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Hydrographie des plans d'eau

30 octobre 1984 Paru dans le N°86 à la page 55 ( mots)
Rédigé par : Bernadette ROBERT

De nombreux plans d’eau font l'objet de projets d’aménagement, notamment en vue de la réalisation de bases de loisirs destinées aux activités sportives (voile, baignade), ce qui nécessite en général la régularisation des berges et du fond, la construction de digues, plages, etc.

Les études préliminaires demandent une bonne connaissance du plan d’eau d’où la nécessité de mesurer les profondeurs de façon précise et de situer les trous, les récifs et les écueils. Cette connaissance est d’autant plus indispensable dans le cas des plans d’eau artificiels (anciennes exploitations de sables et graviers), dans les zones fluviales à forts courants, dans les lagunes et les zones littorales où les fonds sont très évolutifs dans l’espace et le temps, ce qui demande souvent un suivi quasi-continu des cotes de fond.

Il s'agit alors de réaliser des profils serrés le long desquels seront effectuées les mesures de profondeur, chaque sonde étant très précisément repérée. De telles mesures doivent naturellement être exécutées sous de très faibles profondeurs.

Le système de positionnement Spider mis au point par notre société répond à ces impératifs : couplé avec un écho-sondeur, il permet de réaliser une bathymétrie du plan d'eau à toutes profondeurs, même là où seules des embarcations à faible tirant d'eau peuvent accéder.

PRINCIPE DE MESURE

Le Spider permet de déterminer en plan les coordonnées d’un point (situé dans le cas qui nous occupe sur un plan d’eau) et cela à partir d’un point repère connu.

Il comprend la mesure de distance par télémètre laser (dont la portée atteint environ 4 km) et la mesure des angles par codeur digital à partir d’une ligne de base définie par deux points pris au bord ou à proximité du plan d’eau). À défaut, le travail peut être calé sur des points remarquables et le rattachement effectué ultérieurement.

L’acquisition, le traitement et la gestion des mesures se font automatiquement par un calculateur. Les points à lever sont repérés par un réflecteur qui, dans le cas d’un plan d’eau, est mobile, puisque situé sur une embarcation.

MATÉRIEL

Le système utilise le matériel suivant :

À terre :

  • — un télémètre laser dont la résolution est de 0,1 m et sa précision de 0,1 % ou 0,5 m ;
  • — un codeur angulaire avec affichage digital à 4 chiffres dont la résolution et la précision sont de 0,1 degré ;
  • — un calculateur HP 85 avec interface Roms et logiciel.

Sur l’embarcation :

  • — un bloc de 5 prismes de 60 mm de diamètre, formant un réflecteur omnidirectionnel ;
  • — un écho-sondeur hydrographique bi-fréquence Atlas Deso 20 qui fournit un affichage digital et un enregistrement sur papier (0,2 mm de résolution). Sur le canal 1, la précision graphique est de 0,12 %. La précision digitale est également de 0,12 % + 1 digit. Sur le canal 2, les précisions graphique et digitale sont les mêmes que les précédentes ;
  • — une télétransmission.

MISE EN ŒUVRE

À l'arrivée sur le site, il faut choisir le ou les points d’implantation du système de visée de manière à couvrir l’ensemble de la zone à reconnaître. Télémètre, codeur angulaire et calculateur sont branchés ; sur le bateau sont installés l’écho-sondeur (avec papier enregistreur), l’alimentation et la couronne de prismes ; sur la rive, la mise en œuvre du système nécessite deux opérateurs dont l’un pointe avec le télémètre les prismes situés sur l’embarcation (un signal sonore lui indique qu’il est pointé sur la cible), l’autre lance le programme et transmet instructions et tops de marquage sondeur à l’embarcation.

[Photo : Le système Spider. À gauche : poste sur la rive ; à droite : poste mobile.]

À partir du système de base avec lequel informations (ex. guidage) et instructions (ex. marquage) sont transmises par radio, de même que les cotes de profondeur en provenance de l’embarcation, un certain nombre d’options sont possibles :

  • — télétransmission du top de marquage sondeur ;
  • — télétransmission d’une indication droite-gauche ;
  • — télétransmission codées PCM (modulation d’impulsions) d’informations en digital.

Acquisition-traitement

Les mesures débutent selon la grille de profils déterminée à l’avance. Le cycle d’acquisition dure 0,50 seconde. À chaque cycle, un point en XY toutes corrections effectuées (dans les systèmes UTM, Lambert ou local) est calculé et visualisé sur l’écran du calculateur.

En fonction du travail à réaliser, deux modes d’exploitation sont alors envisageables :

  • - cible à atteindre : par exemple positionnement d’une embarcation sur un point déterminé ;
  • - détermination des profils : quadrillage pour la bathymétrie.

Tous les 6 cycles, sont affichés sur la partie basse de l’écran, selon le mode d’exploitation choisi : distance/gisement ou distance/écart.

Enfin, à chaque top, sont imprimés et enregistrés : le numéro de top, les coordonnées et la distance au top précédent.

À tout moment, l’opérateur peut intervenir dans le déroulement des opérations à déclencher :

  • — topage automatique à cadence (en temps et en distance) choisie à l’avance ;
  • — topage isolé à la demande ;
  • — changement de cadence de topage ;
  • — changement de profil sans effacement de l’écran ;
  • — changement de zones de travail, de cible à atteindre ou d’échelle ;
  • — filtrage ou moyenne de points ;
  • — introduction de données autres à chaque top : sonde, etc. ;
  • — arrêt du report sur écran.

Les documents fournis sont de deux sortes :

  • — un plan de position comportant les cotes de profondeur, établi sur table traçante, avec courbes de niveau tracées manuellement ;
  • — un enregistrement sur papier du sondeur donnant, outre la mesure de profondeur, une information sur l’épaisseur de la couche sédimentaire meuble.

Le système permet la bathymétrie rapide et économique du plan d’eau avec une bonne précision quant au positionnement des sondes. À titre d’exemple, le rendement moyen d’une journée de travail de 8 heures est d’environ 30 km de profil bathymétrique. La précision dépend en partie de la nature du plan d’eau : en mer par exemple, la présence de houle conduit à une certaine imprécision de mesure. On prend alors une valeur moyenne réduisant ainsi l’erreur à quelques centimètres, erreurs qui sont quasi inexistantes en plan d’eau ferme.

Comme avec les autres procédés, l’utilisation reste délicate en période de mauvais temps et principalement avec le brouillard.

APPLICATIONS

Le système est utilisé pour le positionnement de navires de travaux, ancrages, pieux, plongeurs, etc. Associé à un écho-sondeur, il permet tous sondages, levers, etc. à partir de tous types d’embarcation et dans tous plans d’eau.

Ses applications sont donc diverses. Il a notamment été utilisé pour le positionnement de sondes lors de la réhabilitation de gravières. L’aménagement d’anciennes exploitations de granulats en base de loisirs pose de nombreux problèmes qui sont d’autant plus délicats à résoudre que leur réhabilitation n’a pas toujours été prévue au début de leur exploitation.

Les difficultés que l’on peut rencontrer sont notamment les suivantes :

  • — définition des berges en plan et en profil ;
  • — connaissance de la cote d’étiage et des fluctuations saisonnières du niveau de l’eau ;
  • — nature du fond (la présence de fines provoque une turbidité importante qui nuit à la sécurité des usagers) ;
  • — topographie à l’emplacement des baignades ;
  • — détection des obstacles à la navigation : rochers, etc. ;
  • — perméabilité de la digue de séparation rivière-gravière (quand elle existe).

Une étude bathymétrique du plan d’eau et la position de quelques cotes de berges permettent en général de résoudre ces problèmes.

Nous illustrerons notre propos en développant le cas du plan d’eau de Jablines (département de Seine-et-Marne) — étude réalisée pour le compte de l’Agence foncière et technique de la Région parisienne — où une gravière avait été aménagée en base de loisirs réservée à la baignade et à la navigation. En cours d’utilisation, deux problèmes se sont posés : le premier lié à l’hydrographie du plan d’eau, le second lié aux berges.

1) L’hydrographie du plan d’eau

Une bathymétrie a dû être envisagée au large de la plage nord où la présence de trous dangereux pour les baigneurs était suspectée. Ces trous, fréquents en gravières, peuvent être dus à des écoulements préférentiels de la nappe phréatique. Ce phénomène reste peu étendu dans l’espace et très localisé, ce qui rend sa

Reconnaissance difficile.

Le système Spider présente l’avantage de permettre alors un maillage très fin par l’exécution de profils serrés et recoupables. Quand un doute subsiste sur un sondage, il est notamment possible d’arrêter, de revenir en arrière et d’intensifier les mesures.

Le profil qui sort automatiquement est directement exploitable, ce qui offre un gain de temps et de précision par rapport aux relevés topographiques traditionnels (où seules quelques cotes sont fournies).

Dans le cas particulier, l’exploitation de la bathymétrie a permis de conclure avec certitude que le fond du bain était parfaitement plat et ne présentait donc aucun danger pour la sécurité des baigneurs.

Il s’est également avéré que l’utilisation du sondeur hydrographique bi-fréquence avait donné une bonne définition de l’épaisseur des matériaux colloïdaux des fonds de bain. Cette information est importante car la présence de fines amène souvent à préconiser la pose d’un anticontaminant, stabilisateur (du type géotextile par exemple).

2) Les berges

– Cotes de la plage

L’évolution des berges par érosion est un problème dont il faut assurer le suivi : le sous-minage des berges, la création de fissures de retrait, la suppression de butée de pied notamment provoquent des éboulements de berges et des modifications du profil d’équilibre des matériaux. À Jablines, l’utilisation du Spider a permis d’obtenir quelques coupes type et définir le profil d’équilibre vers lequel tendaient les berges.

– Étude de la digue de séparation

Une crue hivernale a fait rompre la digue de séparation entre la gravière en exploitation et le plan d’eau. Le problème se posait de la façon suivante :

— quelle était l’ampleur de la lentille d’arrachement ? (ceci afin d’évaluer le volume des matériaux à ramener pour la reconstruction de la digue) ;

— où avaient flué les matériaux ? (de manière à ne pas reconstituer la digue sur les matériaux instables).

Pour cela, deux profils ont été suivis le long de la brèche, l’un au Sud et l’autre au Nord, recoupés dans la partie Est par deux profils nord-sud (voir croquis).

Au centre de la brèche, la sonde donne une mesure de 8 m 50 pour le profil sud, et de 8 m 60 pour le profil nord. On a pu définir le profil de la lentille (voir croquis) et la vitesse d’entraînement des matériaux déplacés.

Les résultats ont été satisfaisants et la précision s’est révélée bonne.

Le maillage fin, le nombre de points calculés et la souplesse d’emploi sont, en définitive, avec le faible coût d’exploitation et la rapidité des opérations, les principales qualités du système.

[Photo : 1. Jablines. Schéma du dispositif des mesures. Plan d'eau public.]
[Photo : 2. Jablines. Profil nord de la digue.]
[Photo : 3. Jablines. Profil sud de la digue.]
[Photo : 4. Jablines. Plage nord. Courbes de niveau.]
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