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L'utilité de la cartographie par satellite dans l'évaluation de la consommation d'eau : le cas d'istanbul

28 février 1995 Paru dans le N°179 à la page 58 ( mots)
Rédigé par : Claude MOINET

L'utilisation d'images satellites pour obtenir une meilleure connaissance du milieu urbain a débuté par une étude-pilote menée par Sogreah en collaboration avec le CNES à Manille, il y a quelques années. Dans le domaine de l'alimentation en eau (comme de l'assainissement urbain), l'utilisation d'images satellites présente de nombreux avantages, comme on le voit dans l'article qui suit, consacré à l'évaluation de la consommation d'eau dans les 583 districts de la ville d'Istanbul.

Pour mener à bien les études que Sogreah réalise en France et dans de nombreux pays, les images du satellite SPOT sont de plus en plus souvent utilisées : que ce soit pour détecter l’évolution des méandres d’une rivière au cours des siècles passés ou pour apprécier le mode d’occupation des sols dans une ville, le traitement d’images satellites permet en effet d’améliorer la qualité des études et facilite la communication entre les techniciens et les décideurs.

La possibilité d’obtenir en quelques jours une “image-carte” de qualité qui permet d’avoir une vision globale de la zone d’étude n’est pas l’un des moindres avantages de l’image satellitaire. Soit parce que les plans de ville sont anciens, soit parce qu’il est difficile, dans certains pays, d’obtenir des vues aériennes (problèmes d’équipements pour les prises de vue et autorisations administratives nécessaires), l’utilisation d’une vue SPOT est souvent la meilleure façon de ne pas perdre de temps et de travailler de manière efficace.

Les équipements informatiques dont Sogreah s’est doté permettent de traiter rapidement les bandes P et XS pour générer des images qui constituent un document de travail de premier ordre pour permettre la formulation des problèmes et leur résolution.

Les solutions qui sont apportées à des problèmes complexes doivent être présentées, expliquées et justifiées. L’utilisation d’une scène SPOT, traitée par exemple en mode multispectral, constitue une aide précieuse pour présenter un résultat, commenter une solution, voire reformuler le problème. L’utilisation de couleurs bien choisies et parfaitement contrastées permet en effet de mettre en évidence des structures et des faits qui n’apparaissent pas toujours à l’œil nu. C’est en particulier le cas pour apprécier les différents types d’habitat d’une grande ville.

Sogreah a effectué une première étude d’optimisation du réseau d’eau potable d’Istanbul en 1986 et a participé ensuite à la mise en plan d’un système SCADA.

La nouvelle étude d’optimisation réalisée actuellement nous donne l’occasion de revisiter Istanbul avec le satellite SPOT.

Fournir de l’eau potable à 7 millions d’habitants

L’eau nécessaire à l’alimentation d’Istanbul provient de plusieurs barrages dont certains sont situés à une cinquantaine de kilomètres de la ville.

Dès 1986, les responsables d’ISKI (1) ont décidé d’adopter des moyens modernes pour améliorer la gestion du réseau et un modèle de simulation couvrant 850 km de canalisation a été élaboré par Sogreah en 1987. Ce modèle de simulation dénommé Procedure® permet par exemple de déterminer des règles de conduite qui facilitent la prise de décision lorsque le volume produit ou consommé varie subitement. Un système SCADA a ensuite été installé permettant de gérer à distance toutes les installations de stockage et de distribution de l’eau.

La nouvelle étude d’optimisation du réseau qui a débuté en décembre 1992 se situe dans la continuité logique des actions d’amélioration entreprises il y a plusieurs années.

(1) ISKI : Istanbul Su ve Kanalizasyon İdaresi.

[Photo : Une partie de la Ville d'Istanbul vue en mode multispectral par le satellite SPOT.]

Tableau I

Métropole d’Istanbul – Catégories d’habitat et consommation d'eau. Classification thématique basée sur le traitement d’une image SPOT.

Types d’habitat Description Appellation utilisée Litres par habitant par jour
A Quartiers à prédominance revenus moyens Revenus moyens 80
B Quartiers à habitat dense et structuré Dense / structuré 100
C Quartiers avec très hauts immeubles (20 à 30 étages) constructions récentes Immeubles hauts 120
D Quartiers où les immeubles sont encore en construction. Dans la plupart des cas les gens vivent au rez-de-chaussée Constructions en cours 75
X Quartiers incluant de vieux bâtiments et des sites historiques Immeubles anciens 80
Y Quartiers commerciaux Quartiers commerciaux 90
Z Quartiers d'affaires et zones de loisirs Quartiers d'affaires 100

Évaluer correctement la consommation d’eau

Afin que le modèle de simulation fonctionne dans des conditions qui reflètent fidèlement la réalité, il est parfois nécessaire que les consommations d’eau qui sont introduites à chaque nœud du réseau soient corrigées, ajustées, voire rectifiées. En effet, les inévitables fuites, les pannes de compteurs et les chutes de pression conduisent parfois à des statistiques de consommation anormales (en 1992, le nombre de branchements avoisinait 1 400 000 unités).

Pour évaluer le volume d’eau qui est réellement nécessaire aux besoins de la population, nous nous sommes appuyés sur les résultats du traitement d'une image SPOT en mode multispectral (figure 1), ce qui a permis de distinguer plusieurs types d’habitat qui ont été pris en compte pour vérifier la cohérence et la vraisemblance des statistiques de consommation d’eau enregistrées (tableau I).

Munie d’une image SPOT d’Istanbul qui avait fait l'objet d’un traitement préliminaire, une équipe a contrôlé sur place la nature des “objets” figurant sur la vue satellite.

La mission “vérité-terrain” permet de repérer et de préciser la nature exacte des éléments, qui ont la même couleur sur la vue satellite mais qui, en réalité, correspondent à des utilisations différentes : zones industrielles et parkings, par exemple. À cet effet, les limites administratives des 583 districts d'Istanbul (Mahallé) ont été dessinées sur un plan calque qui a été superposé à l'image satellite. Pour chaque district, le type d’habitat dominant a été identifié sur la vue satellite et a été reporté sur le calque pour être transféré ensuite dans les calculs. Le résultat obtenu à partir de cette estimation a ensuite été comparé aux statistiques de consommation d’ISKI.

Dans le cas où les valeurs estimées étaient très éloignées des statistiques, des vérifications et des contrôles techniques ont permis dans la plupart des cas d’expliquer les causes des écarts constatés : fuites importantes, compteurs défectueux, pression insuffisante.

Les volumes d’eau qui ont finalement été pris en compte dans le modèle de simulation ont donc pu être consolidés dans des délais très courts qui n’auraient jamais pu être atteints avec des méthodes d’investigation traditionnelles : enquêtes socio-économiques, campagne de recherche de fuites, vérification du fonctionnement des compteurs d'eau.

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