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L'utilisation de la pierre ponce de Lipari dans la filtration de l'eau

30 octobre 1988 Paru dans le N°122 à la page 87 ( mots)
Rédigé par : J.p. EYRAUD

La pierre ponce est un matériau poreux à très faible poids spécifique d’origine volcanique, employé dans les filtres utilisés dans les opérations de potabilisation des eaux.

Origine et caractéristiques de la pierre ponce

Nous prendrons comme exemple la pierre ponce provenant de l’important gisement de l’île de Lipari, dont il occupe un quart de la superficie (soit 900 ha) sur une hauteur de 550 à 600 m (figure 1). Ce gisement est pratiquement homogène (puisque sans découvert), essentiellement meuble et comporte une proportion de 50 % de poudre, 45 % de grains et 5 % de morceaux.

[Photo : Gisement de l’île de Lipari]

La première méthode de production consiste en un traitement simple du matériau, par séchage, tamisage et ensachage : on obtient ainsi la ponce standard, dite « noire » du fait de la présence d’obsidienne et de magnétite.

La seconde consiste à éliminer l’obsidienne, la magnétite et les pierres par ventilation, et à procéder ensuite à des opérations de séchage, broyage puis tamisage, ce qui permet d’obtenir la ponce dite « blanche » (figure 2).

[Photo : Matériau de filtration pour le traitement des eaux]

Les caractéristiques physiques de ces deux types de ponce diffèrent passablement : c’est ainsi que la densité apparente d’une poudre standard atteint 1,10 à 1,20, alors que celle de la poudre blanche, pour des granulométries similaires, est de 0,90 à 1,05. De même, la densité apparente des grains standards varie de 0,55 à 0,90 et celle des grains blancs de 0,45 à 0,65. On relève des différences analogues dans la capacité d’absorption de l’eau et de l’huile : les ponces standards ont une prise d’huile d’environ 40/41 ml pour 100 g, et une prise d’eau de 46/48, alors que les ponces blanches ont une prise d’huile d’environ 62/63 et une prise d’eau de 68/72. Leur surface spécifique s’établit entre 0,15 m² et 0,60 m² par gramme (figure 3).

Caractéristiques physico-chimiques

La pierre ponce de Lipari est un silicate d’alumine dont la composition est approximativement la suivante (en poids) :

SiO₂ : 70,90  
Al₂O₃ : 12,76  
TiO₂ : 0,14  
Fe₂O₃ : 1,75  
FeO : 0,64  
MnO : 0,09  
CaO : 1,36  
MgO : 0,60  
Na₂O : 3,23  
K₂O : 3,83  
P₂O₅ : 0,0015  
CO₂ : 0,04  
SO₃ : 0,21  
H₂O° : 3,88  
[Photo : Vue microscopique de la surface d’un grain de ponce]

Elle contient environ 4 % d'eau de structure, c’est-à-dire d'eau liée par la réticulation siloxanique, impossible à éliminer par séchage.

Caractéristiques techniques

Nous examinerons deux types de ponce utilisées en filtration, de granulométries 1,2 – 2 mm et 1,6 – 3 mm. Leurs courbes granulométriques, portées sur la figure 4, montrent des coefficients d'irrégularité de 1,2 pour la première et de 1,1 pour la seconde ; leurs densités sont identiques (apparente 0,41, après tassement 0,45). Elles doivent leur action filtrante exceptionnelle à la forme irrégulière des grains qui les constituent et à leur vide intergranulaire, ce qui leur assure une grande capacité de rétention des matières en suspension contenues dans l'eau à traiter.

Produit passant au tamis (exprimé en mm)

Maille du tamis de contrôle (en mm)

[Photo : Fig. 4 – Courbes granulométriques]

La technique de filtration

La pierre ponce de Lipari s'emploie dans des filtres monocouches, mais surtout dans des filtres bicouches où elle vient en complément des filtres à sable, avec des possibilités de rétention beaucoup plus importantes, ce qui est particulièrement appréciable dans le cas des prétraitements par floculation. Il en résulte une augmentation de la durée des cycles et un espacement plus élevé des opérations de rinçage des filtres. En effet, le temps nécessaire à la filtration est fonction du temps de colmatage du filtre ; celui-ci se traduit par une perte de charge qui s'accroît au fur et à mesure du dépôt des MES (figure 5). Lorsque celle-ci arrive à son maximum admissible, le rinçage à contre-courant intervient suivant le processus ci-après :

  • — abaissement du niveau de l'eau située au-dessus de la couche filtrante,
  • — insufflation d’air (afin de briser le filtrat),
  • — rinçage à contre-courant, en général avec de l'eau brute ou filtrée,
  • — suit la phase de séparation et de remise en place, après laquelle la pierre ponce utilisée retrouve sa puissance de filtration.

À titre indicatif, les valeurs suivantes peuvent être retenues : vitesse de l'air de balayage : 50 – 90 m/h, vitesse de l'eau de rinçage : 30 – 70 m/h (figure 6).

Expansion du rinçage à contre-courant (en mm)

Perte de charge

Vitesse de filtration (en m/h)

[Photo : Fig. 5 – Courbes des pertes de charge absorbées en fonction de la vitesse de l'eau (couche de 1 m de ponce eau à 12 °C)]

La vitesse de l'eau de rinçage dépend de la granulométrie, de la répartition granulométrique et de la densité des grains de pierre ponce formant la couche filtrante. Elle doit être suffisante pour que ceux-ci soient bien agités les uns contre les autres.

Vitesse de rinçage en m/h

Lors de la phase de séparation, le débit de l'eau diminue et les grains se déposent tout en retrouvant leur sélection granulométrique de départ ; dans cette phase, la pratique montre que si le rapport de la granulométrie moyenne des couches supérieure et inférieure est plus petit que 3, les différents matériaux, après régénération, se déposent automatiquement à leur place originelle sans mélange, comme dans l'exemple courant suivant :

  • granulométrie moyenne de la ponce : 2 mm
  • granulométrie moyenne du sable : 0,7 mm

Une autre règle pratique se réfère au rapport de la densité du sable et de la densité apparente de la ponce, rapport qui doit également être au moins égal à 3 ; dans le cas de la ponce de Lipari, on relève ainsi :

  • ponce blanche = 2,313 : 0,40 = 5,78
  • grain humide = 2,356 : 0,46 = 5,12

Il faut noter qu'outre son efficacité en matière de filtration, la ponce de Lipari possède des propriétés de décoloration qui peuvent être comparées à celles d'une bentonite à forte activation, et qui peuvent également être utilisées dans le traitement des eaux.

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