Poussées par une réglementation en constante évolution, les entreprises industrielles connaissent des coûts de dépollution qui ne cessent d'augmenter. Celle qui réalisent du traitement de surface n'échappent pas à la règle. A l'heure où l'on évoque une modification de l'arrêté de 1985, elles doivent quand même faire face aux nouvelles réglementations qui se profilent à l'horizon comme la stabilisation des boues. Tôt ou tard, elles ne pourront échapper à l'adoption de procédés respectueux de l'environnement. Ces procédés existent. Ils sont au point.
Les industriels du traitement de surface manipulent des produits très toxiques comme le cadmium, le chrome, le nickel, le cuivre, l’étain ou le zinc. Les cyanures, les fluorures, le phosphore, les acides et les bases sont aussi très courants. Les entraînements des bains de rinçage, les réactions parasites et les vidanges pour le renouvellement des bains usés représentent l’essentiel des pollutions aqueuses produites par ce secteur. On avance que l’industrie du traitement de surface est à l’origine de 30 à 45 % de la pollution des eaux par les métaux. Ces polluants, lorsqu’ils sont rejetés, sont facilement assimilables par le milieu naturel. Ils se caractérisent par une toxicité élevée qui s’accumule, provoquant du même coup une contamination de toute la chaîne alimentaire.
Opter pour le recyclage et les procédés propres
Pour réduire ces nuisances, tout un arsenal de moyens existe. L’évolution qu’ils poursuivent les rend plus sûrs, plus performants et moins gourmands en énergie.
Aujourd’hui, les traitements physico-chimiques ont conduit à des réductions importantes des rejets aqueux chargés en métaux.
Des méthodes appliquées aux effluents industriels permettent de séparer les chromes et les cyanures, d’oxyder les cyanures, de réduire les chromes ou de les neutraliser à l’aide de floculant. Cependant ils transposent le problème de la pollution aqueuse à celui des boues, considérées à juste titre comme un déchet industriel. L’arrivée du 1er avril 1998 puis de l’échéance 2002 avec la suppression des décharges imposent de reconsidérer ce problème.
La diminution des nuisances passe immanquablement par une réorganisation de l’outil de production. Il doit être transformé pour produire moins de déchets et moins de pollution. Pour ceci, deux approches peuvent être prises en compte, l’une prônant l’absence totale de rejet dans le milieu naturel, ce qui n’est pas possible si l’on prend en compte les boues, l’autre la suppression des rejets polluants par l’adoption de procédés de traitement adaptés. Quelle que soit la voie retenue, il n’existe pas de recette miracle. Les procédés de traitement sont au point. Il faut les utiliser.
Cependant, avant de se lancer dans des investissements coûteux, il est important de bien connaître les problèmes de l’entreprise. Le choix de la meilleure technologie devra s’établir au cas par cas, après une analyse détaillée de tout l’outil de production.
Une analyse détaillée s’impose
La première façon de réduire les pollutions consiste à s’attaquer directement à leurs causes, afin de diminuer les sources. Sur les unités existantes, cette approche oblige à bien connaître son procédé, ses produits et ses déchets. Pour ceci, une expertise point par point de toutes les étapes de la fabrication est nécessaire. Franck Gambelli, juriste, expert auprès du Cetim, est spécialisé dans les problèmes liés à l’environnement. Il explique : « Cette analyse doit être menée par des experts qui connaissent bien les procédés du traitement de surface. » Chaque poste d’activité est détaillé, puis on lui applique une méthodologie d’analyse.
Pour cela, le Cetim a développé une
Traitement des pollutions dans l'industrie du traitement de surface : la législation
C'est l'arrêté ministériel du 26 septembre 1985, en application de l'article 7 de la loi du 19 juillet 1976 qui fixe le cadre réglementaire applicable aux ateliers de traitement de surface soumis à autorisation. Ce texte aborde à la fois la prévention de la pollution des eaux, de la pollution atmosphérique et des pollutions accidentelles, ainsi que l'élimination des déchets.
D'autres législations touchent encore ce domaine :
- la loi du 15 juillet 1975 complétée le 30 décembre 1988 et modifiée le 13 juillet 1992, elle concerne la législation sur l'élimination des déchets et la récupération des matériaux ;
- la loi du 19 juillet 1976 modifiée le 13 juillet 1992 et dont le décret d'application a été profondément remanié le 5 janvier 1996. Il s'agit de la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement ;
- la loi du 2 février 1995 modifiant les lois des 15 juillet 1975 et 13 juillet 1992, ainsi que la loi sur l'eau du 3 janvier 1992, qui renforce la protection de l'environnement ;
- les prescriptions fixées dans cet arrêté ont été complétées par la circulaire du 28 décembre 1990 relative aux études déchets.
Selon l'activité exercée et la nature des polluants, la réduction ou la suppression de certaines émissions doit être prise en compte :
- rejets de solvants nocifs pour le milieu aquatique : arrêté du 2 octobre 1991 en application de la directive européenne 76/464/CEE ;
- réduction en termes de production et de limitation de substances portant atteinte à la couche d'ozone : règlement 3093/94 du Conseil européen du 15 décembre 1994 ;
- émissions de solvants en provenance des activités industrielles : projet de directive européenne de la DG XI ;
- limitation de l'emploi du cadmium : décret 94-647 du 27 juillet 1994 en application de la directive européenne 91/338/CEE ;
- réduction des émissions de solvants dues à l'application de peinture aux carrosseries de l'industrie automobile : circulaire du 14 juin 1987 ;
- ligne de prélaquage (prévention de la pollution de l'air, de l'eau, des déchets et du bruit) : instruction technique du 25 août 1988.
Avenir :
- durcissement de la loi sur les émissions de solvants (courant 1997, probablement) ;
- obligation de stabiliser les boues d'hydroxydes métalliques pour leur admission dans les décharges de classe 1 (30 mars 1998).
Méthode d'analyse. Elle met en lumière tous les problèmes pouvant avoir des conséquences sur l'environnement. Michel Ganier, responsable de l'environnement et de l'énergie au Cetim (Centre Technique des Industries Mécaniques) de Saint-Étienne, détaille cette démarche : « Chaque étape du procédé est répertoriée. Une analyse de poste est réalisée. Elle conduit à un classement de l'impact des nuisances observées ».
Ce diagnostic, établi par des techniciens du Cetim ou par des représentants dûment mandatés, permet d'établir un rapport environnemental de l'entreprise qui sert de base à toute mise à niveau. Strictement confidentiel, il est le premier pas vers une mise en conformité des anomalies constatées. C'est aussi la première étape vers une éventuelle certification ISO 14000.
Dans cette approche, la notion de bilan matière peut être exploitée. Elle aide à comptabiliser les nombreux produits chimiques, c'est-à-dire :
- les entrées de matières (les pièces et leurs contaminants, les produits chimiques nécessaires aux différents bains, l'eau...)
- les sorties matières (les pièces traitées, le reste de produits contenus dans les bains, l'eau, les déchets...)
À partir de là, le bilan matière tient compte
Entraînement (E l/m²)
Nombre de postes de rinçage
Rapport de dilution Rd = C₀ / Cfi
100 | 500 | 1000 | 2000 | 3000 | 5000 | 7500 | 10000 | 12500 | 15000 | 20000 | 25000 | ||
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
1 | 10 | 50 | 100 | 200 | 300 | 500 | 750 | 1000 | 1250 | 1500 | 2000 | 2500 | |
0,10 | 86 | 95 | 107 | 114 | 127 | 137 | 150 | 167 | 184 | 197 | 220 | 247 | 278 |
2 | 25 | 125 | 250 | 500 | 750 | 1250 | 1875 | 2500 | 3125 | 3750 | 5000 | 6250 | |
0,15 | 91 | 102 | 123 | 139 | 153 | 172 | 195 | 223 | 247 | 268 | 307 | 346 | 389 |
3 | 40 | 200 | 400 | 800 | 1200 | 2000 | 3000 | 4000 | 5000 | 6000 | 8000 | 10000 | |
0,20 | 89 | 100 | 117 | 130 | 153 | 167 | 187 | 215 | 237 | 256 | 292 | 329 | 370 |
4 | 55 | 275 | 550 | 1100 | 1650 | 2750 | 4125 | 5500 | 6875 | 8250 | 11000 | 13750 | |
0,25 | 94 | 107 | 120 | 149 | 179 | 197 | 220 | 253 | 280 | 304 | 344 | 387 | 435 |
5 | 70 | 350 | 700 | 1400 | 2100 | 3500 | 5250 | 7000 | 8750 | 10500 | 14000 | 17500 | |
0,30 | 99 | 112 | 129 | 156 | 188 | 228 | 257 | 295 | 326 | 355 | 391 | 464 | 512 |
Tableau 1 : Débit d'eau de rinçage (en l/m²) en fonction du rapport de dilution (Rd) de l'entraînement (E) pour un rinçage courant (1) et à une cascade à deux, trois ou quatre postes.
@ Zone d'utilisation de la cascade 2 postes pour respecter un débit inférieur à 8,1 l/m² – fonction de rinçage
# Zone d'utilisation de la cascade 3 postes pour respecter un débit inférieur à 8,1 l/m² – fonction de rinçage
© Zone d'utilisation de la cascade 4 postes pour respecter un débit inférieur à 8,1 l/m² – fonction de rinçage
des produits perdus à chaque étape du traitement. C'est le flux brut. Les opérations annexes (nettoyage, démétallisation), bien qu'épisodiques, sont aussi à prendre en compte. C’est là un point délicat. Cette analyse met en évidence tous les problèmes. Elle fournit de précieuses indications sur les actions à entreprendre. En général, la première d’entre elles consiste à réduire les rejets des installations existantes en agissant sur le process.
D’abord agir sur le process
Différentes anomalies ont été constatées lors du premier bilan : eau perdue, consommation de matière trop importante... Il est possible de les réduire, voire de les supprimer en agissant sur certaines parties du process. Prenons l'exemple de l’eau. Pour limiter les pertes, différentes actions peuvent être faites pour limiter le gaspillage. La plus simple consiste à limiter le débit d'eau. Pour ceci, un contrôle de la pression du réseau d'alimentation s'impose. C’est un paramètre important qu’il faut à tout prix contrôler pour maîtriser le débit.
Une autre action consiste à identifier les besoins en eaux (permanents et intermittents) et les rejets produits. Une maîtrise insuffisante de ces rejets entraîne très souvent une perturbation de fonctionnement des systèmes antipollution. Les rejets intermittents, qui fournissent dans la plupart des cas une eau fortement chargée en pollution, peuvent parfois atteindre 10 % de la consommation totale.
Pour une même qualité de rinçage, la quantité d’eau nécessaire peut varier considérablement selon que l’on utilise une, deux ou trois cuves. Dans l'étude sur « Les techniques et moyens à mettre en œuvre pour diminuer les rejets liquides de l'industrie du traitement de surface », réalisée par Louis Soufflot Conseil International pour le compte du Ministère de l'Environnement, quelques chiffres sont cités. Pour un entraînement de 1 l/h et un rapport de dilution souhaité de 10 000, on utilise 10 000 l/h avec une cuve, 100 l/h avec 2 cuves et 21,54 l/h avec 3 cuves. Mais ces chiffres sont très difficiles à maîtriser avec rigueur. Il est préférable de prendre en compte le rapport de dilution.
Une autre contrainte corse cette affaire : « La réglementation de 1985 impose de ne pas dépasser 8 litres d’eau perdue par m² de surface chimique de pièces et montages en contact avec le bain et par fonction de rinçage ».
Le fait de ne pas dépasser 8 litres d’eau perdue par m², sans recycler l'eau, donne les rapports de dilution suivants :
- - pour 1 rinçage : 57,69, ce qui est inacceptable,
- - pour 2 rinçages : 3 328, c’est insuffisant dans la plupart des cas,
- - pour 3 rinçages : 19 201,6, ce qui est une valeur bien au-delà des besoins.
Différents artifices peuvent compléter le choix de la structure de rinçage afin de limiter la consommation d'eau, tout en améliorant sa qualité :
- - rincer à l'eau chaude,
- - utiliser une eau de bonne qualité, surtout pour les rinçages critiques,
- - se servir de cascade à contre-courant : les bains se déversent l'un dans l'autre du plus propre au plus souillé,
- - réduire le volume et la concentration d’entraînement en recyclant.
Cette dernière approche consiste à recycler les bains pour réduire la consommation d'eau et de produits chimiques. Elle diminue aussi le volume des effluents rejetés en espaçant des vidanges.
Pour recycler les bains, différentes approches sont possibles. Elles ont fait leur preuve. Elles seront retenues au cas par cas.
Entraînement en g/L – Système de rinçage
0,10 l/m² | 0,15 l/m² | 0,20 l/m² | 0,25 l/m² | 0,30 l/m² | 0,35 l/m² | 0,40 l/m² | 0,50 l/m² | |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Simple courant | 80 | 53 | 40 | 32 | 27 | 23 | 20 | 16 |
Simple courant avec ECO | 100 | 107 | 60 | 43 | 36 | 31 | 21 | 18 |
Cascade 2 postes | 6 000 | 2 840 | 1 600 | 1 000 | 710 | 470 | 320 | — |
Cascade 2 postes + ECO | 128 000 | 56 600 | 33 000 | 22 400 | 14 600 | 11 700 | — | — |
Cascade 3 postes | 100 000 | 100 000 | 64 000 | 32 700 | 18 900 | 11 900 | 8 000 | 4 100 |
Cascade 3 postes + ECO | — | 65 400 | 37 800 | 23 800 | 16 000 | 10 800 | 6 500 | — |
Cascade 4 postes | 700 000 | 700 000 | 100 000 | — | — | — | — | — |
Cascade 4 postes + ECO | — | 100 000 | — | — | — | — | — | 65 500 |
Tableau 2 : Valeur du rapport de dilution limite pour un débit d’eau de rinçage imposé à 8 l/m². Ce tableau est présenté en fonction du système de rinçage et de l’entraînement.
☐ Rinçage grossier inter-opération (Rd < 500) ; ⬞ Bon rinçage (Rd 500 à 2000) ; ▷ Rinçage de qualité (sortie des pièces) (Rd 2000 à 10 000).
(Source : Société Alfa-Laval)
En fonction de la nature des bains de rinçage, du volume à traiter et du résultat attendu. Une étude préalable soignée optimise les investissements et les coûts de fonctionnement.
Prolonger la durée de vie des bains...
Pour augmenter la durée de vie des bains de dégraissage, il suffit de limiter l’augmentation de la teneur en huile et en matières décantées, par un traitement continu. Ce traitement peut être réalisé par un écrémage des corps gras en flottation. Serep propose plusieurs solutions de séparation physique des huiles, des écrémeurs autostables et un séparateur déshuileur.
Pour pousser plus loin la séparation, une approche dynamique peut être mise en œuvre. Il s’agit de la centrifugation. «Cette méthode permet d’extraire les huiles, elle sépare deux phases de densité différentes», précise Louis-Marie Girard, Président-directeur général d’Hytec Industrie, une entreprise qui commercialise cette technologie. Bien utilisée, la centrifugation permet le recyclage complet des bains. Matra Automobile en est l’exemple (voir encadré). L’entreprise tourne depuis trois ans sans avoir changé ses bains.
Si la centrifugation est intéressante, elle ne peut être mise en œuvre dans tous les cas. Quand la proportion d’huile en solution est trop importante, il faut se servir de la filtration.
Retenir les molécules polluantes
La filtration sur membrane, encore appelée ultra ou micro-filtration, selon la taille des pores, est un procédé couramment utilisé. Il retient les macromolécules présentes dans l’effluent, lesquelles constituent une source majeure de DCO. La partie filtrante est placée à la suite d’un déshuileur mécanique. Le fluide est ensuite filtré avant d’alimenter le module de filtration. La filtration permet d’arrêter les particules solides susceptibles de boucher les pores de la membrane. La filtration est réalisée sous pression. Le rétenteur (résidu de traitement) est stocké dans un bac, alors que le perméat (produit dégraissant) est recyclé dans les bains de traitement. «Cette technologie permet de conserver une concentration stable d’huile dans le bain», souligne-t-on chez SAAE, «et l’apport automatique de tensioactif garantit une efficacité constante du dégraissage». Car c’est bien là un des seuls inconvénients de l’ultrafiltration : la membrane retient en plus une partie des tensioactifs. Il faut donc réactiver le bain.
Tout aussi utilisée, mais moins efficace que l’ultrafiltration, les résines échangeuses d’ions s’adaptent bien au recyclage des effluents à faible charge de pollution, dont le débit est important. Les bains de dégraissage, de décapage, ou encore les bains d’oxydation anodique (pour l’élimination de l’aluminium) peuvent être traités par cette méthode. Les polluants se fixent sur les résines. Lorsque le support est saturé, il est régénéré. Il faut souligner que les échangeurs d’ions ne sont pas des filtres absolus. Ils ne retiennent pas tous les produits contenus dans l’effluent. Pour donner toute satisfaction, une étude d’intégration, là aussi s’impose.
La cristallisation (ou sulfaterie) peut être une bonne approche pour recycler certains bains de décapage. Il s’agit d’abaisser la solubilité du sulfate ferreux contenu dans l’effluent, soit par une diminution de la température, soit par évaporation sous vide. Lorsque les conditions sont favorables, il ne reste plus qu’à récupérer les cristaux précipités.
Récupérer les métaux dissous
Pour récupérer les métaux dissous plusieurs technologies sont disponibles. Le choix sera établi en fonction du devenir du métal récupéré : recyclage ou déchet.
Conçue pour récupérer les métaux précieux en solution, pouvant être valorisée, l’électrode poreuse percollée de Solymep est un équipement très sophistiqué. La cathode volumique est constituée d’un lit granulaire en graphite d’une surface de dépôt minimale de 1,8 m²/0,8 l/kg. L’agitation permanente des granulés évite les colmatages et les court-circuit. Les granules ne collent pas,
Polluer moins, c'est aussi bien conduire son process. Et pour cela, on n’échappe pas aux mesures et à la régulation des bains. Les compteurs d'eau, les débitmètres, les limiteurs de débit, les régulateurs de pression sont aussi indispensables que les sondes de mesure du pH ou de la température. Les détecteurs de fuite sont aussi des équipements importants, ils préviennent à temps des accidents.
d’où un échange solution-cathode efficace et une faible perte du débit. Lorsque la cathode est saturée, le métal déposé sur les billes de graphite est recyclé, puis, ces dernières sont restituées au client pour une nouvelle opération. La technique de l'électrolyse permet d'oxyder les cyanures contenus dans la solution. Pour les métaux communs, le recyclage trop élevé n'est pas réalisé. Cependant l'équipement peut avoir un intérêt, dès que l’on veut réduire son volume de déchet. « Dix kilogrammes de cuivre récupéré par l'électrolyseur », explique Monsieur Branche de Solymep, « c’est une tonne de moins de boue d'hydroxyde en station de traitement ».
Et c'est bien là une des nouvelles applications de l'électrolyse qui peut, par un allégement de la charge métallique, réduire considérablement le volume des boues à évacuer. Cependant, utilisée seule, cette technique n’est pas aujourd’hui en mesure d’éviter tous les rejets de métaux dans les effluents des ateliers. Elle ne fait que les réduire. Hytec Industrie, qui commercialise le procédé Actimag, met en avant l’absence de toxicité du procédé. Il réduit le chrome hexavalent en chrome trivalent sans utilisation de bisulfite de sodium, un additif qui émet des vapeurs toxiques et corrosives. Ce procédé assure aussi la cémentation du cuivre et sa récupération sous forme valorisable. « La méthode permet de travailler sur un flux relativement important et sur un effluent qui n’est pas forcément électrolysable », explique Louis-Marie Girard.
Le procédé d’électrodialyse permet d’extraire les ions contenus dans une solution par migration à travers des membranes sélectives sous l'influence d’un champ électrique.
Quant à l’électro-électrodialyse, elle couple les effets de l'électrolyse et de l’électrodialyse en interposant une membrane entre les deux électrodes. Au phénomène d’électrodialyse (filtration sélective des anions et des cations) s’ajoutent les réactions aux électrodes : oxydation à l’anode et réduction à la cathode.
Une autre approche consiste à concentrer l’effluent. Réalisée sous vide, cette opération permet aussi de recycler l'eau condensée. Geysers a mis en place chez Rabourdin Industrie un évaporateur WISE 2000 d’une capacité évaporatoire de 2000 l/jour. Cette installation placée sur le circuit des eaux de lavage a permis à l’entreprise de supprimer ses rejets liquides.
Chez Proserpol on se sert même d'un évaporateur sous vide pour concentrer la DCO soluble, un pré-traitement physico-chimique. Ce procédé utilise un système double effet de 1200 l/h avec chauffage au gaz et faisceaux arrosés.
Quant à Hytec Industrie, l’entreprise propose des solutions réalisées à la demande et à basse consommation énergétique. « Nos évaporateurs ne sont pas figés et nous nous adaptons aux besoins en fonction des conditions de fabrication et des applications attendues », précise Louis-Marie Girard. « Sur une petite unité, nous placerons une pompe à chaleur, alors que la compression mécanique de vapeur sera plus intéressante pour les débits élevés », explique-t-il encore.
Une autre méthode d’extraction proposée
Des effluents de laminage traités par aéroflottation et traitement physico-chimique
Sur son site de Basse-Indre (44), Sollac fabrique des tôles d’acier pour emballage. La production s’organise autour d’une unité de laminage à froid et de deux ateliers de chromatage et d’étamage. Les effluents issus du laminage des tôles se composent d’une eau déminéralisée, de suif de bœuf (utilisé comme lubrifiant pour l’opération de laminage) et de calamine. Le débit, compris entre 0 et 160 m³/h, est discontinu. Il est lié au fonctionnement du laminoir.
« L’équipement est destiné à produire un effluent pouvant être rejeté dans le milieu naturel, explique François Morier, directeur général de Proserpol, mais aussi d’obtenir un déchet dont la gestion sera la moins coûteuse possible. »
L’installation fonctionne en deux étapes. La première travaille sans réactif et produit une boue huileuse la plus concentrée possible. Compte tenu du fort pouvoir calorifique interne du produit (PCI), elle peut être vendue à des cimentiers. Une autre valorisation peut être envisagée : le recyclage. Le suif est alors réintroduit à l’étape de laminage. Ce second choix nécessite la mise en place d’un traitement chimique complémentaire.
La seconde étape consiste en un traitement physico-chimique. Il permet d’obtenir un effluent rejetable dans le milieu naturel. Les boues, produites en moins grande quantité que dans un traitement unique, sont mises en décharge.
Chaque étape fonctionne sur le schéma suivant. D’abord, un dégrillage enlève les matières en suspension de forte taille comme les boules de suif. Puis l’effluent est tamisé avant de subir une aéroflottation directe. Ce procédé, mis au point et breveté par Proserpol/SGN, permet de flotter le suif usagé pour obtenir une boue de faible concentration en eau. L’effluent restant est ensuite mis à pH puis stocké pour la seconde étape.
Le deuxième traitement consiste en une coagulation, une oxydation et une floculation des polluants par procédé physico-chimique. De nouveau, une étape d’aéroflottation sépare les boues présentes. Cette installation fonctionne en continu, mais à très faible débit.
Avant de choisir la coagulation, Sollac a réalisé des essais sur l’électrocoagulation, explique François Morier : « après un essai comparatif, la coagulation est retenue, car plus facile à régler et moins coûteuse que ses concurrentes ».
L’aéroflottation 2 par Hytec Industrie permet de séparer deux liquides. C’est l’extraction liquide-liquide. Mise au point au CEA, elle est surtout intéressante pour extraire de façon sélective une base, un acide ou un métal. Il faut pour cela trouver un solvant sélectif du produit à extraire. De plus, ce solvant doit pouvoir être récupéré par séparation avec de l’eau déminéralisée. Elle apporte une solution de récupération (et séparation) des métaux stratégiques que sont le nickel, le cobalt, le zinc, le cadmium, etc. Elle permet encore de récupérer les ions Cr³⁺ sous forme de chromate de sodium ou de potassium.
Lorsque toutes les approches de recyclage ont été réalisées, que toutes les méthodes de récupération ont été envisagées, il reste ce qui n’est pas recyclable. Il faut alors mettre en place des unités de traitement physico-chimique des effluents.
Le traitement physico-chimique
Si les techniques de filtration retiennent la plupart des molécules d’origine organique source de DCO, une oxydation avancée, par traitement physico-chimique, peut se révéler nécessaire pour abattre la DCO soluble, décomplexer les bains et récupérer le maximum de polluants toxiques avant son rejet dans le circuit traditionnel. SAAE commercialise la technologie Skid. Le traitement consiste en une neutralisation à la chaux.
Puis, le phosphore et les métaux lourds sont précipités sous forme de phosphate de calcium insoluble et d’hydroxydes métalliques. Une injection de polyélectrolyte assure la floculation.
Une décantation des matières en suspension est nécessaire. Les boues formées sont récupérées puis traitées comme déchet industriel. Les effluents clarifiés, récoltés en surverse du décanteur, sont dirigés vers l’émissaire.
Le traitement des bains dégraissants avant rejet suit à peu près le même schéma. L’effluent est traité par acidification, coagulation minérale, neutralisation à la chaux, floculation et décantation. Cette procédure génère beaucoup de boues et nécessite de grande quantité de produits et une installation appropriée.
Pour résoudre le délicat problème des émulsions, CFPI Industries propose une méthode de traitement organique basée sur le développement d’une macromolécule de charges positives régulièrement réparties sur une chaîne longue. Les briseurs d’émulsion développés par l’entreprise permettent de traiter avec une seule molécule et en une étape ce problème.
En fait, le traitement physico-chimique s’adapte. Le conditionnement est réalisé sur mesure, ou presque, selon la nature de l’effluent à traiter. Les tendances actuelles étant de produire moins de boues, et des boues moins chargées en métaux lourds. En attendant, des entreprises comme Elf Atochem se penchent sur le problème. Les recherches ont conduit à mettre au point un procédé de traitement physico-chimique simple et efficace, permettant d’abattre les polluants.
métaux lourds en solution.
Ce réactif, appelé Metland 30, est produit par MLPC (Manufacture Landaise de Produits Chimiques). Présenté aux Journées de l’eau de Poitiers en septembre 1996, par J. Grévin du Centre d’Application de Levallois, ce procédé « permet d'abattre les métaux lourds présents dans les effluents urbains ou industriels, en particulier le cadmium, le nickel, le cuivre, le plomb, le cobalt et le mercure ». Le complexe formé est précipité.
Décanté, il est éliminé du milieu aqueux. Les boues produites devraient pouvoir, ensuite, être étendues en milieu agricole. Une fois validée, cette méthodologie pourrait être une des solutions au délicat problème des boues.
Le problème des boues
Aucun des industriels du traitement de surface ne peut échapper au problème des boues. Car si l’on peut envisager un recyclage des bains et un zéro rejet des effluents liquides, il n'est pas envisageable aujourd’hui de supprimer les boues.
Ce problème est d’autant plus crucial que la législation sur les boues évolue à grands pas. Des changements devraient arriver dès avril 1998. Ensuite, l’horizon 2002 se profile. Alors, seuls les déchets ultimes pourront être stockés.
Il devient donc important de bien gérer son processus de fabrication et sa station physico-chimique pour limiter la fabrication de boues et les surcoûts qu’elles entraînent.
Cette limitation passe par un choix drastique du procédé de fabrication et par une connaissance parfaite des équipements qui en découlent. L’objectif à terme est de réduire les pollutions à la source, avant le procédé de traitement des polluants. Mais cette approche nécessite le plus souvent l’adoption de technologies dites « propres », donc une reconception en amont des unités de production.
Des études sont également menées pour produire des boues moins toxiques. L’approche menée par Elf Atochem en est un exemple.
Une autre consiste à fixer les ions métalliques avec une efficacité mille fois plus élevée qu'avec les procédés de récupération classiques. Pour cela, des textiles échangeurs d'ions, mis au point à l’ITF (Institut Textile de France), remplaceront les résines. Cette étude a fait l'objet d’un contrat européen Brite-Euram coordonné par Protection des Métaux, une PME spécialisée dans le traitement de surface. Elle est associée dans cette aventure à des industriels utilisateurs français, belges et espagnols.
Le CNAM (Conservatoire National des Arts et Métiers) et l'Université Pierre et Marie Curie sont partenaires aux côtés de deux centres techniques, le Cetim et l’ITF.