de zones mortes dans le filtre, prétraitement insuffisant de l'eau à filtrer. En particulier, un manque de désinfection de l'eau dans le cas de la filtration rapide sur sable est souvent la cause profonde de l'altération de la masse.
5. RÉGÉNÉRATION DES MASSES FILTRANTES
5.1. Outre le nettoyage par lavage, tant pour les filtres lents que pour les filtres rapides, une masse dégradée, contenant des agglomérats ou des zones de fermentations (« mud-balls »), peut être régénérée par un traitement approprié. Parmi les techniques de régénération, on peut distinguer le traitement au sel marin, la régénération au moyen de chlore et un traitement par permanganate de potassium ou par peroxyde d’hydrogène, ou la soude caustique.
5.2. Régénération au moyen de soude caustique
Celle-ci a pour objet d’éliminer essentiellement l'argile fine, les hydrocarbures et les blocs gélatineux qui auraient pu se former dans les bassins de filtration. Après que le filtre ait été soigneusement lavé selon sa technologie spécifique au moyen d’air et d’eau ou d’eau seulement, on pro-
On procède comme suit : une solution comprenant 5 à 10 kg de soude caustique par m² de surface de filtre est dispersée dans une couche d’eau de l’ordre de 30 cm d’épaisseur au-dessus du lit filtrant. Cette solution est ensuite diffusée dans la masse par infiltration lente. L’action peut être prolongée pendant 6 à 12 heures et le filtre est ensuite très soigneusement lavé.
5.3. Traitement au sel marin
Cette méthode est plus particulièrement employée pour les filtres rapides. Dans ce traitement, on disperse environ 5 à 10 kg de sel par m² de surface filtrante dans une mince couche d’eau de 10 à 15 cm surmontant le lit de sable fraîchement lavé. Après 2 à 3 heures de dissolution, l’infiltration lente dans la masse est provoquée par l’ouverture d’une vanne de sortie des eaux filtrées. On laisse ensuite agir la saumure pendant 24 h. Le filtre est remis en service après lavage approprié. Le sel marin agit principalement sur des agglomérats protéiques éventuellement d’origine bactérienne.
5.4. Utilisation du permanganate de potassium
Cette application est particulièrement indiquée dans le cas des filtres colmatés par des algues. À cet effet, on disperse à la surface des filtres une solution concentrée (3,85 % de KMnO₄) de manière à obtenir, dans une couche d’eau de 10 à 15 cm au-dessus de la masse, une teinte rose-violette caractéristique contenant le permanganate de potassium à une concentration effective de l’ordre de 5 à 10 mg/litre. Par filtration dans la masse, la solution est amenée à y agir pendant 24 h. Après cette opération, le filtre est soigneusement lavé.
5.5. Utilisation du péroxyde d’hydrogène
Le péroxyde d’hydrogène, à une concentration de 10 à 100 ppm, est efficace pour l’élimination des bactéries colmatantes du type Sphaerotilus. La méthode de nettoyage est similaire à celle utilisée pour le permanganate. L’adjonction de phosphates ou de polyphosphates facilite le dégagement de dépôts ferrugineux. Cette méthode est susceptible d’application avec succès in situ pour le décolmatage des sables d’isolement des puits.
5.6. Utilisation d’acide chlorhydrique
Le nettoyage périodique des filtres rapides de déferrisation et de démanganisation sur sable peut se faire en utilisant une solution diluée d’acide chlorhydrique. L’opération, effectuée en mettant en œuvre l’acide à 5 % en poids d’HCl, présente l’avantage secondaire de donner lieu à la formation de chlore in situ, selon la réaction :
MnO₂ + 4 HCl → MnCl₂ + 2 H₂O + Cl₂
Bien entendu, il est essentiel de conduire l’opération de manière à éviter toute attaque significative des structures en béton des filtres.
5.7. Emploi du chlore
Pour le nettoyage momentané drastique d’un lit de sable filtrant au moyen de chlore, on peut disperser jusqu’à 0,2 kg de chlore actif par m² de surface filtrante. Pour cette opération, il convient d’employer une couche d’eau d’une épaisseur de l’ordre de 20 à 30 cm comme moyen de dispersion.
L’infiltration ultérieure de la solution est obtenue par percolation dans la masse. L’action est poursuivie pendant plusieurs heures (24 heures au moins). Le filtre est lavé ensuite. Le chlore est mis en œuvre au départ d’une solution concentrée d’hypochlorite de sodium. En variante, du bioxyde de chlore peut être employé. Ce réactif est plus efficace pour enrayer le colmatage par les algues. On peut prévenir, ou éventuellement éliminer, le phénomène de formation d’agglomérats d’origine biologique en traitant l’eau de lavage des filtres au moyen de chlore, de manière permanente. À cet effet, on tend à obtenir une concentration résiduelle de l’ordre de 1 ppm dans l’eau de lavage rejetée.
6. GRANULOMÉTRIE DES SABLES FILTRANTS DES FILTRES RAPIDES
Les caractéristiques granulométriques des sables filtrants revêtent une importance particulière pour la percolation de l’eau au travers des masses des filtres.
6.1. Le tamisage
Le tamisage des sables filtrants est effectué par une série de tamis superposés, les tamis les plus fins étant situés en bas. Les équipements sont actuellement standardisés quant à leur intensité et leur mode d’agitation.
Différentes conventions d’ouverture de tamis existent. Nous en reprenons quelques-unes dans le paragraphe ci-après :
Vides de maille des tamis standardisés
Un échantillon sec du sable filtrant est répandu sur le tamis supérieur et, après une période d’agitation appropriée (15 minutes à 30 minutes), le poids retenu sur chaque
Le tamis est déterminé. On obtient ainsi, après conversion, le pourcentage en poids des grains ayant passé des tamis d’un diamètre inférieur à la valeur x, correspondant à chaque tamis. La courbe granulométrique directe est obtenue en portant les diamètres de vide de maille des tamis en abscisse et le pourcentage en poids de la masse ayant passé les tamis de dimensions correspondantes en ordonnée.
Les échelles sont linéaires. La fig. 4 donne deux exemples de courbes de tamisage de sables filtrants utilisés dans l’usine de Tailfer de la C.I.B.E.
Une variante consiste à tracer le pourcentage en poids de la masse qui a traversé les différents tamis, en fonction du vide de maille en mm, sur un graphique bilogarithmique. Le plus souvent, le résultat s’approche ainsi d’une droite. Toutefois, dans la plupart des cas, on a recours à la courbe granulométrique directe pour caractériser un sable filtrant. La fig. 5 donne l’expression bilogarithmique de la répartition de la taille des grains d’un sable filtrant.
6.2. Caractéristiques immédiates de granulométrie des sables filtrants
Pour caractériser les sables filtrants utilisés dans les filtres rapides, on fait appel aux notions de taille effective, de diversité, de taille moyenne hydraulique et enfin de coefficient d’uniformité.
6.2.1. La taille effective est donnée par le diamètre du vide de maille laissant passer, lors de l’épreuve de tamisage, 10 % en poids de la masse globale du sable filtrant. Les valeurs correspondantes sont indiquées sur la figure 4 par TE.
Dans l’ensemble, la taille effective 10 % ne sera pas inférieure à 0,3 mm pour les filtres lents et à 0,5 mm pour les filtres rapides. La valeur de ce paramètre joue un rôle prépondérant, surtout pour les filtres lavés à contre-courant d’air, d’eau ou les deux, puisque par assortiment progressif, les masses correspondant aux tailles les plus fines se retrouvent dans les parties supérieures du filtre. Il en ressort une tendance au colmatage plus élevée quand la proportion de grains plus fins augmente par rapport à la masse de l’ensemble du filtre.
6.2.2. La diversité 60 %, soit la taille du vide de maille laissant passer 60 % en poids de la masse filtrante sèche, donne une indication quant à l’homogénéité granulométrique de la masse filtrante. Les masses homogènes ont une diversité 60 % plus petite que les masses non homogènes pour une taille effective donnée. Pour les filtres lents, la diversité 60 % sera de l’ordre de 0,5 à 0,6 mm. Pour les filtres rapides (5 à 10 m/h de vitesse globale de filtration), la diversité 60 % est généralement fixée dans les limites inférieures à 0,8 à 1 mm.
6.2.3. Le coefficient d’uniformité est le quotient de la diversité 60 % et de la taille effective 10 %. En tout état de cause, pour les filtres lents, aucune spécification rigoureuse du coefficient d’uniformité n’est généralement imposée puisque le système tend à constituer une masse de filtration fine en surface. Néanmoins, d’une manière générale, le coefficient d’uniformité sera de préférence inférieur à 3. Pour les filtres rapides, en aucun cas, le coefficient d’uniformité ne sera supérieur à 3 et, d’une manière générale, il est exigé qu’il soit inférieur à 2. De manière plus précise, on pourrait envisager comme une spécification guide, objectif de qualité, une limite de 1,5.
6.2.4. Le diamètre hydraulique moyen d’une masse filtrante peut être estimé globalement par la transformation suivante de la courbe granulométrique immédiate d’un sable filtrant : on maintient sur une échelle linéaire en
ordonnée le pourcentage en poids cumulatif correspondant au passage d’un diamètre du vide de maille et en abscisse l'inverse du diamètre du vide de maille, soit 1/D en mm⁻¹. La fig. 6 donne une détermination graphique du diamètre hydraulique moyen.
Le diamètre hydraulique actif moyen est donné par l’expression :
1/h = Σ (pᵢ / dᵢ)
où dᵢ est le diamètre vide de maille lors de l’épreuve de tamisage et pᵢ le pourcentage de poids passant au diamètre vide de maille considéré.
Sur une courbe rapportant le pourcentage de passage en fonction de 1/d on peut construire graphiquement la verticale équipotentielle délimitant de manière équivalente la masse des particules de diamètres inférieur et supérieur à la moyenne. À cette verticale correspond l’inverse du diamètre hydraulique moyen de la masse. Par calcul, ou par construction graphique, on en déduit le diamètre hydraulique moyen effectif d’une masse filtrante.
7. SPÉCIFICITÉ DE DIMENSION DES MASSES FILTRANTES
Une série de paramètres de constitution ou de forme des grains interviennent dans la spécification des masses filtrantes. Ces paramètres peuvent être indépendants de l'aspect de dimension globale reflétée par le diamètre moyen lors de l’épreuve de tamisage.
7.1. Constitution matérielle
La silice constitutive des sables filtrants possède une densité de 2,65. Des matières étrangères (mica, calcaire, etc.), sous forme de grains, peuvent parfois être assimilées ou confondues au sable lors de l’épreuve de tamisage. Elles doivent donc être analysées par une épreuve de densité. Celle-ci peut être effectuée par un test basé sur la loi d’Archimède. Le chloroforme, de densité 1,48, permet l'immersion du sable alors que le bromoforme, de densité 2,89, donne lieu à la flottation de celui-ci. Par mélange, il est possible de constituer des fluides à gradient de densité variable permettant de définir un test de densité des masses filtrantes. La densité et éventuellement le fractionnement de la masse permettent de caractériser la pureté.
7.2.
Pour les filtres rapides, il est nécessaire que des éléments lamellaires, tels que le mica, soient absents des masses filtrantes. Ce point est particulièrement important, puisque, lors des lavages des filtres rapides à contre-courant d’air et/ou d’eau, les éléments lamellaires se rangent en surface et provoquent un colmatage accéléré lors des cycles de filtration ultérieurs (voir fig. 7 et 8).
7.3.
Le facteur de forme est caractérisé par un coefficient dont il y a lieu d’affecter la taille granulométrique résultant du tamisage immédiat, pour tenir compte du fait que le grain moyen du matériau ne correspond pas nécessairement à des sphères identiques pour tous les grains. Ainsi peut-on exprimer le diamètre correspondant à un poids P du matériau en fonction des fractions de poids P₁, P₂, P₃, …, Pₙ correspondant au diamètre d₁, d₂, d₃, …, dₙ des vides de maille lors de l’épreuve de tamisage.
Le diamètre spécifique, possédant une valeur restrictive ou limitante pour la filtration rapide, peut être obtenu par l’équation suivante :
P₁/d₁ + P₂/d₂ + … + (Pₙ/P)·1/dₙ
Le diamètre spécifique intervient dans les conditions d’écoulement dans les filtres à sable.
La corrélation entre le diamètre spécifique, la taille effective et le coefficient d’uniformité est exprimée par la formule empirique suivante :
dₛ = d₁₀ (1 + 2 log U) = f · d₅ (où d₁₀ = TE et U = uniformité)
7.4. Intervient également la notion de porosité d’une masse. Celle-ci, généralement indiquée par le symbole ε, correspond au quotient du volume Vᵥ (ou volume libre) divisé par le volume Vₐ, volume total apparent de paroi. Cette notion correspond, en outre, à l'idée de perméabilité ou d’ouverture de passage dans le filtre à sable (voir fig. 9).
En effet, pour des particules sphériques de diamètre d’assemblées de manière compacte, le diamètre de l’interstice cylindrique moyen correspond à 0,155 × le diamètre moyen du grain de sable filtrant.
7.5. Il apparaît donc que le coefficient de forme des grains de sable qui constituent la masse filtrante est un facteur important. Ce coefficient complète l’appréciation fournie par la courbe de tamisage immédiat d'une masse donnée. En effet, selon l'orientation que peut prendre un grain lors du tamisage, ce diamètre peut être minimal ou maximal par rapport au vide de tamis ayant présidé jusqu’alors à l'appréciation de la dimension des grains d’une masse dans son ensemble (fig. 10).
Dans les approximations de l’hydraulique de filtration sur sable, on peut considérer que les conditions d’écoulement de l'eau dans la totalité du lit restent laminaires. C'est dire que la résistance à l’écoulement, ou la perte de charge d'un filtre, par rapport au lit filtrant obéit à une loi d’écoulement laminaire, en l’occurrence la loi de Darcy. D’après cette loi, la hauteur équivalente de la perte de charge Δh est fonction linéaire de la vitesse de filtration et de l’épaisseur du lit h et inversement proportionnelle à la perméabilité du lit filtrant. Le coefficient ou coefficient de perméabilité a les dimensions d'une vitesse et dépend d'une série de facteurs dans lesquels interviennent la température de l'eau (de par l’effet de viscosité), la porosité du milieu filtrant, le diamètre spécifique des grains de sable constitutifs des masses filtrantes définis antérieurement, et, enfin, le facteur de forme f, encore dénommé la sphéricité des sables. Le facteur de forme ou de sphéricité est donné par un chiffre sans dimensions, de valeur égale à 1 pour les grains parfaitement sphériques et inférieure à celle-ci dans la mesure où l'angulosité augmente. À titre indicatif, on peut citer les valeurs suivantes.
Forme de grain : | Sphérique | Arrondi | Anguleux |
---|---|---|---|
f : | 1 | 0,9 | 0,75 |
Les équations d’écoulement correspondantes sont :
Δh = — h ; k (m/h) = 150 (0.72 + 0.028 t) k ε² (1 — ε)² ≈ f² dₛ
7.6. En conclusion, l’expertise et la spécification particulière d’un sable filtrant doivent correspondre à une série de critères de composition et de pureté de sable, et à des paramètres spécifiant les dimensions et la forme voulues pour l’application considérée.
De l'ensemble des considérations sur les rapports « forme — diamètre », on admet généralement que les sables filtrants passent par les mailles d’un interstice de tamisage de dimension 1,05 fois la maille pour les grains oblongs : en moyenne, d = 1,1 fois l’ouverture de vide de maille.
La deuxième partie de cette étude sera présentée dans un prochain numéro.
Dr W.J. MASSCHELEIN