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L'aéroéjecteur: un centenaire en pleine forme

30 novembre 1998 Paru dans le N°216 à la page 48 ( mots)
Rédigé par : Gérard BOCQUAIRE

L'aéroéjecteur assure le refoulement des eaux usées dans un réseau de transport sous pression, en utilisant l'air comprimé comme source d'énergie. Simples, robustes, fiables, ces appareils qui existent depuis le début du siècle, ont évolué, avec les progrès techniques et sont aujourd'hui indispensables pour qui cherche à résoudre des problèmes de relevage et d'assainissement, tout en garantissant la sécurité du personnel, la fiabilité de la technique et en minimisant les coûts d'entretiens.

, Ingénieur CNAM, Directeur de Soterkenos

[Photo : Gérard Bocquaire]
[Photo : Poste de relevage, par aéroéjecteur, d’un important laboratoire de cosmétiques]

Le brevet d'origine, de l’aéroéjecteur système PYR, a été déposé en 1917. L'absence d'organe mécanique ou électrique entre l'admission et le refoulement confère à l'aéroéjecteur, sur tout autre type de pompe, une incontestable supériorité.

Depuis cette date, l'aéroéjecteur a beaucoup évolué, pour faire appel, comme en 1979, aux techniques pneumatiques les plus performantes, ou en 1984, au système d'oxygénation des effluents.

Principe de fonctionnement

L'aéroéjecteur fonctionne par admission d'air comprimé dans une cuve de petite dimension (50 litres pour un appareil de 10 m³/h d’eaux usées). Son fonctionnement est donc cadencé : phase de remplissage et phase de refoulement.

L'appareil se compose d'une cuve, en acier galvanisé, comprenant :

  • dans la partie inférieure, et de part et d'autre, une entrée et une sortie, munies chacune d'un clapet ;
  • à la partie supérieure, une tubulure soumise alternativement à la pression et à l'échappement et un détecteur de niveau ;
  • un jeu de vannes pneumatiques ;

Un détecteur à chute de pression et un cof-

[Photo : Figure 1 : Remplissage : la cuve étant à la pression atmosphérique, le clapet d’arrivée s’ouvre, et la cuve se remplit.]

Coffrets de commande pneumatique, entièrement automatiques, pilotent l’opération, qui se déroule en trois phases démontrées dans les figures 1, 2 et 3.

L’aéroéjecteur est alimenté en air comprimé, soit par un compresseur individuel (fosse de relevage), soit par un réseau d’air comprimé. En cas de rupture d’alimentation électrique, le secours peut être assuré par un compresseur mobile.

Caractéristiquesdes aéroéjecteurs

Hormis les données qui figurent dans le tableau (voir figure 4), les aéroéjecteurs présentent bien d’autres caractéristiques :

  • - Sécurité : étant donné les risques d’accident encourus par le personnel d’installation et d’entretien, c’est la qualité la plus remarquable de l’aéroéjecteur. En effet, dans les postes de relevage, sans dispositif de protection, les émanations d’H₂S peuvent être mortelles.

    Or, avec l’aéroéjecteur, ces risques disparaissent, puisque les effluents sont stockés dans la cuve de l’appareil.

    De plus, inévitable dans tous les cas où le temps de séjour des effluents dans les canalisations est important, la formation d’H₂S est combattue efficacement par l’injection d’air comprimé, dans les aéroéjecteurs, sous forme de micro-bulles.

[Photo : Figure 2 : Refoulement : la cuve étant remplie, le détecteur de niveau, par l’intermédiaire du coffret de commandes, inverse les fonctions des vannes pneumatiques. Sous l’effet de la pression de l’air comprimé, le clapet d’arrivée se ferme, le clapet de refoulement s’ouvre et le liquide est chassé.]
[Photo : Figure 3 : Échappement : une fois la durée de phase de refoulement atteinte (temporisation pneumatique), les vannes « air comprimé » reviennent à leur position « repos ». L’air comprimé contenu dans la cuve s’échappe, et le clapet de refoulement se ferme.]

L’injection séquentielle de micro-bulles par l’intermédiaire d’un diffuseur positionné au-dessus du clapet de refoulement permet de lutter, par oxygénation directe des effluents, contre la formation et le dégagement d’H₂S. Un coffret de commandes assure le réglage des différents paramètres : temps-cadence-débit-pression. Une injection cadencée d’air à haute pression évite le colmatage du diffuseur (voir figure 6).

  • - Performances : la gamme des appareils standard va jusqu’à 250 m³ d’eaux usées. La hauteur géométrique de refoulement correspond à 10 m de colonne d’eau par bar de pression d’air comprimé. À ce jour, la hauteur totale réalisée est de 53 m, ce qui ne constitue pas une limite aux possibilités de l’appareil.

  • - Fiabilité : si l’on se réfère aux milliers d’installations existantes, la durée de vie moyenne d’un aéroéjecteur est d’environ 20 ans. Certains appareils, toujours en fonctionnement et en parfait état de marche, ont été installés, à Paris, voilà plus de trente ans. Par ailleurs, une heure chaque trimestre par appareil en visite programmée, et un coût pratiquement négligeable de pièces détachées, en entretien, attestent de la robustesse et de la fiabilité de l’aéroéjecteur.

[Photo : Figure 5 : Caractéristiques des aéroéjecteurs.]
  • - Respect de l’environnement : stockés dans la cuve de l’appareil lui-même, les effluents ne sont pas en contact direct avec l’atmosphère. Les installations de transfert d’eaux usées, par aéroéjecteurs, sont donc totalement inodores, et les fosses de relevage restent sèches.

  • - Robustesse : l’aéroéjecteur qui fonctionne avec des canalisations de 80 mm de diamètre « avale » les effluents les plus chargés qui ne buttent jamais contre des pièces mécaniques tournantes. Cette caractéristique supprime les risques d’obstruction et permet un fonctionnement sans dégrillage (les vannes de brassage ou les dispositions géométriques particulières en fond de fosse n’ont pas lieu d’être).

  • - Adaptabilité : la vitesse d’autocurage reste constante dans la conduite de refoulement, quel que soit le débit d’arrivée et la résistance hydraulique du réseau.

    Par ailleurs, le risque de « coup de bélier » est pratiquement inexistant, puisque le refoulement s’effectue par mise en pression et non mise en vitesse des effluents. À la fermeture du clapet de refoulement, la colonne d’eau repose sur un matelas d’air comprimé. Celui-ci va se détendre pour occuper tout le volume créé par l’inertie de la colonne. Le volume d’air sera réglable par simple augmentation de la durée du refoulement.

  • - Esthétique de l’installation : posé tout au

Figure 4 : Certaines caractéristiques des aéroéjecteurs

Aéroéjecteur Type1005A1006A1020A101510201030104010501060108011001120115012001250
Débit (m³/h)561015203040506080100120150200250
Ø entrée (mm)100100100100125125150150150200250250250300300
Ø refoulement (mm)80808080100100125125125150200200250250300
Volume cuves (l)25303050751001502003004005006007208801250
Masse ensemble (kg)16514515020022028035038041060068072088010351250
Cote “A” (mm)7557708278928871027102710271035130013731373144515951653
Cote “C” (mm)97111011191123713371533153315331633190022002200270028803220

Fond de la fosse sèche, surmonté du compresseur, l’installation intérieure de l’aéroéjecteur est d’un accès agréable pour le personnel d’entretien (Photo 2).

L’installation extérieure s’harmonise avec le paysage, évoquant, par exemple, la margelle d’un puits (Photo 3).

Les applications

Les caractéristiques de l’aéroéjecteur rendent sa présence indispensable dans trois secteurs d’activité où les indices de satisfaction, liés à son installation, abondent.

Il y a tout d’abord le secteur qui a contribué, depuis ses origines, à la notoriété de la marque :

- L’Urbanisme : en zone urbaine, il est rapidement devenu l’outil indissociable du relevage des eaux usées. Sa longévité sans égale et sa fiabilité garantissent une tranquillité à toute épreuve. L’air comprimé, par sa souplesse de mise en œuvre, apporte l’énergie nécessaire à d’autres utilisations immobilières, telles que commandes de régulation de chauffage et climatisation, portes pneumatiques, surpresseurs d’eaux etc. À Paris, plusieurs milliers d’appareils fonctionnent, parfois depuis plus de trente ans, dans la quasi-totalité des bâtiments destinés au public : ministères, hôpitaux, aéroports, gares SNCF, stations de métro (plus de 1000 installations). Les monuments célèbres et les plus visités de la capitale, comme la Tour Eiffel, le Musée du Louvre, l’Assemblée Nationale, le Palais Omnisport de Bercy, et plus récemment la Grande Bibliothèque de France, sont équipés d’aéroéjecteurs.

- L’Industrie : l’efficacité, la robustesse et la sécurité indissociables de l’aéroéjecteur en font une pompe de relevage sans égale partout où les conditions de fonctionnement sont difficiles et les fluides particulièrement chargés. Ses très grands diamètres de canalisation d’admission ou de refoulement lui permettent de refouler en passage « direct » des déchets importants. Pour le transport des fluides agressifs, l’aéroéjecteur peut être réalisé en inox et équipé de clapets spéciaux (Viton, PVDF, PTFE…). Dans les industries papetières, chimiques, pétrolières, agro-alimentaires, sidérurgiques, il est irremplaçable ; Nestlé, Coca-Cola, Dassault, Essilor, ou Saint-Gobain, entre autres, utilisent les aéroéjecteurs.

- L’Assainissement : depuis 1970, il participe à la protection des fleuves et rivières, en assurant, dans les réseaux d’assainissement, le transfert des eaux chargées vers les stations d’épuration. Installé en fosse enterrée, l’aéroéjecteur, en « avalant » les eaux usées, supprime les dégrillages et les stagnations d’effluents, et diminue considérablement la formation d’H₂S. Dans la station d’épuration même, l’aéroéjecteur assure l’évacuation des boues issues du traitement des effluents. En Seine-Maritime, dans le Finistère, dans la Loire-Atlantique, ou dans la Corrèze, par exemple, les réseaux d’assainissement des communes ou des stations d’épuration s’équipent d’aéroéjecteurs.

Description d’un poste de relevage aéroéjecteur

Globalement, un poste aéroéjecteur se défi…

[Photo : Le poste de Montépile, dans le Jura]
[Photo : Le poste de Botsorel, dans le Finistère]
[Photo : Système intégré d’oxygénation des effluents – Diffuseur de microbulles, Régulateur de débit d'air, Vanne pneumatique de commande, Aéroéjecteur, Boîte à clapet de refoulement]

Il fonctionne comme un poste classique. Toutefois, certaines caractéristiques, propres aux aéroéjecteurs, doivent être prises en compte.

  • - Le débit de refoulement est égal au double du débit nominal de l'appareil. La vitesse d'autocurage est donc obtenue quel que soit le débit réel d’effluents.
  • - La hauteur de refoulement reste constante sur toute la plage de débits (de 0 % à 100 %). Elle ne dépend, en aucun cas, de l'aéroéjecteur lui-même, mais uniquement de la pression d'air comprimé.

Dans le cas d’un poste isolé, le compresseur d'air, jusqu’à une puissance de 4 kW (400 eq.hab., HMT = 15 m) est installé en partie haute du génie civil. Le génie civil est surélevé d’environ 0,50 m, afin de permettre la ventilation du compresseur.

Dans le cas de postes plus importants, le compresseur est installé dans un abri annexe, type abri EDF. Le génie civil n'est alors plus surélevé.

Dans le cas de réseau sous-pression à postes multiples, la production d’air comprimé est centralisée en un point unique, situé le long du réseau de refoulement.

Chaque poste aéroéjecteur sera alimenté en air comprimé par un tube PEHD, de faible diamètre, installé dans la même tranchée que les canalisations « eaux usées », gravitaires ou de refoulement.

Un poste de relevage, avec compresseur intégré, se compose de plusieurs éléments :

  • - le génie civil étanche, de 1600 mm de diamètre, en surélévation d’environ 0,50 m par rapport au terrain. La partie en surélévation comporte les grilles de ventilation ;
  • - l'aéroéjecteur, installé en fond de poste, de manière à ce que toutes les pièces soient accessibles, par simple démontage mécanique.

Toute la boulonnerie intérieure et extérieure est en acier inoxydable. Les canalisations d'arrivée et de refoulement sont en acier galvanisé ou PVC pression, et peuvent être en acier inox 316 L, en option.

Entre l'aéroéjecteur et la canalisation de refoulement est inséré un manchon antivibratile.

Pour les appareils équipés d’un système d'oxygénation incorporé, la boîte à clapets de refoulement sera munie d'un diffuseur de micro-bulles (voir figure 6).

  • - un réservoir d'air comprimé, fixé en élévation sur le génie civil, ou posé sur le fond de poste, galvanisé à l'intérieur et à l’extérieur, et équipé de ses organes de contrôle et de sécurité. Le réservoir est également équipé d'une prise en attente, permettant le raccordement d’un compresseur mobile, en cas de rupture de l’alimentation électrique ;
  • - un compresseur d’air, en version super insonorisée (niveau sonore inférieur à 60 dB), posé sur un caillebotis en acier galvanisé, ou en résine, formant un palier de sécurité intermédiaire. De technologie non lubrifiée, les compresseurs ne nécessitent aucune opération particulière d’entretien.

L’ensemble des automatismes de commandes est installé dans une armoire extérieure. Dans certains cas (risques de détérioration), il peut être installé en coffret séparé, à l'intérieur même du poste.

L’automatisme de commandes aéroéjecteur, entièrement pneumatique, permet un fonctionnement en marche forcée automatique. Ainsi, en cas d’arrivée trop importante d'eaux usées (mise en charge de l'installation ou présence anormale de graisse alimentaire ayant entraîné le blocage du flotteur en position haute), l'appareil se met immédiatement en « marche forcée automatique », c’est-à-dire à sa cadence de fonctionnement maximum, quel que soit le débit d'eaux usées.

Un coffret d’alarme permet de détecter les anomalies de fonctionnement (marche forcée automatique, niveau anormalement haut dans le regard amont, manque d’air…). Ce coffret d'alarme peut être relié à un coffret de télésurveillance.

[Photo : Coffret de télésurveillance]

Conclusion

Pour un centenaire, l'aéroéjecteur est en pleine forme : les projets d’équipement du futur métro d’Istanbul, ainsi que les projets d’assainissement envisagés par de nombreuses communes, attestent de sa bonne santé, à l'aube du deuxième millénaire…

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