Il n'existe de par le monde que trois plans inclinés permettant à des péniches de franchir des dénivellations de grande hauteur : — en Belgique : le plan incliné longitudinal de Ronquières, sur le canal de Charleroi à Bruxelles : pente 5 %, pour bateaux de 1 350 tonnes ; — en U.R.S.S. : le plan incliné longitudinal de Krasnoyarsk, sur le Iénisséï (Sibérie) : pente 10 %, pour bateaux de 1 500 à 2 000 tonnes ; — en France : le plan incliné transversal d'Arzwiller-Saint-Louis sur le canal de la Marne au Rhin : pente 41 % (dénivellation 44,55 m) pour bateaux de 350 tonnes.
ET DES HISTOIRES D'EAU...
LES « PLANS INCLINÉS »
Il n'existe de par le monde que trois plans inclinés permettant à des péniches de franchir des dénivellations de grande hauteur :
- — en Belgique : le plan incliné longitudinal de Ronquières, sur le canal de Charleroi à Bruxelles : pente 5 %, pour bateaux de 1 350 tonnes ;
- — en U.R.S.S. : le plan incliné longitudinal de Krasnoyarsk, sur le Iénisséï (Sibérie) : pente 10 %, pour bateaux de 1 500 à 2 000 tonnes ;
- — en France : le plan incliné transversal d'Arzwiller-Saint-Louis sur le canal de la Marne au Rhin : pente 41 % (dénivellation 44,55 m) pour bateaux de 350 tonnes.
Dans son genre, notre plan incliné national est donc une première réalisation mondiale. Les deux autres ouvrages ayant été construits à peu près à la même époque, il n'y avait aucun précédent du genre pour servir de référence au moment de son étude et de sa construction.
LE CANAL DE LA MARNE AU RHIN
C'est sous Louis-Philippe, par une loi du 3 juillet 1838, que la construction de ce canal fut décidée, le projet définitif ayant été établi deux ans auparavant par M. Brisson, ingénieur des Ponts et Chaussées.
Commencés immédiatement, les travaux furent ajournés en 1844 ; ils étaient repris en 1846 pour être terminés de bout en bout en même temps que ceux de la ligne de chemin de fer Paris-Strasbourg sous Napoléon III, en 1853.
De Vitry-le-François, point de départ sur le canal latéral à la Marne jusqu'au port de Strasbourg, la longueur est de 314 km avec 178 écluses (à l'origine).
Deux massifs montagneux sont escaladés, avec deux biefs de partage : celui de Mauvages à la cote 246 (entre les vallées de la Meuse et de la Moselle) et celui des Vosges à la cote 266 (entre les vallées de la Meurthe et de la Zorn).
Le canal de la Marne au Rhin est rattaché à d'autres voies navigables : au canal latéral à la Marne, au canal de l'Est (branches Nord et Sud), au canal des Houillères de la Sarre, à la Moselle.
Des ports se sont implantés le long de son tracé : Vitry-le-François, Bar-le-Duc, Pagny-sur-Meuse, Nancy, Saint-Phlin, Dombasle, Héming et bien entendu Strasbourg.
Depuis plus de 120 ans, il a fait l'objet de travaux : remises en état successives, transformation, amélioration et modernisation. Le mouillage était à l'origine de 1,60 m, la longueur des écluses de 34,50 m. Ces dimensions ont été portées respectivement à 2 mètres et 38,50 m à la suite de la loi du 5 août 1879 (programme Freycinet : voies de première catégorie). En 1895, le mouillage qui était à l'origine de 1,60 m fut porté à 2,20 m. Enfin, au cours des IIIᵉ, IVᵉ et Vᵉ Plans, de 1958 à 1970, la mise au mouillage fut portée à 2,60 m, permettant la navigation à des bateaux transportant 350 tonnes de marchandises, avec un enfoncement de 2,20 m.
LE « GOULOT » D'ARZWILLER
À l'extrême-Est du bief de partage des Vosges, le canal de la Marne au Rhin, après avoir franchi les souterrains de Niderviller et d'Arzviller rejoint la vallée de la Zorn par celle du Teigelbach, petit affluent de la Zorn, au moyen d'une série de 17 écluses réparties sur une distance de 4 km environ et permettant de racheter une dénivellation de 44,55 m.
Les conditions de navigation dans ce court secteur sont particulièrement défavorables puisqu'aux difficultés qui résultent du tracé en plan du canal s'ajoutent les servitudes de la voie ferrée qui franchit trois fois la voie navigable et la faible longueur des biefs imposée par le profil en long. La longueur moyenne des biefs n'est que de 180 m, ce qui cause à la navigation une gêne et une perte de temps évidentes, aggravées par l'importance inégale des biefs. C'est ainsi que le bief n° 3 n'a qu'une longueur de 45,10 m à peine supérieure à la dimension d'une écluse, ce qui oblige les mariniers à des manœuvres délicates pour y faire naviguer, et souvent se croiser, des bateaux de 38,50 m de longueur.
« L’échelle d’écluses d’Arzviller » a constitué de tout temps une sorte de goulot d'étranglement, de point singulier, que les bateliers n'abordaient pas sans appréhension ni inquiétude.
SOLUTION CHOISIE : UN « PLAN INCLINÉ » TRANSVERSAL
Un concours fut ouvert en 1962-63 pour résoudre ce problème : rachat de 17 écluses, représentant une dénivellation de 44,55 m de la vallée du Teigelbach par un « ouvrage de haute chute », sans consommation d'eau, ce qui exclurait le type « écluse » classique.
Des recherches ont montré depuis que de nombreux « plans inclinés » transversaux ou longitudinaux, à sec ou munis d'un chariot-bac, avaient été réalisés aux XVIIIᵉ et XIXᵉ siècles en France, en Angleterre, aux U.S.A., en Allemagne, mais pour des bateaux de seulement 50 tonnes de port en lourd.
Le caractère expérimental de l'ouvrage ne faisait donc aucun doute, et neuf groupements d'entreprises présentèrent une quarantaine de propositions, parmi lesquelles figuraient des « plans inclinés » longitudinaux et transversaux, des « pentes d'eau » ou « trains d'eau », des ascenseurs, rachetant de 13 à 19 écluses de l'échelle d'Arzviller.
Après des comparaisons et des examens minutieux, la solution constituée par un plan incliné transversal rachetant 17 écluses, soit 44,55 m, fut choisie par le jury du concours.
Le système du bac transversal présente l'avantage de conduire à un ouvrage compact. L'importance de la pente, donc la faible longueur de parcours, permet une durée de cycle comparable à celle d'une écluse, ce que ne permet pas un système longitudinal.
D'autre part, la possibilité d'équilibrer le bac par un contrepoids réduit très sensiblement les frais d’exploitation : le problème des mouvements d'eau ne se pose pratiquement pas.
Les travaux commencés en 1964 comprenaient trois tranches : la construction du plan incliné proprement dit, et celles des canaux d'accès amont et aval.
Après une période d'essais et de manœuvres la mise en service de l'élévateur eut lieu le 27 janvier 1969. Un avis à la batellerie a été publié à cette date, laissant la possibilité aux mariniers de choisir eux-mêmes leurs parcours, c'est-à-dire soit de passer par l'ancienne échelle d’écluses, soit d’emprunter le plan incliné.
C'est ainsi que l'on assista au début à certaines scènes pittoresques : le 28 janvier 1969, vers 13 h 30, deux bateaux montants se présentaient à la jonction aval ; les deux mariniers père et fils, patrons respectifs n’étaient pas d'accord sur le chemin à suivre. Le père décida alors d'emprunter la vieille échelle d'écluses, le fils partit vers le plan incliné ; il arriva dans le port de formation d'Arzviller avant 16 heures et attendit son père, qui ne le rejoignit que le lendemain à 10 heures.
DESCRIPTION ET FONCTIONNEMENT
Le « plan incliné » proprement dit se compose du chariot-bac, véritable « bassin mobile » équilibré par deux contrepoids auxquels il est relié par des câbles, et tracté par des treuils entraînés par des moteurs électriques. Le chariot-bac circule sur un plan incliné (41 %) perpendiculairement à sa plus grande dimension, par l'intermédiaire de galets, il est guidé par une poutre longitudinale.
Toute l'infrastructure a été réalisée pour recevoir deux chariots-bacs, pouvant manœuvrer indépendamment ou accouplés ; un seul bac (amont) a été réalisé en première phase jusqu'à présent.
Le chariot-bac est muni à chacune de ses extrémités de portes levantes, fermant de façon étanche le bac pendant tous ses déplacements.
Lorsque le bac arrive en fin de course (« poste aval » ou « amont »), contre l'extrémité du canal aval ou amont, l’étanchéité entre le bac et le canal d'accès est assurée par un cadre mobile ; à ce moment les portes du bac et du canal peuvent être levées pour livrer passage au bateau (la porte du canal d'accès, seule pourvue d'un mécanisme de levage, entraîne la porte mobile du bac dans sa manœuvre à l'aide d'un crochet).
Lorsque l'on veut libérer le chariot-bac après l'entrée d'un bateau, par exemple, les opérations se succèdent ainsi : abaissement simultané des portes du bac et du canal, vidange de l'espace entre lesdites portes (par ouverture d'une vanne), retrait ou « effacement » du cadre d’étanchéité ; le relèvement des crochets de sécurité libère enfin le chariot-bac qui peut manœuvrer. Toutes ces opérations sont enclenchées.
L'accélération au départ est de 0,02 m/s², pour atteindre sur 12 mètres la vitesse de croisière de 0,60 m/s. L'arrivée s'effectue dans des conditions semblables après ralentissement progressif.
Le plan incliné transversal de Saint-Louis-Arzviller
[Schéma : Plan incliné transversal de Saint-Louis-Arzviller]Caractéristiques du chariot-bac :
Longueur hors tout ............................... | 43,00 m |
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Longueur utile ................................... | 41,00 m |
Largeur utile .................................... | 5,20 m |
Mouillage dans le bac ............................ | 3,20 m |
Poids du chariot-bac rempli d’eau (et poids approximatif de l’ensemble des 2 contrepoids) ............ | 850 t |
Caractéristiques des accès :
Longueur du canal amont .......................... | 3 275,00 m |
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Longueur du canal aval ........................... | 1 209,00 m |
Section mouillée des canaux d’accès .............. | 42,00 m² |
Puissance des deux moteurs principaux ............ | 2 × 125 CV |
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Puissance installée (pour 1 bac) ................. | 500 kVA |
Débit journalier de l’ouvrage (un bac et 13 heures de navigation) ................................. | 40 bateaux |
Consommation d’eau ............................... | pratiquement nulle |
Date de mise en exploitation expérimentale ....... | 27 janvier 1969 |
Caractéristiques générales de l’ouvrage réalisé :
Chute rachetée (remplace 17 écluses) ............. | 44,55 m |
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Longueur du plan incliné en projection horizontale (axe en axe des postes amont et aval) ............. | 108,65 m |
Longueur totale du plan incliné .................. | 128,65 m |
Pente des chemins de roulement ................... | 41 % |
La durée d'un passage, depuis le départ du bateau du garage du canal d'accès jusqu'au moment où il libère le passage au bateau navigant en sens inverse, est inférieure à 20 minutes, dont 4 minutes pour le déplacement du chariot-bac. Ce temps est du même ordre de grandeur que celui correspondant à la durée de franchissement d'une écluse quelconque du canal de la Marne au Rhin. Deux moteurs électriques de 125 CV, entraînés par un groupe Ward-Léonard classique, assurent la traction des câbles par l'intermédiaire des tambours. C'est grâce à l'équilibrage du chariot-bac par des contrepoids qu'il est possible, dans un tel ouvrage, d'avoir recours à une aussi faible puissance. D'autre part, une différence de calage du chariot-bac à postes amont et aval par rapport au plafond des canaux d'accès permet de donner toujours une prépondérance de poids à la masse descendante (chariot-bac ou contrepoids).
EXPLOITATION
Le nombre des passages est, comme le trafic, très fluctuant. Le nombre maximum de passages enregistrés pour un seul bac est de 41 (avalants et montants totalisés) et le minimum de 11 par jour. Le débit maximum pourrait être doublé par la mise en place du second bac, qui n'apparaît pas nécessaire pour l'instant.
L’équipe de conduite se compose de trois personnes : un « éclusier », qui, devant son pupitre de commande en haut de la tour de contrôle, est en relation téléphonique avec toutes les écluses et les rames des souterrains, et qui règle le trafic, et deux agents affectés à la manœuvre du bac.
La consommation en courant électrique de toute l'installation, ramenée à l'unité de franchissement d'un bateau, est en moyenne de 60 kWh en été et de 300 kWh en hiver, compte tenu des réchauffages.
Cependant, lorsque l'on branche un compteur sur le circuit d'alimentation « moteurs », on s'aperçoit que le compteur lui-même tourne plus souvent à l'envers qu'à l'endroit !
Ceci tient à une astuce de montage permettant aux moteurs de travailler plus souvent en « résistant » qu'en « moteur ».
En effet, lorsque le bac se trouve à poste devant les portes, il est placé à l'amont de telle sorte qu'il emmagasine 15 cm d'eau en plus (1 cm d'eau dans le bac = 2,065 tonnes) et à l'aval 10 cm d'eau en moins. Ce procédé fait que la masse prépondérante est toujours celle qui descend.
UNE RÉUSSITE INCONTESTABLE
Un nombre considérable de touristes visitent chaque année le plan incliné transversal d'Arzviller/Saint-Louis : la manœuvre est très spectaculaire.
Compte tenu du temps nécessaire pour parcourir les canaux d'accès amont et aval, le gain de temps en utilisant le plan incliné au lieu de l'échelle d'écluses, pour l'exploitation d'un automoteur par exemple, apporte à la batellerie une économie annuelle intéressante.
D'autre part, l'ouvrage est expérimental, et les enseignements qu'on a pu tirer de l'exécution des travaux, autant que ceux qu'on tire de son exploitation, sont des plus utiles pour l'étude des ouvrages similaires à grand gabarit qui constitueront un progrès d'avenir pour l'usage de la voie d'eau. On peut penser notamment à la liaison mer du Nord-Méditerranée et au futur navistrade qui reliera le Rhin alsacien à la Seine.
Documentation :
— Revue « Navigation, ports et industries » du 25 juin 1970, Éditions de la Navigation du Rhin, Strasbourg, 1970.
— Service de la Navigation de Strasbourg, Port Autonome de Strasbourg.
— Communication de M. René Descombes, ingénieur divisionnaire.
N.D.L.R. — Nous remercions vivement les services du Port Autonome de Strasbourg de la documentation qu'ils ont mise aimablement à notre disposition.
PETITES ANNONCES
Société d'études et de réalisation, installation de traitement des boues, recherche technicien supérieur ou ingénieur, formation chimie, références traitement des eaux ou traitement des boues exigées pour essais, conceptions mises au point, pouvant déboucher sur responsabilités technico-commerciales, déplacements en province. Lieu de travail : zone industrielle de 78140 Vélizy. Adresser lettre manuscrite avec curriculum vitæ, photo et prétentions à Revue n° 8445.
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Occasion, suite faillite. Lot de petites cuves et bacs polyester à vendre. GRAF, tél. (88) 61.63.80.