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L'eau et la corrosion dans les installations de vapeur

30 octobre 1985 Paru dans le N°95 à la page 97 ( mots)
Rédigé par : Jacques WNUCK

Gestra

La composition chimique de l’eau de forage dépend, en premier lieu, de la nature des sols qu’elle traverse : s’ils contiennent, par exemple, du calcaire (CaCO₃), celui-ci est transformé par le gaz carbonique de l’eau de pluie (CO₂) en carbonate de calcium Ca(HCO₃)₂ qui est facilement soluble.

On trouve souvent de l’oxygène dans les eaux de source ; les eaux souterraines, par contre, n’en contiennent que peu ou pas. Les eaux de surface et les eaux pluviales en sont saturées.

On rencontre également dans l’eau de surface de l’acide carbonique libre, mais en quantité réduite (dans la plupart des cas, moins de 10 mg/l). L’eau de source en possède entre 10 et 3 000 mg/l. La concentration diminue rapidement au contact de l’atmosphère.

La cause principale de la corrosion dans les tuyauteries de vapeur est la présence de CO₂ et O₂. Lorsque la désaération et le traitement chimique de l’eau d’alimentation de la chaudière sont insuffisants, CO₂ et O₂ sont entraînés par la vapeur dans l’installation.

La corrosion provoquée par l’acide carbonique est due à l’hydrogène qu’il contient. Son degré dépend de la concentration en ions d’hydrogène libres (ions H⁺), la corrosion étant d’autant plus importante qu’ils sont plus nombreux.

L’anhydride carbonique se combine à l’eau et forme l’acide carbonique H₂CO₃ qui, en faible dissociation, réduit la valeur du pH et — comme tous les acides — corrode les surfaces métalliques. Les eaux naturelles contiennent toujours de l’acide carbonique libre qui peut être éliminé par désaération thermique. Si l’eau d’appoint n’est pas traitée dans une installation de déminéralisation totale ou par distillation, la vapeur, et par conséquent le condensat, comportent de l’acide carbonique provenant de la dissociation des bicarbonates et carbonates de soude, qui s’effectue dans la chaudière à pression et température élevées.

L’anhydride carbonique entraîné par la vapeur entre en solution avec le condensat formé lors du refroidissement de celui-ci, pour produire de l’acide carbonique aqueux (H₂CO₃) qui corrode le fer en constituant, à des températures inférieures à 250 °C, du bicarbonate ferrique [Fe(HCO₃)₃] et, à des températures supérieures, du carbonate ferreux (FeCO₃). La quantité d’anhydride carbonique entrant en solution avec le condensat varie considérablement et dépend, entre autres, de la disposition des tuyauteries de condensat ; en aval des poches d’eau, par exemple, ou dans les angles morts, la concentration est quelquefois supérieure à la normale.

L’anhydride carbonique, même en concentration élevée dans la vapeur provoquée par la présence importante de carbonates dans l’eau d’alimentation, restera, à température élevée du condensat, pratiquement à l’état gazeux ; sa solubilité est extrêmement faible.

L’utilisation de vapeur contenant de l’acide carbonique n’est pas souhaitable dans les chaudières à vapeur, les tuyauteries de vapeur, les préchauffeurs haute pression, les échangeurs de chaleur et les tuyauteries de condensat.

Bien que, par suite de la désaération et de la valeur élevée du pH, sa présence soit rare, l’acide carbonique libre ou combiné peut être éliminé en grande partie par un traitement approprié. D’autre part, des concentrations d’acide carbonique de 5 mg/l dans le système vapeur/condensat peuvent être neutralisées par l’alcalinisation des surfaces métalliques.

Le traitement chimique de l’eau d’alimentation est étudié en détail dans la littérature technique. Nous nous limiterons à quelques aspects de l’élimination du CO₂ :

— par le phosphate trisodique :  
Na₃PO₄ + H₂O → Na₂HPO₄ + NaOH  
2 NaOH + CO₂ → Na₂CO₃ + H₂O  
formation de précipités insolubles en chaudière et combinaison du CO₂ ;  
— par l’ammoniac :  
CO₂ + 2 NH₃ + H₂O → (NH₄)₂CO₃  
(NH₃ est injecté dans la vapeur et combiné à l’anhydride carbonique libre) :  
combinaison du CO₂ et formation d’une couche protectrice carbonatée dans les tuyauteries ;  
— par le traitement aux amines (sels ammoniacaux) :  
(NH₄)₂SO₄ + 2 NaOH → Na₂SO₄ + 2 H₂O + 2 NH₃  
2 NH₃ + CO₂ + H₂O → (NH₄)₂CO₃  
neutralisation du CO₂, avec formation d’une couche protectrice carbonatée dans les tuyauteries.  

La corrosion provoquée par l’oxygène est de nature électrochimique ; elle ne peut se produire que dans une solution aqueuse qui en contient. Elle peut intervenir dans les eaux neutres, acides ou alcalines mais jamais, pendant le fonctionnement, dans les tuyauteries sèches, c’est-à-dire transportant de la vapeur surchauffée.

Par contre à l’arrêt de l’installation les parois

en acier, au contact du condensat qui se forme, sont en présence de l’oxygène, soumises à un risque de corrosion particulièrement important.

Comme la structure du métal de la chaudière est rarement homogène, la corrosion due à l’oxygène se produira en règle générale à une électrode hétérogène, c’est-à-dire entre des points de potentiel électrolytique différents. Sur les tôles d’acier, on trouve toujours de tels points : cordons de soudure, déformations plastiques (avec contrainte propre), variations de composition du métal, ressuages, couches d’oxyde de fer, etc. Les parties soumises à des efforts mécaniques présentent également un potentiel moins électropositif que la matière de base, et subissent plus facilement une charge anodique. Si la caractéristique anodique se limite à une superficie réduite et si sur la cathode, elle s’étend à une superficie plus grande, la corrosion par piqûre se produit.

La corrosion pendant l’arrêt des installations présente un problème grave. Il existe beaucoup d’installations industrielles telles que blanchisseries, manufactures de pneumatiques, industrie du contre-plaqué, industrie alimentaire, etc., où la production est arrêtée plusieurs fois par jour ou, au moins une fois par semaine ; par conséquent, de l’air pénètre dans l’installation.

Lors du redémarrage, nos purgeurs thermiques des séries MK et BK assurent un réchauffage rapide de l’installation. Comme ces purgeurs réagissent à la pression et à la température, ils sont complètement ouverts au début du réchauffage et assurent un débit important. Ils se ferment juste avant d’atteindre la température de saturation.

Ces purgeurs sont donc à utiliser avec profit comme désaérateurs au démarrage et en service continu, par exemple sur les autoclaves, évaporateurs, bouilleurs, chaudières à brasser...

Combinaison chimique de l’oxygène

L’eau d’alimentation ne peut contenir qu’une quantité déterminée d’oxygène qui dépend de la température, soit : 5,50 g/m³ à 50 °C ; 0,86 g/m³ à 95 °C ; 0,18 g/m³ à 99 °C.

La teneur en oxygène peut être réduite à 0,02 — 0,05 g/m³ en fonction de la température et du type du dégazeur utilisé. Le reste de l’oxygène est alors combiné par addition d’hydrazine (N₂H₄), de lévoxine ou de sulfite de soude, avec la réaction suivante en ce qui concerne l’hydrazine :

N₂H₄ + O₂ → 2 H₂O + N₂.

L’azote (N₂) est un gaz inerte et complètement inoffensif.

Pour les dégazeurs fonctionnant à des températures supérieures à 100 °C, 0,1 – 0,2 mg N₂H₄/l suffisent pour combiner le reste de l’oxygène ; à des températures plus basses la quantité d’hydrazine utilisée doit être plus élevée.

La corrosion peut être évitée pendant l’arrêt de l’installation en augmentant la quantité d’hydrazine (environ trois fois plus).

En l’absence de traitement chimique de l’eau, la corrosion attaquera d’abord la chaudière, les tuyauteries de vapeur et les utilisateurs de vapeur. Les tuyauteries de condensat seront également attaquées, la condensation de la vapeur libérant constamment O₂ et CO₂.

Mesure des valeurs du pH

Le pH du condensat est influencé par les ions H⁺, OH⁻, CO₂ et les sels (sulfates, chlorures, carbonates).

L’alcalinité ou l’acidité d’un échantillon d’eau est mesurée à l’aide d’électrodes de mesure du pH. Une valeur mesurée de 5,3 par exemple, ne donne pas d’indication sur la concentration en CO₂ ; celle-ci ne peut être déterminée que par analyse. Le CO₂ peut même être totalement inexistant mais on le rencontre parfois en présence d’ions H⁺, de chlorures ou de sulfates.

[Photo : Figure 1.]

Conclusion

Notre conclusion sera soulignée par un diagramme indiquant le taux de corrosion en fonction du débit de condensat (figure 1). On y voit par exemple qu’avec un débit de condensat de 200 kg/h chargé de 3 mg/l de CO₂ (ce qui correspond à 600 mg/l/h dans la tuyauterie), le taux de corrosion est d’environ 0,57 mm par an. De tels débits de condensat ne se produisent que dans les échangeurs importants ; dans les systèmes de tracers où les débits sont beaucoup moins élevés (5 – 20 kg/h) le taux de corrosion est plus faible : par exemple, avec un débit de condensat de 10 kg/h (soit un taux de 30 mg/l de CO₂ par heure dans la tuyauterie) la corrosion se réduit à une fraction de millimètre par an, ce qui est tout de même à éviter.

Dans les installations de vapeur modernes, le CO₂ et l’O₂ doivent donc être totalement éliminés en traitant l’eau d’alimentation ; il n’est pas possible, en particulier, d’évacuer complètement le CO₂ par des diaphragmes ou des purgeurs, car la condensation de la vapeur provoque alors la combinaison de CO₂ et H₂O pour former de l’acide carbonique, quel que soit le type de purgeur installé.

Il faut noter qu’un traitement insuffisant de l’eau d’alimentation peut entraîner la détérioration d’une installation.

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