L’aménagement hydraulique de la Montagne Noire
LE CANAL DU MIDI(2ᵉ partie)
L’aménagement hydrauliquede laMontagne Noire
par ,Président des Transporteurs fluviaux du Midi
Dans une première partie intitulée « L’idée de RIQUET et la volonté de Colbert » (1), l'auteur a relaté comment, après des projets restés sans suite pour relier les deux mers, « l’Océan » et la « Méditerranée », RIQUET avait enfin trouvé la solution au problème capital de l’alimentation du canal, ceci en ayant recours au château d’eau naturel que constitue la Montagne Noire (1661-1665).
Colbert ayant adopté le projet, et Louis XIV s’étant montré favorable, Riquet était finalement informé par une lettre de Colbert du 14 avril 1665 que « Sa Majesté avait décidé de faire exécuter le canal par ses soins »…
Une « Rigole » fut réalisée pour faire l’essai de la pente et de la conduite des eaux vers le Seuil de Naurouze…
L’IDÉE DU CHEVALIER DE CLERVILLE
La rigole d’essai que Riquet avait fait creuser durant l’été 1665 de REVEL À NAUROUZE avait été un succès. La possibilité de conduire les eaux du SOR, grossi des apports de la Rigole de la Montagne au Conquet, jusqu’au bief de partage du Canal de navigation projeté était démontrée.
Les intendants délégués de la province de Languedoc : MM. de BEZONS et de TUBŒUF avaient visité cette rigole d’essai en novembre 1665 et avaient demandé qu’on fît dresser les plans des lieux où elle passait, pour rendre compte de leur visite à COLBERT. Ce qui fut fait.
Les experts de BOURNEUF et VAUROSE avaient établi un devis précis des ouvrages à exécuter pour la création du Canal devant relier la Garonne à l’Aude et l’assurer d’une alimentation en eau en tous temps par la Montagne Noire. Ce devis adopté par les Commissaires devait, par ordre du Roi, être communiqué pour avis à M. le Chevalier de CLERVILLE, commissaire général des fortifications.
Cet éminent technicien adopta les grandes lignes des tracés proposés, modifia les dimensions de la voie navigable et surtout les conceptions relatives aux réserves d’eau.
En effet, autant pour parer aux pénuries dues aux sécheresses que pour assurer la remise en eau rapide des biefs vidangés pour des réparations, Riquet et les experts avaient prévu une quinzaine de réservoirs le long des rigoles de collecte. M. de CLERVILLE proposa de remplacer ces « magasins d’eau », comme les appelait Riquet, par un grand réservoir.
LE RÉSERVOIR DE SAINT-FERRÉOL
En accord avec Riquet et les experts, il choisit le vallon de Vaudreuille où serpentait le rec d’Audot (1).
Près de la ferme de SAINT-FERRÉOL un resserrement du vallon sur un verrou rocheux fut retenu comme site de la fameuse digue de SAINT-FERRÉOL, dont la construction allait constituer à l’époque un exploit technique sans précédent par son importance. Il existait près d’ALICANTE un barrage de 58 mètres de hauteur, construit vers 1580, mais d’une longueur et d’une masse bien moindres que celui qui allait être édifié à SAINT-FERRÉOL.
Cet ouvrage admirablement conservé et en service depuis 1672, sans la moindre défaillance, étonne encore de nos jours les constructeurs contemporains.
Les croquis ci-contre donnent une idée de sa composition qu’on peut résumer ainsi :
— une sorte d’épine dorsale ; le « GRAND MUR » (ou mur-écran), construit en blocs de granit taillés, qui barre le vallon de l’Audot et s’étend sur une longueur de 871 mètres.
(1) AUDOT : diminutif de AUDE = cours d’eau impétueux.
L’épaisseur de ce mur est d’environ 5 mètres dans sa partie la plus haute qui voisine les 35 mètres ;
— à l'amont et à l'aval de ce mur ont été tassés des remblais d’enrochement et de terres argileuses retenus par deux murs ; l'un à l'amont, immergé ; l'autre à l'aval. Ces murs constitués, comme écran, de blocs de granit taillés ont les caractéristiques suivantes :
Mur amont : épaisseur : 3,90 mètres (au talweg) — hauteur : 19,50 mètres
Mur aval : épaisseur : 2,80 mètres — hauteur : 29,25 mètres
Entrepris en 1667, il allait occuper près de mille travailleurs pendant 5 ans : des maçons et des compagnons certes pour les ouvrages d’art ; mais surtout une armée de terrassiers avec des pioches, des pelles, des hottes... pour extraire, transporter et régler les remblais.
D’après les récits d'un contemporain de ces travaux, il avait été installé un tourniquet où devaient passer ceux qui portaient la terre dans la hotte. À chaque voyage ils percevaient 1 denier (soit 1/12 de sol). L’appât du gain était tel que les plus vaillants arrivaient à se faire jusqu’à dix sols par jour, ce qui, à l’époque, constituait pour les travailleurs manuels une somme considérable...
Pour les ouvrages en maçonnerie, leur construction s’était déroulée ainsi :
— au niveau inférieur les murs précités avec les galeries appelées voûtes destinées aux manœuvres et à l’écoulement des eaux du réservoir quand le niveau de celles-ci baisse au-dessous du seuil de la vanne dite « de la Badorque ».
La galerie inférieure dite de vidange suit l’ancien lit naturel du cours de l’Audot et débouche par une rigole carrelée dans le cours de l’Audot à l’aval.
La galerie supérieure est rectiligne et conduit aux robinets ancrés dans un massif de maçonnerie imposant qui fait corps avec le mur écran.
Ces deux galeries sont accessibles par le mur aval. À l’amont du mur écran, sous les eaux du réservoir, se trouvent la galerie du tambour et la galerie d’Enfer. Ces deux galeries sont immergées et ne deviennent accessibles que lors de la vidange totale du réservoir, qui a lieu en principe tous les trente ans.
Pour mesurer la hauteur des eaux dans le réservoir quand leur niveau descend au-dessous de la vanne inférieure de la Badorque, les héritiers de Riquet exploitant le canal eurent l'idée de faire édifier sur le mur amont une pyramide en maçonnerie dont les retraites et les assises présentent une sorte d’échelle graduée qui s’élève à 21 mètres au-dessus du fond du réservoir, c’est-à-dire le seuil de la vanne inférieure du fond.
La partie supérieure de cette échelle correspond à la base de l’échelle établie sur le grand mur avec des repères saillants dont le plus élevé est à 32 mètres du fond.
L’exploitation de cette réserve d'eau a commencé vers 1675 avec des perfectionnements incessants.
Le réservoir est considéré comme plein lorsque la surface de son plan d'eau s’élève à 31 mètres 35 centimètres au-dessus du fond et mesure environ 67 hectares.
Le volume de la réserve est égal, à cette cote, à 6 374 000 m³, soit un peu plus de la contenance du canal entier.
Cette particularité mérite d’être soulignée parce qu’elle montre le souci qu’ont mis les auteurs du bassin de Saint-Ferréol à lui donner une capacité suffisamment large pour avoir « l’eau à suffisance », comme disait Riquet pour la navigation.
Un seul écueil devait apparaître dès la première année sèche : le bassin versant de l’Audot, au site de Saint-Ferréol, qui n’était que de 8 km², ne suffisait pas à lui seul à remplir ce vaste réservoir.
L’IDÉE DE VAUBAN :« LA PERCÉE DES CAMMAZES »
C'est alors que le roi chargea Vauban d’inspecter le canal royal de Languedoc, avec mission d’y apporter les améliorations qu'il jugerait indispensables notamment pour le remplissage du réservoir de Saint-Ferréol chaque année.
Vauban avait succédé à M. de Clerville dans la charge de Commissaire général des fortifications qui comportait la direction des travaux des forteresses, des ports, des ponts, des voies... Il était donc normal que le problème du canal et en particulier celui de Saint-Ferréol lui fût soumis pour avis.
Après la visite qu'il fit de tous les ouvrages construits par Riquet et observé leur fonctionnement, il conclut à la nécessité de conduire dans le réservoir de Saint-Ferréol les eaux collectées par la rigole de la montagne dans les périodes d’abondante pluviosité pour les y mettre en réserve.
L’entreprise s’avérait difficile car il fallait changer de versant, et on ne pouvait le faire qu’au moyen d’un tunnel.
VAUBAN et son adjoint NIQUET dressèrent le projet qui comportait le prolongement de la Rigole de la Montagne depuis le déversoir de CONQUET jusqu'au village des CAMMAZES où l'arête de séparation des versants océanique et méditerranéen était la moins épaisse. Le franchissement de cette arête fut réalisé par un tunnel de 123 mètres de long suivi d'une rigole en tranchée profonde qui se déverse dans l'extrémité haute du versant de l'Audot, que l'on appelle « la percée des Cammazes ».
Ces travaux furent réalisés à partir de 1687. L'architecture des têtes amont et aval de la percée des Cammazes rappelle celle des forteresses et bâtiments que fit ériger VAUBAN.
Cette importante modification permettait de déverser dans le bassin de SAINT-FERRÉOL les apports excédentaires des bassins de l'Alzau (21 km²), de la Bernassonne (6,8 km²), du Lampy (7,2 km²), du Rieutort (5,8 km²) ; au total : 40 km².
Le problème des difficultés de remplissage du réservoir de SAINT-FERRÉOL avec les seuls apports du bassin versant de l'Audot se trouvait résolu surabondamment par l'idée de VAUBAN.
DES PERFECTIONNEMENTS SUCCESSIFS...
Les ingénieurs qui se sont succédé pour assurer à la fois l'exploitation et l'entretien de ces ouvrages d'alimentation du canal les ont perfectionnés sans cesse.
Un supplément de réserve d'eau fut créé de 1777 à 1782 par la construction du barrage dit de LAMPY-NEUF sur le cours du Lampy — longueur : 120 m en crête ; hauteur : 17 m ; capacité : 1 700 000 m³.
Sous Napoléon Iᵉʳ, en 1807, un décret-loi impérial vint confirmer les dispositions de l'Édit royal de 1666 en spécifiant que « la totalité des eaux tombant, soit dans le canal, soit dans les rigoles nourricières, sont en entier à la disposition du canal... et que les concessions faites à des particuliers seront toujours révocables... ».
L'Administration du Canal — les héritiers de Riquet jusqu'à la Révolution et la Compagnie privée du canal après, jusqu'au rachat par l'État en 1898 — se trouvait donc la seule à pouvoir disposer des eaux de la Montagne Noire. Même après le rachat du Canal, en 1924, le Conseil d'État avait confirmé cette prérogative.
Mais, entre les deux guerres mondiales, certains ingénieurs privés avaient avancé l'idée d'un aménagement de la Montagne Noire qui permettrait l'utilisation des eaux excédentaires du canal pour satisfaire les besoins des populations voisines en eau potable.
En effet, le dispositif alimentaire du canal du Midi pouvait, à lui seul, mobiliser — en année de pluviosité moyenne — environ 40 000 000 de mètres cubes, avec des réserves pour traverser la saison sèche de 6 300 000 m³ à SAINT-FERRÉOL et 1 700 000 m³ à LAMPY. Or les statistiques, scrupuleusement tenues aux postes d'Alzau, Lampy, Saint-Ferréol, indiquaient que les ressources dépassaient 80 000 000 m³/an en pluviosité moyenne.
Mais tout aménagement de réserves supplémentaires était tributaire du « bon vouloir » des responsables de la gestion du canal du Midi.
Or, en août 1943, le Ministre des Travaux publics responsable de cette gestion adoptait une position plus souple dans une décision « historique » qui comportait le passage capital suivant : « ... il ne convient pas de s'attacher au maintien envers et contre tous des droits que l'Administration tient de l'Édit de 1666, mais au contraire il y a lieu de les négocier en vue d'aboutir à des solutions pratiques ».
Depuis 1941, le Haut-Languedoc était éprouvé par des sécheresses estivales sévères. Plusieurs ingénieurs de bureaux d'études privés travaillaient sur la question.
En 1946, la Compagnie des Eaux et de l'Ozone parvint à mettre au point un avant-projet d'aménagement de la Montagne Noire par la construction de trois barrages-réservoirs dont deux sur le cours du Sor (versant ATLANTIQUE) et un sur le versant MÉDITERRANÉEN. Le 7 mai 1946, elle demandait au Ministre des Travaux publics une concession non « précaire et révocable » pour assurer cet avant-projet.
EN 1948 : L'INSTITUTION DÉPARTEMENTALE POUR L'AMÉNAGEMENT HYDRAULIQUE DE LA MONTAGNE NOIRE
L'idée de l'aménagement hydraulique de la Montagne Noire était lancée. Elle allait faire son chemin jusqu'en avril 1948, à la mairie...
Je Revel au pied de cette Montagne Noire, un accord devait intervenir entre les ministères de l’Agriculture et des Travaux Publics pour la construction du barrage-réservoir d'environ 20 000 000 m³ dans lequel seraient « entreposés » 4 000 000 m³ pour le Canal, près de 10 000 000 m³ pour l'eau potable de cent trente communes rurales et l'irrigation.
Le cours du Sor s’en trouvait régularisé par un débit d’étiage assuré en saison sèche et une tranche de protection contre les crues dans le réservoir d’une capacité d’accumulation de 1 200 000 m³.
Les Conseils généraux des trois départements de l'Aude, de la Haute-Garonne et du Tarn parvenaient à s’entendre et « l'Institution pour l'aménagement hydraulique de la Montagne Noire » était officiellement constituée par un arrêté signé par le préfet IGAME PELLETIER, le 5 août 1948.
Le programme de cette Institution était limité à la construction d’une retenue sur le Sor près des Cammazes ; à l'amenée d'eau brute à la station de traitement des eaux ; à l'usine de traitement des eaux ; aux canalisations intercalaires de transport.
À cause de nombreux obstacles administratifs et techniques les études devaient stagner pendant quatre ans. La réalisation du barrage des Cammazes devait durer de janvier 1953 à février 1957. Le réseau d’adduction d'eau potable qui comprenait : l'amenée d’eau brute, l'usine de traitement des eaux, la maille de canalisations à haute pression pour la mise en charge des réseaux syndicaux des trois départements était commencé dès 1959 pour se terminer en 1962 avec des solutions malheureusement étriquées par suite de manque de financement et aussi de coordination rationnelle des études techniques.
Mais l'aménagement hydraulique de la Montagne Noire n’est pas terminé. Loin s’en faut. Sur le versant méditerranéen surtout il y a possibilité de mobilisation de grosses ressources en eau d’excellente qualité.
IL FAUT ACHEVER L’ŒUVRE…
En ne considérant que les ressources en eau mobilisables par le dispositif précité, la création de réserves aux sites indiqués dans l'avant-projet dressé en 1949 par la Compagnie des Eaux et de l'Ozone est indispensable.
Sur le versant méditerranéen
- — Un barrage-réservoir sur le cours de l’Alzau au lieu dit « La Galaube » de 9 hm³ environ de capacité, avec une tranche de laminage des crues subites et importantes de ce torrent qui atteignent souvent 800 000 m³/jour durant 2 à 3 jours.
- — Un calibrage et une amélioration de l’écoulement de la Rigole de la montagne d’Alzau à Conquet lui donnant une capacité de 350 000 m³/jour, pour le déstockage rapide de la crue emmagasinée vers les réserves inférieures.
- — Un barrage-réservoir près de la métairie de Compagnes, de 5 à 6 hm³ de capacité sur le cours du Lampy, en aval de la Rigole permettant de stocker les apports de crue des bassins versants d’Alzau, de Bernassonne, de Rieutort et de Lampy.
Sur le versant océanique
- — Un barrage-réservoir sur le Sor, en amont de celui des Cammazes — site d’ARFONS — de 7 à 8 hm³ de capacité permettant d’emmagasiner les excédents du bassin versant du Sor ainsi que les apports des versants nord-ouest des Peyres-Grises, du Trou-Obscur, du Travers-de-Besnard par une rigole le long du G.R. 7, apports qui se perdent dans la barre perméable au-dessous du G.R. 7.
Toutes ces eaux sont d’une excellente qualité et doivent être destinées à l’alimentation en eau potable…
G. HOULIE
TABLE DES ANNONCEURS
— A —
AFEE 23 AFNOR 41 A.I.N.F. ALFA-LAVAL
— B —
BAT TARAFLEX 11 C BINET
— C —
CALDYNE CEBEEAU 82 CELLOPHANE (La) CERCHAR C.F.G. 81 C.F.P.I. 91 C.G.E.E. ALSTHOM 8 CHEMFIX CHEMVIRON I C CIFEC 4 CODIREP COMPTOIR GENERAL DES FONTES 16 COPEF C.T.E. (Cie européenne de Traitement des Eaux) IV C
— D —
DEGREMONT 87
— E —
ECOPOL E.G.A. (Eau, Gaz, Assainissement) ELECTRICITE DE FRANCE ENDRESS ET HAUSER 26 EQUIPEMENT MINIER (L’)
— F —
FENWICK FILTRES-CREPINES JOHNSON FISCHER S.A. (Georges) FLYGT FRANCEAUX
— G —
GAMMA TEC GERLAND GROUX 91 GUIDE DE L’EAU GUIGUES
— H —
HEPGRES HYDROCURE 87
— I —
I.R.C.H.A. ISMA JOBIN YVON
— L —
LABO-MODERNE LEROY-SOMER LURGI LYONNAISE DES EAUX (SLEE)
— M —
MAGIRUS DEUTZ HUMBOLDT MASURE 6
— N —
NARDONNET NEYRPIC Techniques des Fluides NORIT
— O —
O.D.A. (Omnium d’Assainissement) 82 OLIN OTIC-FISCHER ET PORTER
— P —
PECPEC ENGINEERING PHOX FRANCE PLANCHET POMPES GUINARD PRO-GRES PROMECOME 87
— R —
RECOMAT 91 ROUSSELET
— S —
SALON DE LA BLANCHISSERIE 81 SAMBRE ET MEUSE SARLIN SATAP SAUR 26 S.C.P.A. 87 SEREP SERPEE S.G.A.D. (Société Générale d’Assainissement et de Distribution) S.G.N. (Saint-Gobain Techniques Nouvelles) SOAF SOBREP SOCEA 4 SOCOMATEN SODERN STAP 2 S.V.P. III C
— T —
TECHNICON TECHNIME THANN ET MULHOUSE 3
— U —
UNITEC
— V —
VALCKE, FRERES VAN DEN BROEK FRANCE VANNES LEFEBURE 2
— W —
WALKER CROSWEILLER WILD-LEITZ FRANCE