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En lessivant les toitures des bâtiments et le sol de l'usine, les eaux de pluie se chargent de toutes les particules rejetées dans l'atmosphère qui se sont déposées sur toutes les surfaces à l'air libre. Elles se chargent ainsi de multiples polluants qu’il faut traiter. À travers deux exemples, nous décrirons ici les solutions retenues par une PME normande spécialisée dans le lavage de citerne et un industriel du raffinage.
Un traitement biologique chez Lavaouest
Filiale du groupe Charles André située dans la zone industrielle de Lillebonne (Seine-Maritime), Lavaouest est spécialisée dans le lavage de citernes de camions. Cette entreprise de 17 personnes reçoit chaque année 16 000 citernes qui transitent par ses installations. La provenance de ces conteneurs est extrêmement variée, ce qui diversifie d’autant les polluants à traiter. Ainsi, la société nettoie aussi bien des produits pulvérulents ou agroalimentaires comme le blé ou le lait, mais aussi n'importe quel produit chimique, ainsi que des hydrocarbures... Cette activité est classée par arrêté préfectoral dans la catégorie « transitaire de déchets ».
Pour l'entreprise, il est difficile d’estimer la quantité d’eau utilisée pour nettoyer une
[Photo : Le traitement consiste en un débourbeur déshuileur, destiné à la séparation des hydrocarbures.]
citerne, le lavage à haute pression nécessitant entre 30 minutes et plusieurs heures, selon les produits. Très peu de détergents sont utilisés. Le nettoyage est principalement effectué sous pression. L’ensemble des eaux de lavage sont récupérées et traitées. Les eaux pluviales, ruisselant sur les sols sont chargées également en produits divers et sont stockées. « Elles sont recueillies dans un bassin et analysées une fois par semaine. En fonction du résultat, elles sont orientées en tête de station d’épuration », explique le responsable du site.
Le traitement consiste en un débourbeur déshuileur, destiné à la séparation des hydrocarbures. Les eaux subissent ensuite un traitement chimique de floculation, puis traversent un bassin d’homogénéisation. La dernière étape consiste dans un traitement biologique dont le suivi est réalisé par l’équipe elle-même, formée à ces techniques. Ils se sont d'ailleurs équipés d'un microscope leur permettant de vérifier par eux-mêmes l’état biologique de l'eau en détectant les bactéries. Enfin, l’équipe a installé au sein de son équipement un bassin de truites. Plus qu'une mascotte, ces animaux sont également un excellent indicateur de l’état de la pollution et meurent rapidement dans une eau contaminée. Réalisée en l’an 2000, cette installation a représenté un investissement de l’ordre d'un million d’euros. Cette initiative a été récompensée dans le cadre du concours “eau pure - eau propre” organisé par l'agence de l'eau Seine-Normandie en 2000.
Traitement avec les eaux de process à la raffinerie Total
Les eaux pluviales, tombées sur l’aire d'une raffinerie de pétrole, se chargent en hydrocarbures et autres polluants par le lavage des sols. À la raffinerie Total de Gonfreville l’Orcher en Seine-Maritime, elles sont collectées puis intégrées au circuit de traitement des eaux de process. C'est donc l’ensemble “eau de pluie augmenté des effluents industriels” qui est traité globalement. En effet, si ces eaux doivent, en principe, suivre deux circuits différents, l’ancienneté des installations du site normand ne le permet pas actuellement. Il est prévu à moyen terme une modernisation complète des installations de traitement des eaux.
Les principaux polluants rencontrés dans ce type d'industrie sont les hydrocarbures bien sûr, en particulier les fractions lourdes et les matières en suspension provenant des coupes de pétrole brut : sables et boues. Parmi les polluants solubles, notons également la présence en quantité importante de phénols, qui ont une action sur la DCO, provenant de procédés de craquage catalytique. Les métaux lourds sont normalement déjà éliminés au niveau des procédés. On trouve également des dérivés ammoniacaux et sulfurés, des chlorures de fer, des fluorures. Au total, dans le cas de cette raffinerie les débits d'eau à traiter avoisinent les 1000 m³/h sur une année.
Les principaux traitements consistent dans une décantation en station suivie d’un écrémage, opération qui permet la récupération des hydrocarbures, recyclés ensuite dans l’unité de distillation de pétrole brut. Un traitement secondaire permet ensuite de récupérer les matières en suspension et les hydrocarbures par floculation. Le traitement final consiste en un traitement biologique qui permet l’élimination des phénols. La DCO rejetée en moyenne est inférieure à celle préconisée par la Drire avec 2800 kg/j de DCO contre 4000 kg/j. Dans le détail, ces rejets sont composés de 13 kg/j d’hydrocarbures, 400 kg/j de MES et de 2 kg/j de phénols. Enfin, les boues sont centrifugées et incinérées. En effet, « Elles contiennent des substances issues des procédés, en particulier des catalyseurs à base d’acides phosphoriques. Ces boues ne peuvent donc pas être épandues », indique le responsable environnement de la raffinerie. L'eau n'est pas recyclée mais est rejetée directement dans le canal de Tancarville.
Ce schéma est propre à celui de la raffinerie de Gonfreville. Selon les sites, il peut être différent. Dans le cas de la raffinerie de Grandpuits en région parisienne, le manque d’approvisionnement en eau brute, provenant en majorité de la nappe phréatique a conduit à recycler l’ensemble des eaux. Les eaux d’orage sont ainsi récupérées et intégrées au circuit de traitement avec les eaux huileuses et les eaux strippées. Elles subissent plusieurs opérations de traitement : pré-déshuilage, floculation, flottation, oxydation biologique puis filtration. À ce niveau sont intégrées les eaux pluviales et de ruissellement. L’ensemble est filtré sur sable et est recyclé dans les circuits incendie ainsi que dans les unités de réfrigération.
[Photo : Les eaux pluviales, tombées sur l’aire d'une raffinerie de pétrole, se chargent en hydrocarbures et autres polluants par le lavage des sols.]