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La climatisation par réseaux urbains : une solution pour la protection de l'environnement

30 avril 1993 Paru dans le N°163 à la page 51 ( mots)
Rédigé par : Laurent HUTIN

Fondée en août 1990, la société Climespace a été créée pour développer et gérer des réseaux de climatisation urbaine, dont le principe consiste à alimenter des immeubles en climatisation par des réseaux d'eau glacée passant sous la voirie, à partir de centrales de production frigorifiques à vocation urbaine. Depuis novembre 1990, elle développe ce nouveau service dans le cadre d'un contrat de concession qui lui a été confié par la Ville de Paris, prévoyant la construction ou l'extension de cinq centrales de production frigorifique d'une capacité totale de production de 150 MW en phase finale, permettant de raccorder 2 à 3 millions de m2 de bâtiments tertiaires. La majorité des fluides frigorifiques utilisés dans les installations de production frigorifique étant des CFC ou HCFC, ce développement est directement impliqué dans les évolutions réglementaires tendant à limiter, puis interdire, l'utilisation de ces composés en raison de leur action sur la couche d'ozone. Du protocole de Montréal (septembre 1987) à la récente conférence de Copenhague (novembre 1992), on constate un durcissement régulier de cette réglementation, qui prévoit maintenant l'interdiction de l'utilisation des CFC dès le 1er janvier 1996, et, par la suite, une diminution très rapide de l'utilisation des HCFC. Par ailleurs, il est probable qu'une fois la réglementation liée à la protection de la couche d'ozone définitivement mise au point, une nouvelle évolution réglementaire se mette en place à propos de l'effet de serre. Dans ce cadre, Climespace a dû procéder en juillet 1992 à des choix de fluide frigorigène délicats, pour étudier l'extension de la centrale des Halles (7,5 MW), et en décembre 1992 pour la première phase de la centrale de Bercy (11 MW). Dans le premier cas le choix s'est porté sur des groupes centrifuges fonctionnant au R123 (HCFC), et dans le deuxième cas sur deux groupes centrifuges et un groupe à vis fonctionnant au R134 A (HCFC). A partir du commentaire sur ces choix réalisés dans un contexte technique et réglementaire différent, sont analysés les différentes possibilités de choix d'équipements futurs.

Depuis novembre 1990, elle développe ce nouveau service dans le cadre d’un contrat de concession qui lui a été confié par la Ville de Paris, prévoyant la construction ou l’extension de cinq centrales de production frigorifique d’une capacité totale de production de 150 MW en phase finale, permettant de raccorder 2 à 3 millions de m² de bâtiments tertiaires. La majorité des fluides frigorigènes utilisés dans les installations de production frigorifique étant des CFC ou HCFC, ce développement est directement impliqué dans les évolutions réglementaires tendant à limiter, puis interdire, l'utilisation de ces composés en raison de leur action sur la couche d’ozone. Du protocole de Montréal (septembre 1987) à la récente conférence de Copenhague (novembre 1992), on constate un durcissement régulier de cette réglementation, qui prévoit maintenant l'interdiction de l'utilisation des CFC dès le 1er janvier 1996, et, par la suite, une diminution très rapide de l'utilisation des HCFC. Par ailleurs, il est probable qu’une fois la réglementation liée à la protection de la couche d’ozone définitivement mise au point, une nouvelle évolution réglementaire se mette en place à propos de l’effet de serre. Dans ce cadre Climespace a dû procéder en juillet 1992 à des choix de fluide frigorigène délicats, pour étudier l’extension de la centrale des Halles (7,5 MW), et en décembre 1992 pour la première phase de la centrale de Bercy (11 MW). Dans le premier cas le choix s’est porté sur des groupes centrifuges fonctionnant au R123 (HCFC), et dans le deuxième cas sur deux groupes centrifuges et un groupe à vis fonctionnant au R134a (HFC). À partir du commentaire sur ces choix réalisés dans un contexte technique et réglementaire différent, sont analysées les différentes possibilités de choix des équipements futurs.

[Encart : Le principe de la distribution urbaine de climatisation consiste à alimenter des immeubles en énergie frigorifique à partir de centrales de production urbaine, de taille importante et situées en dehors des immeubles alimentés. L’énergie frigorifique produite dans ces centrales est distribuée dans des réseaux passant sous la voirie, et fournit l’énergie frigorifique sous forme d'eau glacée au travers d'un poste de livraison situé dans les immeubles raccordés. Comme on le voit ci-après, les avantages du système sont importants ; en partant du plus particulier au plus général, on peut évoquer principalement : – les immeubles raccordés profitent d'une énergie économiquement compétitive, dont la fiabilité est contractuellement garantie ; la suppression des installations de production frigorifique dans l'immeuble permet d’obtenir un gain de place important, et de supprimer toutes les contraintes administratives et architecturales (locaux techniques importants, tours de refroidissement en toiture, nuisances acoustiques...) générées par ces productions ; – la production centralisée permet un lissage des pointes de consommation, un meilleur rendement de production, et l'utilisation plus facile d’énergies de substitution ou de systèmes économisant l’énergie comme l'absorption ou la cogénération ; – le remplacement d'une multitude de petites installations individuelles par un nombre restreint d’installations centralisées entraîne une diminution de la quantité globale de fluide frigorigène ; le raccordement d’un immeuble au réseau de distribution urbaine de climatisation lui permet donc de se mettre en conformité]
[Photo : Installation de canalisation en galerie.]

Avec la réglementation actuelle ou future concernant les installations de production frigorifique, liée à la protection de l’environnement notamment, sans souci d’investissement ou de choix technologiques délicats.

La société Climespace*, fondée en 1990, assure le développement d’un réseau de distribution urbaine de climatisation sur le territoire de la Ville de Paris dans le cadre du contrat de concession qui lui a été confié le 19 novembre 1990.

Le plan de développement prévoit de distribuer d’ici dix ans environ, chez les usagers, une puissance souscrite totale de 180 MW (soit l’équivalent de 2 à 3 millions de m² de bâtiments tertiaires). Dans ce cadre, en fonction notamment du foisonnement important des besoins de climatisation, dont les pointes ne se superposent pas totalement dans le temps, le concessionnaire prévoit la construction ou le développement de cinq centrales frigorifiques :

  • • la centrale des Halles, dont la capacité existante de 19 MW sera portée à 40 MW au début de 1994 ;
  • • la centrale de Bercy, qui sera mise en service au début de 1994, avec une puissance de 11 MW, progressivement portée à 30 MW ;
  • • la centrale du quartier de l’Opéra, d’une capacité de 20 à 25 MW ;
  • • la centrale d’Ivry, d’une capacité maximale de 30 MW ;
  • • la centrale d’Auteuil, d’une capacité maximale de 30 MW.

La majorité de ces centrales sera entièrement refroidie par l’eau de Seine, ce qui procure un meilleur rendement énergétique de la production et la suppression de toutes les contraintes en nuisances liées aux tours de refroidissement. Dans un souci de sécurité, elles comprendront un minimum de six groupes frigorifiques, la majorité disposant de groupes électrogènes permettant de pallier les éventuelles coupures d’alimentation du réseau électrique. La centrale de Bercy, comme la centrale des Halles, sera équipée d’un système de récupération de chaleur sur les condenseurs des groupes frigorifiques ; cette chaleur sera utilisée par la Compagnie Parisienne de Chauffage Urbain, dans le cadre de contrats de vente de chaleur à basse température pour alimenter divers immeubles du secteur.

Leur fonctionnement sera entièrement automatisé par des systèmes de Gestion Technique Centralisée locaux, la centrale des Halles abritant un poste de contrôle centralisé capable d’intervenir en mode dérogatoire sur les autres centrales. Seule la centrale des Halles, centrale « maîtresse » du système, disposera de personnel assurant une permanence ininterrompue. Les différentes centrales fourniront l’énergie frigorifique sous forme d’eau glacée à 5 °C à un réseau de distribution maillé.

[Photo : Schéma du système de distribution urbaine de climatisation.]

En accord avec la Ville, ce réseau passera prioritairement dans les égouts, comme les réseaux d’eau potable, d’eau non potable et d’air comprimé.

Pour des raisons de sécurité, de fonctionnement et de facilité d’entretien, des galeries techniques visitables seront construites lorsque le passage dans les égouts ne sera pas possible (par exemple, dans la traversée de la rue Française entre la centrale des Halles et le collecteur d’égout de la rue Étienne-Marcel). Dans ces égouts, la présence de conduites d’eau glacée, fluide à basse température et basse pression, ne pose pas de problèmes en matière de sécurité ou de voisinage avec les autres canalisations.

Le réseau sera entièrement maillé et alimenté indifféremment par l’une ou l’autre des centrales, en fonction des options énergétiques et économiques de la production. Les tuyauteries « aller » seront calorifugées par de la mousse de polyuréthane (expansée sans CFC), les tuyauteries « aller » et « retour » étant revêtues de polyéthylène haute densité, ce qui évite tout risque de corrosion ou d’agression externe.

Le sens de circulation dans le réseau pouvant s’inverser suivant les hypothèses de production, le réseau fonctionne en maintien de pression (comme les réseaux d’eau potable ou d’eau non potable ou comme les réseaux de chauffage urbain distribuant la vapeur), au moyen de pompes à débit variable à variateur de fréquence installées dans les centrales.

Le réseau alimente des postes de livraison par échange chez les abonnés, auxquels sont garantis une puissance d’énergie frigorifique et une température secondaire inférieure à 6,5 °C ; ces postes, qui représentent environ un sixième de la surface d’une centrale de production frigorifique de même puissance, ne sont pas considérés comme une installation classée et ne sont sujets à aucune réglementation contraignante. Les postes de livraison sont entièrement automatisés, avec un report de gestion technique centralisée sur le poste de contrôle centralisé des Halles. Les principales informations (puissance fournie, température de distribution…) peuvent être reprises par le système de GTC de l’abonné.

La régulation de la puissance fournie à l’abonné s’effectue par une vanne par variation du débit primaire sur l’échangeur.

De la couche d’ozone aux installations de climatisation

Depuis une dizaine d’années environ, les scientifiques ont constaté une diminution de la couche d’ozone dans certaines parties de l’atmosphère terrestre, notamment au-dessus du continent antarctique, et ils ont mis en avant assez récemment l’hypothèse selon laquelle l’élément chlore serait directement en cause par un effet de dissociation des molécules d’ozone (O₃) en molécules d’oxygène (O₂). Après diverses controverses, et même certaines polémiques, il semble maintenant communément admis que les CFC (chloro-fluoro-carbones) contribuent directement à cette diminution de la couche d’ozone. Il s’en est suivi une prise de conscience importante au niveau mondial, laquelle a entraîné des évolutions réglementaires assez rapides visant au contingentement de l’utilisation de ces CFC.

Avant d’évoquer l’évolution de cette réglementation, rappelons que ces composés chimiques (connus depuis le début du siècle pour les premiers), réputés pour leur extrême stabilité, qui leur est maintenant reprochée, avaient quatre utilisations principales : solvants, agents propulseurs dans les bombes aérosols, agents d’expansion des mousses d’isolation et fluides frigorigènes dans les installations de réfrigération et de climatisation. Cette dernière utilisation, qui nous intéresse plus particulièrement, s’est révélée la plus difficile à faire évoluer, son utilisation étant très délocalisée et se situant dans des installations de durée de vie très longue (15 à 30 ans environ).

Le protocole de Montréal

La première mesure de réglementation concernant les CFC fait l’objet du protocole de Montréal, rédigé et adopté à la suite d’une conférence internationale tenue en septembre 1987. Il prévoit une réduction progressive de la consommation de CFC en valeur annuelle pour chacun des pays concernés, l’échéancier de réduction étant le suivant :

  • • plafonnement de la consommation en 1989 au niveau de la consommation de 1986 ;
  • • réduction de la consommation de 20 % en 1993 par rapport à la consommation de 1986.

* Filiale d’Uniner-Cofreth, pôle énergie du groupe Lyonnaise des Eaux-Dumez.

réduction de 50 % de la consommation en 1998 par rapport à la consommation de 1986.

Ces niveaux de consommation tiennent compte de l’effet de chaque CFC sur la couche d’ozone, ou ODP (Ozone Depletion Effect) ; les fluides les plus nocifs, R11 et R12, ayant par référence un ODP de 1.

Le protocole prévoit également des limitations de production et d’importation des CFC, et une évaluation périodique des mesures de restriction édictées.

La Conférence de Londres

Une révision importante du protocole de Montréal a eu lieu le 29 juin 1990 à la Conférence de Londres, qui a accéléré de manière importante le calendrier de réduction et même de suppression des CFC et a, de plus, élargi le champ d’application du protocole de Montréal. Les principaux points notables sont les suivants :

  • * réduction de 50 % de la consommation des CFC avancée de 1998 à 1995,
  • * réduction de la consommation de 85 % en 1997,
  • * interdiction de la consommation en 2000.

Par ailleurs la Conférence de Londres a également visé le sort des HCFC, qui contiennent des atomes d’hydrogène en plus des atomes de chlore, de fluor et de carbone, et elle a programmé leur élimination en 2040, ou si possible en 2020.

La Conférence de Copenhague

Le 25 novembre 1992 ont été adoptées à Copenhague de nouvelles mesures de durcissement de la réglementation concernant les CFC et les HCFC. Pour les CFC la réduction devra être de 75 % au 1ᵉʳ janvier 1994, l’élimination totale étant programmée pour le 1ᵉʳ janvier 1996, tant en ce qui concerne la production que la consommation. Pour les HCFC la réglementation prévoit une réduction progressive du niveau de consommation par rapport au niveau total de consommation de CFC et de HCFC de 1989, la consommation des HCFC étant pondérée par leur potentiel de destruction d’ozone, moins élevé que celui des CFC. Par la suite, la réduction sera de :

  • * 35 % au 1ᵉʳ janvier 2004,
  • * 65 % au 1ᵉʳ janvier 2010,
  • * 90 % au 1ᵉʳ janvier 2015,
  • * 99,5 % au 1ᵉʳ janvier 2020,
  • * élimination totale au 1ᵉʳ janvier 2030.

Cette réglementation, au parfum légèrement technocratique, est difficile à quantifier, néanmoins elle représente d’évidence un durcissement par rapport aux décisions de la Conférence de Londres, puisque l’élimination doit être quasi totale dès 2020.

[Photo : Installation de canalisation en égout.]

Les incidences au niveau de la climatisation

Les fluides principalement utilisés pour la climatisation des bâtiments ont longtemps été le R11 et le R12, qui sont tous deux des CFC, et le R22, qui lui est un HCFC et qui contient donc des atomes d’hydrogène combinés aux atomes de chlore, de fluor et de carbone. En conséquence, la totalité de la chaîne des intervenants dans le domaine de la climatisation de bâtiment (fabricants de matériels, prescripteurs, installateurs...) se trouve directement concernée par cette réglementation, les propriétaires et gestionnaires d’installations étant évidemment les plus directement impliqués. Par ailleurs l’administration jette un regard particulier sur les installations de climatisation qui, suivant la nomenclature des installations classées au titre de l’environnement (rubrique 361 B), sont soumises à autorisation à partir d’un seuil de 300 à 500 kW absorbés.

Des solutions technologiques de remplacement des groupes fonctionnant par compression de fluide frigorigène sont possibles, que ce soit des solutions bien connues, comme l’absorption, ou des solutions nouvelles, comme le cycle à éjection de vapeur. Une autre possibilité consiste à adapter les groupes frigorifiques à compression actuels, qu’ils soient neufs ou existants, pour les faire fonctionner avec des fluides que, selon les cas et les évolutions réglementaires, on qualifie de fluides de remplacement ou de fluides de substitution. Pour le R11 le fluide préconisé est le R123, qui est un HCFC ; pour le R12 et le R22, le fluide préconisé est le R134A, qui est un HFC, c’est-à-dire un fluide ne contenant pas d’atome de chlore et donc non concerné par les réglementations évoquées ci-dessus.

Dans le cadre d’applications industrielles, il est également possible d’utiliser de l’ammoniac dont les caractéristiques thermodynamiques sont excellentes et dont le potentiel de destruction d’ozone est nul.

Il est par ailleurs très important de noter que la réglementation ne porte actuellement que sur les problèmes liés à la destruction de la couche d’ozone, à l’exclusion des problèmes de réchauffement liés à l’effet de serre. Or, il est fort probable que ce phénomène ne devienne assez rapidement un sujet de préoccupation international, et qu’une réglementation sur les émissions de substances concourant à l’effet de serre voit le jour prochainement. Cette réglementation aurait elle aussi un effet direct sur les fluides frigorigènes, qui serait parfois concordant, mais parfois contradictoire, avec la réglementation sur la couche d’ozone, au niveau de chacun des fluides concernés.

Les premiers choix de Climespace

L’exigence de fiabilité conduit, entre autres dispositions, à doter les centrales d’un nombre de groupes frigorifiques relativement important (6 à 8 groupes minimum par centrale) et à standardiser les équipements, de façon à faciliter leur maintenance et limiter les stocks de pièces détachées. Par ailleurs, le faible écart de température du réseau entre l’aller (5 °C) et le retour (10 à 15 °C) conduit à des diamètres de canalisation importants. La possibilité de distribution par le réseau devient alors un des facteurs limitatifs de la puissance de production des centrales frigorifiques.

L’ensemble de ces critères fait que le schéma de développement prévoit des centrales frigorifiques de puissance unitaire de 30 MW environ, avec en moyenne huit groupes frigorifiques par centrale. On situe ainsi à 3 ou 4 MW la puissance d’un groupe frigorifique.

Première extension de la centrale des Halles

Au printemps 1993, la centrale des Halles devra pourvoir à l’extension des besoins frigorifiques du Musée du Louvre et aux besoins des premiers clients de Climespace.

Actuellement la centrale comprend les équipements de production ci-dessous :

  • * cinq pompes à chaleur centrifuges York, d’une puissance unitaire de 3 500 kW, fluide frigorigène R12, mises en service en 1978,
  • * deux pompes à chaleur à piston Trane, d’une puissance unitaire de 750 kW, fluide frigorigène R22, mises en service en 1988, soit 19 MW frigorifiques environ.

En phase finale, après enlèvement des deux groupes à piston et adjonction de six nouveaux groupes centrifuges, sa capacité sera portée à environ 40 MW.

Dans une première phase, en juillet 1992, deux groupes frigorifiques centrifuges fonctionnant au R123, d’une puissance unitaire de 3 570 kW, ont été commandés et doivent être mis en service en mai 1993 ; leur choix a été guidé par plusieurs facteurs :

D’une part la capacité de récupération sur les groupes frigorifiques actuels étant suffisante, il n’était pas nécessaire de prévoir de nouveaux groupes à récupération de chaleur, ce qui permettait d’installer des groupes centrifuges, dont les capacités de fonctionnement avec des régimes de températures de condenseurs élevées, sont en revanche difficiles à faible charge.

D'autre part, le R123 est un fluide aux caractéristiques physiques et chimiques très proches du R11, ce qui facilite l'adaptation des groupes frigorifiques d'un fluide à l'autre, et diminue les problèmes de corrosion ou de miscibilité d'huile ; ses capacités thermodynamiques sont quasiment équivalentes à celles du R11, ce qui n'engendre pas de surcoût significatif pour la construction des groupes frigorifiques ; enfin, comme le R11, il fonctionne à basse pression, ce qui signifie qu'une fuite n'entraîne pas de dégagement de fluide frigorigène dans le local mais conduit seulement à une entrée d'air dans le circuit frigorifique.

Aux vues des conclusions de la Conférence de Londres, l'élimination des HCFC dont fait partie le R123 en 2040 ou même en 2020 ne posait pas en 1992 de problème particulier de durée d'amortissement des machines. Son seul inconvénient notable est sa toxicité, qui a conduit à une limite réglementaire de concentration de 10 PPM alors que la majorité des fluides atteignent ou dépassent 1 000 PPM (ces niveaux de concentration sont toutefois extrêmement improbables dans des centrales de production frigorifique correctement ventilées).

La centrale frigorifique de Bercy

Cette centrale, dont les travaux de génie civil sont actuellement en cours et qui doit être mise en service en 1994, est installée dans l'enceinte de la chaufferie CPCU de Bercy ; sa puissance frigorifique doit, à terme, atteindre 30 MW.

Elle alimentera dans un premier temps les abonnés du réseau des 12ᵉ et 13ᵉ arrondissements, avant d'être rapidement interconnectée à la centrale des Halles par un réseau de maillage.

Le choix concernant l’équipement de la première tranche, réalisé en décembre 1992, s’est porté vers trois groupes frigorifiques de 3 750 kW, deux groupes frigorifiques centrifuges et un groupe à vis. La centrale frigorifique de Bercy fonctionnera au moins partiellement en récupération de chaleur, pour alimenter en basse température (via la CPCU), de grands ensembles tertiaires du secteur, comme le futur siège de la RATP. Afin que la récupération puisse se faire même à charge partielle du groupe frigorifique, le choix s’est rapidement orienté sur ce groupe frigorifique à vis.

La conférence de Copenhague ayant modifié la réglementation et notamment lié le sort du R123 à celui du R22, sans faire de distinction entre les différents HCFC, des groupes frigorifiques fonctionnant au R134 ont été retenus, choix qui s’est trouvé conforté par l'incidence notable des progrès technologiques sur l'amélioration des capacités et la réduction des prix de ces groupes.

Les choix futurs

Malgré la volonté fortement marquée de la part de Climespace d’obtenir une bonne homogénéité des matériels utilisés dans les centrales frigorifiques, il est évident que les deux choix présentés ci-dessus sont tout à fait hétérogènes, tant en ce qui concerne les groupes frigorifiques eux-mêmes que les fluides frigorigènes ; cette hétérogénéité est le résultat non seulement de partis d’exploitation différents, mais surtout de la prise en compte d'une évolution importante en matière de réglementation sur la protection de l'environnement. Ces choix concernent environ 19 MW frigorifiques, puissance relativement importante puisqu’elle correspond à la puissance actuelle de la centrale frigorifique des Halles. Cependant elle ne représente que 10 à 15 % du plan de développement des futures centrales frigorifiques. Le problème des choix à venir reste donc important, et d'une certaine manière crucial.

La façon la plus radicale de résoudre le problème des fluides frigorigènes est, comme dirait Monsieur de la Palisse, de ne pas en utiliser : des systèmes comme l'absorption ou l’éjection de vapeur permettent de produire du froid sans compression de fluide, et représenteraient donc une bonne alternative ; cependant ces systèmes reposent sur l'utilisation d’énergie thermique, ce que le contexte énergétique français rend difficile à rentabiliser économiquement. Reste alors l'embarras du choix en matière de fluide frigorigène.

La décision la plus simple à prendre est évidemment de bannir le R11 et le R12 qui en tant que CFC sont définitivement prohibés. Un choix plus délicat se pose pour le R22 et le R123, qui en tant que HCFC sont directement touchés par les récentes décisions de la Conférence de Copenhague. L'impact de la Conférence de Copenhague est difficile à analyser quantitativement, mais il est certain que le calendrier de réduction de leur utilisation créera une pénurie progressive à partir de 2005 environ. De plus les HCFC peuvent être utilisés à d'autres fins que le froid ou la climatisation, notamment comme solvants. Les quantités de fluide employées annuellement comme solvant étant à peu près dix fois plus importantes que les quantités utilisées pour les usages du froid et de la climatisation, cette potentialité d'autres usages des HCFC fait peser une menace lourde sur leur utilisation.

Actuellement le R134 A, tant par manque d’alternative que pour son innocuité vis-à-vis de la couche d’ozone, semble avoir le vent en poupe. La technologie de son utilisation s’améliore quasiment tous les jours, et la fiabilité des équipements comme leur coût d'utilisation en profitent directement. Cependant, seul l’avenir permettra de juger l'incidence de l'utilisation du R134 A et des huiles-esters, récemment mises au point pour cet usage spécifique, sur la durée de vie et les coûts d’entretien des groupes frigorifiques. D'autre part, si les fluides frigorigènes étaient touchés par une future réglementation sur l'effet de serre, malgré leur influence extrêmement mineure, le R134 A pourrait être, au moins partiellement, remis en cause.

Conclusion

La conjoncture réglementaire extrêmement mouvante rend délicate la définition d'une stratégie à long terme. À titre d’illustration la Communauté Européenne a déjà décidé d’avancer d'un an, du 1ᵉʳ janvier 1996 au 1ᵉʳ janvier 1995, l'interdiction d'utilisation des CFC.

Dans ce contexte, Climespace dispose d’un atout considérable, puisque l’équipement de ses centrales frigorifiques, qui s’étalera sur plusieurs années, pourra, de ce fait, au fur et à mesure et presque quotidiennement, prendre en compte les évolutions réglementaires ou technologiques les plus récentes. Leur caractère rapide rend d’autant plus pertinent le parti adopté par la société, consistant à porter ses efforts sur quelques grosses centrales frigorifiques à vocation urbaine, plus faciles à contrôler (ou éventuellement à convertir) qu’une dissémination d’installations individuelles, et conforte, pour un bâtiment situé à proximité d’un réseau de climatisation, l'intérêt de s’y raccorder plutôt que d’avoir à installer ou convertir sa propre installation individuelle.

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