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L'instrumentation dans une station de traitement des eaux : régulation de débit et de niveau

31 janvier 1977 Paru dans le N°12 à la page 60 ( mots)
Rédigé par : Jean-paul VALENTIN
[Photo : Régulateur et enregistreur électroniques - Format Din.]

Sté OTIC-FISCHER & PORTER

Si les procédés utilisés dans une station de traitement des eaux peuvent être complexes au point de vue chimique, électrochimique et physique, les systèmes de régulation sont relativement simples. En général, une station se compose d’une série d’unités que l’eau à traiter traverse successivement. Certaines d’entre elles — comme la filtration — comprennent une série de bassins parallèles dont le nombre est déterminé par la taille et la capacité de la station. De ce fait, l’instrumentation d’une station ayant une capacité de 500 m³/h sera semblable à celle d’une station de capacité de 5 000 m³/h sauf, bien entendu, en ce qui concerne le nombre de boucles de régulation.

Le débit d’une station de traitement d’eau n’est jamais directement proportionnel à la demande de la communauté qu’elle dessert. Ce débit est relativement constant et un stockage permet de pallier les éventuelles pointes de consommation. Il en résulte que les appareils de régulation n’exigent pas une plage très vaste.

Sauf pour quelques stations très importantes, les distances sont relativement assez courtes pour que la transmission et la régulation puissent être aussi bien pneumatiques qu’électroniques.

GÉNÉRALITÉS SUR LA RÉGULATION

Un certain nombre de règles fondamentales sont nécessaires pour comprendre et étudier le système de régulation d’une station de traitement d’eau. La plus importante : dans une même boucle les variables doivent être reliées entre elles.

Par exemple, dans la régulation du débit de filtration, il n’est pas toujours possible d’utiliser le niveau du bassin de décantation comme point de consigne. S’il y a un déversoir à l’extrémité du bassin, il est préférable de se servir du niveau des filtres eux-mêmes. En effet, les filtres et le bassin sont isolés hydrauliquement et leurs niveaux respectifs peuvent varier d’une manière différente. Même si les déversoirs sont submergés, les pertes de charge créées lors de leur traversée sont suffisantes pour annuler les effets des variations de niveau dans le décanteur.

Théoriquement, on peut contrôler le débit de sortie des filtres à partir des débits d’entrée et de sortie de la station. En pratique, c’est impossible. En effet l’action des vannes fait varier le débit d’eau et, par suite, le niveau des différents réservoirs. Cependant, du fait de la taille de certains réservoirs le niveau peut varier très lentement et il faut parfois une heure ou même un jour pour que le débit d’entrée de ces réservoirs soit réglé en conséquence. Les boucles de régulation qui agissent directement sur le débit sans mesure intermédiaire, ou compensation de niveau ne sont donc pas valables.

RÉGULATION DU GRADIENT HYDRAULIQUE

En général, depuis le bassin de décantation jusqu’à la citerne d’eau traitée où des pompes assurent sa distribution ultérieure, l’eau s’écoule gravitairement.

La plupart des stations opèrent soit à débit constant, soit en relation avec la demande des pompes de reprise. Mais dans tous les cas, l’eau est stockée à la sortie de la station dans des réservoirs qui se remplissent pendant les périodes de faible consommation et assurent la distribution aux moments de pointe. De ce fait, les variations dans le débit de la station sont minimes.

RÉGULATION DU DÉBIT INSTANTANÉ DES FILTRES

1°) Différentes méthodes

Différents modes de régulation sont utilisés pour contrôler le débit des filtres.

SYSTÈME 1

Les niveaux dans la citerne d’eau traitée et à l’entrée des filtres fournissent les points de consigne respectivement au régulateur du débit de sortie de chaque filtre et au régulateur

de débit d’entrée de la station. Si une modification dans la demande fait diminuer le niveau de la citerne, le débit de filtration augmente. Par conséquent, le niveau du filtre diminue d’autant et une quantité d'eau plus importante est admise dans la station. Le débit d'entrée est donc indirectement relié à la demande en sortie.

[Photo : Schéma Système II]

Système II

Le niveau du filtre détermine le débit de filtration. Le niveau de la citerne détermine le débit d’arrivée d'eau. Le régulateur de niveau de filtration ajuste le point de consigne des régulateurs de débit de sortie des filtres. Ce système est limité par la capacité du décanteur et ne contrôle pas le niveau de la citerne d'eau traitée d'une manière aussi serrée que dans la solution précédente.

Par contre ses avantages sont les suivants : les variations dans le débit de filtration sont lentes et amorties par rapport aux variations de la demande. De plus, les vannes de sortie des filtres se ferment et ceux-ci ne se vident pas si l’alimentation en eau est interrompue. Ils sont donc immédiatement opérationnels dès que la station est alimentée de nouveau.

[Photo : Schéma Système III]

Système III

Cette régulation est une combinaison des deux précédentes.

Elle fonctionne comme le système I aussi longtemps que le débit d’alimentation est suffisant pour satisfaire la demande en sortie. Autrement dit, dans des conditions normales, le niveau de la citerne d'eau traitée contrôle le débit de sortie des filtres et le niveau des filtres contrôle le débit d’entrée. Mais on a ajouté un second régulateur de niveau des filtres et un sélecteur de limite basse.

En fonctionnement normal, le second régulateur délivre un signal maximum au relais du sélecteur de limite basse. Le point de consigne et la bande proportionnelle de ce régulateur sont ajustés de telle sorte que les niveaux normaux des filtres soient à l'extérieur et au-dessus de la bande proportionnelle et supérieurs aux niveaux moyens. Pendant ce temps, le régulateur de niveau de la citerne délivre un signal inférieur au signal maximum précédent.

C'est ce signal que le sélecteur de limite basse envoie en tant que signal de consigne aux régulateurs de débit de sortie des filtres. Si l’alimentation en eau brute diminue ou s’arrête, le signal du second régulateur de niveau des filtres décroît en même temps que le niveau. Quand le signal devient inférieur à celui transmis par le niveau de la citerne traitée, c'est lui qui est transmis par le sélecteur de limite basse pour la régulation du débit de filtration. Cette action équilibre le débit de sortie et l’alimentation des filtres, et si l’alimentation est stoppée, ferme les vannes de sortie des filtres. Ce système réunit donc les avantages des deux précédents.

Il faut insister sur l’importance de pouvoir conserver des filtres pleins lorsque l’alimentation en eau brute est stoppée ou que la station est à l’arrêt. Si le filtre se vide, il faut le nettoyer avant de le remettre en service (backwashing). Mais si les pompes de reprise ont vidé la citerne d'eau traitée pendant ce temps, il n’y a plus d'eau pour effectuer le nettoyage et la station peut être arrêtée pendant une période assez importante.

Système IV

Dans ce cas, les variations de niveau dans la citerne d'eau traitée commandent le démarrage ou l’arrêt des pompes qui alimentent le bassin de décantation en eau brute. Le changement du niveau de filtration qui en résulte détermine le point de consigne pour la régulation du débit de sortie des filtres. Ce mode de régulation présente les mêmes sécurités que le système II en cas d’arrêt de la station.

[Photo : Schéma Système IV]

Dans tous les systèmes décrits précédemment, toutes les installations, sauf les plus importantes, n'exigent qu’un seul ensemble « transmetteur de niveau de filtration-régulateur ». On pourra faire une mesure représentative du niveau de tous les filtres en utilisant un seul instrument qui mesurera le niveau en aval du déversoir et en amont des vannes d’arrivée sur les filtres.

[Photo : Schéma Système V]

Système V

On part du principe que le débit de filtration est égal au débit d’alimentation en eau brute si le niveau du filtre reste

constant. On obtient ceci en mesurant le niveau du filtre et en contrôlant la vanne qui règle le débit de sortie du filtre. La régulation du débit d'eau brute peut être faite soit comme dans le système II, soit comme dans le système IV. On élimine un élément primaire de mesure de débit et un transmetteur sur chaque filtre. Ils sont remplacés par un déversoir ou un système de trop-plein dont la perte de charge est du même ordre que pour les éléments mesureurs de débit employés précédemment.

Le mode de régulation utilisé dans ce système est à action proportionnelle + intégrale pour le débit et proportionnelle pour le niveau. Il permet de diminuer les fluctuations de débit quand la demande varie brusquement, atténuant ainsi les perturbations au niveau de la décantation et de la filtration.

2°) Les appareils.

Le plus souvent on contrôle le débit de filtration en agissant sur le débit instantané de sortie de chaque filtre. Ce débit doit être mesuré et contrôlé avec le minimum de perte de charge. Une boucle de régulation standard comporte un élément de mesure primaire (venturi, flow tube, plaque à orifice, diaphragme...), un transmetteur, un régulateur et une vanne.

Un venturi peut avoir une perte de charge égale à 15 à 30 % de la différentielle produite. Dans les mêmes conditions, ce pourcentage varie de 40 à 90 % pour une plaque à orifice. Mais seules les valeurs réelles de pertes de charge sont utilisables dans la pratique et, comme nous allons le voir, les pourcentages précédents sont trompeurs.

En effet, un venturi crée une différentielle relativement importante et sa perte de charge, bien que représentant un faible pourcentage de la différentielle, peut être supérieure à celle d'un autre élément primaire pour lequel la perte de charge est égale à un plus grand pourcentage d'une différentielle qui, elle, est bien plus petite en valeur absolue.

Par exemple, un venturi dont la différentielle maximum est de 1,50 m peut avoir une perte de charge de 30 cm environ (20 %). Par contre, une plaque à orifice peut créer une différentielle maximum de 50 cm et sa perte de charge sera de 50 %, donc de 25 cm, moins que pour le venturi.

Il n'est donc pas possible de fixer des règles strictes, mais au niveau études, il est toujours bon de baser ses calculs sur des pertes de charge réelles.

Il faut aussi garder présent à l'esprit que la moindre charge supplémentaire sur un filtre qui n'est pas dissipée dans la tuyauterie (perte de charge par frottement) ou dans l'élément de mesure primaire devra être absorbée par la vanne. Un débit ne peut être régulé que s'il y a une perte de charge. Donc, la fameuse règle selon laquelle un élément primaire de mesure de débit de filtration doit avoir une perte de charge minimum n'est finalement valable que dans des cas bien particuliers d'écoulement gravitaire où la charge est faible et ne peut pas être gaspillée.

Et paradoxalement, il peut être inutile de choisir un élément primaire sophistiqué dont la perte de charge est négligeable et d'utiliser une vanne pour dissiper le surplus, si un primaire plus simple peut donner le même résultat. Du fait de la limitation de place dans les galeries, la plupart des primaires sont montés en sortie de filtres sur des longueurs droites très courtes immédiatement après un coude ou un té. Même l'utilisation d’aubages redresseurs ne permet pas d'avoir des conditions de débit amont parfaites. Il est donc souvent difficile d'avoir une mesure de débit très précise à la sortie des filtres, mais ceci n'est pas important dans l'absolu. Ce qui compte en effet, et que l'on obtient facilement grâce à des appareils fidèles, est la répétabilité du signal de mesure.

En fait, une bonne précision en sortie des filtres n'est nécessaire que lorsque ces mesures sont totalisées à ce niveau pour calculer la production en eau traitée de la station et c'est rarement le cas.

COMPARAISON DES DIFFERENTS SYSTEMES DE REGULATION

Le choix d’un mode de régulation (systèmes I à V) dans une station de traitement donnée dépend d'un certain nombre de facteurs :

  • — Taille de l'usine
  • — Mode opératoire (continu ou séquentiel)
  • — Disponibilité en personnel
  • — Débit à traiter constant ou variable
  • — Régulation automatique ou manuelle.
  • — Facteurs économiques.

Le coût de l'équipement de régulation utilisé dans les systèmes précédents est sensiblement comparable. Des économies peuvent être réalisées en utilisant une régulation de niveau par bullage ; en effet, on élimine ainsi un élément primaire et un transmetteur. Par contre, cette méthode a parfois un inconvénient majeur : elle peut avoir des effets désastreux sur la floculation des plus fines particules qui ne se sont pas déposées dans le bassin de décantation et qui parviennent jusqu’aux filtres.

La régulation du débit par le contrôle du niveau des filtres existe depuis les premiers jours du traitement des eaux. Seuls les appareils et les techniques de mesure se sont modernisés, mais le principe est toujours le même qu'il y a 50 ans.

[Photo : Nodules de calcul, d'alarme, de conversion de signaux, de régulation, montés en armoire - sigma 4000.]

J.-P. VALENTIN.

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