L’histoire de La Plaine est liée à l’économie de la vallée. À l’origine, la rivière sert en effet à l’exploitation du bois, coupé sur ses versants et acheminé par flottage aux scieries puis aux papeteries situées à son embouchure.
Plus tard l’industrie textile prend la relève. Mais quand celle-ci s’écroule, vers 1960, le fond de la vallée est alors abandonné par ses habitants, les épicéas envahissent les prés et les jardins ouvriers des abords et la rivière se referme. Ses berges deviennent peu à peu inaccessibles, son cours est obstrué par les troncs d’arbres… et son eau, privée de lumière, perd ses qualités, essentiellement piscicoles.
En 1985, Électricité de France construit un barrage et crée un lac de retenue sur une dérivation de La Plaine, le lac de Pierre-Percée, afin de soutenir les débits des étiages de la Meurthe et de la Moselle, et d’assurer le refroidissement de la centrale nucléaire de Cattenom. Et pour son usage, EDF est amené à réhabiliter le secteur aval de la rivière, entre le lac et la Meurthe.
L’idée vient alors aux élus des neuf communes de la vallée qu’une nouvelle voie de développement économique, basée sur le tourisme, est possible. Ils se mobilisent et créent la même année un syndicat intercommunal d’étude pour l’aménagement de La Plaine, dont la première tâche est de faire un diagnostic des travaux à engager (estimés à 1 million de francs) et d’établir un programme de restauration sur plusieurs années. En même temps, dans leur démarche volontaire de mise en valeur, les élus entendent complètement associer la population : pour eux, environnement et projet social doivent être intimement liés. La rivière sera par conséquent le lieu privilégié d’une réinsertion sociale, d’une formation et, tout simplement, du réapprentissage de la vie en société pour une population en difficulté dans la vallée.
[Photo : dessin sans légende lisible]
Entre 1987 et 1994, une quinzaine de chantiers sont organisés. Des chantiers d’été (d’une durée de 21 jours) permettent à de jeunes bénévoles (à partir de 14 ans) de participer à une action d’aménagement, de protection et d’animation de l’environnement naturel (abattage d’épicéas, nettoyage du lit, débroussaillage des berges).
Dans le cadre d’une formation conventionnée, des stagiaires de chantier-école (d’une durée de 5 mois) rétablissent des relations avec l’environnement en vue d’une réinsertion sociale durable.
Des chantiers d’insertion sont proposés aux personnes bénéficiaires d’un Contrat Emploi Solidarité. Celles-ci deviennent des acteurs à part entière de leur canton pour la sauvegarde de l’environnement.
Pendant huit ans, la rivière est ainsi peu à peu nettoyée, réappropriée, dégagée. Elle est maintenant redevenue accessible, visible, utilisée, sa qualité piscicole s’est améliorée et surtout, elle est considérée comme « la propriété » de tous ces jeunes qui ont participé aux chantiers et de toutes ces personnes « en difficulté » qui ont eu la fierté de participer à sa réhabilitation.
Forts de cette expérience, depuis 1991, les élus se sont engagés dans une action beaucoup plus large, visant l’ensemble de la vallée : il s’agit de la reconquête de ses paysages. Un « Plan de paysage » est en cours d’élaboration qui constitue l’un des dix plans expérimentaux lancés en France et à ce titre, est soutenu par le Ministère de l’Environnement. Les premiers résultats sont très encourageants.
Il reste cependant que chacun, dans la vallée de La Plaine, sait ce qu’il doit à la rivière et à son rôle déterminant dans le déclenchement de tout ce mouvement en faveur d’un meilleur cadre de vie. Aussi toutes les attentions lui sont réservées. Pour notre Association qui a été saisie de cette réhabilitation par ses délégués de Lorraine et a été particulièrement sensible à la démarche très globale qui l’a régie, il était important de la soutenir dès la première année de sa campagne « Espaces pour demain… nos rivières » en 1993. Elle souhaitait par ailleurs témoigner de son itinéraire exemplaire pour lancer cette troisième année consécutive.