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La compatibilité électro magnétique

30 mars 1996 Paru dans le N°190 à la page 60 ( mots)
Rédigé par : Michel GUERIN

A partir du 1er janvier 1996, tous les produits mis sur le marché européen doivent porter la marque CE relative à la compatibilité électromagnétique. Qu'est-ce que la compatibilité électromagnétique, d'où vient elle, quelles sont les normes et comment est-elle mesurée ? C'est ce que nous tentons d'expliquer dans cet article.

Le terme « compatibilité électromagnétique », plus couramment appelée CEM, recouvre des notions diverses.

Pour un équipement, parler de CEM signifie « ne pas perturber les équipements voisins », ce que l’on nomme émission électromagnétique ou EMI (Electromagnetic Interference), et « être construit pour supporter un certain niveau de perturbations électromagnétiques » que l’on nomme immunité (ou susceptibilité, ou encore durcissement), que les perturbations soient rayonnées ou conduites.

détermine donc l’adéquation d’un dispositif :

  • à fonctionner correctement dans un environnement électromagnétique donné, ce qui détermine son degré de susceptibilité ;
  • à ne pas générer des champs électromagnétiques, ce qui détermine son degré de perturbations.
[Photo : Contrôle d’un appareil.]

On peut citer des exemples de perturbations rencontrées de plus en plus souvent dans l’industrie et qui sont liées à la CEM :

  • dysfonctionnements aléatoires d’une machine commandée par un système électronique ;
  • perturbations dans le déroulement d’un processus industriel commandé par un système séquentiel tel un ordinateur ;
  • pannes fantômes sur des sites de production industrielle ;
  • défauts erratiques des ensembles électroniques de mesure ;
  • pannes aléatoires des automates programmables ;
  • déclenchements intempestifs d’alarmes.

À des effets innombrables sont évidemment associées des causes innombrables. Les problèmes liés à la CEM peuvent être regroupés en deux grandes familles :

  • défauts liés à des signaux parasites véhiculés par les câbles d’alimentation ou par les connexions vers des sous-ensembles annexes (capteurs…) ou encore par les liaisons de masse (terre…). Ces défauts sont appelés « perturbations conduites » ;
  • défauts liés à des émissions dans l’atmosphère de signaux électriques, émissions volontaires telles que celles des émetteurs de radiocommunications (T.S.F., T.V., radiotéléphone, CB, …) ou émissions parasites telles que celles créées par l’allumage des véhicules, les alimentations à découpage… Ces défauts sont appelés « perturbations rayonnées ».

Plus la fréquence est élevée, plus la longueur d’onde est petite et plus les conducteurs se transformeront facilement en antenne d’émission.

Ainsi, plus ces conducteurs se rapprocheront des dimensions idéales pour créer une antenne (fraction entière ou multiple de la longueur d’onde), plus ce conducteur rayonnera de l’énergie sous forme d’ondes électromagnétiques.

De ce fait, si les circuits imprimés ou le câblage interne des appareillages électriques ne sont pas réalisés dans le but d’un rayonnement minimum, ceux-ci peuvent très rapidement se transformer en une source de rayonnement parasite très importante, surtout s’ils mettent en œuvre des fréquences élevées à large spectre (signaux de…

[Photo : Principaux rayonnements des équipements électroniques.]
[Photo : Contrôle de la susceptibilité d’un équipement en chambre anéchoïque.]

formes rectangulaires, comme tous les signaux numériques).

Pourquoi un système rayonne-t-il ou est-il susceptible ?

Une onde radioélectrique est produite par un courant circulant dans un conducteur ou par une tension alternative présente entre deux conducteurs.

De même, si une onde électromagnétique rencontre un conducteur de dimensions appropriées, celle-ci produit aux bornes de ce dernier une force électromotrice (fem) alternative de même fréquence, dont l’amplitude sera fonction de ses dimensions, de la distance séparant ces deux conducteurs et de l’énergie rayonnée.

C’est le principe de la transmission de signaux radioélectriques à partir d’une antenne d’émission vers une antenne de réception, dans ce cas c’est un phénomène volontaire. C’est aussi malheureusement le cas de la génération d’ondes perturbatrices involontaires engendrées par tous les systèmes électriques, celles-ci viennent polluer l’atmosphère industrielle occasionnant tous les problèmes de compatibilité des appareils modernes.

Normes sur la compatibilité électromagnétique

Les normes sur les perturbations radioélectriques regroupées en compatibilité électromagnétique ont pour objet de définir les niveaux admissibles pour un équipement donné selon deux critères :

  • • évaluation des perturbations produites sur un appareil dans les conditions d’utilisations – norme générique immunité ;
  • • quantification du pouvoir perturbateur d’un appareil d’une manière indépendante de ses conditions réelles d’installation – norme générique émission.

Par esprit de simplification, nous ne retiendrons que les dernières normes européennes mises en place pour décerner le label CE. Celui-ci est obligatoire depuis le 1er janvier 1996 pour la vente en Europe de tout matériel électrique. Il sera décerné aux matériels qui peuvent faire la preuve de la tenue aux normes en vigueur sur la compatibilité électromagnétique.

Degré de susceptibilité

Ces normes établissent une référence commune en vue de l’évaluation des performances de l’appareillage de mesure et de contrôle des processus industriels en présence de champs électromagnétiques. Ces champs sont créés par des émetteurs radio ou par tout autre système engendrant une énergie électromagnétique rayonnée par ondes entretenues.

[Photo : La chambre anéchoïque Chauvin Arnoux - Roux Pont-l’Évêque (14).]
[Photo : Champs-mètre portable CA 43.]

Contrôle de la susceptibilité d’un équipement en chambre

Le principe de l’essai consiste à plonger l’appareillage dans un environnement électromagnétique homogène créé par un système

d’émission d’ondes radioélectriques calibrées.

Classe ou niveauIntensité du champ à générer
11 V/m
23 V/m
310 V/m

Procédures d’essais

  • • bande de fréquence : 80 MHz à 1000 MHz, 
  • • modulation d’amplitude : 1000 Hz, avec une profondeur de 80 %, 
  • • site de test : la génération de champ peut se faire en chambre blindée (strip line ; TEM, GTEM) ou en chambre anéchoïque, 
  • • principe de génération du champ électromagnétique : un amplificateur de puissance alimente une antenne d’émission. Le type d’antenne à utiliser est laissé libre, le niveau à l’entrée de l’ampli est réglé pour atteindre la valeur de champ désiré, 
  • • mesure du champ généré : utilisation d’un mesureur de champ, de préférence isotropique, placé à proximité immédiate de l’appareillage sous test pour le contrôle de l’homogénéité du champ environnant, 
  • • niveau de champ généré : trois classes sont spécifiées, qui déterminent le degré d’immunité de l'appareil sous test, 

Classe ou niveau X : catégorie ouverte englobant tous les environnements se caractérisant par des rayonnements électromagnétiques très intenses. Le niveau à générer est soumis à négociation entre l'utilisateur et le constructeur ou défini par le constructeur qui doit indiquer la valeur de la tenue de l'appareil.

  • • sanctions des essais : la variété et la diversité des matériels et des systèmes à essayer rendent difficile l'établissement de critères généraux pour l’évaluation des effets des rayonnements électromagnétiques sur ces matériels et systèmes.

Les résultats d’essai peuvent être consignés sur la base des conditions de fonctionnement et des exigences fonctionnelles du matériel soumis à l’essai.

Degré de perturbation

Deux classes d’appareils sont définies pour tenir compte du lieu d'utilisation de l’appareillage sous test :

  • • les limites de la classe A ont été établies pour des matériels destinés à être installés en milieu industriel. Elles sont valables pour des distances de protection de 30 m, 
  • • la classe B est applicable aux matériels de grande diffusion ou pouvant être installés en zone d’habitation. Ces limites sont valables pour une distance de protection de 10 m.

On appelle distance de protection la limite à partir de laquelle le champ électromagnétique perturbateur n’a plus d’incidence sur l’environnement.

Le tableau I rappelle les valeurs maximales à ne pas dépasser.

La distance de mesure est la distance séparant l’appareillage sous test de l’antenne de mesure. Ces mesures demandent un site exempt de tout champ extérieur en champ libre ou en chambre blindée anéchoïque.

Mesure du champ électromagnétique

La mesure de l’intensité d’un champ électromagnétique offre deux intérêts différents :

  • • Vérification de la tenue des normes annoncées ci-dessus. En génération de champ, pour le contrôle de l’immunité d’un système, cette mesure permet de régler le niveau d’émission et de vérifier l'homogénéité du champ autour de l’échantillon sous test. 
  • • En contrôle de l’émissivité, elle permet de connaître le champ émis par l’appareillage sous test.

Tableau I

Classe AClasse B
Plage de fréquence de mesuredistance 30 mdistance 1 mdistance 10 mdistance 1 m
30 à 230 MHz30 dBµV/m58 dBµV/m30 dBµV/m46 dBµV/m
230 à 1000 MHz37 dBµV/m63 dBµV/m37 dBµV/m53 dBµV/m

Rappel : 30 dBµV/m = 30 µV/m et 37 dBµV/m = 70 µV/m 

[Photo : Contrôle du degré de perturbation d'un équipement. A : antenne d’émission log périodique large bande. EST : équipement sous test. C : mesureur de champ large bande. Analyseur de spectre ou récepteur de mesure.]

• Contrôle d’ambiance industrielle.

Cette mesure permet de quantifier le niveau de champ dans l’environnement immédiat d’un système. Le contrôle peut être fait avant l’installation du système en prévention ou en cas de dysfonctionnements aléatoires liés aux parasites électromagnétiques. On peut ainsi faire l’analogie entre la présence d’un champ pouvant dépasser les caractéristiques annoncées par le constructeur et un défaut intempestif.

La mesure du champ électrique se fait le plus souvent en volt par mètre (V/m) et l’appareil de mesure s’appelle un champmètre. Il existe deux types de champmètre dont les utilisations sont très différentes.

Champmètre à bande étroite

Cet appareil nécessite une antenne calibrée ; il est utilisé pour la mesure des faibles champs à partir de quelques µV/m et il permet de connaître le niveau de champ pour chacune des fréquences discrètes composant le spectre de l’onde en mesure. Il est du type analyseur de spectre ou récepteur de mesure ; son utilisation demande du temps et de très bonnes connaissances techniques. Son coût est très élevé et ses caractéristiques de bande de fréquence mesurable dépendent essentiellement du type d’antenne utilisé et de la calibration de celle-ci.

Généralement, il faut accorder cette antenne à chaque fréquence de mesure, sinon il faut utiliser des antennes spécifiques large bande. Dans tous les cas, il faut plusieurs antennes pour couvrir le domaine normatif. Son volume et son poids le destinent surtout aux mesures en laboratoire.

Champmètre à large bande

Cet appareil possède son propre capteur de petite dimension. Il est utilisé pour la mesure des champs forts, généralement à partir de 0,1 V/m. Il mesure la valeur efficace du champ.

Sa petite taille, son coût et sa mise en œuvre très aisée le destinent à des mesures (par du personnel peu qualifié ou non) sur tous les sites où règne une activité électromagnétique, que ce soit pour la maintenance ou pour l’installation de systèmes électroniques ou informatiques. La bande passante (de mesure) est très large ; elle couvre avec un seul capteur toutes les fréquences normatives.

Ce type d’appareil est indispensable pour le contrôle de génération de champ ou pour la qualification des sites servant à la vérification des tenues aux normes.

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